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Documents de travail (continuer)

PRECIPITATIONS ET DEBITS DES COURS D'EAU DANS LA ZONE SOUS-SAHARIENNE
(10°–20° nord) d'AFRIQUE

par

Derek Winstanley
Direction des systèmes environnementaux
Ministère de l'Environnement
Ottawa (Ontario), K1A OH3, Canada

1. INTRODUCTION

Le présent document sert de référence dans les domaines suivants: climatologie de la zone africaine située entre 10° et 20° nord, morphologie de la récente sécheresse, et relation entre les précipitations et le débit des cours d'eau. Les fluctuations des pluies, dans cette zone, sont considérées comme une manifestation régionale des fluctuations de la circulation atmosphérique générale. On effectue des prévisions à long terme des pluies et des débits des cours d'eau, en se basant sur le comportement prévu de la circulation atmosphérique générale d'ici la fin du siècle. Ces renseignements, ainsi que le prévisions, doivent servir de base à l'évaluation des répercussions de la récente sécheresse sur les pêches et à la discussion sur l'exploitation et la protection, à long terme, des pêches.

2. PRECIPITATIONS DANS LA ZONE SOUS-SAHARIENNE

2.1 Régime pluviométrique

La moyenne annuelle des précipitations passe de 1000 mm, au 10° nord, à moins de 100 mm, au 20° nord. Il existe un fort gradiant pluviométrique nord-sud, et les isohyètes (lignes de précipitations égales) sont alignées en direction ouest-est.

Environ 94% des pluies tombent entre mai et septembre. Elles se déplacent progressivement vers le nord de mai à août, avant de redescendre ensuite vers le sud. De novembre à avril, il n'y a pratiquement pas de pluie. La figure 1 montre la distribution des précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960). On a établi, pour cette zone, un modèle simple des précipitations en faisant la moyenne des pluies pour chaque 2 degrés de latitude (fig. 2a).

2.2 Variabilité des précipitations

Le taux de variabilité s'exprime par la grandeur des déviations par rapport à la moyenne et exprimé en pourcentage, donne le coefficient de variabilité. Il est alors possible de comprarer la variabilité interannuelle de plusieurs endroits à l'aide de diverses moyennes de précipitations.

La figure 3 montre la distribution géographique du coefficient de variabilité des précipitations, entre mai et septembre, pour la période allant de 1951 à 1972. En règle générale, de par le monde entier, l'augmentation de la variabilité est proportionnelle à la diminution des précipitations; elle passe donc d'environ 15 ou 18 au sud à plus de 100 au nord. Par comparaison, le coefficient de variabilité des précipitations annuelles en Angleterre varie de 11 à 18 (Senior, 1969).

Non seulement les précipitations diminuent-elles à mesure qu'on s'approche du Sahara, mais elles varient aussi beaucoup plus d'une année à l'autre. Mais s'il est normal que les précipitations diminuent avec l'augmentation de la latitude et soient très variées d'une année à l'autre, quelle est la nature des changements dans les configurations de répartition des pluies qui ont amené la sécheresse, quelle est l'étendue de cette dernière, quelle est l'importance des variations géographiques? Après tout, en 1967 seulement, un rapport faisant autorité, préparé à la suite d'un programme conjoint de la FAO, de l'UNESCO et de l'OMM, concluait qu'il n'y avait aucune preuve de groupement des années très sèches en deux ou trois à la fois, tandis qu'il y avait des preuves de la tendance des sécheresses annuelles à ne pas se produire en même temps le long de la ceinture semi-aride (Cochemé et Franquin, 1967).

2.3 Evolution de la sécheresse

La figure 4 c) donne les moyennes mobiles, sur une prériode de cinq ans, du pourcentage moyen des précipitations normales, de mai à septembre, pour les stations de la zone située entre 10° et 20° nord; le nombre de stations qui ont servi aux calculs a augemnté de 6, au début du siècle, jusqu'à 78 à partir de 1950 (voir fig. 1).

Fig 1

Fig. 1 Précipitations (mm) normales de mai à septembre (1931 à 1960) dans la zone africaine située entre 10° et 20° nord. Les points indiquent les stations qui ont servi à l'analyse des précipitations. Les lignes pointillées représentent les limites internationales. Quant aux étoiles, elles montrent la situation des jauges sur les fleuves Sénégal et Niger (voir fig. 10)

Fig 2

Fig. 2 Moyenne par zone: a) précipitations (mm) normales de mai à septembre (1931 à 1960); b) écarts cumulatifs en pourcentage par rapport aux précipitations normales de mai à septembre (1952 à 1956) (n=5); c) écarts cumulatifs en pourcentage par rapport aux précipitations normales de mai à septembre (1968 à 1972) (n=5)

Fig 3

Fig. 3 Coefficient de variabilité des précipitations de mai à septembre (1951 à 1972)

Fig 4

Fig. 4 a) Pourcentage moyen du débit normal du fleuve Sénégal à Bakel (1901 à 1966) et du fleuve Niger à Diré (1925 à 1966), moyennes mobiles de cinq ans;
b) pourcentage moyen des précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960) enregistrées dans 20 stations des bassins de drainage des fleuves Sénégal et Niger, en amont de Bakel et de Diré, moyennes mobiles de cinq ans;
c) pourcentage moyen des précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960) enregistrées dans les stations de la zone africaine située entre 10° et 20° nord, moyennes mobiles de cinq ans.

La sécheresse, on le constate, suit une évolution longue et ordonnée et résulte de la diminution importante et presque constante des précipitations depuis le début des années 1950. Elle s'est étendue de l'Atlantique à la mer Rouge, ce qui justifie amplement l'ajustement dans le temps et dans l'espace de la série chronologique des relevés pluviométriques. On a aussi enregistré de faibles précipitations dans toute la zone au début du siècle, vers 1913, et dans les années 1940.

On voit donc que les variations des précipitations de toute la zone ne sont pas l'effet du hasard, mais subissent des fluctuations distinctes sur des périodes de 10 à 30 ans. L'étendue des fluctuations (moyenne mobiles de 5 ans) au cours du siècle a été de 70 à 110 pour cent de la normale. Mais il nous faut aussi connaître les variations spatiales des précipitations avec le temps.

