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4. MISE EN OEUVRE D’UN IMPÔT SUR LA PROPRIÉTÉ RURALE


4.1 Dans les juridictions où il n’existe pas de système d’imposition sur la propriété, la dévolution de certaines responsabilités aux collectivités locales peut rendre nécessaire l’introduction d’une fiscalité foncière totalement nouvelle. Dans celles où le système fiscal en vigueur ne s’applique qu’aux propriétés urbaines et surtout aux biens immobiliers situés dans les grandes villes, l’extension de ce régime aux propriétés rurales peut exiger la plupart des étapes nécessaires pour l’instauration d’un système d’imposition foncière tout à fait nouveau. D’autres juridictions taxant déjà les propriétés rurales pourront trouver leur système fiscal inefficace ou autrement défaillant. Dans ce cas, on privilégiera probablement le passage à un dispositif plus efficace et plus équitable.

4.2 Qu’il s’agisse d’introduire un nouveau système d’imposition sur les propriétés rurales, d’étendre à ces biens un régime fiscal urbain déjà en vigueur ou d’apporter des améliorations substantielles à un impôt rural préexistant, d’importantes décisions politiques doivent être prises. L’ampleur de la mise en oeuvre variera selon qu’il sera nécessaire d’introduire le système fiscal pour la première fois, de l’étendre ou de l’améliorer, mais dans tous les cas des changements seront apportés à la structure de la fiscalité et à la répartition de la charge fiscale. La conception et la mise en oeuvre d’un impôt foncier étant des opérations délicates sur le plan politique, des stratégies sont nécessaires pour atténuer certains effets des changements qui seront introduits. Une évaluation d’impact devrait déterminer comment les différents groupes cibles seront affectés par les changements proposés au système fiscal. Une introduction progressive de l’impôt devrait être envisagée, par exemple une augmentation graduelle de la charge fiscale, de manière à rendre la taxe plus acceptable pour les contribuables. La diffusion d’informations concernant l’impôt et l’utilisation prévue des recettes, est nécessaire pour gagner le soutien du public.

4.3 Les détails de l’administration de l’impôt devraient être définis conformément aux principes de base de la taxe. Pour quelle raison est-il nécessaire de lever un impôt foncier? Comment celui-ci s’inscrit-il dans la structure de gouvernement actuelle ou proposée? Comment s’inscrit-il dans le cadre de la stratégie de décentralisation? Comment s’accorde-t-il avec les autres taxes en vigueur? Quels seront les effets sociaux et économiques de l’introduction d’un nouvel impôt foncier ou de la modification d’une taxe déjà en vigueur? La conception détaillée de l’impôt dépend des réponses à ces questions.

4.4 Si l’impôt foncier est particulièrement approprié pour les collectivités locales, il est essentiel toutefois que l’État central établisse et assure le maintien des conditions qui permettent à ces instances d’assumer des responsabilités accrues. Les ministères nationaux jouent un rôle déterminant pour la promotion d’une décentralisation durable, en élaborant des politiques et des réglementations nationales appropriées et efficaces pour renforcer les capacités des institutions locales afin qu’elles puissent assumer la responsabilité de nouvelles fonctions.

4.5 Concernant l’impôt foncier, il s’agira de procéder à la séparation des fonctions entre l’État central et les collectivités locales, par exemple:

1. L’accès local aux informations contenues dans les bureaux d’enregistrement peut permettre de mettre à jour l’assiette fiscale et d’identifier les contribuables, et permet aux acheteurs et aux vendeurs de biens immobiliers un meilleur accès aux services. Les bureaux d’enregistrement locaux peuvent être exploités soit en tant qu’offices décentralisés du Cadastre central, soit par dévolution à des organismes locaux lorsque les collectivités locales ont la capacité de fournir des services d’enregistrement foncier. Il convient toutefois de noter que si un registre complet des biens fonciers peut être précieux, il ne constitue pas un préalable indispensable aux fins de l’établissement d’un système fiscal. En effet, dans certains cas, les données du cadastre ne constituent que l’une des sources utilisées pour la compilation des listes des contribuables.

2. L’identification des propriétés foncières est une fonction locale parfaite en raison des connaissances locales des fonctionnaires du lieu. L’identification des biens immobiliers à des fins d’imposition devrait si possible s’appuyer sur les enregistrements fonciers.

3. La mise à jour de l’assiette fiscale devrait être considérée principalement comme une fonction locale. Des contrôles devraient cependant être mis en place si certains facteurs empêchent les fonctionnaires municipaux d’exercer cette fonction en toute objectivité.

4. La responsabilité de l’établissement des évaluations requiert l’allocation de ressources suffisantes pour assurer un système d’évaluation solide et uniforme. L’État central devrait en principe être en mesure de fournir ce service aux juridictions décentralisées. Les collectivités locales plus importantes pourraient toutefois disposer des ressources nécessaires pour mener cette fonction à bien. Dans ce cas, des contrôles devraient être mis en place pour assurer l’établissement objectif du montant des contributions.

5. Le système d’appel devrait être indépendant de la responsabilité des évaluations. Les appels contre les valeurs fiscales établies devraient être entendus en premier lieu par un système de tribunaux ou de courts établis à l’échelon local. Pour des questions de droit, le système d’appel peut prévoir un droit d’appel à un plus haut niveau, probablement à celui de l’État central.

