LA SITUATIONMONDIALE DE
L’ALIMENTATION ET
DE L’AGRICULTURE
2021

RENDRE LES SYSTÈMES AGROALIMENTAIRES
PLUS RÉSILIENTS FACE AUX CHOCS
ET AUX SITUATIONS DE STRESS

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La pandémie de maladie à coronavirus 2019 (covid-19) a bouleversé nos vies et nous n’en sommes toujours pas sortis. La fermeture des frontières et les confinements qui ont été imposés pour endiguer la progression de la pandémie ont stoppé net les voyages internationaux, entraîné la fermeture d’un nombre considérable d’entreprises et contraint au chômage des millions de personnes. Les restrictions appliquées aux déplacements des personnes et des marchandises, en particulier au début de la pandémie, ont empêché les intrants de parvenir aux agriculteurs et les produits agricoles de parvenir aux marchés. La récolte et les transports étant suspendus, d’énormes quantités de fruits et de légumes frais ont été abandonnées dans les champs.

Les restrictions ont porté un coup non seulement au commerce, aux chaînes d’approvisionnement et aux marchés, dans le secteur agroalimentaire, mais aussi à la vie des gens, aux moyens d’existence et à la nutrition. Après des perturbations et des hésitations initiales, beaucoup de chaînes d’approvisionnement ont fait preuve d’un degré de résilience remarquable, absorbant le choc causé par la pandémie et s’y adaptant; toutefois, les difficultés rencontrées par des millions de personnes pour accéder à une alimentation adéquate se sont imposées comme un problème persistant de dimension majeure. Nombre d’habitants des zones rurales n’ont pas pu se rendre sur leur lieu de travail pour les travaux des champs saisonniers, qui constituent une source de revenus importante dans les communautés pauvres. Bloqués par le confinement, les ménages à bas revenus, dans les zones urbaines, ont vu leurs revenus chuter brutalement, de même que leurs dépenses alimentaires.

Déjà avant la pandémie, le monde n’était pas en voie d’atteindre l’engagement commun qui a été pris – éliminer la faim et la malnutrition sous toutes ses formes d’ici à 2030 – et avec elle cet objectif s’est éloigné davantage encore. L’édition 2021 de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde donne comme estimation 720 à 811 millions de personnes touchées par la faim en 2020, soit jusqu’à 161 millions de personnes de plus qu’en 2019, une augmentation qui est largement due à la crise de la covid-19. Ce sont malheureusement les femmes et les enfants qui, souvent, ont le plus souffert. D’après le Rapport sur les objectifs de développement durable 2020, les perturbations dans les services de santé et dans l’accès à une alimentation adéquate ont alourdi les bilans de mortalité infantile, concernant les enfants de moins de 5 ans, et de mortalité maternelle. D’après une note de synthèse de l’Organisation des Nations Unies (ONU) sur l’impact de la covid-19 sur la sécurité alimentaire et la nutrition (Policy Brief: The Impact of COVID-19 on Food Security and Nutrition), 370 millions d’enfants n’ont pas pu bénéficier de repas scolaires en raison de la fermeture des écoles. Il ne fait pas de doute que la pandémie aura des répercussions sur la sécurité alimentaire et la nutrition pendant encore de nombreuses années.

Les chaînes de production et d’approvisionnement agroalimentaires ont toujours été vulnérables face aux chocs – qu’il s’agisse de sécheresses ou d’inondations ou encore de conflits armés ou de hausses des prix des denrées alimentaires – et elles sont soumises à des pressions croissantes sous l’effet de situations de stress de longue durée dues notamment à la crise climatique et à la dégradation de l’environnement. Cependant, la crise causée par la covid-19 est exceptionnelle en ce qu’elle montre qu’un choc de dimension mondiale peut survenir de façon soudaine, se répandre rapidement et compromettre la sécurité alimentaire, la nutrition et les moyens d’existence de milliards de personnes, à un degré sans précédent et sur une longue période.

La pandémie de covid-19 a mis largement en évidence les fragilités des systèmes agroalimentaires nationaux. Si nous devons y porter remède, c’est bien entendu parce qu’elles causent une augmentation de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition. Mais les systèmes agroalimentaires sont d’une dimension bien trop grande pour que nous puissions croire que leurs fragilités, si on ne s’en occupe pas, puissent simplement nous empêcher d’atteindre l’objectif Faim zéro d’ici à 2030, aussi crucial soit-il. Les répercussions sont plus vastes. Les systèmes agroalimentaires produisent 11 milliards de tonnes d’aliments par an et emploient, directement et indirectement, 4 milliards de personnes. Le secteur agroalimentaire, y compris les forêts et la pêche, est par ailleurs responsable d’un tiers des émissions anthropogéniques de gaz à effet de serre causes du changement climatique, et il occupe 37 pour cent de la superficie des terres émergées. Les systèmes agroalimentaires ont donc un rôle essentiel à jouer dans la réalisation d’autres objectifs de développement durable (ODD), ceux notamment qui ont trait à la pauvreté, à l’efficience d’utilisation des ressources et de l’énergie, à des économies moins polluantes et à des écosystèmes terrestres et aquatiques en bonne santé.

Un consensus international s’est progressivement formé autour de l’idée que la transformation des systèmes agroalimentaires – pour une efficience, une résilience, une inclusivité et une durabilité accrues – était une condition essentielle de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. L’impulsion qui a été donnée en faveur du changement a abouti, en septembre 2021, au premier Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui a débouché sur des solutions et des stratégies novatrices visant à transformer les systèmes agroalimentaires et à tirer parti de ces changements pour faire progresser l’ensemble des ODD. Le Sommet a appelé à l’action sur cinq objectifs, dont l’un est de renforcer la résilience face aux vulnérabilités, aux chocs et aux situations de stress, afin d’assurer le fonctionnement ininterrompu de systèmes agroalimentaires sains et durables.

Le thème de l’édition de cette année fait écho à l’appel lancé par le Sommet sur les systèmes alimentaires pour que des actions concrètes soient proposées concernant les mesures qui peuvent être prises partout dans le monde afin d’aider à transformer les systèmes agroalimentaires. Plus précisément, le présent rapport fournit des données et donne des indications sur les actions à mener pour permettre aux acteurs des systèmes agroalimentaires de gérer leur vulnérabilité face aux chocs et aux situations de stress, et pour renforcer la capacité des systèmes agroalimentaires de procurer des moyens d’existence et d’assurer à tous, dans des conditions durables, de façon permanente et en quantités suffisantes, l’accès à des aliments sûrs et nutritifs même en cas de perturbations.

À cette fin, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a mis au point une série d’indicateurs de la résilience destinés à mesurer la solidité de la production primaire, l’étendue des disponibilités alimentaires et le degré d’accès physique et économique des personnes à une alimentation adéquate, dans tous les pays du monde. Ces indicateurs peuvent aider à évaluer la capacité des systèmes agroalimentaires d’absorber les effets des chocs, quels qu’ils soient, un aspect essentiel de la résilience. L’analyse montre que les secteurs de production primaire des pays sont plus résilients lorsqu’ils offrent une gamme diversifiée de produits alimentaires et non alimentaires et lorsque ces produits sont vendus sur tout un ensemble de marchés, intérieurs et internationaux, une configuration que l’on rencontre surtout dans les pays à revenu élevé et dans ceux qui disposent d’une grande base agroalimentaire. Toutefois, en ce qui concerne les disponibilités alimentaires, l’analyse de multiples voies d’approvisionnement dans les secteurs de la culture, de la pêche et de l’élevage, montre que les pays à faible revenu disposent d’une diversité qui est comparable à celle de pays plus grands et à revenu plus élevé.

Un autre aspect important qui est mis en avant dans le présent rapport est que les pays à faible revenu ont beaucoup plus de mal à assurer l’accès physique à l’alimentation par les réseaux de transport, éléments essentiels du maintien en activité de la chaîne d’approvisionnement. L’analyse de données portant sur 90 pays montre qu’en cas de perturbation touchant les principaux itinéraires de transport, beaucoup de pays à faible revenu, en particulier, auraient peu de moyens de décentraliser la distribution ou d’utiliser des itinéraires de substitution pour les livraisons. Pour près de la moitié des pays analysés, la fermeture de liaisons d’importance critique entraînerait une augmentation de 20 pour cent ou plus du temps de transport local, avec des répercussions sur les coûts et sur les prix de vente aux consommateurs.

Prenant comme approche les systèmes agroalimentaires, le rapport note aussi que les risques associés à l’accès économique à l’alimentation sont encore plus préoccupants. Nous savons déjà qu’au niveau mondial, 3 milliards de personnes environ ne peuvent se permettre une alimentation saine qui les préserve de la malnutrition. Étant donné que les ménages qui ont de faibles revenus consacrent la plus grande partie de leur revenu à l’alimentation, toute perte importante de pouvoir d’achat – qu’elle soit due à une hausse des prix des denrées alimentaires, à de mauvaises récoltes ou à des pertes de revenus – représente une menace pour la sécurité alimentaire et la nutrition. De fait, le rapport constate que 1 milliard de personnes de plus seraient exposées au risque de ne plus pouvoir se permettre une alimentation saine si un choc venait à réduire leurs revenus d’un tiers. Les effets du choc se feraient surtout sentir dans les pays à revenu intermédiaire, mais les auteurs du rapport notent aussi qu’en cas de choc sur les revenus, proportionnellement, un nombre beaucoup plus grand de personnes dans les pays à faible revenu ne pourraient pas se permettre une alimentation suffisamment énergétique. Ces risques sont inacceptables dans un monde qui produit suffisamment pour alimenter toute sa population.

Des chaînes d’approvisionnement agroalimentaires diversifiées, redondantes et bien connectées sont nécessaires pour renforcer la résilience car elles comportent de multiples voies qu’il est possible d’emprunter pour la production, l’approvisionnement et la distribution. Toutefois, certains acteurs de la chaîne sont plus vulnérables que d’autres. La vulnérabilité des petites et moyennes entreprises agroalimentaires (PMEA) est un aspect critique, tout comme le fait que la capacité de résilience des ménages ruraux – en particulier des petits producteurs agricoles – est de plus en plus mise à l’épreuve par des événements climatiques et par l’appauvrissement des ressources naturelles.

Compte tenu des données présentées dans le rapport, la FAO a de solides arguments sur lesquels elle peut s’appuyer pour recommander que les gouvernements fassent de la résilience des systèmes agroalimentaires un élément stratégique des actions menées aux niveaux national et mondial pour relever les défis présents et à venir. L’un des principes de base est la diversité – diversité des sources d’intrants, de la gamme des produits, des débouchés et des chaînes d’approvisionnement – car celle-ci crée de multiples voies pour absorber les chocs. La connectivité multiplie les avantages: des réseaux agroalimentaires bien connectés sont en mesure de surmonter plus vite les perturbations, ils donnent la possibilité de se tourner vers d’autres sources d’approvisionnement ou d’autres voies pour le transport, la vente, les intrants et la maind’œuvre.

Il faut que les gouvernements favorisent une meilleure coordination et une meilleure organisation des PMEA au sein de la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire, par exemple en encourageant la formation de consortiums, pour que ces entreprises puissent fonctionner à plus grande échelle, et avoir plus de visibilité et d’influence. De même, les petits producteurs de denrées alimentaires peuvent rester compétitifs et résilients en intégrant les chaînes d’approvisionnement par l’intermédiaire d’associations de producteurs et de coopératives, et en adoptant des pratiques qui permettent de conserver les ressources. Les programmes de protection sociale peuvent être nécessaires pour améliorer la résilience des ménages ruraux en cas de choc. Les politiques doivent aussi, au-delà des systèmes agroalimentaires, s’intéresser à d’autres questions et notamment à la nécessité d’améliorer les services de santé et les systèmes d’enseignement ou d’accroître l’égalité des genres et la participation des femmes, et doivent reconnaître le rôle que joue le secteur agroalimentaire en tant que gardien de l’environnement naturel.

La FAO est résolue à tirer parti des occasions offertes par des manifestations telles que le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires pour passer de l’engagement à l’action, afin de transformer les systèmes agroalimentaires de sorte qu’ils deviennent plus efficients, plus inclusifs, plus résilients et plus durables, pour une production, une nutrition et un environnement meilleurs et une vie meilleure pour tous, sans que nul ne soit laissé pour compte. Le présent rapport fournit des données et des indications qui doivent permettre de prendre des mesures concrètes pour avancer dans cette direction.