2.4 Configuration de la distribution des pluies en certaines années

La figure 5 montre la distribution du pourcentage de précipitations normales en 1964, époque à laquelle les pluies dans la région étaient à 109% de la normale. La figure 6, elle, illustre la distribution des précipitations normales en 1971, année où la valeur moyenne dans la zone était à 68% de la normale.

Il est évident que, même au cours d'une année de pluies abondantes, il y a toujours des secteurs où les précipitations sont sous la normale. Les écarts les plus grands au-dessus ou au-dessous de la normale se situent le long de la limite désertique. Pendant ces années il y aura probablement des pénuries locales ou régionales d'eau et de nourriture.

En 1971, il y avait encore des secteurs où les précipitations étaient au-dessus de la normale, surtout dans le sud, même si elles étaient sous la normale le long de presque toute la zone et surtout dans le nord. Plus les précipitations de l'ensemble de la zone s'écartent de la normale, plus les écarts deviennent fonction de la latitude. Au cours de ces années, les pénuries d'eau et de nourriture risquent d'être généralisées.

Toutefois, une sécheresse aussi grave que celle de ces dernières années est causée par la généralisation de l'absence de précipitations pendant plusieurs années consécutives, entraînant l'accumulation des effets néfastes de pluies sous la normale.

2.5 Cartographie du déplacement vers le sud du climat saharien

La figure 7 montre les changements, dans la distribution géographique, des précipitations de 1952–1956 à 1968–1972. Sur toute la largeur de l'Afrique, les isohyètes et, par conséquent, le climat désertique, se sont déplacés vers le sud, par un ou deux degrés de latitude. Bien qu'apparemment très faible, ce déplacement a eu des conséquences désastreuses, causant la sécheresse et la rupture de l'équilibre écologique.

Au cours des années de pluies assez abondantes, le pourcentage cumulatif des précipitations au dessus de la normale augmente avec la latitude (figures 2b) et 8); de même, avec les années de sécheresse, le pourcentage cumulatif des précipitations inférieures à la normale augmente aussi avec la latitude (figures 2c) et 9). Cette situation prouve encore une fois que les écarts de précipitations sont d'abord fonction de la latitude et qu'il y a relativement peu de changements à environ 10° nord.

Même si la figure 3 montre que la variabilité des précipitations augmente avec la latitude, les analyses précédentes ont montré un haut degré de non-hasard dans les cas des écarts spatiaux des précipitations avec le temps.

3. PRECIPITATIONS ET DEBITS DES COURS D'EAU

3.1 Régimes pluviométriques et fluviaux

La figure 10 illustre le débit mensuel moyen du Sénégal, à Bakel, et du Niger, à Diré et Koulikora, ainsi que les précipitations mensuelles moyennes aux stations avoisinantes. On peut observer clairement une étroite relation entre le régime des pluies et celui des cours d'eau à Bakel et à Koulikora, le débit mensuel moyen maximal suivant d'un mois les précipitations mensuelles moyennes maximales. A Diré, plus en aval sur le Niger, le régime fluvial est très different. D'après les faibles précipitations enregistrées, il est évident que le débit du fleuve dépend des pluies abondantes qui tombent en amont. La pointe saisonnière moins prononcée, en décembre, trouve son explication dans les plaines inondables entre Koulikora et Diré.

3.2 Relations entre les précipitations et le débit fluvial

Pour obtenir une base susceptible de servir à l'étude de la relation entre les précipitations et le débit des cours d'eau, on a calculé chaque année le débit moyen du Niger, à Diré, et du Sénégal, à Bakel, exprimé en pourcentage normal (1925 à 1966, à Diré, et 1901 à 1966, à Bakel). Le pourcentage moyen des précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960) sur les surfaces réceptrices de 20 stations situées en amont de Diré et de Bakel a aussi été calculé pour chaque année.

Fig 5

Fig. 5 Pourcentage des précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960), en 1964, quand la moyenne de la zone s'étendant de 10° à 20° nord était de 109 pour cent.

Fig 6

Fig. 6 Pourcentage des précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960), en 1971, quand la moyenne de la zone s'étendant de 10° à 20° nord était de 68 pour cent.

Fig 7

Fig. 7 Diminution des précipitations de mai à septembre, comme l'indique le déplacement des isohyètes (mm) vers le sud, de 1952–56 (—) à 1968–72 ( - - - ).

Fig 8

Fig. 8 Ecarts cumulatifs en pourcentage par rapport à la précipitation normale de mai à septembre (1931 à 1960), pour la période de cinq ans, de 1952 à 1956 (voir Fig. 4 c)).

Fig 9

Fig. 9 Ecarts cumulatifs en pourcentage par rapport aux précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960), pour la période de cinq ans, de 1968 à 1972 (voir Fig. 4 c)).

Fig 10

Fig. 10 Débit mensuel moyen (103m3sec-1) du Sénégal à Bakel, et du Niger à Diré et Koulikora (—) (voir Fig. 1 pour la situation géographique), et précipitations mensuelles moyennes aux stations avoisinantes de Matam, Tombouctou et Bamako respectivement ( - - - - ).

La figure 4 (a et b) indique les moyennes mobiles de 5 ans du pourcentage moyen des débits normaux du Niger et du Sénégal, ainsi que le pourcentage moyen des précipitations normales sur les surfaces réceptrices. Le coefficient de corrélation (1926 à 1971) est r = + 0.83 m, avec un niveau de signification de 1%.

Depuis les années 1940, la corrélation entre les précipitations sur les surfaces réceptrices du Niger et du Sénégal (fig. 4 b) et celles de la zone située entre 10° et 20° nord a été presque parfaite: r = + 0.96. On peut donc extrapoler jusqu'en 1926 la relation entre 10° et 20°nord (fig. 4 c) et les débits du Niger et du Sénégal (fig. 4 a): le coefficient de corrélation r = + 0.77 a un niveau significatif de 1%. Les données sur le débit du Sénégal remontent au début du siècle et le débit jusqu'à 1926 est aussi étroitement relié aux précipitations indiquées à la figure 4 c).