6. Un système de facturation régional ou central peut permettre des économies d’échelle en termes de ressources humaines et quant à la technologie nécessaire.

7. Le recouvrement de l’impôt est une fonction locale importante, notamment lorsque les recettes fiscales perçues sont intégralement destinées au budget local. Assurer un recouvrement efficace au niveau local présente donc un intérêt financier, qui serait absent à l’échelon central. Lorsque les collectivités locales n’ont pas la capacité de recouvrer les impôts, un organisme central peut fournir un service de perception aux pouvoirs locaux.

8. Tout comme la perception de l’impôt, l’exécution est une fonction qui relève du gouvernement local.

4.6 Des décisions politiques devront être prises avant de procéder à une conception détaillée. Ces décisions dépendront de la forme de décentralisation choisie et de la nécessité d’introduire un nouveau système d’imposition foncière, ou bien de modifier le régime existant en l’étendant ou en le réformant. Un élément important de la planification des politiques est l’évaluation de l’impact des changements proposés sur les différents groupes de contribuables et l’identification des solutions possibles pour atténuer certains de leurs effets.

4.7 Des débats publics sont nécessaires lorsqu’il s’agit d’introduire un nouvel impôt ou de modifier le régime fiscal. Toutefois, afin que des préjudices sans fondement n’enlisent pas le débat, il est important de préparer soigneusement le terrain à l’aide d’un document de travail bien étudié, établissant les avantages et les inconvénients des différentes solutions possibles dans les circonstances locales. Une campagne de communication positive établissant le lien entre l’impôt foncier proposé et les bénéfices escomptés, c’est-à-dire l’amélioration des services locaux, doit être réalisée.

4.8 Des mesures législatives seront nécessaires pour la mise en oeuvre d’un impôt sur la propriété rurale. La section ci-après énonce les questions distinctes mais liées qui devraient faire l’objet de dispositions juridiques, soit directement au niveau de la législation, soit par le biais des pouvoirs dévolus aux ministres en vertu de la loi. Cette section, qui présente une liste récapitulative, n’est pas exhaustive.

Détails pratiques concernant les règles: liste récapitulative

4.9 Juridiction fiscale. La loi doit spécifier la juridiction de l’impôt et son champ d’application. Par quelles instances peut-il être imposé? Quels domaines couvre-t-il? Quel type de propriété sera imposable? Qui sera responsable du paiement de l’impôt?

4.10 Avantages administratifs et responsabilités. L’administration de l’impôt foncier comporte plusieurs phases:

1. L’introduction juridique de l’impôt, qui relève généralement du ministre de l’État central.

2. L’évaluation, et l’assignation des responsabilités relatives à cette tâche dans la législation.

3. La responsabilité de l’établissement du taux d’imposition. Celle-ci peut être spécifiée dans la législation ou bien être assignée à l’instance locale, éventuellement dans les limites fixées par l’État central.

4. La législation doit spécifier les responsabilités relatives au recouvrement.

5. La législation doit indiquer l’entité bénéficiaire des recettes.

6. La législation doit indiquer l’entité responsable de la mise en recouvrement des impôts et du règlement des différends.

Il est possible que chacune de ces fonctions soit assignée à l’instance locale, mais cette situation est plutôt inhabituelle et l’État central est rarement disposé à laisser entière liberté aux collectivités locales. Assurer l’indépendance législative de la base d’évaluation peut être important pour la crédibilité publique du système d’imposition foncière. La législation devrait apporter un fondement et un soutien juridique à ceux qui assurent la fonction d’évaluation.

4.11 La base d’évaluation. La base d’évaluation est au coeur même du processus d’imposition. Malheureusement, le débat public et politique des options possibles est souvent faussé par l’excès d’enthousiasme des partisans de telle ou telle solution, bien souvent alimenté par des attentes peu réalistes quant aux avantages économiques de la formule privilégiée. Or, dans la pratique, il n’y a pas de grandes différences entre les options et, dans la plupart des cas, trois formules au moins auraient une efficacité à peu près égale. Aucune solution n’aura le monopole des avantages et il y aura toujours des inconvénients. Les différents choix possibles sont présentés dans le tableau 1.

4.12 Le choix d’une assiette fiscale appropriée doit être effectué conformément aux principes généraux de l’impôt et s’accorder avec d’autres dispositions administratives. Par exemple, doit-il s’agir d’un impôt sur la propriété ou d’une taxe d’occupation? Ce sont ces principes de base qui déterminent probablement la meilleure formule concernant la base d’évaluation de la valeur fiscale. Ils sont également essentiels pour les dispositions juridiques relatives à bon nombre des éléments indiqués dans la présente section. Le choix d’une assiette fiscale appropriée pour un système d’imposition ad valorem (c’est-à-dire basé sur la valeur) devrait également tenir compte de la prépondérance de la preuve de valeur disponible. Si la plupart des biens fonciers sont loués, une base d’évaluation fondée sur la valeur locative serait raisonnable et plus facile à comprendre. En revanche, si la plupart des biens sont achetés et vendus sur la base de leur valeur de capital sur le marché, celle-ci fournira une base d’évaluation plus crédible.

TABLEAU 1
Comparaison de différentes bases d’évaluation


A - Hypothèse d’évaluation: évaluation limitée à la seule valeur d’usage du bien.