Qu Dongyu
Directeur général de la FAO

TABLEAUX

1 Indicateurs de la résilience et de la vulnérabilité des réseaux de transport alimentaire, dans divers pays

2 Indicateurs de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine

3 Incidences de la covid-19 sur la chaîne d’approvisionnement alimentaire de trois pays et mesures d’adaptation prises

4 Facteurs de la résilience des ménages ruraux et conséquences qui en découlent pour les politiques à mener

5 Points d’entrée pour la gestion du risque et de l’incertitude dans les systèmes agroalimentaires

A3.1 Indice de souplesse de la production primaire (ISPP) en valeur protéique, 2016-2018

A3.2 Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), contribution en kilocalories et en tonnes de fruits et légumes, 2016-2018

A3.3 Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), contribution en valeur protéique et en valeur lipidique, 2016-2018

A3.4 Indicateurs de résilience et de vulnérabilité des réseaux de transport de produits alimentaires

A3.5 Accessibilité économique d’une alimentation suffisamment énergétique et saine en 2019

A4.1 Liste des pays du modèle FAO-RIMA

A4.2 Liste des pays de l’enquête en grappes à indicateurs multiples (EGIM)

FIGURES

1 La résilience des systèmes agroalimentaires et les six dimensions de la sécurité alimentaire

2 Analyse de la résilience des systèmes agroalimentaires – un cadre conceptuel

3 ISPP, en valeur protéique, 2016-2018

4 ISAA, en kilocalories, 2016-2018

5 Résilience fondée sur la proximité en tant que fonction du temps moyen de transport des denrées alimentaires, dans divers pays

6 Positionnement de divers pays d’après le degré d’accessibilité économique d’une alimentation saine et indice ISAA pour les fruits et les légumes (en tonnes), 2016-2019

7 Représentation schématique d’une chaîne d’approvisionnement alimentaire et des liens avec la chaîne d’approvisionnement en intrants et la chaîne d’approvisionnement en services

8 Représentation simplifiée de trois types de chaînes d’approvisionnement alimentaire du point de vue de leur vulnérabilité en cas de choc ou de situation de stress et de leur capacité de résilience

9 Volets de résilience du modèle RIMA, par profil de pays

10 Composantes des systèmes alimentaires et facteurs contextuels

A1.1 Production agricole et vente sur le marché intérieur et les marchés d’exportation, en valeur agricole: les voies possibles

A1.2 Approvisionnement alimentaire à partir des stocks, de la production intérieure ou des importations, en kilocalories: les voies possibles

A1.3 Approvisionnement en intrants pour la production d’aliments transformés et leur vente sur le marché intérieur et à l’exportation aux fins de la création de valeur: les voies possibles

A2.1 Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), en valeur protéique, 2016-2018

A2.2 Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), en valeur lipidique, 2016-2018

A2.3 Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), en tonnes de fruits et légumes, 2016-2018

ENCADRÉS

1 Systèmes agroalimentaires: définition et relation avec les systèmes alimentaires

2 La stratégie d’interventions anticipées de la FAO

3 L’ISPP en bref

4 L’ISPP en valeur agricole, produits non alimentaires inclus

5 L’ISAA en bref

6 Comparaison de l’ISAA à l’ISPP et mise en lumière des segments intermédiaires

7 Méthode utilisée pour l’étude de la résilience des réseaux nationaux de transport de produits alimentaires

8 Simulation de l’incidence d’inondations sur les réseaux de transport de produits alimentaires au Nigéria et au Pakistan

9 Contribution des forêts aux moyens d’existence des petits producteurs

10 Calcul de la proportion de population risquant de ne pas pouvoir se permettre une alimentation saine

11 Beaucoup de personnes ne peuvent pas se permettre – ou sont exposées au risque de ne pas pouvoir se permettre – une alimentation suffisante en énergie

12 Incidences de la pandémie de la covid-19 sur les petites et moyennes entreprises agroalimentaires

13 Le modèle RIMA en bref

14 La résilience climatique des éleveurs pastoraux et agropastoraux en Afrique subsaharienne

15 Synergies entre productivité, résilience et durabilité: l’initiative du Partenariat de la montagne concernant les produits

16 Répercussions directes et indirectes des programmes de protection sociale sur la résilience des ménages face aux chocs multiples

17 Utilisation des ISAA et des ISPP

18 Le centre logistique de Kemin, au Kirghizistan

L’élaboration de La Situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture 2021 a commencé par un atelier consacré à la définition du plan du rapport. L’atelier s’est tenu en ligne du 26 au 30 octobre 2020. Y ont participé des spécialistes de la FAO et des experts extérieurs. À la suite de l’atelier, un groupe consultatif au sein duquel étaient représentées toutes les unités techniques compétentes de la FAO a été formé. Le groupe consultatif, ainsi qu’un groupe d’experts extérieurs, a été chargé d’assister l’équipe de recherche et de rédaction. Le rapport a été rédigé à partir de quatre documents de base et d’une analyse empirique originale réalisée par la FAO et des experts extérieurs. Le groupe consultatif s’est réuni à distance le 26 janvier 2021 pour examiner les recherches. En février 2021 il a produit des commentaires sur l’avant-projet de chapitre 1. Les avant-projets des différents chapitres ont été présentés au groupe consultatif et au groupe d’experts extérieurs avant un atelier qui s’est tenu en ligne du 10 au 16 mars 2021 sous la présidence du Directeur adjoint de la Division de l’économie agroalimentaire (FAO). Le rapport a été révisé sur la base des indications données par l’atelier et par le groupe consultatif, qui s’est réuni à la suite de l’atelier, puis il a été présenté à l’équipe de direction de l’axe Développement économique et social de la FAO. La version révisée a été soumise à des fins de commentaires aux autres axes de la FAO et aux bureaux régionaux pour l’Afrique, l’Amérique latine et les Caraïbes, l’Asie et le Pacifique, l’Europe et l’Asie centrale, et le Proche-Orient et l’Afrique du Nord. Les commentaires ont été incorporés dans le projet final, qui a été examiné par le Directeur adjoint de la Division de l’économie agroalimentaire, l’Économiste en chef de la FAO et le Bureau du Directeur général.

La Situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture 2021 a été élaborée par une équipe multidisciplinaire de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), sous la direction de Marco V. Sánchez Cantillo, Directeur adjoint de la Division de l’économie agroalimentaire, et d’Andrea Cattaneo, Économiste principal et coordonnateur de la publication. Máximo Torero Cullen, Économiste en chef de la FAO, et l’équipe de direction de l’axe Développement économique et social, ont donné des orientations générales.

ÉQUIPE CHARGÉE DES RECHERCHES ET DE LA RÉDACTION
Theresa McMenomy, Fergus Mulligan (rédacteur consultant), Ahmad Sadiddin, Jakob Skøt, Graeme Thomas (rédacteur consultant) et Sara Vaz.

DOCUMENTS DE BASE ET ANALYSE DES DONNÉES
Imran Ali (Université du Queensland central, Melbourne), Mark Brussel (Université de Twente), Mark Constas (Université Cornell), Ellestina Jumbe (FAO), Rolf de By (Université de Twente), Marco d’Errico (FAO), Serkan Girgin (Université de Twente), Vu Minh Hien (FAO), John Hoddinott (Université Cornell), Hong Anh Luu (FAO), Andy Nelson (Université de Twente), Robert Ohuru (Université de Twente), Rebecca Pietrelli (FAO), Jeanne Pinay (FAO), Thomas Reardon (Université de l’État du Michigan), Alessandro Tavoni (Université de Bologne), Tom Thomas (Université de Twente), Valentijn Venus (Université de Twente) et David Zilberman (Université de Californie, Berkeley).

CONTRIBUTIONS SUPPLÉMENTAIRES DE LA FAO
Abram Bicksler, Adriana Ignaciuk, Giorgo Grussu, Yuka Makino, Dario Lucantoni, Anne Mottet, Beate Scherf et Antonio Scognamillo.

GROUPE CONSULTATIF DE LA FAO
Fenton Beed, Dubravka Bojic, Ben Davis, Marco d’Errico, Ana Paula de la O Campos, Kim Friedman, Stepanka Gallatova, Giorgo Grussu, Panagiotis Karfakis, Michelle Kendrick, Preetmoninder Lidder, Yuka Makino, Roman Malec, Erdgin Mane, Zitouni Oulddada, Rebecca Pietrelli, Pilar Santacoloma, Guido Santini, Nick Sitko, Beate Scherf, Josef Schmidhuber, Kostas Stamoulis, Salar Tayyib, Jim Tefft, José Valls Bedeau et Sylvie Wabbes Candotti.

GROUPE D’EXPERTS EXTÉRIEURS
Imran Ali (Université du Queensland central, Melbourne), Mark Constas (Université Cornell, Ika Darnhofer (Université des ressources naturelles et des sciences de la vie - BOKU - Vienne), Rolf de By (Université de Twente), Paolo D’Odorico (Université de Californie, Berkeley), John Hoddinott (Université Cornell), Helena Kahiluoto (Université LUT), Matti Kummu (Université Aalto), Andy Nelson (Université de Twente), Mohan Rao (Université du Massachusetts, Amherst), Thomas Reardon (Université de l’État du Michigan), Donato Romano (Université de Florence), David Seekell (Université d’Umeå), Jamie Stone (Biotechnology and Biological Sciences Research Council), Alessandro Tavoni (Université de Bologne), Paul Winters (Université Notre-Dame) et David Zilberman (Université de Californie, Berkeley).

ANNEXES
Les annexes ont été élaborées par Ahmad Sadiddin et Sara Vaz.

APPUI ADMINISTRATIF
Liliana Maldonado a assuré l’appui administratif.

La traduction a été réalisée par la Sous-Division des langues (CSGL) de la Division des services aux organes directeurs (CSG) de la FAO.

La Sous-Division des publications(OCCP) du Bureau de la communication (OCC) de la FAO a apporté un appui rédactionnel et s’est chargée de la conception et de la mise en page du document, ainsi que de la coordination de la production dans les six langues officielles.

ACI
agriculture climato-intelligente

covid-19
maladie à coronavirus 2019

EAH
eau, assainissement et hygiène

EGIM
enquêtes en grappes à indicateurs multiples

FAO
Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture

GES
gaz à effet de serre

HLPE
Groupe d’experts de haut niveau

ISAA
indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire

ISPP
indice de souplesse de la production primaire

ISSI
indice de souplesse des segments intermédiaires

ODD
objectifs de développement durable

OMS
Organisation mondiale de la Santé

ONG
organisation non gouvernementale

ONU
Organisation des Nations Unies

PDSL
pays en développement sans littoral

PEID
petits États insulaires en développement

PMEA
petites et moyennes entreprises agroalimentaires

R-D
recherche-développement

RIMA
mesure et analyse de l’indice de résilience

TAPE
outil d’évaluation de la performance de l’agroécologie

TIC
technologies de l’information et de la communication

Agriculture climato-intelligente. Ou «agriculture intelligente face au climat». Approche qui permet de définir les mesures à prendre pour transformer et réorienter les systèmes agricoles dans le but de soutenir efficacement le développement et d’assurer la sécurité alimentaire face au changement climatique, par les moyens suivants: augmentation, dans des conditions durables, de la productivité et des revenus agricoles; adaptation et renforcement de la résilience face au changement climatique; et réduction des émissions de gaz à effet de serre6.

Agroécologie. Approche intégrée qui met simultanément en œuvre des concepts et des principes écologiques et sociaux en vue d’optimiser les interactions entre végétaux, animaux, humains et environnement tout en prenant en compte les aspects sociaux, afin d’aboutir à des systèmes agroalimentaires justes et durables4.

Aléa. Processus, phénomène ou activité humaine pouvant faire des morts et causer des blessures ou avoir d’autres effets sur la santé, et entraîner des dégâts matériels, des perturbations socioéconomiques ou une dégradation de l’environnement9.

Biodiversité pour l’alimentation et l’agriculture. Variété et variabilité des animaux, des végétaux et des micro-organismes aux niveaux de la génétique, des espèces et des écosystèmes, qui soutiennent les structures, les fonctions et les processus des écosystèmes à l’intérieur et autour des systèmes de production et qui fournissent des produits agricoles alimentaires et non alimentaires5.

Capacité de résilience. Les systèmes, les institutions et les personnes sont considérés comme étant résilients lorsqu’ils ont à disposition les différentes capacités ci-après, dont nombre se recoupent. Celles-ci sont essentielles pour gérer les risques multiples et faire face aux événements préjudiciables, les supporter et s’en relever8.

  • Capacité de prévention. Capacité de prendre des mesures pour réduire l’exposition et la vulnérabilité face aux chocs et aux situations de stress, à savoir réduire les risques existants et éviter d’en créer de nouveaux9.

  • Capacité d’anticipation. Capacité de prendre des mesures à l’avance en prévision d’une menace (alerte rapide, intervention rapide ou financement basé sur les prévisions) afin de réduire les incidences qu’elle pourrait avoir19.

  • Capacité d’absorption. Capacité de supporter les chocs et les situations de stress et de rebondir en utilisant des mesures de riposte prédéfinies pour préserver et rétablir les structures et les fonctions de base essentielles20 à 22.

  • Capacité d’adaptation. Capacité d’apporter progressivement des ajustements et des changements à la structure et au fonctionnement d’un système, pour préserver ses fonctions de base sans bouleverser son identité fonctionnelle et structurelle21 à 24.

  • Capacité de transformation. Capacité de créer des systèmes fondamentalement nouveaux lorsque les structures écologiques, économiques ou sociales font que les systèmes actuels ne peuvent être maintenus23, 25. La capacité de transformation est nécessaire lorsque le changement voulu va au-delà des capacités d’anticipation, de prévention, d’absorption et d’adaptation des systèmes et lorsqu’on se rend compte que les structures écologiques, économiques ou sociales piègent les gens dans un cercle vicieux de pauvreté, de catastrophes et de conflits, faisant que les systèmes actuels ne peuvent être conservés26.

Chaîne d’approvisionnement alimentaire. Consiste en une série d’activités connectées qui englobent la production primaire d’aliments issus de la culture, de l’élevage, des forêts, de la pêche et de l’aquaculture; les activités de stockage, de transport et de transformation qui ajoutent de la valeur; et la vente en gros et au détail. Cette définition se différencie de la définition de l’expression «chaîne de valeur alimentaire» telle que proposée par la FAO (2015) en ce qu’elle exclut la consommation alimentaire et l’élimination des déchets13.

  • Chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles. Circuits courts sur le plan spatial qui mettent en jeu un faible nombre de petits producteurs, d’intermédiaires et de micro et petites entreprises à forte intensité de main-d’œuvre qui effectuent les transactions au comptant. Les aliments sont produits localement et les opérations de traitement, de stockage, de logistique et autres activités postérieures à la production sont rudimentaires.

  • Chaînes d’approvisionnement alimentaire de transition. Circuits longs sur le plan spatial, qui mettent en jeu un grand nombre de petits producteurs et d’intermédiaires et d’entreprises de taille petite et moyenne, notamment pour la transformation et la vente en gros et au détail, caractérisés par leur fragmentation; la diversification des produits et la valeur ajoutée sont relativement élevées; il y a des contrats, même si les transactions au comptant prédominent.