4. PRECIPITATIONS DANS LA ZONE SOUS-SAHARIENNE PAR RAPPORT A LA CIRCULATION DE L'ATMOSPHERE

L'atmosphère est un énorme moteur thermique mû par l'énergie solaire. La circulation atmosphérique globale (c.-à-d. les configurations des mouvements horizontaux et verticaux de l'air au-dessus de la Terre), à son tour, entraîne la circulation océanique et toutes deux redistribuent l'énergie thermique à partir des zones de source des tropiques aux zones de source des tropiques aux zones de perte des pôles, contribuant ainsi à maintenir un équilibre thermique d'enxemble dans le système. L'aspect principal est que la circulation de l'atmosphère terrestre fait preuve d'une grande organisation à l'échelle globale. La sécheresse de la zone sous-saharienne peut être considerée comme une manifestation régionale climatique d'une fluctuation à l'échelle planétaire de la circulation atmosphérique générale.

La classification de la succession des caractères du temps, jour après jour pendant des années, facilite l'étude du comportement de la circulation générale des vents. Les îles Britanniques sont situées dans la zone de vents d'ouest aux latitudes moyennes, et l'on peut considérer la région comme un échantillon assez représentatif de cette zone. Lamb (1972 a) a classifié la succession quotidienne des caractères du temps dans les îles Britanniques à partir de 1861. Les variations de la fréquence du type de temps d'ouest sont un bon indice des variations de la force des vents d'ouest aux latitudes moyennes.

La figure 11 illustre l'étroite relation entre la fréquence du type de temps d'ouest en Grande-Bretagne et les précipitations dans la zone africaine située entre 10° et 20°nord: r = 0.56, qui a un niveau de signification de 1%. La figure 12 montre le diagramme de dispersion et la ligne de régression. Mais quelle est la base physique de cette corrélation?

La façon la plus précise de décrire l'atmosphère est de représenter la structure moyenne d'une coupe simple de la Terre, d'un pôle à l'autre. La force des vents d'ouest aux latitudes moyennes est déterminée principalement par la différence de température aux pôles et à l'équateur, ce qui détermine aussi les exigences de transfert méridien (nordsud) de l'énergie. La figure 13 montre que les vents d'ouest aux latitudes moyennes sont plus forts en hiver: de décembre à février, dans l'hémisphère nord, et de juin à août, dans l'hémisphère sud. L'atmosphère cède constamment une quantité de mouvement angulaire à la Terre, dans les régions de vents d'est de surface aux latitudes moyennes, et en gagne dans les régions de vents d'ouest tropicaux. La quantité totale de mouvement angulaire de la Terre et de son atmosphère autour de l'axe de rotation doit être constante. C'est pourquoi, afin de conserver cet équilibre, doit-il y avoir un transfert régulier de quantité de mouvement angulaire des tropiques aux latitudes moyennes, comme l'illustre la fig. 14. Même s'il s'agit des valeurs moyennes de chaque zone, on les considère comme représentatives de la situation dans le secteur africain (Newell, Vincent, Dopplick, Ferruzza et Kidson, 1969).

Fig 11

Fig. 11 a) Fréquence (nombre de jours par année) du type de temps d'ouest dans les îles britanniques (moyennes mobiles de 20 ans); b) pourcentage moyen des précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960) dans la zone africaine comprise entre 10° et 20° nord (moyennes mobiles de 20 ans).

Fig 12

Fig. 12 Diagramme de dispersion illustrant la relation entre la fréquence du type de temps d'ouest dans les îles britanniques (nombre de jours par année) et le pourcentage moyen des précipitations normales de mai à septembre (1931 à 1960) dans la zone africaine comprise entre 10° et 20° nord (valeurs moyennes mobiles de 20 ans pour la période de 1900 à 1973). La ligne de régression a été tirée selon la méthode des moindres carrés.

Fig 13

Fig. 13 Composante zonale moyenne de chaque zone de la vélocité horizontale des vents (m sec-1): les valeurs positives indiquent les vents d'ouest et les valeurs négatives, les vents d'est (Newell, Vincent, Kidson et Boer, 1972). L'atmosphère gagne une quantité de mouvement angulaire dans les régions de vents d'est tropicaux de surface et en cède dans les régions de vents d'ouest de surface aux latitudes moyennes.

Fig 14

Fig. 14 Fonction de courant d'une quantité de mouvement angulaire absolue moyenne de chaque zone (x 1025 gm cm2 sec-2) (Newell, Vincent, Kidson et Boer, 1972). La quantité de mouvement angulaire est transportée des zones de source des tropiques aux zones de perte des latitudes moyennes.

Les précipitations dans la zone africaine comprise entre 10° et 20° nord sont associées à l'ascension d'air humide dans les systèmes météorologiques à l'échelle moyenne et à l'échelle synoptique. Il est probable que ces systèmes contribuent à la circulation méridienne (nord-sud) moyenne de la ramification ascendante des cellules tropicales de Hadley (voir ascension entre 10° et 20° nord, de juin à août, fig. 14). De décembre à février, cette zone se caractérise par des courants d'air descendants (fig. 14) qui freinent les mécanismes de précipitations.

Ceci représente l'état moyen de la circulation atmosphérique générale. Mais il y a de plus en plus de preuves à l'effet que la vigueur de la circulation atmosphérique générale subit des fluctuations importantes au cours des décennies et des siècles. La figure 11 a) montre que la vigueur des vents d'ouest aux latitudes moyennes a augmenté jusque vers 1930 et a décru par la suite. La figure 15 illustre les profils moyens de la pression au niveau de la mer pour chaque zone de l'hémisphère nord, de décembre à février, pendant les 40 premières années du siècle et la période allant de 1968 à 1973. L'indice zonal, de 1968 à 1973 (mesuré comme la différence moyenne de la pression en surface entre 35° et 65° nord) a diminué de 56% par rapport à sa valeur entre 1900 et 1939. L'indice zonal de juin à août a lui aussi diminué (Winstanley, Emmett et Winstanley, 1974). La fréquence du type de temps d'ouest en Grande Bretagne est donc considérée comme représentative de la force des vents d'ouest aux latitudes moyennes dans l'hémisphère nord. Il est évident, d'après la figure 15, que les anticyclones polaires et subtropicaux se sont affaiblis.