B - Hypothèse d’évaluation: Évaluation basée sur l’utilisation optimale du bien.

1. Valeur en capital.
Le prix auquel le bien pourrait être vendu sur le marché libre.

1A: Base d’évaluation commune qui a fait ses preuves, fondée sur la valeur du bien en son état actuel. Probablement la formule la plus utilisée dans le monde. Facile à comprendre. Ne tient pas compte de la valeur potentielle de rénovation du bien, contrairement à l’option 1B.

1B: Bien connue et ayant fait ses preuves. Considérée comme ayant des avantages économiques en encourageant une utilisation optimale du bien. Exige des règles juridiques claires concernant l’aménagement du territoire pour avoir la preuve de l’utilisation optimale. La perception de l’impôt n’est pas aussi facile qu’avec les bases d’évaluation 1A et 2A.

2. Valeur locative.
Le prix auquel le bien pourrait être loué d’année en année.

2A: Base d’évaluation ayant fait ses preuves. Applicable pratiquement en toutes circonstances. De nombreux avantages fiscaux. L’impôt le plus facile à recouvrer. Formule moins bien comprise que 1A lorsque le marché est restreint ou contrôlé par la loi.

2B: Formule difficile à mettre en application dans la pratique et méritant rarement d’être envisagée. Ne permet pas de tenir compte de la valeur potentielle de rénovation au regard d’une valeur annuelle.

3. Valeur du site.
La valeur du terrain seulement. Le prix auquel le bien-fonds pourrait être vendu, sans les constructions et autres aménagements.

3A: Base d’évaluation ayant fait ses preuves et souvent efficace. Peut présenter des avantages administratifs et être un système peu onéreux à gérer. Moins facile à comprendre que 1A ou 1B, ce qui peut retentir sur la facilité de recouvrement. Corrélation avec la capacité contributive inférieure à celle des formules 1A ou 1B.

3B: Formule applicable dans certaines circonstances. Les différentes utilisations potentielles pouvant être prises en considération sont uniquement celles autorisées par les plans d’aménagement du territoire ou les catégories de zonage.

4.13 L’adoption de l’une des assiettes fiscales ad valorem identifiées au tableau 1 présente des avantages. Elles sont en général bien comprises par les contribuables, surtout lorsque la base est naturelle plutôt qu’artificielle et qu’elle reflète la prévalence d’une preuve de marché qui sera connue et accessible au public. Elles favorisent une utilisation optimale des biens et ont une certaine corrélation avec la capacité contributive. D’ordinaire, le rendement potentiel des impôts sur la valeur est supérieur à celui des autres solutions possibles. Toutefois, ces formules ne constituent pas le seul choix possible. Plusieurs pays optent pour ce que l’on pourrait appeler des «impôts fonciers à taux fixe» qui requièrent moins de capacités d’évaluation et constituent souvent une solution rapide et aisée. Une formule intéressante et peu coûteuse, surtout lorsque les capacités d’évaluation sont limitées, consiste à adopter un système de classement des valeurs par «tranches» qui offre un degré d’équité raisonnable au niveau de l’assujettissement à l’impôt, sans toutefois être trop exigeant en données et en compétences professionnelles. Dans un système de classement par tranches, chaque bien-fonds est assigné à une ou plusieurs tranches ou catégories, et tous les biens rentrant dans une tranche donnée sont assujettis au même impôt. Il n’est donc pas nécessaire de procéder à une évaluation distincte et détaillée de chaque propriété.

4.14 La définition des biens à évaluer séparément aux fins de leur imposition. Quels sont les biens qui devraient faire l’objet d’une évaluation fiscale distincte? Cela ne va pas toujours de soi. Par exemple, dans les zones où les exploitations agricoles sont constituées de nombreux champs épars et non contigus, il s’agit de déterminer si chaque champ constitue une entité fiscale distincte ou si l’ensemble de l’exploitation est une entité unique à des fins d’imposition. La définition des avoirs doit être en accord avec d’autres aspects de l’impôt. Par exemple, s’il s’agit d’un impôt sur la propriété, un immeuble d’habitation occupé par des locataires pourra avoir une évaluation unique. Cela n’est pas possible si l’impôt est une taxe d’occupation, auquel cas chaque appartement doit être imposé séparément.

4.15 Le contribuable: qui paye? Le choix est généralement entre le propriétaire et l’occupant. Il peut y avoir des avantages fiscaux à considérer l’occupant comme le contribuable, surtout lorsque les registres fonciers sont incomplets. L’occupant est bien plus facile à localiser et à identifier et il peut y avoir une plus grande corrélation avec la capacité contributive. D’autre part, il est plus probable que l’occupant soit le consommateur des services fournis par la collectivité locale. Toutefois, sur le plan politique, il est plus facile de persuader l’opinion publique des mérites d’un impôt foncier lorsque le contribuable est le propriétaire du bien. Aux personnes peu informées, il semble plus équitable que le propriétaire, qui peut être le locateur d’une propriété louée, soit la personne assujettie à l’impôt sur la propriété. En réalité, dans bien des cas cela n’aura pas grande importance, chacune des deux options pouvant être viable. Quoi qu’il en soit, la charge reviendra en définitive au propriétaire du bien-fonds (même si ce dernier peut, bien entendu, tenter de transférer l’impôt au consommateur des produits ou des biens issus de ses terres). Un locataire ne peut se permettre de consacrer qu’un certain montant au loyer et à l’impôt foncier. Si les locataires, en qualité d’occupants, sont assujettis à un nouvel impôt foncier, le montant qu’ils sont à même d’engager dans une nouvelle location en sera réduit. Cet aspect montre combien il est important que des accords transitoires facilitent l’introduction d’un nouvel impôt.