  • Chaînes d’approvisionnement alimentaire modernes. Desservent de grandes populations urbaines; les circuits peuvent être courts, longs ou très longs (y compris transnationaux) sur le plan spatial; les supermarchés et les grandes entreprises de transformation sont prépondérants; il y a une forte intensité de capital là où l’entreposage frigorifique, l’emballage et les normes de qualité privées sont très répandus; les contrats prédominent mais dans le cas des denrées périssables les transactions se font au comptant.

Choc covariant. Événement qui touche directement des groupes de ménages, des communautés, des régions, voire des pays entiers7.

Choc idiosyncratique. Événement qui touche des individus ou des ménages7.

Chocs. Déviations, sur le court terme, par rapport à des tendances longues et qui ont un effet préjudiciable important sur un système, sur le bien-être des personnes, sur les biens, sur les moyens d’existence, sur la sécurité, et sur la capacité de résister à des chocs futurs8, 29. Les catastrophes, les phénomènes climatiques extrêmes, les événements biologiques et technologiques, les maladies des animaux et des végétaux et les infestations d’organismes nuisibles, les crises socioéconomiques et les conflits sont des chocs qui ont des répercussions sur les systèmes alimentaires. Les chocs peuvent être covariants ou idiosyncratiques.

Consommateur net de produits alimentaires. Individu dont les ventes totales de produits alimentaires sur le marché sont inférieures aux achats de produits alimentaires sur le marché14.

Développement durable. Gestion des ressources économiques, sociales et environnementales et du changement technologique et institutionnel telle que les besoins humains des générations présentes et futures soient satisfaits et continuent de l’être35.

Événement. Manifestation de menaces et d’aléas ou de perturbations, ou de plusieurs à la fois, en un lieu donné et au cours d’une période déterminée8, 9.

Exposition. Situation des personnes, des infrastructures, des logements, des moyens de production et d’autres actifs humains tangibles situés dans des zones soumises à des aléas8.

Incertitude. Situation dans laquelle aucune probabilité ne peut être affectée aux résultantes de chocs et de situations de stress soit parce que les informations et les données voulues font défaut (à savoir que les résultantes ne peuvent pas être déduites des informations passées ou mesurées d’après des modèles), soit parce que les résultantes sont totalement imprévisibles du fait qu’elles découlent d’un choc lui-même imprévisible.

Innovation agricole. Processus par lequel des personnes ou des organisations utilisent pour la première fois, dans un contexte spécifique, des produits, des procédés ou des modes d’organisation existants ou nouveaux en vue d’obtenir une efficacité, une compétitivité, une résilience face aux chocs ou une durabilité environnementale accrues, et contribuent par là à la sécurité alimentaire et à la nutrition, au développement économique ou à la gestion durable des ressources naturelles2.

Ménage. Groupe de personnes (unies ou non par des liens de parenté), qui vivent sous le même toit avec un même chef de ménage, et qui partagent la nourriture, les dépenses de nourriture, les revenus et autres actifs du ménage.

Ménage agricole. Ménage qui tire des revenus, aussi minimes soient-ils, de l’agriculture, ou qui fournit du travail en vue d’une production agricole1.

Moyen d’existence rural. Capacités, biens et activités sur lesquels comptent les habitants des zones rurales pour gagner leur vie28.

Petites et moyennes entreprises agroalimentaires (PMEA). Entreprises agroalimentaires indépendantes qui interviennent après récolte (transformation, stockage, transport, distribution, etc.) et dont les revenus, les actifs et le nombre d’employés se situent en dessous d’un certain seuil. Ces entreprises sont considérées comme étant plus vulnérables et comme nécessitant une attention particulière sur le plan des politiques et sur le plan de la recherche30, 31.

Petits producteurs. Ménages à la tête d’une petite exploitation agricole, dans les secteurs de la culture, de l’élevage, de la pêche, de l’aquaculture, du pastoralisme ou des forêts, qui est soumise à des contraintes plus fortes en raison d’un accès limité aux marchés et aux ressources telles que la terre et l’eau, l’information, la technologie, le capital, les actifs et les institutions32.

Producteur net de produits alimentaires. Individu dont les ventes totales de produits alimentaires sur le marché sont supérieures aux achats totaux de produits alimentaires sur le marché14.

Redondance. Duplication d’éléments ou de fonctions critiques d’un système ayant pour effet de rendre celui-ci plus fiable. Renvoie souvent aux systèmes et processus d’appoint qui font que l’ensemble du système continue de fonctionner en cas de défaillance d’un élément. Les capacités de stockage excédentaires dans les entreprises, les itinéraires de substitution entre deux étapes ou les infrastructures d’appoint dans la chaîne d’approvisionnement, et les stocks alimentaires stratégiques au niveau national, sont des exemples de redondance dans le système agroalimentaire. Introduire des redondances dans un système a généralement un coût, qu’il faut mettre en balance avec les améliorations attendues sur le plan de la performance du système15, 16, 17.

Résilience. Capacité des individus, des ménages, des communautés, des villes, des institutions, des systèmes et des sociétés exposés à une grande diversité de risques de prévenir, d’anticiper, d’absorber, de s’adapter et de se transformer, de façon positive, efficiente et efficace, tout en conservant un niveau acceptable de fonctionnement et sans compromettre les perspectives à long terme de développement durable, la paix et la sécurité, les droits humains et le bien-être de tous18.

Résilience des systèmes agroalimentaires. Capacité des systèmes agroalimentaires, même confrontés à une perturbation, de continuer de façon durable à fournir des quantités suffisantes d’aliments sûrs et nutritifs accessibles à tous, et de procurer des moyens d’existence aux acteurs des systèmes agroalimentairesa.

Risque. Éventualité que des chocs ou des situations de stress aient une incidence préjudiciable sur des systèmes, des communautés, des ménages ou des individus. Le risque est fonction des aléas, de l’exposition, de la vulnérabilité et des capacités, et correspond au coût probable, social, économique et environnemental, direct et indirect, des chocs et des situations de stress9, 27.

Sécurité alimentaire. Situation dans laquelle chacun a, à tout moment, un accès matériel, social et économique à une nourriture suffisante, sûre et nutritive de nature à satisfaire ses besoins et préférences alimentaires et peut ainsi mener une vie saine et active. On peut distinguer quatre dimensions traditionnelles (disponibilités alimentaires, accès économique et accès physique aux aliments, et utilisation des aliments), et deux dimensions supplémentaires, l’agencéité et la durabilité, qui sont proposées par le Groupe d’experts de haut niveau (HLPE) du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) mais qui n’ont pas fait l’objet d’un accord officiel de la part de la FAO ni d’autres organismes, et dont la définition, telle qu’elle est libellée, ne fait pas non plus l’objet d’un accord11, 12.

Sécurité sanitaire des aliments. Assurance que les aliments n’auront pas d’effets nocifs sur la santé du consommateur quand ils sont préparés et/ou consommés conformément à l’usage auquel ils sont destinés10.

Situation de stress. Tendance ou pression qui s’inscrit dans le long terme et qui a pour effet d’entamer progressivement la stabilité d’un système et d’accroître la vulnérabilité au sein de celui-ci. Les situations de stress peuvent résulter de la dégradation des ressources naturelles, de l’urbanisation, de la pression démographique, de la variabilité du climat, d’une instabilité politique ou d’un déclin économique33.

Systèmes agroalimentaires. Ensemble complet des acteurs – et de leurs activités interdépendantes d’ajout de valeur – participant à la production primaire de produits agricoles alimentaires et non alimentaires, ainsi qu’au stockage, au groupage, à la manutention après récolte, au transport, à la transformation, à la distribution, à la vente, à l’élimination des déchets et à la consommation, en ce qui concerne tous les produits alimentaires, y compris ceux d’origine non agricole.

  • Systèmes alimentaires. Les systèmes alimentaires comprennent tous les produits alimentaires issus de la production végétale et animale, des forêts, de la pêche et de l’aquaculture, ainsi que d’autres sources telles que la biologie de synthèse, et qui sont destinés à la consommation humaine.

Systèmes agroalimentaires durables. Systèmes qui procurent à tous sécurité alimentaire et nutrition tout en assurant des moyens d’existence aux acteurs des systèmes agroalimentaires, sans compromettre les bases sociales, économiques et environnementales de la sécurité alimentaire et de la nutrition pour les générations futures. Les systèmes doivent être durables sur les plans économique (c’est-à-dire équitable et rentable), social (c’est-à-dire ayant des avantages pour l’ensemble de la société) et environnemental (c’est-à-dire ayant un impact neutre ou positif sur l’environnement naturel)34.

Vulnérabilité. Situation causée par des facteurs ou des processus physiques, sociaux, économiques et environnementaux qui ont pour effet de rendre les personnes, les communautés, les biens ou les systèmes plus sensibles aux incidences des chocs et des situations de stress9.

1 Pour préserver leur fonctionnalité et procurer à des millions de personnes la sécurité alimentaire, la nutrition et des moyens d’existence, les systèmes agroalimentaires doivent devenir plus résilients face à des chocs et des situations de stress qui vont croissant et qui ont des origines, biophysiques et socioéconomiques, diverses.

2 Parce que les systèmes agroalimentaires sont complexes – ils comprennent la production primaire, les chaînes d’approvisionnement alimentaire, les réseaux de transport intérieurs, les ménages – et parce qu’ils font intervenir de nombreux acteurs qui sont liés entre eux, un choc dans une composante quelconque peut rapidement s’étendre à tout le système.

3 La fragilité des systèmes agroalimentaires peut avoir des répercussions sur un très grand nombre de personnes: déjà, 3 milliards de personnes ne peuvent se permettre une alimentation saine, et à ce chiffre il faut ajouter 1 milliard de personnes qui se trouveraient dans la même situation si leurs revenus baissaient d’un tiers suite à un choc. Jusqu’à 845 millions de personnes pourraient voir le coût de l’alimentation augmenter si des itinéraires de transport d’importance critique devaient subir une perturbation.

4 Sur les cinq capacités de résilience des systèmes agroalimentaires – prévention, anticipation, absorption, adaptation et transformation –, la capacité d’absorption est vitale pour faire face à des chocs imprévus et elle est complémentaire de la gestion des risques en ce qui concerne les chocs qui peuvent être prévus.

5 La diversité des sources d’approvisionnement alimentaire (production intérieure, importations et stocks existants), la diversité des acteurs de la chaîne d’approvisionnement, des réseaux de transport redondants et solides, et l’accessibilité économique d’une alimentation saine, pour tous les ménages, en particulier les plus pauvres et les plus vulnérables, sont essentiels au renforcement de la capacité d’absorption des systèmes agroalimentaires.

6 Les stratégies de gestion des risques mises en place en prévision de chocs tels que les sécheresses, les inondations et les infestations d’organismes nuisibles, et qui peuvent consister en évaluations multirisques, prévisions disponibles en temps utile, systèmes d’alerte rapide et plans d’intervention précoce, sont essentielles pour aider tous les acteurs des systèmes agroalimentaires à prévenir et anticiper les perturbations importantes des systèmes et pour éviter des souffrances humaines et des interventions de relèvement coûteuses.

7 Le renforcement de la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire suppose que les pouvoirs publics apportent un appui en vue de développer les petites et moyennes entreprises agricoles, les coopératives, les consortiums et les pôles d’activité, ainsi que les programmes de protection sociale.

8 L’éducation, l’emploi hors secteur agricole et les transferts monétaires peuvent considérablement renforcer les capacités de résilience des ménages ruraux ayant de faibles revenus, en particulier des petits producteurs dont les moyens d’existence sont de plus en plus vulnérables face aux chocs climatiques et à l’appauvrissement des ressources naturelles.

9 Assurer à tout moment l’accès économique à une alimentation suffisante et saine est une dimension essentielle de la résilience des systèmes agroalimentaires. Des politiques et des investissements qui visent à réduire la pauvreté, à créer des emplois décents et à élargir l’accès à l’éducation et aux services de base, et des programmes de protection sociale auxquels il puisse être fait appel en cas de besoin, sont des éléments essentiels de la résilience.

10 Instaurer des systèmes agroalimentaires résilients doit être un objectif majeur des politiques, sachant qu’il faut veiller à ce que toutes les composantes des systèmes agroalimentaires fonctionnent convenablement à tout moment. Cela suppose que la résilience soit systématiquement prise en compte dans les politiques agroalimentaires et qu’il y ait davantage de coordination dans tous les secteurs intéressés et entre les différents échelons de l’administration publique, afin d’assurer la cohérence des politiques.

Des systèmes agroalimentaires résilients sont un élément stratégique de l’action mondiale face aux défis présents et à venir

Les systèmes agroalimentaires comprennent la production agricole primaire de produits alimentaires et non alimentaires (produits issus de la culture, de l’élevage, de la pêche, des forêts et de l’aquaculture), la production d’aliments d’origine non agricole (la viande synthétique, par exemple), la chaîne d’approvisionnement alimentaire, depuis le producteur jusqu’au consommateur, et la consommation finale de nourriture. Au niveau mondial, ce sont quelque 11 milliards de tonnes de produits alimentaires qui sont issus chaque année des systèmes agroalimentaires et ces systèmes sont la pierre angulaire de nombreuses économies. Dans un monde idéal, les systèmes agroalimentaires seraient résilients, inclusifs et durables, produiraient en quantité suffisante de la nourriture sûre et nutritive, pour tous, et assureraient des moyens d’existence qui garantiraient l’accès économique à la nourriture. Or à l’heure actuelle ils ne parviennent pas à mettre à l’abri de la faim 10 pour cent environ de la population mondiale.