L'importante diminution de la force des vents d'ouest de surface aux latitudes moyennes laisse prévoir une baisse de la quantité de mouvement angulaire produite dans les régions de vents d'est tropicaux de surface, une baisse du flux vertical de la quantité de mouvement (et de chaleur) dans les ramifications ascendantes des cellules de Hadley tropicales et une diminution du transfert de la quantité de mouvement vers le pôle, dans la couche de frottement des latitudes moyennes.

Les fluctuations des précipitations dans la zone sous-saharienne peuvent donc être considérées comme associées aux exigences changeantes de transfert d'énergie accompagnant les changements du bilan radiatif. La récente sécheresse aurait été causée par une baisse du flux vertical de la chaleur et de la quantité de mouvement dans une circulation moins intense des cellules de Hadley, et peut-être restreinte aux latitudes, avec une diminution de la force de la circulation atmosphérique générale (Winstanley, Emmett et Winstanley, 1974).

Bryson (1973; 1974) considère les récentes modifications du climat comme reliées au refroidissement marqué de la surface dans les hautes latitudes de l'hémisphère nord, résultant en partie de la pollution de l'atmosphère par les particules engendrées par les activités de l'homme. L'hypothèse veut que l'augmentation du gradient thermique de l'équateur au pôle ait augmenté la vigueur du flux zonal, déplacé les anticyclones subtropicaux et les moussons vers l'équateur et contribué dans une grande mesure à la sécheresse de la zone sous-saharienne. Les analyses précédentes montrent, toutefois, que la circulation atmosphérique générale a diminué de vigueur. Il semble donc peu probable que l'homme ait une grande part de responsabilité, s'il en a, dans le cas de la sécheresse.

5. CLIMAT FUTUR ET ECOULEMENT FLUVIAL

Les niveaux des cours d'eau jusqu'à la fin du siècle pourrait avoir une grande valeur pour déterminer la viabilité économique des pêches qui font l'objet de mesures de protection et de développement en Afrique de l'Ouest. La disponibilité de l'eau sera probablement l'une des principales contraintes des nombreux programmes d'exploitation de la zone.

Fig 15

Fig. 15 Profils de pression moyenne du niveau de la mer par zone (mb) de l'hémisphère nord, de décembre à février
(Winstanley, Emmett et Winstanley, 1974)

La question est simple: peut-on considérer que la meilleure façon de faire des prévisions à long terme est de se baser sur une climatologie stationnaire ou y a-t-il des preuves de cycles et de tendances sur de longues périodes?

Si l'on considère la série chronologique des précipitations annuelles comme stationnaire, la valeur moyenne d'ici la fin du siècle devrait alors être la même que celle de la période de 1900 à 1973. Mais la valeur zonale moyenne pour la période est inférieure de 4% à la normale de 1931 à 1960. Par conséquent, on se rend compte immédiatement que les prétendues valeurs climatologiques “normales” ne sont pas nécessairement représentatives d'une longue série chronologique: elles ne sont “normales” que par entente internationale.

Compte tenu de l'importante relation, statistiquement établie, entre les précipitations et le débit des cours d'eau, on peut évaluer les débits moyens futurs des fleuves Sénégal et Niger, en établissant comme hypothèse une climatologie stationnaire. Le débit moyen du Sénégal serait d'environ 2%, ou 14 cm3 sec-1, inférieur à la valeur moyenne de 1901 à 1966, soit 771 m3 sec-1, mais le débit moyen du Niger serait d'environ 4%, ou 45 m3 sec-1, inférieur à la valeur 1925 à 1966, soit 1180 m3 sec-1. On peut supposer qu'il continuerait d'y avoir des fluctuations quasi-cycliques de l'ordre de ± 25% de la valeur moyenne (moyennes mobiles de 5 ans) sur des périodes de 10 à 30 ans, à la fin du siècle.

Il faut faire face à un problème beaucoup plus complexe quand il s'agit d'évaluer les preuves d'existence de cycles ou de tendances s'étendant sur certaines périodes d'un siècle. Les données sur les précipitations et les débits en Afrique de l'Ouest sont trop élémentaires pour révéler des changements sur une échelle de temps de cet ordre. La seule approche possible consiste à comparer les relevés pluviométriques de l'Afrique de l'Ouest à des indices climatiques et une circulation atmosphérique d'une plus longue période, dans d'autres parties du monde. Il est alors raisonnable de supposer que les tendances ou la périodicité des secondes valent aussi pour la première.

Fig 16

Fig. 16 a) Températures (°C) dans le centre de l' Angleterre, moyennes de 50 ans (Lamb, 1972b));
b) précipitations (pourcentages des moyennes de 1916 à 1950) en Angleterre et au Pays de Galles, moyenne de 50 ans (Lambm 1972b)).

L'analyse précédente a montré pour le siècle actuel une importante corrélation, du point de vue statistique, entre les précipitations de la zone s'étendant de 10° à 20° nord et la fréquence du type de temps d'ouest en Grande-Bretagne (fig. 11 et 12). Au cours de la discussion, nous avons proposé une base physique pour cette relation. Toutefois, il est évident d'après la figure 11 que le type de temps d'ouest s'est produit beaucoup moins souvent (64.5 jours par année) au cours des 40 dernières années du 19e siècle que pendant les 60 premières du 20e (75 jours par année). Selon l'équation de régression établie entre la fréquence du type de temps d'ouest et les précipitations dans la zone comprise entre 10° et 20° nord (fig. 12), nous évaluons les précipitations dans cette zone, au cours des 40 dernières années du 19e siècle, à 5% sous la normale de 1931 à 1960.