4.16 Une importante mise en garde s’impose si le propriétaire doit être considéré comme le contribuable. La définition ne devrait pas être trop étroitement liée à l’enregistrement des titres de propriété car, du fait des lacunes du système cadastral, certaines propriétés pourraient échapper à l’imposition. D’autre part, lorsque l’enregistrement déclenche l’obligation de payer un impôt annuel sur la propriété, l’effet dissuasif sur l’enregistrement même est important tandis que l’efficacité de l’investissement au niveau des systèmes d’enregistrement est compromise. Dans les systèmes d’imposition foncière qui font du propriétaire le principal responsable, des formules juridiques connues permettent d’imposer l’occupant en cas de doute, avec pour ce dernier la protection accordée par la loi de transmettre cette obligation au propriétaire foncier lorsque cela est possible. Dans les pays où les terres domaniales sont louées à des particuliers ou à des sociétés, il est fréquent que la charge de l’impôt soit confiée à la personne qui prend à bail les terres du secteur public.

4.17 Les réévaluations. La législation doit stipuler la fréquence avec laquelle les propriétés doivent être réévaluées pour que la cotisation d’impôt soit à jour. En général, le délai indiqué aux termes de la loi est d’environ cinq ans. Un intervalle supérieur présente des inconvénients considérables. Plus les réévaluations sont fréquentes, mieux la valeur fiscale reflète celle du marché et mieux elle est comprise par les contribuables. La technologie de l’information permet de procéder à des réévaluations annuelles. Il existe de bonnes raisons d’introduire le concept de réévaluation annuelle dans les révisions de l’impôt foncier lorsque la capacité technologique est suffisante pour pouvoir le faire sans trop de frais. Les réévaluations peuvent être difficiles à gérer sur le plan politique si elles donnent lieu à des changements importants au niveau de la valeur et des obligations fiscales. Comme des réévaluations plus rapprochées détermineront probablement des modifications de valeur moins importantes que des évaluations moins fréquentes, l’introduction d’un système de réévaluation annuelle peut réduire la nécessité de prendre des décisions politiques délicates.

4.18 L’établissement du taux d’imposition. Plusieurs approches sont possibles:

1. Le taux d’imposition est fixé chaque année par les pouvoirs locaux en fonction des besoins de la collectivité inscrits au budget. L’établissement de ce taux est un acte politique, qui donnera lieu à des débats à l’échelon local. Cette approche offre une autonomie maximale aux gouvernements locaux décentralisés, en leur donnant la possibilité de fixer les taux d’imposition en fonction des recettes nécessaires. La transparence et la responsabilité des collectivités locales à l’égard des citoyens sont essentielles.

2. L’État central fixe chaque année le taux d’imposition compte tenu des besoins de la collectivité locale et en fonction de l’importance des transferts intergouvernementaux entre l’État central et le gouvernement local.

3. Le taux d’imposition est fixé par la loi au niveau de la législation primaire et les recettes fiscales varieront en fonction de l’évolution des valeurs de marché et des réévaluations périodiques. L’élasticité de l’impôt est donc limitée et les recettes dépendent du calendrier d’application de la procédure de réévaluation sur la base des fluctuations des valeurs du marché. Cette approche ne laisse aucune discrétion aux gouvernements locaux décentralisés.

4. Un taux d’imposition maximal est fixé par la loi au niveau de la législation primaire, tandis que les collectivités locales ont la possibilité d’établir les taux d’imposition effectifs dans le cadre de la limite fixée.

4.19 Il est également possible d’avoir des taux différentiels selon la valeur de la propriété ou le type de bien-fonds concerné. Une politique prévoyant l’application d’un taux d’imposition plus élevé aux biens de plus grande valeur fiscale, peut donc être introduite. Théoriquement, cela donne un caractère progressif à l’impôt et semble intéressant à première vue. Plusieurs raisons techniques conseillent toutefois d’éviter une telle approche et d’adopter un taux d’imposition unique. Les taux multiples donnent généralement lieu à une fragmentation artificielle des biens-fonds pour éviter les tranches d’imposition plus élevées. Cette approche rend le rendement total de l’impôt moins prévisible et complique ainsi les budgets des collectivités locales. L’impôt perd de sa transparence. La complexité accrue réduit le niveau de reddition de comptes qui peut être demandé au personnel administratif et peut être une source de corruption.

4.20 Les exonérations. En général, moins il y aura d’exonérations et plus l’administration de l’impôt foncier sera facile et économique. Plus le nombre des biens imposés est grand, moins la charge fiscale individuelle est importante. Les exemptions fiscales s’accompagnent rarement d’une popularité politique durable, elles peuvent avoir un effet de distorsion sur le marché immobilier et ne produisent pratiquement jamais les bénéfices économiques et sociaux escomptés.