De plus en plus, les chaînes d’approvisionnement alimentaire et les moyens d’existence des acteurs des systèmes agroalimentaires sont perturbés par des chocs – depuis les sécheresses et les inondations jusqu’aux conflits armés et aux flambées des prix des denrées alimentaires – et par des situations de stress qui s’inscrivent dans la durée, en particulier le changement climatique et la dégradation de l’environnement. Le risque et l’incertitude sont inhérents aux systèmes agroalimentaires; ils touchent la production primaire et également les segments situés au milieu et en aval de la chaîne d’approvisionnement, et tous les acteurs de la chaîne à tous les stades. La vulnérabilité des systèmes agroalimentaires s’est manifestée de manière flagrante en 2020 lorsque les mesures prises pour endiguer la propagation de la nouvelle maladie à coronavirus (la covid-19) ont perturbé les chaînes d’approvisionnement nationales et mondiales et causé un fléchissement économique dans de nombreux pays. Les pertes de pouvoir d’achat ont fortement pesé sur la sécurité alimentaire et la nutrition de milliards d’êtres humains, en particulier dans les pays à faible revenu et parmi les plus pauvres.

Des systèmes agroalimentaires véritablement résilients englobent toutes les dimensions de la sécurité alimentaire

Le présent rapport passe en revue les défis que présente l’instauration de systèmes agroalimentaires plus résilients. Il s’appuie sur un document d’orientation des Nations Unies destiné à aider à l’édification de sociétés résilientes, UN Common Guidance on Helping Build Resilient Societies, et définit la résilience des systèmes agroalimentaires comme étant la capacité des systèmes agroalimentaires, même confrontés à une perturbation, de continuer de façon durable à fournir des quantités suffisantes d’aliments sûrs et nutritifs accessibles à tous, et à procurer des moyens d’existence aux acteurs des systèmes agroalimentaires.

Les systèmes agroalimentaires, qu’ils soient traditionnels ou modernes ou en phase de transition, ont trois composantes principales: i) la production primaire; ii) la distribution, qui relie la production à la consommation par l’intermédiaire de la chaîne d’approvisionnement alimentaire et des réseaux de transport; et iii) la consommation des ménages, y compris la répartition de la nourriture au sein de ceux-ci. Les principaux acteurs sont: les producteurs primaires; les acteurs qui assurent les services d’approvisionnement en intrants, de manutention après récolte, de stockage, de transport et de transformation; les distributeurs, grossistes et détaillants; et les ménages et les individus en tant que consommateurs finals.

Un système agroalimentaire véritablement résilient doit avoir une solide capacité de prévenir, anticiper, absorber, s’adapter et se transformer face aux perturbations quelles qu’elles soient, et doit avoir pour objectif fonctionnel d’assurer la sécurité alimentaire et la nutrition de tous, ainsi que des revenus et des moyens d’existence décents aux acteurs du système. La résilience ainsi envisagée englobe toutes les dimensions de la sécurité alimentaire mais vise en particulier la stabilité d’accès et la durabilité, qui assurent la sécurité alimentaire et la nutrition à court et à long terme. L’agencéité, une autre dimension de la sécurité alimentaire, est profondément liée aux droits humains, notamment au droit à l’alimentation, et met en évidence la nécessité de l’inclusivité dans les systèmes agroalimentaires.

Les chocs ont un impact immédiat, tandis que les situations de stress sapent progressivement la capacité des systèmes de faire face

Par rapport aux autres secteurs économiques, l’agriculture est très exposée, et est vulnérable aux aléas naturels, en particulier aux aléas climatiques. Le changement climatique cause des chocs de courte durée, par exemple des phénomènes météorologiques extrêmes, et des situations de stress qui s’installent lentement, comme l’élévation des températures et l’appauvrissement de la biodiversité. Contrairement aux chocs, qui ont un impact immédiat, les situations de stress sont des processus lents qui sapent progressivement la capacité des systèmes agroalimentaires de s’adapter au changement, les rendant plus vulnérables. Les composantes et les acteurs des systèmes agroalimentaires sont exposés à des chocs et à des situations de stress de différents types et d’intensité diverse et, parce que les composantes sont liées entre elles, une perturbation dans l’une d’elle peut se répandre rapidement dans tout le système. Un même choc ou une même situation de stress peut produire des effets différents sur différentes composantes et différents acteurs du système. Parmi les producteurs, ce sont les moyens d’existence de ceux qui travaillent à petite échelle et ont de faibles revenus qui risquent le plus d’être touchés en cas de choc; parmi les consommateurs, ce sont les plus pauvres qui seront les plus touchés en cas de hausse des prix des produits alimentaires.

Les stratégies de gestion des risques qui visent à réduire l’exposition et la vulnérabilité à un choc spécifique connu, par exemple la préparation aux sécheresses, contribuent à rendre les systèmes agroalimentaires plus résilients. La crise de la covid-19 a cependant montré que certains chocs étaient imprévisibles. On ne sait ni quand ils pourraient survenir, ni quelle pourrait être leur ampleur. Il faut que les systèmes agroalimentaires puissent continuer de fonctionner en présence de chocs non prévisibles. Le renforcement de la résilience est donc plus qu’une question de gestion du risque: des systèmes agroalimentaires résilients constituent un élément stratégique de l’action mondiale face aux défis présents et à venir.

Dans un environnement incertain, la capacité de supporter les chocs et les situations de stress puis de rebondir est essentielle

Le présent rapport s’intéresse en particulier au renforcement de la capacité des systèmes agroalimentaires d’absorber l’impact des chocs et des situations de stress. La capacité d’absorption est l’aptitude à supporter des chocs et des situations de stress et à rebondir, en utilisant des mesures de riposte prédéfinies pour préserver et rétablir les structures et les fonctions de base essentielles. Il est particulièrement important de prendre des mesures en ce qui concerne les chocs qui ne sont pas prévisibles.

Les chocs et les situations de stress peuvent être d’origine et de nature très différentes. L’ampleur de leurs effets dépendront des vulnérabilités et de la capacité de résilience propres à chacune des composantes et à chacun des acteurs des systèmes agroalimentaires, ainsi que du contexte général (dont les dimensions climatiques, environnementales, socio-économiques et politiques) et des secteurs externes, énergie et santé notamment. Les liens complexes et bidirectionnels entre les différentes composantes des systèmes signifient que les perturbations de la production alimentaire finissent par se répercuter sur la sécurité alimentaire des ménages, et que les chocs sur la consommation alimentaire peuvent se répercuter à leur tour, en amont, sur les producteurs; et tout ceci aura des conséquences environnementales.

Dans les pays à faible revenu, les ménages agricoles qui ont peu accès aux assurances et aux crédits agricoles comptent souvent sur la diversification des cultures et sur l’association culture-élevage pour réduire les risques liés à la variabilité du climat et à l’instabilité des marchés. Or, la diversification empêche de se spécialiser, alors que la spécialisation est une stratégie qui permet aux ménages d’accumuler de l’expérience. La question se pose donc du compromis à trouver entre renforcer la résilience par la diversification d’une part, et accroître l’efficience d’autre part. Une autre stratégie de résilience efficace est la redondance, qui permet, par la duplication d’éléments ou de fonctions critiques, de renforcer la capacité des systèmes agroalimentaires d’absorber les chocs. Mais cette même redondance peut être coûteuse pour la société et est particulièrement difficile à accomplir lorsque les moyens sont limités.

COMPRENDRE LES FONCTIONS ET LES VULNÉRABILITÉS DES SYSTÈMES

Le présent rapport contient une analyse de la capacité d’absorption des systèmes agroalimentaires au niveau national, réalisée à l’aide d’une série d’indicateurs liés aux quatre fonctions clés des systèmes, qui sont d’assurer: i) une production primaire robuste; ii) les disponibilités en aliments; iii) l’accessibilité physique des aliments; et iv) leur accessibilité économique. Chaque système national a ses caractéristiques propres et comporte un grand nombre de composantes et d’acteurs, qui fonctionnent à plusieurs niveaux liés entre eux, dont, souvent, le commerce international. Certaines composantes peuvent être plus résilientes que d’autres, et un choc donné peut toucher spécifiquement une composante ou un acteur. Les décideurs doivent bien comprendre comment fonctionnent les systèmes et en connaître les vulnérabilités potentielles. La participation, l’inclusion et la collaboration peuvent aider les acteurs des systèmes à mieux coordonner leur action face aux défis à relever.

La diversité de la production et des partenaires commerciaux peut contribuer à réduire le risque

Pour évaluer la capacité des producteurs primaires d’absorber les chocs, la FAO a mis au point pour le présent rapport un indice de souplesse de la production primaire (ISPP), qui couvre 181 pays et permet de mesurer le degré de diversité de la production (culture et élevage) et la capacité potentielle de produire pour le marché intérieur et pour les marchés d’exportation. Une valeur élevée de l’indice ISPP indique que de multiples voies peuvent être empruntées pour créer de la valeur agricole et trouver des débouchés pour la production alimentaire primaire. Pour plus de 80 pour cent des pays, l’ISPP a pour moteur la diversité du marché intérieur, et les pays qui présentent les valeurs de diversité les plus faibles sont fortement tournés vers le marché intérieur. La plupart sont des pays à faible revenu, au commerce extérieur peu développé, dont la production primaire est vulnérable en cas de choc touchant des produits clés ou ayant pour effet de réduire les revenus des consommateurs. C’est dans les pays à revenu élevé et dans ceux qui possèdent un secteur agricole important qu’on trouve une plus grande diversification. Ces pays jouissent d’un ensemble d’avantages comparatifs en ce qui concerne la production et l’exportation de produits agricoles, bénéficient d’une ouverture au commerce international, et peuvent compter sur une demande intérieure importante pour écouler leurs produits.

Les grands pays agricoles ne sont pas tous à l’abri des vulnérabilités: même les pays qui disposent d’un secteur agricole et d’un marché à l’exportation importants peuvent avoir une faible capacité d’absorber les chocs, s’ils ont un petit nombre de partenaires commerciaux. Si ces partenaires subissent un choc, leur marge de manœuvre est limitée. Il y a aussi le cas où un pays est spécialisé dans un très petit nombre de produits d’exportation, une situation qui accroît la vulnérabilité face à des chocs intérieurs propres à un produit – une infestation par un organisme nuisible, par exemple – ou à des chocs internationaux, comme une baisse soudaine des cours suite à une surproduction.

L’une des fonctions importantes des systèmes agroalimentaires est de fournir une gamme diversifiée d’aliments qui apportent les nutriments essentiels à la santé humaine. Pour évaluer la capacité des systèmes d’absorber les chocs et d’assurer la fourniture des aliments nécessaires à une alimentation nutritive, la FAO a également mis au point pour le présent rapport un indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), calculé pour 153 pays. L’indicateur ISAA rend compte de la multiplicité des voies d’approvisionnement en produits issus de la culture, de la pêche et de l’élevage (production intérieure, importations de produits alimentaires et stocks disponibles). Il ressort de l’étude que les pays diversifient leurs sources de produits alimentaires de différentes façons et que l’efficacité de la diversification ne dépend ni de la taille ni du niveau de revenu du pays. Le niveau de revenu intervient en ce qui concerne la diversification des sources de fruits et de légumes, laquelle est limitée dans les pays à faible revenu à cause des problèmes logistiques que posent le transport et le stockage, joints à la nature périssable de ces denrées.

Les pays dotés d’un secteur agricole important et qui comptent davantage sur la production intérieure peuvent avoir la même capacité d’absorption que des pays qui diversifient davantage leur offre intérieure au moyen des importations. Ceux qui importent en faisant appel à de multiples partenaires commerciaux et qui achètent de multiples produits sont parmi ceux qui atteignent les valeurs d’ISSA les plus élevées, du fait qu’ils sont en mesure d’amortir les chocs sur l’offre sur un grand nombre de partenaires et de produits. À l’inverse, les pays qui dépendent d’importations alimentaires en provenance de quelques grandes sources seulement sont vulnérables en cas de choc touchant leurs partenaires commerciaux. Dans ces situations, il serait prudent de diversifier le panier des importations et les partenaires commerciaux internationaux, voire d’investir dans des stocks intérieurs.

Assurer l’accès physique et économique à l’alimentation est un aspect essentiel de la résilience des systèmes agroalimentaires

Un réseau de transport souple et efficace doté d’un niveau de redondance optimal garantit l’accès physique à l’alimentation au niveau infranational. Pour rendre compte de la vulnérabilité structurelle des réseaux de transport alimentaire dans le monde, la FAO a analysé la résilience de ces réseaux dans 90 pays en examinant comment les réseaux de transport assurent la liaison entre les centres où se situe la demande et les lieux où la nourriture est produite. L’analyse mesure la capacité des systèmes alimentaires de réagir localement en cas de perturbation, la disponibilité d’itinéraires de substitution, et la sensibilité des systèmes à la fermeture de liaisons d’importance critique par suite de chocs ou de situations de stress. Plusieurs très grands pays ont des réseaux de distribution étendus sur une grande longueur; d’autres peuvent réajuster leur réseau de production et de distribution à un niveau plus local si nécessaire.

Les pays à faible revenu sont ceux qui ont le plus de mal à appliquer des mesures de résilience sur l’ensemble du système dans leurs réseaux de transport des denrées alimentaires. Leur capacité d’ajustement à un niveau local est limitée et ils ne disposent pas d’itinéraires de substitution fiables qui pourraient être empruntés en cas de perturbation. Du fait que la résilience fondée sur la proximité dépend de la façon dont la production et la demande sont réparties l’une par rapport à l’autre, certains grands pays à revenu élevé sont eux aussi vulnérables. Pour près de la moitié des pays analysés, la fermeture de liaisons de transport d’importance critique se traduirait par une augmentation de 20 pour cent au moins du temps de trajet, ce qui entraînerait une augmentation du coût des aliments.