Combien de temps, alors, la vigueur de la circulation atmosphérique générale et des précipitations dans la zone sous-saharienne demeurera-t-elle à des niveaux plus faibles que ceux qui ont prévalu pendant les 60 premières années du siècle?

Les données sur la fréquence quotidienne du type de temps d'ouest ne datent que de 1861. Mais il y a une corrélation positive entre la vigueur de la circulation atmosphérique générale (comme l'indique la fréquence du type de temps d'ouest) et la fréquence des vents de surface du sud-ouest et la température et les précipitations annuelles en Grande-Bretagne (Lamb, 1972, b)1. Les observations sur la température remontent à 1680, et Lamb (1972, b) a pu en extrapoler des données jusqu'en l'an 900 de notre ère. Les précipitations ont été enregistrées depuis 1740, et Lamb a aussi réussi à extrapoler des valeurs dans ce domaine jusqu'à l'an 900. Il a en outre réussi à calculer directement, à partir des observations, la fréquence des vents de surface du sud-ouest en Grande-Bretagne depuis 1670, et indirectement, pour des périodes antérieures.

Il est évident, d'après la figure 16, que le températures, les précipitations et, probablement, la vigueur de la circulation générale sont passées d'un maximum, au 13e siècle, à un minimum, au 17e siècle. Cette période est celle de la petite glaciation, pendant laquelle les glaciers avançaient et la Tamise gelait assez fréquemment. On a observé une récupération assez régulière du 17e siècle jusqu'à 1930, durant laquelle les glaciers ont reculé. Au cours de la seconde moitié du 20e siècle, cependant, la vigueur de la circulation atmosphérique générale a encore diminué (fig. 11 a) et la température mondiale est descendue d'environ 0.3 ou 0.4 °C.

Les points suivants nous amènent à la conclusion que la tendance vers une diminution de la vigueur de la circulation atmosphérique générale et un climat plus frais persistera au moins jusqu'à la fin du siècle:

  1. La diminution de la température mondiale et de la vigueur de la circulation atmosphérique pendant la second moitié du siècle est probablement la plus persistante qui se soit produite depuis plusieurs centaines d'années et elle semble plus importante qu'une simple fluctuation à court terme;

  2. selon la plupart des prévisions climatiques, ce régime se maintiendra (OMM, 1972);

  3. des températures aussi élevées que celles des cent dernières années ne se sont produites que 10% du temps environ pendant les 500,000 dernières années (Emiliani, 1972), faisant ainsi, des climats frais, des climats plus “normaux” que les conditions de la première moitié du siècle;

  4. on a prouvé l'existence d'un cycle bi-centenaire pour la température, les précipitations et la fréquence des vents du sud-ouest en Grande-Bretagne (Lamb, 1972 b), des minima étant prévus pour 2050, 2050 et 2010, respectivement.

D'après la discussion sur la relation entre la vigueur de la circulation atmosphérique générale et les précipitations dans la zone sous-saharienne, les précipitations dans la zone comprise entre 10° et 20° seront probablement plus faibles pendant le reste du siècle que pendant la période climatologique normale de 1931 à 1960. Nous pouvons faire plusieurs évaluations quant au degré de leur diminution.

1) Une projection linéaire de la ligne la plus pertinente (à partir de la fin des années 1920 aux années 1960) des valeurs moyennes mobiles de 20 ans des précipitations dans la zone comprise entre 10° et 20° nord (fig. 11 b) donne une valeur moyenne de 20 ans qui est inférieure d'environ 15% aux précipitations normales prévues pour 1990. Cette situation serait associée à une valeur moyenne de 20 ans de la fréquence du type de temps d'ouest de moins de 40 jours par année (fig. 12).

2) Si l'on suppose que la vigueur de la circulation atmosphérique générale sera la même jusq'à la fin du siècle que pendant la période de 1861 à 1900, et qu'il aura environ 64.5 jours de pluie par année en Grande-Bretagne avec le type de temps d'ouest (fig. 11 a), les précipitations seront environ de 5% inférieures à la normale (fig. 12).

3) Le moyen terme serait que les précipitations soient d'environ 10% inférieures à la normale d'ici la fin du siècle.

D'après l'équation de régression calculée au moyen des valeurs moyennes mobiles de cinq ans du débit moyen du Niger et du Sénégal et des précipitations dans la zone comprise entre 10° et 20° nord (1927 à 1971), on évalue que des précipitations de 10% inférieures à la normale entraîneraient un débit d'environ 9% inférieur à la normale.

1 Les vents du sud-ouest sont associés au type de temps d'ouest et à une forte circulation d'ouest. Il en résulte un climat doux et humide de forte influence maritime. La circulation étant faible, le nombre de dépressions traversant la Grande-Bretagne d'ouest en est (et, par conséquent, les précipitations et l'influence maritime) diminue et les irruptions d'air froid du nord et de l'est augmentent.

6. CONCLUSIONS

C'est de mai à septembre que se produisent des précipitations moyennes annuelles dans la zone comprise entre 10° et 20° nord.

Bien que les précipitations diminuent avec l'augmentation de la latitude et deviennent de plus en plus variables d'une année à l'autre, le degré de hasard des variations géographiques des précipitations avec le temps est très bas. Les précipitations annuelles moyennes de chaque zone varient d'environ 60 à 13% de la normale de 1931 à 1960. Les valeurs moyennes mobiles de cinq ans des précipitations moyennes de chaque zone montrent les fluctuations distinctes presque périodiques de quelque 70 à 110% de la normale sur une période de 10 à 30 ans.

Quand les précipitations sont inférieures à la normale dans toute la zone pendant plusieurs années consécutives, le pourcentage cumulatif des déviations par rapport aux précipitations normales et la figueur de la sécheresse augmentent, du 10° au 20° nord. Quand le contraire se produit, le pourcentage cumulatif des déviations par rapport aux précipitations normales augmente aussi avec la latitude. Ce qui veut dire que la variabilité des précipitations augmente avec la latitude non seulement d'une année à l'autre, mais aussi d'une décennie à l'autre.