4.21 Il n’existe pratiquement aucune raison valable d’exonérer d’impôt les propriétés agricoles. La plupart des motifs communément avancés ne produisent pas le résultat souhaité. Ainsi, l’on croit que l’exonération fiscale de l’agriculture fera baisser le prix des denrées alimentaires, mais il semble que cela n’ait jamais été le cas. La théorie économique indique que l’exemption tend à faire augmenter le prix de la terre par rapport à d’autres biens imposables et il est prouvé qu’il en est ainsi. L’on pense également que l’exonération fiscale des terres agricoles facilite l’accès à la terre, alors qu’en réalité, comme on l’a déjà dit, l’allègement fiscal détermine une hausse du prix de ces terres et rend plus difficile l’accès de nouveaux venus aux exploitations agricoles. D’autre part, l’exonération de l’agriculture porte préjudice à la perception de la fonction de l’impôt en tant que moyen de répartition équitable des dépenses locales. L’impôt devient ainsi également d’une faible utilité pour la production de recettes destinées aux organes spécialisés s’occupant principalement des terres agricoles (comme les offices du drainage, de l’irrigation, etc.).

4.22 Peu de raisons fondées justifient l’exonération des petites propriétés. À première vue, de telles exemptions pourraient paraître justifiées. Une grande partie de la valeur fiscale totale peut dériver d’un pourcentage limité de propriétés et l’essentiel de la population occupe des propriétés de moindre valeur qui ne représentent qu’un petit pourcentage de la valeur imposable totale (dans les pays développés, 40 pour cent ou plus de la valeur fiscale totale provient d’ordinaire de moins de 10 pour cent des propriétés, tandis que la moitié environ de la population réside dans des propriétés représentant moins de 10 pour cent de la valeur totale). En raison du rapport coût/rendement supérieur de l’évaluation des propriétés de moindre valeur et du fait des plus grandes difficultés de recouvrement, on pourrait soutenir que l’exonération fiscale des petites propriétés s’accompagnerait d’une perte de recettes limitée. En dépit de ces avantages apparents, il est rare que les petites propriétés soient exemptées d’impôt. Tout d’abord, une telle exonération réduit la valeur de l’impôt en tant qu’instrument de responsabilisation locale du fait de la diminution du pourcentage de contribuables dans la population totale. Ensuite, elle peut conduire à une fragmentation artificielle des biens-fonds dans le but d’éluder l’impôt. Enfin, elle est source d’insatisfaction en lésant les propriétaires fonciers dont les biens rentrent de peu dans la tranche d’imposition fixée.

4.23 Il y a également peu de raisons d’exonérer les biens publics. Dans certains pays, les propriétés domaniales sont exemptées d’impôt. Au premier abord, de telles exonérations peuvent paraître justifiées. L’imposition des biensfonds possédés et occupés par le secteur public semblerait être une inutile complication bureaucratique. Pourtant, une analyse plus attentive révélerait que de très bonnes raisons justifient l’imposition des propriétés publiques. D’une part, cela permet de répartir les obligations fiscales entre les différents niveaux de gouvernement. Un organisme de l’État central fait usage des aménagements locaux et il n’y a aucune raison pour que le gouvernement central ne contribue pas, à travers l’impôt foncier, au coût des services fournis localement. La taxation des propriétés de l’État peut être très importante pour les collectivités locales dans les zones où les biens fonciers du gouvernement central sont relativement nombreux. Ensuite, le secteur public n’est généralement pas un utilisateur attentif de ses biens. Le versement d’un impôt foncier est alors une étape vers une meilleure gestion des biens fonciers, leur détention cessant alors d’être gratuite. Le secteur public étant presque toujours un très grand propriétaire et occupant foncier, la question est importante.

4.24 Parmi les propriétés susceptibles d’être exonérées d’impôt, on peut indiquer les suivantes:

1. Les propriétés utilisées à des fins religieuses, par exemple les églises, les mosquées, les temples, etc., et les cimetières qui en dépendent.

2. Les routes, les parcs publics et les propriétés similaires faisant l’objet d’une «occupation» publique. Il en va de même pour d’autres commodités publiques situées en milieu rural, comme les pâturages collectifs. Même si de tels aménagements ne figurent pas dans les listes cadastrales, leur contribution à l’assiette fiscale n’en est pas pour autant perdue. Leur valeur se reflète bien souvent par une valorisation des propriétés qui bénéficient de ces aménagements.

3. Les terres utilisées pour la foresterie commerciale. En général, la valeur des terres forestières est très faible si l’on ne tient pas compte de la valeur du bois sur pied. Par ailleurs, la capacité contributive est limitée par le caractère périodique des rendements forestiers qui s’accommode assez mal d’un impôt annuel.

4.25 Les règles de paiement. La législation doit spécifier quand et comment réclamer et effectuer le paiement.

4.26 L’exécution. La législation doit conférer des pouvoirs d’exécution en cas de défaut de paiement. Les moyens les plus courants sont notamment l’enlèvement et la vente de biens jusqu’à concurrence du paiement, la saisie des loyers et des profits, les amendes pour retard de paiement et le versement d’intérêts supérieurs au taux commercial, la confiscation de la propriété et l’incarcération.