L’accès physique à l’alimentation ne suffit pas pour assurer la sécurité alimentaire. Un système agroalimentaire qui fonctionne convenablement doit aussi assurer l’accès économique à l’alimentation. Au niveau mondial, quelque 3 milliards de personnes ne peuvent se permettre une alimentation saine, à savoir une alimentation qui les protège contre la malnutrition sous toutes ses formes. Étant donné que la part du revenu des ménages qui est consacrée à l’alimentation est plus élevée dans les ménages qui ont de faibles revenus, toute perte importante de pouvoir d’achat – causée par des perturbations telles qu’une hausse du prix des produits alimentaires, de mauvaises récoltes ou la perte d’actifs – représente une menace pour la sécurité alimentaire et la nutrition. À partir de données portant sur 143 pays, la FAO a également mis au point pour le présent rapport un autre indicateur d’où il ressort que si un choc entraînait une réduction de leurs revenus d’un tiers, 1 milliard de personnes de plus ne pourraient se permettre financièrement un régime alimentaire sain. Ce sont essentiellement les pays à revenu intermédiaire qui seraient confrontés à ce défi supplémentaire: sur le milliard de personnes qui risqueraient de ne plus pouvoir se permettre une alimentation saine, 95 pour cent vivent dans des pays à revenu intermédiaire des tranches inférieure et supérieure. Dans les pays à faible revenu – où une alimentation saine est déjà hors de portée d’une grande majorité de personnes – le risque est qu’en cas de baisse des revenus d’un tiers, de nombreuses personnes supplémentaires ne puissent même pas se permettre une alimentation suffisamment énergétique, constituée principalement de féculents fournissant l’énergie nécessaire pour une journée de travail.

Lorsque les revenus subissent un choc, un système agroalimentaire véritablement résilient, inclusif et durable doit viser à assurer l’accessibilité économique d’une alimentation saine. Pour ce faire, soit le coût des aliments doit baisser, soit les revenus des populations vulnérables doivent augmenter ou bénéficier d’un soutien, par exemple au moyen de programmes de protection sociale – soit, dans l’idéal, les deux.

DES CHAÎNES D’APPROVISIONNEMENT ALIMENTAIRE DIVERSIFIÉES, REDONDANTES ET BIEN CONNECTÉES FAVORISENT LA RÉSILIENCE

Les pénuries de main-d’œuvre qui se sont produites pendant les périodes de confinement dues à la covid-19 ont mis en évidence la vulnérabilité des petites et moyennes entreprises agroalimentaires

Le bon fonctionnement des chaînes d’approvisionnement alimentaire favorise la résilience des systèmes agroalimentaires nationaux. Une chaîne d’approvisionnement alimentaire est composée d’activités interconnectées exécutées par différents acteurs – agriculteurs, entreprises de transformation, grossistes et détaillants – qui eux-mêmes s’adressent à des chaînes latérales pour se fournir en intrants et en services logistiques. La capacité d’une chaîne d’approvisionnement alimentaire d’absorber les chocs dépend de la résilience de chacun de ses segments. Des chaînes d’approvisionnement alimentaire diversifiées, redondantes et bien connectées contribuent à renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires en offrant de multiples voies qu’il est possible d’emprunter pour la production, l’approvisionnement et la distribution. La résilience est nécessaire non seulement pour préserver et améliorer les moyens d’existence des agriculteurs et la situation des entreprises, mais aussi pour assurer à tous l’accès physique à l’alimentation.

La vulnérabilité et les capacités de résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire dépendent en grande partie de leurs caractéristiques structurelles et des caractéristiques de leurs produits. Les chaînes traditionnelles sont courtes et comptent un petit nombre d’intermédiaires locaux mais la diversification des produits, l’application de normes de qualité et de sécurité sanitaire, et les économies d’échelle leur font défaut. Les chaînes en phase de transition sont plus longues et comptent de nombreuses petites et moyennes entreprises agroalimentaires (PMEA) qui interviennent à mi-parcours au stade de la transformation et au stade de la distribution. Les chaînes modernes, qui approvisionnent de grandes populations urbaines, principalement en produits horticoles et en produits d’origine animale, sont dominées par des multinationales sur les segments intermédiaires et en aval.

Pour développer les capacités de résilience de manière à limiter les chocs et les situations de stress et à offrir des options de redressement, il est essentiel de comprendre comment ces chocs et situations de stress sont susceptibles de toucher une chaîne d’approvisionnement alimentaire donnée. Les grandes chaînes d’approvisionnement modernes se sont avérées résilientes durant les confinements dus à la covid-19 parce qu’elles fonctionnent au niveau mondial et peuvent s’adapter aux perturbations sur les plans géographique et temporel. Les chaînes de transition, qui englobent une multitude de PMEA et sont très dépendantes de la main-d’œuvre, ont été plus vulnérables face aux perturbations qui ont touché la main d’œuvre et les transports. On a aussi constaté que dans certains cas, les chaînes traditionnelles ont comblé les vides laissés par les chaînes modernes et les chaînes de transition perturbées par les périodes de confinement. Beaucoup ont su faire preuve de souplesse, en particulier dans les pays à revenu élevé. Cependant, les chaînes traditionnelles sont en général plus vulnérables parce que, étant souvent présentes dans le secteur informel, elles n’apparaissent pas dans les statistiques nationales, et de ce fait échappent aux programmes de soutien publics et aux programmes de protection sociale.

Les stratégies de renforcement de la résilience peuvent exiger que l’on trouve un équilibre entre efficience et inclusivité

Les entreprises agroalimentaires sont hétérogènes en ce qui concerne leur échelle économique, la composition des intrants, l’utilisation des technologies et les produits – les biens qu’elles produisent vont des denrées en vrac aux articles de niche, en passant par les produits différenciés. Leurs capacités face aux risques sont variables, de même que leur capacité d’investir dans la résilience. Elles peuvent adopter des stratégies de diversification ou des stratégies de redondance, ou les deux. En Thaïlande, par exemple, la plus grosse entreprise mondiale d’usinage du riz a construit deux ports fluviaux en amont de son port primaire afin que les livraisons puissent se poursuivre même en cas de typhon. C’est un exemple représentatif de l’équilibre à trouver entre efficience et résilience. Afin de trouver le meilleur équilibre possible, les entreprises peuvent recourir à des partenariats avec d’autres entreprises, qui soient complémentaires. Mais ce n’est pas toujours possible pour les PMEA, qui se heurtent à la double difficulté de devoir être résilientes face aux chocs tout en résistant à la concurrence des entreprises plus grandes. Ce qu’elles gagnent en résilience et en agilité, elles risquent de le perdre en accès aux marchés lucratifs.

Les infrastructures publiques – routes, canaux, réseau électrique, eau courante, installations d’irrigation, ports – qui aident à écarter ou à amortir les effets des chocs, sont une composante essentielle de toutes ces stratégies. Les producteurs et les acteurs des filières alimentaires qui sont situés dans des territoires agricoles bien dotés en infrastructures auront une capacité d’absorption plus grande. De plus en plus, les infrastructures publiques sont complétées par des infrastructures privées – points de collecte, camions de livraison et entrepôts réfrigérés, par exemple. Les entreprises qui sont à même d’investir et de faire face aux risques ont plus de chances de survivre et de supplanter celles qui ont moins de moyens, ajoutant aux pressions concurrentielles qui ont pour effet d’accroître la concentration dans les segments non agricoles des chaînes d’approvisionnement alimentaire entre les mains d’un plus petit nombre d’entreprises. Les entreprises agroalimentaires, les agriculteurs et les territoires agricoles qui se trouvent exclus de la sorte perdent le lien, crucial, avec les marchés urbains et les marchés d’exportation, et sont pris dans le piège de la pauvreté, où la convergence de l’évolution des marchés et du changement climatique les rend particulièrement vulnérables. Le coût social du chômage et de la perte de moyens d’existence qui surviennent du fait de l’évincement des PMEA peut être supérieur aux gains obtenus grâce à la résilience accrue des grandes entreprises.

Du fait qu’ils ont des ressources limitées, les petits producteurs et les PMEA ont souvent plus de mal à se redresser après une perturbation. De meilleures infrastructures publiques et un accès plus facile au crédit et à l’information peuvent créer des effets de synergie entre efficience et résilience et accélérer le redressement. Les pouvoirs publics peuvent, pour leur part, faciliter la coordination et l’organisation des PMEA au sein des chaînes d’approvisionnement alimentaire. L’une des méthodes consiste à créer des consortiums de manière à accroître l’échelle d’activité, la visibilité et l’influence des petites entreprises et à leur faciliter l’accès au financement, privé et public. En favorisant les relations inter-organisationnelles au sein d’alliances stratégiques ou de réseaux, on peut créer du capital relationnel et structurel et du capital de connaissances, promouvoir une gestion du risque plus robuste et plus efficace par la mise en commun des ressources, et améliorer l’accès aux technologies modernes et au savoir-faire. Des outils de mise en valeur des territoires, tels que les pôles d’activité, encouragent la coordination entre les PMEA et développent leur capital relationnel. Dans les pays où les marchés du crédit sont imparfaits ou insuffisamment développés, la création de pôles d’activité peut contribuer à lever les contraintes qui pèsent sur le crédit. L’organisation en consortiums et en pôles d’activité est un excellent moyen de développer les compétences du personnel et de diffuser les technologies numériques.

DES MOYENS D’EXISTENCE RURAUX ROBUSTES RENFORCENT L’ENSEMBLE DU SYSTÈME

Les capacités de résilience de tous les ménages sont importantes pour le fonctionnement des systèmes agroalimentaires. Tous les ménages, qu’ils soient producteurs, fournisseurs ou consommateurs de denrées alimentaires, ont un rôle à jouer dans ces systèmes. La capacité de résilience des ménages ruraux – en particulier des petites exploitations familiales à faibles revenus – est particulièrement, et de plus en plus, mise à l’épreuve par le nouvel ordre des choses qui résulte du changement climatique et de l’appauvrissement des ressources naturelles. Beaucoup de ruraux, même s’ils travaillent souvent dans le secteur non agricole, dépendent principalement de l’agriculture pour leurs moyens d’existence. Les incidences des chocs et des situations de stress sur ces moyens d’existence, et par conséquent sur la sécurité alimentaire et la nutrition, se manifestent essentiellement au sein des ménages. Des centaines de millions de ménages agricoles contribuent aux systèmes agroalimentaires, au niveau de la production primaire et dans de petites entreprises agroalimentaires. Les ménages ruraux qui mènent de front plusieurs activités différentes sont généralement mieux à même de faire face aux chocs et aux situations de stress et peuvent reprendre pied plus facilement.

Les ménages qui sont producteurs nets de produits alimentaires sont plus vulnérables en cas de choc ou de situation de stress touchant la production agricole et alimentaire, par exemple les infestations d’organismes nuisibles, les maladies, les épisodes de sécheresse ou encore les perturbations sur la chaîne d’approvisionnement en intrants ou au stade de la commercialisation. Les ménages qui sont consommateurs nets de produits alimentaires – qui ont une activité agricole à temps partiel et comptent surtout sur l’emploi dans l’économie non agricole – sont eux plus sensibles à des chocs, tels qu’une envolée des prix, qui ont une incidence sur le pouvoir d’achat. Ceux qui ont une petite entreprise agroalimentaire sont soumis à des contraintes plus fortes que leurs concurrents de taille plus importante car ils ont moins accès à l’information, aux technologies, au capital, aux actifs et aux institutions. Ils ont à supporter un double fardeau, lié à leur vulnérabilité face aux risques et aux chocs: outre qu’ils sont exposés aux risques propres à l’activité agricole, ils sont exposés au risque d’être écartés des actifs productifs et des marchés lucratifs dans le contexte d’une modernisation accélérée des chaînes d’approvisionnement alimentaire dans les pays en développement.

L’éducation, le travail dans le secteur non agricole et les transferts monétaires aident les ménages ruraux à mieux faire face aux chocs et aux situations de stress

Les ménages ruraux ont mis au point tout un ensemble de stratégies pour s’en sortir face aux perturbations, prévisibles et imprévisibles, et renforcer leurs capacités de prévenir les chocs, de les anticiper, de les absorber, de s’y adapter et de se transformer. Au niveau des exploitations agricoles, les ménages font face aux interactions imprévisibles entre les facteurs naturels, technologiques et sociaux en reconfigurant et en utilisant différemment les ressources à disposition. En prévision des chocs, pour réduire les risques et faire en sorte que l’impact soit moindre, ils diversifient leur gamme de produits, ajustent leur calendrier d’ensemencement compte tenu de la variabilité des précipitations, et investissent dans la réduction des risques en améliorant les installations d’irrigation et de drainage, en prenant des mesures plus efficaces de lutte contre les ravageurs, et en adaptant leurs pratiques agricoles de manière à réduire l’érosion des sols. Ils diversifient leurs sources de revenu en travaillant à temps partiel dans l’économie rurale non agricole. Les ménages ont aussi des mécanismes qui leur permettent de tenir après un choc: ils couvrent leurs pertes et font la jonction en liquidant des actifs, en empruntant ou en prélevant sur leur épargne, ou encore en faisant appel à leur réseau communautaire pour prendre une assurance informelle. Toutefois, les stratégies de survie qui ont pour effet de réduire les actifs des ménages risquent de rendre ceux-ci encore plus vulnérables du fait qu’elles sapent leurs capacités de revenu futures.