Les précipitations zonales moyennes dans la période climatologique normale de 1931 à 1960 étaient de 4% supérieures à la moyenne zonale pour la période de 1900 à 1973.

Les valeurs moyennes mobiles de cinq ans du débit moyen du Niger et du Sénégal sont étroitement liées aux précipitations zonales moyennes. Le débit annuel du Niger et du Sénégal varie d'environ 35 à 160% de la normale. Les valeurs moyennes mobiles de cinq ans du débit montrent des fluctuations distinctes presque périodiques de quelque 65 à 120% de la normale.

Si l'on pose comme hypothèse une climatologie stationnaire (c'est à dire une continuation des valeurs moyennes 1800–73), les précipitations, dans la zone comprise entre 10° et 20° nord, seront inférieures de 4% à la normale de 1931 à 1960 d'ici la fin du siècle, et l'on connaîtra au moins une sécheresse de 6 à 10 ans au cours de cette période.

Les valeurs moyennes mobiles de 20 ans des précipitations moyennes de chaque zone ont augmenté à partir du début du siècle jusque vers 1930, époque à laquelle elles ont commencé à diminuer. On croit que cela représente une fluctuation climatique régionale, accompagnant le changement de vigueur de la circulation atmosphérique générale, et que les précipitations dans cette zone dépendent des exigences du transfert de la chaleur et de la quantité de mouvement angulaire des rtopiques aux latitudes supérieures.

On a observé dans d'autres parties du monde que la vigueur de la circulation atmosphérique générale subissait des variations importantes au cours des décennies et des siècles. On peut donc s'attendre à ce que les précipitations de la zone sous-saharienne subissent aussi ces changements. Il est raisonnable de penser que les précipitations moyennes de chaque zone et le débit du Niger et du Sénégal seront de quelque 10% inférieurs aux valeurs de 1931 à 1960 d'ici la fin du siècle, tout en continuant de subir des fluctuations quasi-cycliques de 10 à 30 ans, de l'ordre de 65 à 120% de la valeur moyenne.

Il est possible que le climat soit modifié par l'homme vers la fin du siècle, mais il est impossible, à l'heure actuelle, de dire dans quelle mesure le climat de la zone soussaharienne en sera touché.

Il semble improbable que nous en arrivions, d'ici un certain temps, à une théorie généralement acceptée sur le climat et les modifications climatiques et, de ce fait, à une base scientifique rigoureuse pour les prévisions climatiques. Entre temps, il faut prendre des décisions importantes concernant les programmes de développement à long terme, en se basant sur nos connaissances actuelles, si imparfaites soient-elles.

REFERENCES

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Bryson, R.A., 1974 A prospective on climatic change, Science, (184):753–60

Cochemé, J., et Franquin, P., 1967 An agroclimatology survey of a semi-arid area in Africa south of the Sahara, W.M.O.Tech.Note, (86):136 p.

Emiliani, C., 1972 Quaternary hypsithermals, Quaternary Research, (2):270–3

Lamb, H.H., 1972 a British Isles weather types and a register of the daily sequence of circulation patterns 1861–1971, Geoph.Mem., London, (116):85 p.

Lamb, H.H., 1972 b Climate: present, past and future, Methuen, London, (I):613 p.

Newell, R.E., Vincent, D.G., Dopplick, T.G., Ferruzza, D., & Kidson, J.W., 1969 The energy balance of the global atmosphere. In, The global circulation of the atmosphere, (ed. G.A. Corby), (Roy. Met. Soc., London), 42–90

Newell, R.E., Kidson, J.W., Vincent, D.G., & Boer, G.J., 1972 The general circulation of the tropical atmosphere and inter-actions with extra-tropical latitudes, (M.I.T. Press), (I):258 p.

Senior, M.R., 1969 Changes in the annual variability of rainfall over Britain, Weather, (24):354–9

Winstanley, D., Emmett, B., & Winstanley, G., 1974 Climatic changes and the world food supply, Environment Canada, Planning and Finance Service Report (5) (in the press).

OMM 1972 Climatic fluctuation and the matter of foresight, (inédit)

Annexe

LA SIGNIFICATION DES FLUCTUATIONS CLIMATIQUES EN AFRIQUE DE L'OUEST POUR LA VALIDITE ECONOMIQUE DU PROJET DE KPONG

Tableau I

Pourcentage de probabilités de moyennes de précipitations par zone (10–20°N) au-dessous des différents niveaux pour n'importe quelle année donnée et pour une durée de neuf ans consécutifs

Nombre d'années

% normal
(1931–60)
123456789
< 100573524171410741
< 903519127431  
< 801653      
< 70531      
< 6031       

Figure 1

Figure 1 Moyenne par zone des analyses des précipitations de mai à septembre de 44 stations entre 10–20°N en Afrique
(a) Précipitations normales (1931–60)
(b) Ecarts cumulatifs en pourcentage moyen de précipitations normales pour la période 1968–72

(D'après: E.S.S.A. (1967); Monthly Climate Data for the World 1961–72)

Figure 2

Figure 2 (a) moyennes de cinq années consécutives de pourcentage moyen de précipitations normales (1931–60) de mai à septembre de 78 stations entre 10–20°N en Mauritanie, Sénégal, Gambie, Guinée, Mali, Niger, Tchad, Nigeria, Dahomey, République Centrafricaine, Togo, Haute-Volta et Soudan
(b) moyennes de cinq années consécutives du nombre de jours par année caractérisés par le type de temps d'ouest sur la Grande-Bretagne
(c) tendance de la moyenne globale de la température de la couche d'air

(D'après: E.S.S.A. (1967); Monthly Climatic Data for the World 1961–73; C.R.U.M.B. (1973); Lamb (1972); N.C.A.R. (1970)

Figure 3

Figure 3 Ecarts cumulatifs en pourcentage par rapport aux précipitations normales (1931–60) dans la zone sous-saharienne d'Afrique 1968–1972

LES GRANDES SOURCES FONDAMENTALES D'ENERGIE NATURELLE
(Ensoleillement, Précipitations)

Définition sommaire du concept de l'autorégulation à périodicité variable

Application à l'étude du profil des pluies à Maiduguri (Nigeria)