4.27 Le règlement des différends. L’expérience acquise dans le monde entier montre les avantages d’un système de tribunaux ou de cours à l’échelon local, qui soient accessibles sans représentation professionnelle, rapides et peu onéreux. Il est important de veiller à ce que les tribunaux utilisés pour connaître des appels de l’impôt foncier soient considérés comme indépendants à la fois de l’organe responsable de l’évaluation de l’impôt et de l’instance chargée du recouvrement de cet impôt.

4.28 Une bonne partie des différends concernant l’impôt foncier seront jugés sur des questions de fait et d’évaluation. La composition type de ces tribunaux (constitués d’au moins trois personnes et souvent, mais pas toujours, présidé par un juriste) en sera le reflet. Les membres non juristes sont généralement des personnalités locales bien informées et respectées, ou des professionnels, comme par exemple des évaluateurs et des comptables. Le système de règlement des différends est très important pour une administration sans problèmes de l’impôt et constitue également une précieuse soupape de sécurité. La législation doit bien entendu indiquer quand et comment introduire un appel.

4.29 La relation avec d’autres impôts. Il s’agira de décider si l’impôt foncier peut être déduit de l’impôt sur le revenu des particuliers et de l’impôt sur les bénéfices des sociétés et dans ce cas, dans quelles circonstances. En général, l’impôt foncier est une charge déductible de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur les sociétés.

L’appareil administratif

4.30 Principales caractéristiques de l’administration de l’impôt foncier. Les caractéristiques importantes de l’administration de l’impôt foncier dont il faudra tenir compte au moment de planifier l’application de l’impôt ou une réévaluation, sont notamment les suivantes:

1. Chaîne de fonctions: L’application efficace de l’impôt foncier requiert l’accomplissement de différentes fonctions, chacune étant essentielle pour le succès de l’ensemble du processus. Ces fonctions sont les maillons d’une chaîne et l’absence ou la défaillance d’un seul d’entre eux causerait un échec total.

2. Établissement du rôle d’évaluation: L’impôt foncier exige que toutes les propriétés imposables soient inscrites au rôle d’évaluation. Si le relevé est incomplet, des recettes fiscales potentielles seront perdues. L’inscription de toutes les propriétés est importante également pour l’impartialité et l’équité de l’impôt car elle garantit une répartition équitable de la charge fiscale entre tous les contribuables concernés. Toutes les propriétés doivent être évaluées conformément au calendrier prévu.

3. Calendrier: Le temps nécessaire pour mettre le système d’imposition en application dépendra de l’ampleur de la tâche et des ressources disponibles. Il faudra normalement au moins deux ans, mais souvent bien plus, pour mettre en place un nouveau rôle d’évaluation en partant de zéro. Dans les années suivantes, ce délai peut être réduit si le relevé a été correctement mis à jour et si des systèmes informatiques bien conçus sont utilisés. Les décideurs doivent en tenir compte.

4. Modules annuels: Un nouveau rôle d’évaluation prend d’ordinaire effet au début d’un exercice financier. Le calendrier devrait en tenir compte. Si l’établissement du relevé n’est pas terminé et dûment approuvé conformément à la législation au début de l’exercice financier, le processus sera probablement retardé d’une année entière.

4.31 Divers facteurs peuvent conduire à un échec. De plus, tout le travail fait pour établir un relevé défaillant pourra être entièrement perdu. La plupart des données ont une durée de vie relativement brève. Il en résulte que l’administration de l’impôt foncier doit être soigneusement planifiée et mise en oeuvre avec une très grande détermination.

4.32 Personnel et compétences professionnelles. Dans les pays développés à économie de marché, les personnes chargées de l’évaluation et de la gestion des propriétés foncières dans le secteur privé sont généralement trois ou quatre fois plus nombreuses que celles qui opèrent dans le secteur public. Dans tous les pays dotés de systèmes d’imposition annuelle de la propriété foncière bien établis, le processus d’évaluation foncière est organisé de manière à réduire au minimum le nombre des experts pleinement qualifiés utilisés. Grâce aux techniques d’évaluation à grande échelle assistées par ordinateur, l’essentiel du travail peut être assuré par des personnes dotées de compétences appropriées en technologie de l’information et en statistique, en collaboration avec des techniciens d’évaluation. La nécessité de recourir à des experts en évaluation foncière professionnellement qualifiés pourrait être réduite en adoptant des approches telles que la répartition par tranches (c’est-à-dire en classant les propriétés par tranches d’imposition au lieu de procéder à une évaluation individuelle de chaque propriété).

4.33 Les connaissances et les compétences en matière d’évaluation sont encore insuffisantes dans les pays en développement. D’autre part, les techniques spécifiques nécessaires pour procéder à l’évaluation des propriétés rurales exigent des experts évaluateurs dûment formés, dotés d’expérience et ayant qualité pour agir dans les districts intéressés. Cette pénurie a été considérée comme une entrave à la mise en oeuvre d’un impôt ad valorem. Les exigences du secteur public quant aux compétences nécessaires en matière d’imposition foncière doivent se mesurer aux besoins du secteur privé et d’autres fonctions publiques nécessitant des capacités d’évaluation et de gestion foncières. Dans certains pays, les capacités d’évaluation de la valeur commerciale des propriétés foncières se développent plus rapidement dans le secteur privé que dans le secteur public. C’est pour cette raison que les experts en évaluation foncière sont souvent plus nombreux dans le secteur privé que dans le secteur public, si tant est qu’il y en ait. Dans d’autres pays, le niveau de développement du secteur privé n’est pas tel que l’on puisse faire appel en toute confiance à des compétences privées pour l’évaluation à des fins d’imposition.