Le modèle de mesure et d’analyse de l’indice de résilience (RIMA) de la FAO a été appliqué afin de mettre en évidence les principaux facteurs qui contribuent à la résilience des ménages ruraux, dans 35 pays. Les résultats constatés pour 23 pays montrent que l’éducation, la diversification des revenus et les transferts monétaires sont les principaux facteurs qui contribuent au renforcement progressif des capacités de résilience. D’après une analyse portant sur 12 autres pays, dans plus de la moitié des cas, c’est l’accès aux actifs, productifs et non productifs, qui constitue le principal volet de la résilience. La capacité d’adaptation des ménages, qui est étroitement liée au niveau d’instruction et au développement des capacités humaines de leurs membres, est aussi un élément important de leur résilience. L’accès aux services de base (meilleures installations sanitaires et eau potable sûre, et services primaires, en particulier écoles, hôpitaux et marchés agricoles) apporte un soutien important à la résilience des ménages, notamment dans les zones très arides et pour les ménages qui pratiquent le pastoralisme.

L’analyse réalisée à l’aide du modèle RIMA montre également que les ménages ruraux majoritairement féminins sont les plus durement touchés pendant et après les chocs. Les femmes ont tendance à avoir beaucoup moins accès que les hommes à la terre et aux autres actifs, cruciaux pour la résilience. Les enfants sont eux aussi particulièrement vulnérables en cas de choc ou de situation de stress. Les études montrent que les chocs très étendus se traduisent par une augmentation des taux de retard de croissance et d’insuffisance pondérale chez les enfants de moins de 2 ans. L’état nutritionnel des enfants a une incidence sur les tests cognitifs, les résultats scolaires et les débouchés ultérieurs sur le marché du travail, ce qui conduit à penser que les chocs peuvent avoir des coûts économiques à long terme importants, pour les individus et pour la société.

Il faut que les petits producteurs puissent s’organiser, adopter des pratiques durables et bénéficier d’une protection sociale

Pour rester compétitifs et pour préserver leurs moyens d’existence, les petits producteurs agricoles doivent être bien intégrés dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire et dans les chaînes d’approvisionnement en intrants et en services. Les associations de producteurs et les coopératives sont l’un des moyens d’y parvenir. Elles permettent d’améliorer les moyens d’existence de plusieurs manières: mise en commun des ressources pour obtenir des économies d’échelle; accès facilité aux moyens de production (machines et outillage, crédits, etc.); et poids accru sur le marché. La coordination avec les autres acteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire est également essentielle dans la gestion des risques du marché. Elle permet d’obtenir des avantages mutuels au moyen, par exemple, de contrats à terme de gré à gré, dans le cadre desquels les agriculteurs bénéficient d’un prix garanti quelle que soit la situation du marché, tandis que pour leur part les transformateurs et les distributeurs obtiennent des produits de la qualité souhaitée.

L’adoption de pratiques de production plus durables constitue une autre stratégie de renforcement de la résilience, à laquelle ont de plus en plus recours les petits producteurs agricoles. L’une d’elle est l’agroécologie, une approche qui consiste à appliquer des principes écologiques et sociaux à la manière dont sont conçus et gérés les systèmes agroalimentaires. Un élément important de l’agroécologie est la biodiversité agricole et alimentaire, qui permet d’accroître la résilience face aux chocs et aux situations de stress, de faciliter l’adaptation, de maintenir la stabilité et de soutenir la reprise après des perturbations. Une autre possibilité est l’agriculture climato-intelligente, qui permet d’accroître la sécurité alimentaire et de développer des moyens d’existence sains tout en contribuant à l’atténuation du changement climatique et en facilitant l’adaptation à ses effets. Ces pratiques partent du constat que l’agriculture classique ne peut nourrir de manière durable une population mondiale de plus en plus nombreuse, car elle est cause d’une dégradation de l’environnement et d’un épuisement des ressources naturelles.

Les programmes de protection sociale, apparus dans les pays en développement dans les années 1980 et au début des années 1990, n’ont plus pour seule vocation l’aide sociale. Ils mettent de plus en plus l’accent sur la réduction des risques et des répercussions des chocs sur les moyens d’existence fragiles. La protection sociale aide les ménages agricoles ayant de faibles revenus à se lancer dans des activités économiques plus rentables mais aussi plus risquées, et offre une solution de remplacement à des stratégies de survie aux effets préjudiciables. Les programmes qui offrent une protection sociale et un appui à l’activité productive sont parfaitement complémentaires, et de plus en plus fréquents dans les zones rurales.

UN PRINCIPE DOIT GUIDER LES DÉCIDEURS: SE PRÉPARER AUX PERTURBATIONS

La diversité des sources de produits alimentaires et des marchés de produits crée de multiples voies qui permettent d’absorber les chocs

Dans un environnement où les risques sont multiples, certaines perturbations sont prévisibles et d’autres pas. Se préparer à l’inconnu exige que l’on étudie attentivement les caractéristiques structurelles des systèmes, y compris la capacité d’absorption qu’offrent la connectivité et la diversité des voies pouvant être empruntées. Les politiques et les investissements doivent bien faire la distinction entre risque et incertitude. Gérer le risque, cela suppose en général de réduire l’exposition à un événement néfaste donné et la vulnérabilité face à cet événement. Gérer l’incertitude, cela suppose qu’un système dispose d’une diversité suffisamment grande d’acteurs et d’actions possibles pour maintenir ses fonctions de base en cas de choc imprévu. Les deux approches sont nécessaires et sont complémentaires.

La diversité sous toute ses formes est un élément essentiel de la capacité d’absorption d’un système agroalimentaire. Les systèmes agroalimentaires – et les chaînes connexes d’approvisionnement alimentaire – sont moins vulnérables dès lors qu’ils ont accès à des sources plus diversifiées de produits alimentaires et à des débouchés, les marchés de produits, eux aussi plus diversifiés. Pour élaborer des stratégies face à une crise, il est crucial que les décideurs connaissent les multiples voies par lesquelles un choc peut être absorbé. Les systèmes agroalimentaires qui s’approvisionnent sur le marché international sont moins vulnérables aux chocs et aux situations de stress intérieurs, mais si pour leurs importations ils sont très dépendants de quelques partenaires seulement, ils seront plus vulnérables en cas de choc extérieur. Importer des produits alimentaires diversifiés depuis différents pays présentant des profils socioéconomiques et climatiques hétérogènes permet de diversifier les risques et de réduire la vulnérabilité en cas de choc extérieur. Des efforts internationaux pour réduire les obstacles au commerce entre les pays pourraient être nécessaires pour assurer un approvisionnement flexible de ce type. Dans les pays où la capacité d’absorber les chocs découle principalement de ce qui est produit et vendu sur le marché intérieur, diversifier la production intérieure et les importations, ainsi que les stocks, sera un élément essentiel des stratégies de sécurité alimentaire et de nutrition, en particulier dans ceux où nombreuses sont les personnes pour lesquelles une alimentation saine est hors de portée ou qui risquent de se trouver dans cette situation.

Les systèmes agroalimentaires qui sont bien connectés se relèvent plus rapidement après une perturbation du fait qu’ils peuvent changer de source d’approvisionnement, faire appel à d’autres moyens pour transporter et vendre leurs produits ou se procurer des intrants et de la main d’œuvre, et trouver de nouvelles voies de transmission des connaissances et de nouvelles sources de financement. La connectivité et la diversification contribuent à la capacité d’absorption et permettent d’être mieux préparé aux perturbations éventuelles: elles ne visent pas un événement en particulier mais offrent des options. Elles doivent toutefois être complétées par la gestion du risque. Par exemple, les catastrophes et les crises peuvent avoir un impact considérable sur les infrastructures et les services, tels que les routes, le transport ou le stockage des denrées alimentaires. Il est par conséquent très important d’évaluer les infrastructures, de les protéger et de les mettre à l’abri du risque, et de mettre en place de nouvelles infrastructures qui tiennent compte du risque et qui présentent une bonne résilience climatique. Pour assurer la résilience face au climat, il est essentiel d’évaluer les vulnérabilités physiques des infrastructures et d’y remédier.

L’hétérogénéité des exploitations agricoles et des entreprises doit être reconnue

Les politiques et les interventions doivent viser à promouvoir tout un ensemble de chaînes d’approvisionnement alimentaire - traditionnelles, de transition et modernes - de manière à pouvoir amortir les différents types de choc et de situation de stress. Les décideurs doivent prendre acte de l’hétérogénéité des exploitations et des entreprises sur le continuum urbain-rural et trouver des solutions aux vulnérabilités à différentes échelles. Il peut être nécessaire d’améliorer les capacités en matière de gestion des risques et d’alerte rapide, afin d’aider à prévoir les chocs et leurs répercussions. Pour renforcer la prise de décision, les pouvoirs publics, à tous les niveaux, doivent collaborer avec les universités, les centres de recherche, la société civile et le secteur privé, et mettre les données à disposition aux fins d’analyse de toutes les composantes des systèmes. Une gouvernance et des institutions inclusives permettront d’obtenir une meilleure gestion des risques, pour des interventions rapides durant les crises. Des stratégies de gestion de risques multiples pourront être nécessaires aux échelons infranational et local pour trouver une solution aux vulnérabilités et aux facteurs de risque sous-jacents.

Les outils dont on dispose déjà pour gérer les risques et les catastrophes, dans la législation, la réglementation et les politiques nationales, pourraient être adaptés aux chaînes d’approvisionnement alimentaire de façon à aider les parties prenantes à fonctionner plus efficacement et à mieux collaborer, au sein des secteurs et d’un secteur à l’autre. Les politiques doivent aussi aider les producteurs et les entreprises agroalimentaires à adopter des outils d’entreprise qui leur permettent de renforcer leur résilience, ce qui suppose notamment une meilleure maîtrise de l’informatique, un meilleur accès à l’internet, au crédit et à l’assurance, et le financement de la recherche et des services de vulgarisation agricole. Un environnement à même d’apporter un soutien aux acteurs des systèmes agroalimentaires utilisera les technologies de l’information et des communications (TIC) pour les mettre au service de la logistique. Les pouvoirs publics, au niveau central et au niveau local, ainsi que le secteur privé, les organisations non gouvernementales et les organismes internationaux de développement, ont un rôle important à jouer à l’appui de leur adoption.

La gestion des risques, l’assurance récolte et la protection sociale contribuent à renforcer la résilience des ménages

La résilience des moyens d’existence est à la base de la résilience des systèmes agroalimentaires car des moyens d’existence résilients permettent d’assurer l’accès à la nourriture même en cas de choc. Parmi les ménages ruraux vulnérables, ce sont les petits agriculteurs et tous ceux qui travaillent dans la production primaire qui tireront le plus avantage de l’appui logistique, des innovations dans la production et d’une gouvernance inclusive des chaînes d’approvisionnement alimentaire. Lorsqu’ils élaborent des politiques visant à renforcer les capacités de résilience des petits producteurs et des ménages vulnérables, les décideurs doivent s’efforcer de faciliter la gestion des risques et de créer un environnement qui permette aux ménages de développer leur capacité de résilience. Alors que les phénomènes climatiques extrêmes deviennent plus fréquents et plus prononcés, les producteurs auront besoin d’avoir accès à des systèmes d’alerte rapide et de gestion des risques de catastrophe agroclimatique. S’ils ont davantage accès aux assurances récolte et climat, ils pourront plus facilement obtenir des prêts à la production et se lancer dans des activités agricoles plus risquées mais plus rentables.

Les programmes de protection sociale peuvent être nécessaires pour améliorer la résilience des ménages en cas de choc. Les systèmes de protection sociale fondés sur l’analyse des risques et réactifs aux chocs sont conçus non seulement pour les bénéficiaires habituels, par exemple les retraités, mais aussi pour venir en aide aux populations exposées aux risques et susceptibles de connaître des crises, avant, pendant et après une perturbation. Ils peuvent élargir les prestations en fonction des nouveaux besoins des bénéficiaires potentiels et permettre à ceux-ci d’investir et de s’engager dans des activités productives. Bien conçue, la protection sociale peut agir en synergie avec les programmes d’aide aux activités de production et les investissements, renforçant à la fois la résilience et la durabilité des moyens d’existence des petits producteurs.

Les politiques devront viser plus loin que les systèmes agroalimentaires. Des assurances maladie et des services médicaux solides et inclusifs sont des domaines d’action clés qui ont clairement une incidence sur la résilience des ménages. L’éducation et la formation jouent aussi un rôle important dans le renforcement de la résilience des ménages sur le long terme. Des politiques de portée plus vaste visant à promouvoir l’égalité des genres permettront d’améliorer considérablement la résilience grâce à une participation accrue des femmes dans tous les secteurs. Les politiques en faveur de l’emploi peuvent aussi contribuer à renforcer les moyens d’existence et les revenus, avec des retombées positives sur les systèmes agroalimentaires.

Assurer la durabilité des systèmes agroalimentaires fait partie intégrante du renforcement de la résilience. Les politiques suivies peuvent promouvoir la durabilité des systèmes en prenant en compte leur rôle de gardiens de l’environnement naturel. Plutôt que d’aggraver le changement climatique et la dégradation des ressources naturelles, les systèmes agroalimentaires doivent adopter l’agroécologie et d’autres pratiques qui permettent de préserver les ressources.

Il est important de reconnaître que les politiques suivies peuvent avoir des conséquences indésirables. Pour éviter d’appliquer des restrictions qui feront du tort aux acteurs des systèmes agroalimentaires, il faut que les décideurs comprennent bien comment fonctionnent les systèmes et comment ils interagissent. La cohérence des politiques est essentielle. Un point important qui exige une bonne cohérence des politiques est celui des subventions, notamment les politiques de soutien des prix agricoles. Dans l’immédiat et sur le court terme, les subventions peuvent apporter une aide aux producteurs agricoles, mais elles peuvent aussi avoir pour effet de réduire leur capacité de s’adapter aux chocs lorsqu’ils surviennent. En outre, les subventions, de même que toute autre politique visant à favoriser la résilience des systèmes agroalimentaires, doivent être viables sur le plan budgétaire. Relever le défi de la cohérence des politiques n’est possible qu’avec la participation des pouvoirs publics dans tous les secteurs concernés et aux différents niveaux.