RAPPORT PRELIMINAIRE

Rapporteur: J. Louis
Laboratoire de Génétique Evolutive et de Biométrie
du Centre National de la Recherche Scientifique
Groupe des Laboratoires du C.N.R.S.
91190 - GIF sur Yvette (France)

1. INTRODUCTION

Les moyens mis en oeuvre à l'échelle mondiale, en vue d'améliorer les méthodes de prévision des pluies témoignent de l'importance du problème, car dans bien des cas, la sécheresse affecte ou accable encore l'économie de régions entières pendant de trop longues périodes. Or, il n'est guère possible à l'heure actuelle d'espérer pouvoir effectuer des prévisions à plus d'une semaine d'avance et ceci seulement vers l'année 1980. Il était donc urgent de rechercher d'autres moyens en vue d'élargir quelque peu le champ des recherches sur les prévisions à long terme, et de permettre ainsi une meilleure planification de la mise en valeur des ressources. Au cours des deux dernières années, il est apparu de façon de plus en plus précise que le niveau annuel des précipitations ne pouvait être considéré comme soumis exclusivement à la loi du hasard. Les recherches effectuées ces derniers mois pour en apporter la preuve ont abouti à l'observation d'un certain nombre de phénomènes apparamment non encore connus et qu'il conviendra maintenant d'approfondir pendant probablement plusieurs années.

2. METHODES

Avant de procéder à la description sommaire des méthodes employées et des résultats obtenus, il est nécessaire d'admettre au préalable un certain nombre de faits qui paraissent aujourd'hui être devenus de plus en plus importants.

  1. le découpage mensuel des relevés météorologiques apparaît comme étant purement culturel, sans rapport réel avec une éventuelle périodicité des phénomènes naturels. (fig. 1)

  2. les relevés en heures et en millimètres de l'ensoleillement et des pluies apportent parfois une précision illusoire, dont il est commode de se dégager pour pouvoir mettre en évidence certains grands thèmes naturels de variation. Il convient donc mieux de travailler dans certains cas sur des valeurs arrondies.

  3. l'information directe apportée par les mesures ne témoignent que de la quantité d'énergie reçue, il est nécessaire également de considérer les écarts entre les valeurs, et de s'accoutumer à raisonner en différence de potentialités énergétiques.

Compte tenu de ce préalable, il devient alors possible de pressentir un certain nombre de lois et de corollaires dont l'existence réelle paraît maintenent nettement établie.

Les séries analysées portent sur environ 40 ans (1931 à 1973), les données ont été obtenues par les moyens habituels (pluviomètres, héliographes Jordan ou Campbell). (fig. A)

2.1 Méthode d'analyse des séries numériques

Le tableau I met en parallèle l'activité solaire (col. 2) et la hauteur des précipitations à Maiduguri (col 6).

L'activité solaire est estimée d'après les nombres moyens de taches solaires constatées annuellement (nombres de Wolf). Ceux-ci ont été arrondis (col. 3). Les écarts entre une année donnée et l'année précédente affectés de leur signe figurent en colonne 4 et 5. Le même procédé de simplification a été employé pour les pluies (col. 7, 8 et 9).

2.2 Méthode d'analyse des profils

Afin de tenter de dégager un maximum d'information des profils (fig. 2) toutes les combinaisons linéaires entre les points annuels ont été tracés en les joignant deux à deux par des droites. Il est apparu rapidement que certains alignements ne pouvaient être attribués au seul fait du hasard. Toutes les structures virtuelles ont ainsi été dégagées. Seules ont été retenues celles qui présentaient un intérêt évident. La fig. 2 montre ces alignements sur le profil annuel et sur le profil ne représentant que les hauteurs des précipitations tombées au cours de la saison des pluies (juillet, août et septembre).

Fig A
MAIDUGURI (NIGERIA)PROFIL DES PLUIES ANNUELLES SUR 40 ANS
Fig 1
MAIDUGURI (NIGERIA)PLUIES AU MOIS D'AOUT
(AUCUNE RELATION OBSERVABLE)
Fig 2a
MAIDUGURI (NIGERIA)PLUIES ANNUELLES
Fig 2b
MAIDUGURI (NIGERIA)SAISONS DES PLUIES: JUILLET + AOUT + SEPTEMBRE

2.3 Résultats

A. Analyse des séries numériques (ajustement solaire)

Le tableau I montre:

  1. que la somme des écarts positifs constatés en période de croissance de l'activité solaire (+ + …) est égale à la somme des écarts constatés en période de décroissance de cette activité (- - …).

    Entre 1945 et 1954 nous observons un déficit de - 1, compensé au cycle suivant (1954 – 1964) par + 1 (+ 14 – 15; + 19 – 18). Cette propriété est probablement en relation avec l'aspect sinusoïdal des courbes de l'activité du soleil.

  2. qu'en ce qui concerne les pluies (tableau I col. 7, 8 et 9), il est également net que les écarts s'annullent périodiquement.

L'examen des séries annuelles relevées à Paris, Marseille, Perpignan, sur cent années, confirment totalement la périodicité de ces annulations. Il est donc possible de tirer de ce phénomène une première loi.

Loi

La somme algébrique des écarts tend à s'annuler à une année d'ajustement local près, à chaque période d'inversion de l'activité solaire.

Corollaire

Entre chacune de ces périodes, l'ajustement des écarts conserve un caractère strictement local en fonction du niveau des précipitations propres à chaque région.

Le tableau I montre nettement la coïncidence des périodes d'annulation des écarts des pluies avec l'année de changement de signe de l'activité solaire, marquée par des flèches. Il apparaît, aujourd'hui, infiniment probable que nous nous trouvons là en présence d'un phénomène d'ajustement se manifestant à échelle planétaire.

Le fait que l'activité solaire s'étende sur un nombre variable d'années à l'intérieur de chaque cycle, qui est en moyenne de 11 ans, atteste de l'origine probable de la périodicité variable des précipitations.