4.34 Au moment de l’introduction d’un impôt foncier ad valorem, les pays devront considérer en particulier les besoins en matière de formation et d’éducation des experts en évaluation, des conseillers et des gestionnaires immobiliers. Le manque d’experts évaluateurs dûment qualifiés constituera pendant encore un certain temps un défi pour la plupart des pays en développement, et le secteur public aura des difficultés à mobiliser et à retenir les rares compétences disponibles. Les stratégies à mettre en oeuvre pour surmonter ces obstacles comprendront notamment le renforcement des capacités de formation et de recherche des universités dans ce domaine, la formation interne des techniciens et le recours au secteur privé et aux institutions professionnelles. Les stratégies doivent également tenir compte du fait que la formation d’experts évaluateurs ne prévoit généralement aucun enseignement concernant l’organisation d’un bureau d’impôt ou la planification et l’exécution d’une réévaluation.

4.35 Institutions. La répartition des différentes fonctions relatives à l’impôt foncier au sein de l’administration publique, n’est pas simple et peut faire la différence entre le succès et l’échec. Plusieurs sous-fonctions différentes peuvent être localisées auprès de divers ministères ou à des niveaux de gouvernement différents. Le tableau 2 illustre les options possibles.

4.36 Il faut souvent tenir compte des intérêts solidement établis, au moment de l’attribution des responsabilités relatives à l’évaluation foncière. Les registres fonciers qui pourraient être utiles aux fins de l’évaluation peuvent être divisés et situés auprès de différents ministères. Ainsi, le Ministère de l’agriculture peut détenir les registres de la classification des sols et des unités agricoles. Les registres fonciers peuvent se trouver auprès du bureau ou du département du cadastre, tandis que les registres des bâtiments pourront être conservés à part.

4.37 Face à l’insuffisance des compétences professionnelles en matière d’évaluation dans de nombreux pays, dans la plupart des cas il n’y aura peutêtre pas lieu de déléguer la fonction d’évaluation aux collectivités locales.

TABLEAU 2
Options relatives à la répartition des responsabilités

Fonction

Localisation possible

1. Responsabilité générale

Ministère des finances,
Ministère de la planification financière,
Ministère des collectivités locales,
Ministère de l’environnement,
Ministère de l’agriculture,
et/ou tout ministère chargé du contrôle des fonctions
d’arpentage et cadastrales

2. Évaluation

Ministère des finances,
Ministère des collectivités locales,
Ministère de l’agriculture,
Ministère de l’environnement,
et/ou tout ministère chargé du contrôle des fonctions
d’arpentage et cadastrales (autre que ceux indiqués ci-dessus),
Gouvernement local,
Sous-traitance au secteur privé par l’une des entités ci-dessus.

3. Perception

Gouvernement local,
État central au nom du gouvernement local,
Sous-traitance au secteur privé par l’une des entités ci-dessus.

Lorsque les pouvoirs locaux ne disposent pas des capacités professionnelles internes nécessaires, il peut être plus efficace de concentrer les ressources spécialisées en une unité d’évaluation centrale. Dans d’autres cas, il conviendra peut-être de confier cette tâche au secteur privé. Même en cas d’attribution de l’évaluation au secteur privé, l’organisme d’État devrait disposer des compétences nécessaires pour mesurer la qualité des évaluations.

4.38 Il convient de séparer la fonction de recouvrement de celle de l’évaluation, et dans bien des cas le recouvrement est assuré par les pouvoirs locaux tandis que l’État central maintient le contrôle des évaluations.

4.39 Considérations techniques. Des rôles d’évaluation de qualité ont pu être

établis pendant des millénaires, sans les bienfaits de la technologie moderne de l’information. Il convient d’en tenir compte au moment de déterminer le niveau de sophistication technique à utiliser, sachant que la technologie de l’information:

Toutefois, le recours attentif et dûment planifié à la technologie de l’information peut permettre de réduire les coûts, devrait accroître la précision et la cohérence des données et permettra certainement de gagner du temps. Un rôle d’évaluation foncière est une base de données de très grandes dimensions et la technologie de l’information permet de reproduire les informations qui y sont contenues en différents formats. De nombreuses expériences (positives et négatives) d’informatisation de l’impôt foncier ont été faites dans le monde entier et il convient d’en tirer la leçon. Il est important d’orienter la stratégie dans la bonne direction.

La mise en pratique: une liste de contrôle chronologique

4.40 La présente section indique l’ordre chronologique des mesures à prendre pour introduire un impôt local sur la propriété foncière et leur interrelation. La séquence des événements présentée au tableau 3 illustre les différentes étapes à franchir depuis la conception jusqu’au recouvrement de l’impôt. Le tableau vise à faciliter la planification du processus au niveau des pays et l’identification du chemin critique dans chaque cas précis. La séquence vise également à mettre en relief l’unité du processus. Tous les éléments doivent être mis en place afin que le système soit efficace. Toute défaillance au niveau de l’un quelconque de ces éléments conduira l’ensemble du processus à l’échec. Le présent guide ne peut qu’indiquer les fonctions. Il ne procède pas à un examen détaillé de la façon dont elles sont mises en oeuvre, car cela variera d’un cas à l’autre.