Messages clés

L’impact sans précédent de la pandémie de covid-19 sur les ressources des ménages et la sécurité alimentaire est un signal d’alarme qui doit nous mobiliser pour pallier les faiblesses, les vulnérabilités et les multiples risques présents dans les systèmes agroalimentaires et garantir le maintien de leurs fonctions même en cas de perturbations.

Améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires signifie renforcer leur capacité et celle de leurs acteurs de prévenir, anticiper et absorber les chocs et les situations de stress, s’y adapter et se transformer lorsqu’ils y sont confrontés.

Les systèmes agroalimentaires sont de plus en plus menacés par des situations de stress au long cours, telles que le changement climatique, la déforestation, la dégradation des ressources naturelles et d’autres crises prolongées.

Les situations de stress aggravent la vulnérabilité à de nombreux chocs, notamment aux phénomènes météorologiques extrêmes, aux conflits, aux pandémies et aux crises socioéconomiques, qui peuvent frapper n’importe où dans un système agroalimentaire et se propager à l’intérieur et au-delà.

En renforçant la résilience des systèmes agroalimentaires, on contribue de manière fondamentale à les rendre plus durables en améliorant leur capacité à gérer les risques associés à de nombreux chocs et situations de stress.

Pour renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires, la première étape est de répertorier leurs caractéristiques, leurs composantes et leurs acteurs, et de comprendre les liens et interactions qui existent entre eux et les contextes économique, social et environnemental, afin d’évaluer les risques, les vulnérabilités et les capacités de réaction qui leur sont propres.

Deux éléments clés pour renforcer la résilience sont la diversification (de la production et des sources d’approvisionnement, par exemple) et la redondance (c’est-à-dire la duplication d’éléments critiques des systèmes agroalimentaires). Ils pourront nécessiter certains arbitrages en termes d’efficience et parfois d’équité.

Les systèmes agroalimentaires mondiaux forment ensemble une gigantesque entreprise planétaire qui produit chaque année quelque 11 milliards de tonnes de nourriture1 et une multitude de produits non alimentaires, dont 32 millions de tonnes de fibres naturelles2 et 4 milliards de m3 de bois3. La valeur brute estimée de la production agricole s’élevait en 2018 à 3 500 milliards d’USD4. À elle seule, la production primaire occupe environ un quart des travailleurs du globe, plus de la moitié en Afrique subsaharienne et près de 60 pour cent dans les pays à faible revenu5. Avec les segments intermédiaires et de l’aval – depuis l’entreposage et la transformation des produits alimentaires jusqu’au transport, au commerce de détail et à la consommation –, les systèmes agroalimentaires sont la colonne vertébrale de nombreuses économies. Même dans l’Union européenne, le secteur des produits alimentaires et des boissons emploie plus de personnes que toute autre activité manufacturière6.

Dans un monde idéal, tous les systèmes agroalimentaires seraient résilients, inclusifs et durables et produiraient de la nourriture saine et nutritive en quantité suffisante pour que chaque être humain puisse mener une vie active en bonne santé – sans compromettre la sécurité alimentaire, la santé et la nutrition des générations futures. Ils s’appuieraient sur des systèmes biologiques leur permettant de fournir des aliments en abondance et de procurer des moyens d’existence. En étant une source de revenus et de prospérité, les systèmes agroalimentaires garantiraient à des milliards d’individus d’avoir les moyens de se procurer de la nourriture, condition essentielle de la sécurité alimentaire.

Mais la réalité est là. On estime que, en 2020, 768 millions d’êtres humains, soit 9,9 pour cent de la population mondiale, ont souffert de la faim, c’est-à-dire près de 118 millions de plus qu’en 2019 et 153 millions de plus qu’en 20157. Alors que le monde est confronté à l’impératif de produire plus de nourriture, la production agricole et d’autres segments vitaux des systèmes agroalimentaires sont menacés par des chocs de tous ordres (sécheresses, inondations, conflits armés, instabilité des prix...), aggravés par des situations de stress à plus long cours, comme les inégalités économiques et la variabilité du climat. Les nombreux risques et incertitudes ont des effets disproportionnés sur les populations les plus vulnérables et en situation d’insécurité alimentaire, qui se retrouvent en première ligne face à de multiples chocs et situations de stress. Avant même que la nouvelle maladie à coronavirus (covid-19) ne se transforme en pandémie, près de 3 milliards de personnes n’avaient pas les moyens d’avoir une alimentation saine, protégeant de la malnutrition sous toutes ses formes.

Les chocs et les situations de stress ébranlent les systèmes agroalimentaires en désorganisant le fonctionnement des institutions, des chaînes d’approvisionnement et des acteurs concernés8. L’encadré 1 montre comment les systèmes agroalimentaires englobent les systèmes alimentaires, qui comprennent tout l’éventail d’acteurs et leurs activités interdépendantes d’ajout de valeur, et la production primaire de produits non alimentaires dans les secteurs des cultures, de l’élevage, des forêts, de la pêche et de l’aquaculture. Les chocs et les situations de stress peuvent provenir de la situation socioéconomique et environnementale ambiante et se propager à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des systèmes: la pandémie de covid-19 en est le parfait exemple le plus récent. Les conditions physiques, sociales, économiques et environnementales déterminent le niveau de vulnérabilité des individus, des communautés, des institutions, des biens, des infrastructures ou des systèmes aux répercussions négatives des chocs et des situations de stress9. Il est nécessaire de comprendre les différences de vulnérabilité à divers chocs et situations de stress et les capacités de résilience des systèmes agroalimentaires pour trouver les mesures capables d’améliorer la résilience face à des perturbations10.

Parce qu’ils sont fortement dépendants de processus climatiques, biologiques, physiques et chimiques, les systèmes agroalimentaires sont susceptibles d’être confrontés à de nombreux chocs et situations de stress, notamment au changement climatique, à des phénomènes météorologiques extrêmes, à des invasions de ravageurs et des épidémies, à des pénuries d’eau ou encore à la détérioration des ressources naturelles. Selon les estimations de la FAO, dans les pays à revenu faible ou à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, le secteur agricole proprement dit – et non l’ensemble des systèmes agroalimentaires – a absorbé 26 pour cent des pertes et des dommages économiques provoqués par des catastrophes de grande ampleur ou d’ampleur moyenne entre 2008 et 201811. Pour les petits producteurs et les autres acteurs des systèmes agroalimentaires de ces pays, les situations de stress peuvent être particulièrement diffuses et chroniques. Elles amplifient les effets des insuffisances structurelles existantes, par exemple le manque d’infrastructures convenables en matière de transport routier, d’électricité, d’irrigation, d’eau propre, de traitement, d’entreposage et de commercialisation. Ces insuffisances condamnent des millions d’agriculteurs et de ruraux à un isolement géographique et économique, elles limitent leurs perspectives de développement d’entreprises, gênent leur accès à des services et augmentent leur dépendance vis-à-vis des conditions météorologiques locales.

Les conséquences peuvent être extrêmement préjudiciables: facteurs de production sous-utilisés, productivité faible, pertes de production agricole alimentaire et non alimentaire, et accès à des marchés lucratifs bloqué. Amplifier la vulnérabilité d'un système agroalimentaire à de nombreux chocs et situations de stress diminue la capacité des acteurs à prévenir, anticiper, absorber, s’adapter et se transformer. Des capacités de résilience amoindries augmentent la probabilité de faire face à des problèmes aigus ou chroniques d’insécurité alimentaire et de malnutrition.

La communauté internationale a pris conscience de la nécessité urgente d’agir pour renforcer les systèmes alimentaires, c’est-à-dire la partie des systèmes agroalimentaires qui englobe la production, la transformation, le transport et la consommation de produits alimentaires (encadré 1). Le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui s’est tenu en septembre 2021, a lancé de nouvelles actions ambitieuses pour accélérer les progrès en direction des objectifs de développement durable (ODD), dont chacun dépend à un degré plus ou moins élevé de systèmes alimentaires plus sains, plus durables et plus équitables. Il est indispensable de renforcer la résilience pour mettre en œuvre les ODD et l’ensemble du Programme de développement durable à l’horizon 2030. La résilience des systèmes agroalimentaires va directement dans le sens de l’ODD 2, Faim «zéro», et est une condition essentielle pour atteindre plusieurs autres ODD à caractère socioéconomique (ODD 1, Pas de pauvreté; ODD 5, Égalité entre les sexes; ODD 8, Travail décent et croissance économique; ODD 10, Inégalités réduites, ODD 11, Villes et communautés durables) et ceux qui portent sur la durabilité environnementale (ODD 6, Eau propre; ODD 12, Consommation et production responsables; ODD 13, Lutte contre les changements climatiques; ODD 14 et 15, Vie aquatique et vie terrestre). En étant source de paix et de prospérité pour toutes les populations de la planète d’ici à 2030 (en phase avec l’ODD 16, Paix, justice et institutions efficaces), la réalisation des ODD empêchera de nombreuses perturbations, ou au moins atténuera grandement leur impact.

Le présent rapport pose les questions suivantes: Par quoi se caractérise un système agroalimentaire résilient? Comment les acteurs d'un système agroalimentaire gèrent-ils leur vulnérabilité aux chocs et aux situations de stress? Comment les ménages – en particulier les pauvres et les plus vulnérables – peuvent-ils satisfaire leurs besoins alimentaires lorsque des perturbations du système agroalimentaire réduisent la production et les revenus, poussent les prix à la hausse ou créent des pénuries de nourriture? Comment garantir que les systèmes agroalimentaires procurent des moyens d’existence et assurent l’accès de tous à des quantités suffisantes de nourriture sûre et nutritive de manière durable même en cas de perturbations? En bref, comment améliorer la résilience de nos systèmes agroalimentaires?

Pourquoi il faut des systèmes agroalimentaires plus résilients

Renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires est aujourd’hui plus urgent que jamais dans le contexte actuel de faim et de malnutrition persistantes. La faim progresse, et davantage encore dans les pays touchés par des conflits, des phénomènes météorologiques extrêmes et des fléchissements économiques, et ceux où les inégalités de revenus sont fortes12. Les crises alimentaires se sont également étendues et aggravées en 2020, les fragilités préexistantes ayant été exacerbées par des conflits prolongés, l’effondrement économique provoqué par la pandémie de covid-19, et des événements météorologiques extrêmes13. Les fléchissements économiques enregistrés en 2020, notamment ceux dus aux restrictions liées à la covid-19, ont frappé plus durement que jamais depuis des décennies tous ceux qui souffrent de la faim; le nombre de personnes sous-alimentées a augmenté de 118 millions sur la seule année 202012, et l’on a pu voir l’impact dévastateur d’un choc venant s’ajouter à des vulnérabilités existantes. Il ne semble pas y avoir eu de baisse de l’offre alimentaire (en dehors des secousses initiales dues à des achats de panique)8, ce qui pourrait s’expliquer par les mesures de dispense appliquées au secteur agroalimentaire par les pouvoirs publics. Néanmoins, les confinements et les autres restrictions de déplacement ont considérablement diminué la circulation des personnes et des marchandises, et les ressources des ménages s’en sont ressenties. Les pertes de revenu et de pouvoir d’achat ont fortement pesé sur la sécurité alimentaire et la nutrition de milliards d’êtres humains, en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Les familles ont été contraintes de modifier leurs habitudes de consommation pour aller vers des produits alimentaires meilleur marché moins nutritifs8, à un moment où elles auraient eu besoin de protéger et de renforcer leurs systèmes immunitaires14. La détérioration de l’accès à des aliments nutritifs et le passage à une alimentation de mauvaise qualité et à haute densité énergétique, à cause des difficultés économiques liées à la pandémie de covid-19, risquent aussi d’augmenter la prévalence du surpoids et de l’obésité dans presque toutes les régions du monde. L’obésité chez l’adulte est en hausse, sans aucune inversion de cette tendance au niveau mondial ou régional depuis plus de 15 ans, entraînant une progression des maladies non transmissibles associées à ces formes de malnutrition12.

La capacité des systèmes agroalimentaires à assurer la sécurité alimentaire et la nutrition de tous dépendra non seulement de leurs propres capacités mais également du fonctionnement d’autres systèmes socioéconomiques et environnementaux interconnectés (transport, éducation, santé, eau, sols et énergie, entre autres), ainsi que des mécanismes de protection sociale. L’impact négatif du choc déclenché par la pandémie sur la morbidité chez les nourrissons et les jeunes enfants pourrait être aggravé par le moindre accès à des soins de prévention et de traitement du paludisme, de la diarrhée et d’autres maladies infectieuses. La fermeture des établissements scolaires a pu interrompre des programmes alimentaires et nutritionnels en milieu scolaire et se traduire par des repas non pris et des cours d’éducation nutritionnelle manqués8. De nombreuses données attestent que les effets négatifs de ce type de chocs et de situations de stress connexes sur l’état nutritionnel des enfants d’âge préscolaire ne sont pas seulement immédiats mais perdurent à l’âge adulte15.

