EAF-Nansen Programme

Étude des pêcheries démersales transfrontalières le long de la côte nord-ouest de l'Afrique

28/03/2024

Le 21 janvier, le navire de recherche (N/R) Dr. Fridtjof Nansen a quitté Las Palmas, à destination de Casablanca, au Maroc, pour entamer la première expédition scientifique de 2024. Pendant plus de 50 jours, le navire a navigué le long de la côte nord-ouest de l'Afrique pour étudier les ressources halieutiques démersales transfrontalières. C'était la cinquième fois que le navire retournait dans la zone pour étudier les espèces vivant sur les fonds marins, recueillant ainsi des données précieuses et des informations cruciales pour la région.

«Les espèces démersales sont très importantes pour l'Afrique du Nord-Ouest en raison de leur contribution à l'alimentation et aux moyens de subsistance des communautés côtières», a déclaré Maik Tiedemann, l'un des responsables des campagnes à l'Institut de recherche marine (IMR) de Norvège, qui a coordonné le travail à bord pendant la première partie de la campagne, au large des côtes marocaines.

Les ressources halieutiques telles que les merlus – Merluccius merluccius et Merluccius senegalensis – ainsi que d'autres espèces de poissons démersaux et de crevettes ont été étudiées en priorité au cours de la campagne, en raison de leur valeur commerciale et écologique. 

«Le merlu est un aliment clé du régime alimentaire de cette région, car il constitue une source précieuse de protéines pour la population. Sa disponibilité et son prix abordable en font un aliment essentiel», explique Arnault Le Bris, chercheur à l'IMR et l'un des responsables de la campagne. «Pour comprendre le statut des espèces cibles, des données sur la taille des populations, la répartition et l'identité des stocks sont collectées», a-t-il ajouté.

«La collecte de données sur l'ensemble du cycle biologique de toutes les espèces de merlu dans la région est extrêmement importante pour améliorer la gestion partagée entre les pays voisins», a ajouté Ahmed El Achi, l'un des co-responsables locaux de la campagne, qui a également présenté son travail sur la «croissance et la reproduction de Merluccius polli et Merluccius senegalensis dans l'Atlantique Sud marocain» à ses collègues participants à la campagne.  

Bien que l'étude des ressources halieutiques ait été une priorité essentielle, d'autres aspects de l'écosystème ont été étudiés afin d'améliorer la compréhension des facteurs qui déterminent l'abondance et la répartition des ressources démersales et de contribuer aux connaissances sur la diversité des espèces, les habitats, les impacts climatiques et la pollution, tant sur le plateau que sur le talus.

Des échantillons de sédiments du fond ont par ailleurs été prélevés du Cap Spartel au Cap Blanc afin d'étudier les propriétés du fond marin et les organismes qui vivent sur le fond (épibenthos) et dans les sédiments (endobenthos). Les  données et les informations issues de cette partie de la campagne serviront de base à l'un des premiers grands exercices de cartographie de la diversité benthique sur les fonds marins du nord-ouest de l'Afrique.

«J'évalue la diversité des différentes communautés benthiques au large des fonds marins et la manière dont la composition évolue en fonction des gradients environnementaux tels que la profondeur, l'oxygène et la température, et ces résultats permettront de mieux cartographier les fonds», a déclaré Tariq Ouztato, doctorant à l'Université Abdelmalek Essaadi et à l'Institut national de recherche halieutique (INRH) au Maroc, qui a participé à la campagne. 

Les deuxième et troisième parties de la campagne ont portées sur les eaux de la Mauritanie, du Sénégal et de la Gambie. En raison de l’upwelling côtier, les eaux de cette région sont très riches en poissons ce qui favorise à la fois une importante pêche artisanale près du rivage et une pêche industrielle au large.

Près de la côte mauritanienne, le mérou blanc (Epinephelus aeneus) est une espèce clé pour la pêche artisanale, mais comme beaucoup d'autres espèces cibles, les stocks ont diminué au cours des dernières années. Comme en Mauritanie, la plupart des pêcheries les plus productives du Sénégal et de la Gambie sont celles d'espèces pélagiques telles que la sardinelle, mais des ressources démersales précieuses telles que le poulpe (Octopus vulgaris) ou la langouste (Palinurus sp.) sont une source importante de revenus pour les communautés côtières. En outre, il existe des pêcheries industrielles, comme celle de la crevette rose du large, qui approvisionnent le marché international.

«La reconnaissance de l'importance des espèces à valeur commerciale et écologique dans la région souligne la nécessité d'une gestion efficace et de mettre en place des mesures de conservation pour assurer la durabilité à long terme de ces précieuses ressources marines», a déclaré Erik Olsen, responsable de la recherche à l'IMR, qui a dirigé la campagne dans les eaux de la Mauritanie.

Au total, 60 scientifiques et techniciens locaux du Maroc, de la Mauritanie, du Sénégal et de la Gambie ont participé à différents segments de la campagne, recevant une formation pratique sur les installations et l'équipement du navire. Le temps passé à bord a également permis aux jeunes scientifiques de présenter leurs travaux. Des présentations couvrant un large éventail de sujets tels que les éléments essentiels sur les ressources halieutiques importantes, les activités de suivi, la taxonomie des poissons et les différents types de processus et d'outils d'analyse des données ont été faites, particulièrement stimulantes pour l'équipage et les jeunes scientifiques. 

«Le partage des connaissances est un élément inestimable des expéditions avec le N/R Dr. Fridtjof Nansen, et j'ai beaucoup appris de mes expériences à bord, à la fois en ce qui concerne mes études sur les larves de poissons, mais aussi grâce aux autres participants et à l'équipage du navire sur les activités liées à la campagne et à la recherche sur les ressources démersales et les écosystèmes», a déclaré Omaima Mouiret, l'un des participants doctorant à l'Université Hassan II Casablanca et à l'INRH Casablanca, au Maroc.

Les données et les informations recueillies au cours de la campagne serviront de base aux évaluations des pêcheries régionales et aux décisions prises en matière de gestion, ce qui contribuera grandement aux efforts du Comité des pêches pour l'Atlantique Centre-Est (COPACE).

À propos du Programme 

Le N/R Dr. Fridtjof Nansen est au centre du Programme EAF-Nansen, un partenariat de longue date entre la FAO et la Norvège, exécuté en étroite collaboration avec l'Institut norvégien de recherche marine (IMR). Le Programme, en collaboration avec 32 pays d'Afrique et du golfe du Bengale, améliore les politiques de pêche et les pratiques de gestion conformément à l'approche écosystémique des pêches et développe la capacité des institutions de pêche à assurer une gestion durable des pêches. 

Le Programme s'aligne sur les objectifs de la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable, ainsi que sur la vision de la FAO concernant la transformation bleue des systèmes alimentaires aquatiques pour une meilleure production, une meilleure nutrition, un meilleur environnement et une meilleure vie pour tous.