Exemple:1933–19364 ans1954–19573 ansetc…

La figure 3 montre qu'à chaque période solaire ascendante, descendante et minima, correspond sensiblement un pic (dit d'ascendance, de descente et de minima) parfois décalé, en fonction du phénomène d'ajustement local. Celui-ci est démontré ci-après, il vient se superposer à la rythmicité de l'activité du soleil.

Il n'a pas été possible pour le moment de relier par d'autres aspects l'importance des précipitations et l'activité cyclique du soleil. En ce qui concerne les annulations qui coïncident avec le maximum de cette activité, on peut penser que celles-ci se produisent au moment où les écarts deviennent faibles, c'est à dire au moment des paliers d'activité solaire.

Tableau I

 AnnéesNombres de Wolf ArrondisigneEcart  Pluies annuelles ArrondisigneEcart 
COL.(1)(2) (3)(4)(5)   (6) (7)(8)(9)   
 1931 21   2     784 8     
     -1      -4   
 1932 12   1     395 4     
     -0      +1   
 1933   6   1  547  5     
     0      +3   
   
 1934   9   1     798 8     
     +3      -3   
 
 1935 37   4   + 10 536 5    + 1
     +4      +3   
 
 1936 80   8     803 8     
     +3      -2   
   
 1937113 11 605 6- - - - - - - - - - - - - - - - -
 
     0      +2   
  
 1938106 11     756 8     
     -2      +2   
 1939 90   9     960 10       
     -2      -6   
 1940 66   7     375 4     
     -2 - 10    +1  0
 1941 50   5     513 5     
     -2      -0   
 1942 30   3     499 5     
     -1      +1   
 
 1943 15   2     569 6- - - - - - - - - - - - - - - - -
     -1      -1   
  
 1944 11   1 520 5     
     2      +2   
 
 1945 33   3     722 7     
     +6 + 14    +1  0
 1946 93   9     765 8     
     +6      -2   
  
 1947152 15 635 6- - - - - - - - - - - - - - - - -
 
     1      -1   
  
 1948136 14     539 5     
     -0      -1   
 1949135 14     444 4     
     -6      +3   
 1950 84   8     689 7     
     -1 - 15    -2  + 1
 1951 69   7     537 5     
     -4      +1   
 1952 31   3     626 6     
     -2      +2   
 1953 14   1     790 8     
     -1      -1   
  
 1954   4   0 691 7- - - - - - - - - - - - - - - - -
     4      +2   
  
 1955 38   4     854 9     
     +10   + 19    -3  0
 1956142 14     634 6     
     +5      +1   
  
 1957190 19 728 7- - - - - - - - - - - - - - - - -
 
     0      +0   
   
 1958185 19     747 7     
     -3      +2   
 1959159 16     863 9    0 
     -5      -2   
 1960112 11     729 7    0
     -6 - 18    -0   
 1961 54   5     720 7     
     -1      -0   
 1962 38   4     675 7     
     -1      +0   
 
 1963 28   3     686 7- - - - - - - - - - - - - - - - -
     -2      -3   
   
 1964 10   1 448 4     
     1      +2   
 
 1965 15   2     576 6     
     +3      +0  -1
 1966 47   5   + 10 593 6     
     +4      +3   
 1967 94   9     882 9     
     +2      -3   
  
 1968106 11 602 6- - - - - - - - - - - - - - - - -
 
     0      -0   
   
 1969106 11     572 6     
     -0      +1   
 1970105 11     737 7     
     -4      -2   
 1971 67   7     504 5     
     +0      -1   
 1972 69   7     439 4     
     -3     -1  
  
 1973 38   4     436 4     

Corollaire

L'ensoleillement sensiblement inversement correllé aux pluies suit le même thème d'annulation.

Ceci a déjà pu être vérifié sur sept points de la région méditerranéenne française au cours des 40 dernières années. Les ajustements s'effectuent rigoureusement aux mêmes périodes (± 1 an).

B. Etude des profils (ajustement local)

Les figures 2a et 2b mettent en évidence le fait que la base des pics, lorsque celleci est ascendante, est en alignement avec certaines années de fortes précipitations; il semble également, dans la grande majorité des cas, que plus la pente de remontée des minimas est faible plus la relation effective avec l'année de grande pluviosité est lointaine, et inversement.

La base de chaque pic semble donc exprimer parfois trente années d'avance la force de remontée des minimas. Sur les figures 2a et 2b, on voudra bien noter que toutes les années de forte pluviosité sont en correspondance avec la base d'un pic précédent. Dans certains thèmes, notamment à Marseille, ces forces sont rigoureusement parallèles depuis un siècle.

Loi

La base des pics est assimilable à un vecteur exprimant une force de remontée des minimas qui détermine une année de pluviosité maximum, d'autant plus proche dans le temps que la pente de ce vecteur est plus forte ou que son origine est plus élevée.

Inversement, il est possible que les bases des pics inverses soient également en relation avec une hypothétique force de descente des maximas, mais ceci n'est encore qu'une hypothèse. Le jeu complexe de l'imbrication des pentes de remontée des minimas n'est pas encore parfaitement connu, mais on peut dire qu'au moins les années de fortes pluies se situent toujours sur l'un des axes disponibles arrivant dans la zone des maximas (situé pour le profil annuel à Maiduguri au-dessus de 700 mm).

Sur la fig. 2a, entre 1946 et 1949 on remarque une sorte de recentrage. Il a été établi à Paris que deux axes peuvent avoir une influence simultanée et dans ce cas, le point annuel se situe à mi-distance de ces deux axes. Il faut remarquer que les propriétés d'ajustement local mises en évidence à partir des structures virtuelles des profils accentuent encore le principe de la périodicité variable.

En fait, tout se passe comme si chaque hauteur de pluie était la résultante entre des impulsions d'origine solaire et des impulsions d'origine terrestre. Nous considérons donc pour le moment que le concept d'autorégulation à périodicité variable des grandes sources fondamentales d'énergies naturelles en écologie est désormais établi. Malheureusement, ce n'est pour autant qu'il faille considérer qu'il est encore parfaitement connu et immédiatement applicable aux études de prévisions.


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