4.41 Planification stratégique. Il est évident que les responsables politiques doivent avant tout décider dans quelle direction ils souhaitent aller. Bien entendu, il est impossible de procéder à la conception détaillée avant d’avoir effectué un examen attentif de la politique préférée.

4.42 Sensibilisation du public. Un aspect particulièrement important de la préparation est la nécessité de donner au public des informations concernant l’impôt proposé et, notamment, les avantages qui dériveront de son introduction.

TABLEAU 3 Séquence des événements

4.43 Législation. Le processus législatif doit être conclu au moment de l’entrée en vigueur de l’impôt. Si le gouvernement est certain d’y parvenir avant cette date, cette activité peut alors être menée parallèlement à la préparation du rôle d’évaluation. Dans le tableau, il est suggéré de conclure le processus législatif avant d’entreprendre ces travaux. Cela est sans doute préférable. La mise en place d’un bureau d’évaluation est un risque si la modification de la législation n’aboutit pas. Il est nécessaire par ailleurs que les experts en évaluation soient légalement autorisés à pénétrer dans les propriétés pour procéder à l’arpentage et recueillir les informations nécessaires à l’accomplissement de leur tâche.

4.44 Mise en place du bureau d’évaluation. Bien que le processus d’évaluation foncière ne soit que l’une de ses fonctions, il s’agit néanmoins de celle qui présente le plus de difficultés sur le plan technique et organisationnel. Le bureau doit être en mesure de la mener à bien d’une façon complète et précise, et conformément aux exigences de qualité. Cela demande des compétences techniques d’évaluation foncière, des capacités d’organisation et en informatique. Si les travaux d’évaluation sont confiés au secteur privé, le bureau d’évaluation devrait avoir les compétences nécessaires pour gérer la sous-traitance.

4.45 Mise en place du bureau de recouvrement. Une entité doit être chargée du recouvrement de l’impôt. Cette tâche requiert moins de compétences techniques et des effectifs plus réduits que le processus d’évaluation, mais autant de détermination.

4.46 Processus d’évaluation foncière. Cette fonction est celle qui demande le plus de temps. Elle fera certainement partie du chemin critique. Un certain nombre de sous-fonctions sont prévues à ce stade, notamment:

4.47 Si un système d’imposition foncière est mis en place pour la première fois, la compilation des données de base nécessaires pour l’établissement du rôle d’évaluation (identification du bien-fonds, identification du propriétaire ou de l’occupant, adresse pour la facturation, etc.) peut s’avérer extrêmement difficile si le registre dont on dispose n’est pas complet. La collecte des données disponibles ne permettra pas nécessairement d’établir un rôle d’évaluation foncière complet. Le relevé lui-même risque de contenir des erreurs. À un moment donné, il s’agira de décider si le rôle d’évaluation doit être publié en dépit de son caractère incomplet.

4.48 Pour faciliter la mise à jour des rôles d’évaluation foncière, l’organe responsable devrait établir des liens avec d’autres organismes d’administration des terres comme le bureau d’enregistrement des terres et du cadastre (pour les informations concernant les caractéristiques des parcelles, les transferts et les prix de vente) et l’autorité chargée de la planification (pour les informations relatives aux nouveaux bâtiments, etc.). La compilation à grande échelle de données pertinentes concernant les parcelles à des fins d’imposition foncière est une importante tâche initiale et continue qui requiert une planification et une budgétisation attentives des ressources.

4.49 Établissement du taux d’imposition. Dans certains systèmes, le taux d’imposition est fixé par la loi. Dans le cas contraire, cette étape consiste essentiellement en la prise d’une décision. Il s’agit toutefois d’une décision au contenu politique important, qui devrait être précédée d’un débat. Il est nécessaire de trouver un équilibre en établissant un taux d’imposition a) qui produise le niveau de recettes fiscales requises pour couvrir le coût des services à fournir, et b) qui tienne compte de la capacité contributive du contribuable. Si le taux d’imposition fixé est trop élevé, il y aura un mécontentement et une résistance généralisés des contribuables. S’il est trop faible, les recettes produites pourront ne pas être suffisantes pour répondre aux besoins des collectivités locales, ni même justifier le coût d’évaluation et de recouvrement de l’impôt. La décision concernant le taux d’imposition est probablement la plus importante à prendre en relation avec l’impôt foncier.

4.50 Les principales étapes de l’établissement du taux d’imposition sont les suivantes:

1. Dépôt du rôle d’évaluation foncière. Cette opération constitue le point culminant du processus d’évaluation.

2. Instruction des objections et des appels. Le processus d’évaluation ne prend pas fin avec le dépôt du rôle foncier. Tout système transparent et durable doit prévoir un mécanisme d’appel.

3. Recouvrement de l’impôt. Le processus de recouvrement de l’impôt suit un cycle annuel.

4. Exécution. Le recouvrement ne sera pas complet sans une procédure d’exécution efficace.

5. Mise à jour du rôle d’évaluation. Le taux d’imposition évolue avec l’apparition de nouvelles constructions et de la rénovation ou démolition des propriétés existantes. Ces changements doivent être suivis de près et enregistrés. Ce processus doit être réalisé de façon continue.


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