Les pressions démographiques et environnementales ajoutent à la nécessité impérative de rendre les systèmes agroalimentaires résilients car la demande de nourriture augmente sous l’effet de la croissance rapide de la population mondiale. Simultanément, des chocs et des situations de stress, notamment des événements extrêmes plus fréquents et intenses et des phénomènes plus lents dus au changement climatique, menacent tant la production agricole – culture élevage, aquaculture, pêche et forêts – que les stades intermédiaires et de l’aval des systèmes agroalimentaires. Mais en même temps que les systèmes agroalimentaires subissent des chocs et des situations de stress en rapport avec le climat, ils constituent eux-mêmes un facteur majeur de changement climatique. Pour nourrir une population mondiale qui devrait atteindre 9,7 milliards d’êtres humains en 205016, l’agriculture risque de devoir produire entre 40 et 54 pour cent de plus de nourriture, d’aliments pour animaux et de matières premières de biocarburants qu’en 201217, selon les scénarios. Cette mission titanesque pourrait soumettre les ressources naturelles de la Terre à des pressions insoutenables. Le monde a donc besoin d’évoluer vers une agriculture et une production alimentaire plus durables, qui doivent obéir à trois priorités: protéger la nature, restaurer et remettre en état les environnements naturels, et gérer de façon viable les systèmes de production alimentaire18. La réduction des pertes et du gaspillage alimentaires19, l’amélioration de l’efficacité d’utilisation des ressources, et enfin le commerce international joueront un rôle important, car des importations pourront être nécessaires pour combler les déficits intérieurs lorsque les ressources naturelles viennent à manquer.

L’agroécologie est une autre approche qui comprend trois dimensions: la science, un ensemble de pratiques et un mouvement social. De plus en plus d’éléments permettent de dire que l’agroécologie est bonne pour l’environnement, la biodiversité et les revenus des agriculteurs, et qu’elle aide aussi ces derniers à s’adapter au changement climatique, à l’atténuer et à renforcer leur résilience à de nombreux chocs et situations de stress. L’agriculture climato-intelligente est une autre piste d’amélioration de la résilience, apparue en réaction au changement climatique20 et à d’autres situations de stress, dont la dégradation de l’environnement et les pressions démographiques, comme on le verra plus loin.

Un infléchissement majeur des tendances alimentaires actuelles est également nécessaire. L’urbanisation et l’augmentation du niveau de vie entraînent une évolution des régimes alimentaires dans beaucoup de pays à revenu faible ou intermédiaire, dans le sens d’une consommation accrue d’aliments transformés et d’origine animale à plus forte intensité de ressources17. Si ces tendances se maintiennent, d’ici à 2030, les coûts de santé dus aux maladies non transmissibles liées à l’alimentation dépasseront les 1 300 milliards d’USD, tandis que le coût annuel des émissions de gaz à effet de serre (GES) associées sera supérieur à 1 700 milliards d’USD7.

Face aux défis d’aujourd’hui et de demain, les systèmes agroalimentaires doivent non seulement trouver des moyens de gérer les évolutions négatives mais aussi s’employer avec force à atteindre les ODD en transformant les approches traditionnelles actuelles. Les systèmes agroalimentaires doivent avoir pour priorité de fournir des aliments nutritifs à tous et d’utiliser les ressources de façon efficiente, tout en devenant plus inclusifs, durables et résilients. Produire plus avec moins, et en même temps protéger et améliorer les moyens d’existence des petits producteurs agricoles et des autres acteurs de la filière agroalimentaire, sont des enjeux planétaires. La pandémie de covid-19 et d’autres chocs intervenus ces dernières décennies montrent clairement qu’un certain degré de risque et d’incertitude est inhérent aux systèmes agroalimentaires. C’est pourquoi le renforcement de la résilience passe, entre autres, par des stratégies de gestion des risques réduisant l’exposition et la vulnérabilité à un choc précis, par exemple la préparation aux sécheresses dans les régions qui y sont sujettes. La soudaineté de la pandémie de covid-19 prouve toutefois qu’il peut être impossible de prévoir la survenance de certains chocs et l’ampleur de leurs conséquences tant qu’ils ne se sont pas produits. Améliorer la résilience ne se limite donc pas à gérer les risques. La gestion du risque est certes indispensable pour aider les acteurs des systèmes agroalimentaires à anticiper et à prévenir les perturbations importantes, mais les systèmes agroalimentaires doivent posséder les cinq capacités de résilience – prévention, anticipation, absorption, adaptation et transformation – pour pouvoir continuer à fonctionner en présence de chocs qui ne sont pas totalement prévisibles.

Afin de développer ou d’amplifier ces capacités de résilience, il est essentiel d’investir par exemple dans des programmes d’assurance et de protection sociale fondés sur l’analyse des risques et réactifs aux chocs, dans des chaînes d’approvisionnement et des systèmes agricoles diversifiés, et dans des infrastructures logistiques flexibles.

Comprendre la résilience DANS LES systèmes agroalimentaires

La notion de résilience est née de l’étude des écosystèmes21 et est devenue en 50 ans un objet d’étude dans un ensemble de disciplines, dont l’ingénierie, l’agriculture, l’économie et la psychologie. Bien qu’aucune définition précise ne fasse réellement consensus aujourd’hui dans toutes les disciplines, globalement, la résilience peut être définie comme étant la capacité dynamique à continuer d’atteindre des objectifs malgré les perturbations22.

Appelant à une collaboration intersectorielle afin de prévenir, anticiper, absorber les chocs et les situations de stress, s’y adapter et se transformer dans tous les secteurs de la société, les Nations Unies ont élaboré et adopté un document d’orientation destiné à aider à l’édification de sociétés résilientes (UN Common Guidance on Helping Build Resilient Societies)9. Compte tenu des nombreux risques liés à la notion de résilience, les Nations Unies proposent la définition suivante:

la capacité des personnes, des ménages, des communautés, des villes, des institutions, des systèmes et des sociétés exposés à une grande diversité de risques de prévenir, d’anticiper, d’absorber, de s’adapter et de se transformer, de façon positive, efficiente et efficace, tout en conservant un niveau acceptable de fonctionnement et sans compromettre les perspectives à long terme de développement durable, la paix et la sécurité, les droits humains et le bien-être de tous.

Cette définition souligne le fait que les chocs et les situations de stress peuvent avoir des effets préjudiciables à court et à long terme. La résilience suppose de reconnaître leur nature dynamique et intertemporelle. Pour qu'un système agroalimentaire surmonte des chocs et des situations de stress9, 23, il doit posséder cinq capacités de résilience distinctes: celles de prévenir, d’anticiper et d’absorber un grand nombre d’événements qui évoluent, se chevauchent et même se confrontent, de s’y adapter et de se transformer en conséquence.

Ce rapport examine principalement la résilience sous l’angle de la capacité d’absorption et comment celle-ci devrait être conjuguée à des mesures de gestion des risques, par exemple de prévention et d’anticipation, pour permettre une adaptation positive et une transformation inclusive et durable des systèmes agroalimentaires. La capacité d’absorption est l’aptitude à supporter des chocs et des situations de stress et à rebondir, en utilisant des mesures de riposte prédéfinies pour préserver et rétablir les structures et les fonctions de base essentielles. Pour renforcer la capacité d’absorption, il est nécessaire de concevoir et d’investir dans des interventions diversifiées destinées à préserver et à restaurer les structures et fonctions essentielles. La capacité d’absorption est aussi en partie déterminée par les caractéristiques structurelles d’un système, par exemple le nombre et la diversité des parties prenantes concernées, les institutions qui les coordonnent et la solidité des infrastructures sur lesquelles elles reposent. La nature structurelle de la capacité d’absorption est un élément central dans ce rapport, qui va guider le choix des indicateurs et donner de nouvelles pistes sur la manière d’améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires.

Le présent rapport applique à l’alimentation et à l’agriculture la définition de la résilience formulée par les Nations Unies, à savoir que la résilience des systèmes agroalimentaires correspond aux objectifs d’assurer la sécurité alimentaire et la nutrition de tous et de procurer des moyens d’existence et des revenus convenables aux acteurs des systèmes agroalimentaires. Pour établir des systèmes agroalimentaires résilients, il est nécessaire de relier la notion de résilience à toutes les dimensions de la sécurité alimentaire, c’est-à-dire pas uniquement les disponibilités alimentaires, l’accès physique et économique à la nourriture, l’utilisation des denrées alimentaires et la stabilité dans le temps, mais aussi les dimensions d’agencéité et de durabilité, proposées récemment par le Groupe d’experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition (HLPE) du Comité de la sécurité alimentaire mondiale. Ces deux dimensions n’ont pas fait l’objet d’un accord formel de la part de la FAO ni de la part d’autres organismes, et le libellé des définitions n’a pas non plus fait l’objet d’un accord. Mais nous les mentionnons néanmoins ici en raison de leur intérêt dans le contexte du présent rapport. Le HLPE définit l’agencéité comme étant la capacité des personnes, individuellement ou collectivement, de décider par elles-mêmes en connaissance de cause des aliments qu’elles consomment et produisent ainsi que de la manière dont ces aliments sont produits, transformés et distribués, et de participer aux processus qui façonnent les politiques et les structures de gouvernance des systèmes alimentaires. La durabilité renvoie à la capacité des systèmes alimentaires, sur le long terme, d’assurer la sécurité alimentaire et la nutrition sans compromettre les bases économique, sociale et environnementale nécessaires à la sécurité alimentaire des générations futures24.

La résilience des systèmes agroalimentaires dépend des six dimensions de la sécurité alimentaire et de la nutrition, mais plus particulièrement de la stabilité d’accès et de la durabilité, pour garantir la sécurité alimentaire et la nutrition à court et à long terme. La résilience des systèmes agroalimentaires est un processus dynamique défini comme étant:

la capacité d’un système agroalimentaire, même confronté à une perturbation, à continuer de façon durable à fournir des quantités suffisantes d’aliments sûrs et nutritifs accessibles à tous, et à procurer des moyens d’existence aux acteurs du système agroalimentaireb.

La figure 1 illustre la manière dont la définition de la résilience des systèmes agroalimentaires englobe les six dimensions de la sécurité alimentaire.

FIGURE 1
La résilience des systèmes agroalimentaires et les six dimensions de la sécurité alimentaire

L’agencéité, une dimension essentielle de la sécurité alimentaire, est profondément liée aux droits humains, notamment au droit à une nourriture adéquate, et souligne le besoin d’inclusivité dans les systèmes agroalimentaires. Comme il est indiqué dans le rapport 2020 du HLPE, les individus et les populations habituellement défavorisés (les femmes et les petits producteurs agricoles, par exemple) n’ont généralement pas la capacité d’influer sur la sécurité alimentaire et les systèmes alimentaires et ils sont souvent confrontés à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire24. Leur exclusion du pouvoir se manifeste par exemple par des inégalités de revenu et des inégalités entre femmes et hommes qui se répercutent sur les choix; des dynamiques de pouvoir inégales aux niveaux local et mondial concernant les décisions des personnes et des communautés sur les systèmes agroalimentaires; une gouvernance des systèmes agroalimentaires médiocre et fragmentée; et une incapacité des États à faire respecter le droit à une nourriture adéquate. Lorsque l’agencéité est une valeur affirmée, tous les individus et les groupes peuvent faire des choix et s’exprimer sur les systèmes agroalimentaires et les moyens d’existence qu’ils procurent.

Comment les chocs et les situations de stress perturbent les systèmes agroalimentaires

À mesure que les sociétés se développent et se transforment, elles font aussi évoluer l’environnement ambiant, les vulnérabilités, les risques intrinsèques et l’ensemble de situations de stress et de chocs avec lequel elles doivent composer. Certains chocs et situations de stress dépendent de facteurs intervenant à une échelle supranationale ou mondiale, mais bon nombre d’entre eux résultent de conditions géographiques ou locales particulières. Dans tous les cas, le risque d’incidences négatives dépendra de la manière dont les chocs et situations de stress se manifestent, interagissent avec et influent sur les vulnérabilités et les capacités de chaque composante des systèmes agroalimentaires et de chacun de leurs acteurs. Il est indispensable de comprendre ces processus pour pouvoir concevoir des interventions permettant effectivement de gérer différents risques et de développer la résilience des systèmes agroalimentaires en renforçant leur capacité de prévenir, anticiper, absorber, s’adapter et se transformer.

Les systèmes agroalimentaires présentent une grande diversité. Ils dépendent des écosystèmes agricoles et naturels et rassemblent de nombreux acteurs dans plusieurs composantes imbriquées, depuis la production jusqu’à la consommation. De ce fait, un choc ou une tension touchant l’une quelconque de ces composantes non seulement aura des effets sur les acteurs de cette dernière mais se propagera dans tout le système en amont ou en aval, et se répercutera au bout du compte sur beaucoup d’acteurs et de composantes, sinon tous. L’ampleur des effets d’un choc ou d’une situation de stress dépendra du type d’événement, des vulnérabilités des composantes et du système dans son ensemble, et de la résilience de chacune d'elles, notamment des individus et des groupes d’acteurs. Elle dépendra aussi du degré et du sens de leur relation d’interdépendance. Par exemple, l’épidémie mondiale actuelle de fusariose de la banane menace la production et les moyens d’existence de toutes les personnes qui dépendent de la filière25, et elle pourrait avoir des retombées sur la nutrition dans les ménages si les pénuries entraînent une hausse des prix. Pour pouvoir comprendre et analyser la résilience des systèmes et remédier aux problèmes associés, il est essentiel d’adopter une démarche globale tenant compte des nombreux risques auxquels les systèmes agroalimentaires sont exposés et de leurs interactions internes – ainsi que des interactions potentielles avec d’autres systèmes22.

Les caractéristiques des systèmes agroalimentaires déterminent l’impact des perturbations

Les systèmes agroalimentaires peuvent globalement être classés en trois types: les systèmes traditionnels, localisés principalement dans les zones rurales et côtières et desservant les populations locales; les systèmes modernes qui approvisionnent les populations urbaines à partir de sources diversifiées, notamment les marchés mondiaux; et les systèmes de transition, qui correspondent à la phase de passage des premiers vers les seconds, et qui peuvent coexister avec eux26. Cette classification des systèmes agroalimentaires en types bien délimités ne doit pas masquer toutefois l’immense diversité qui existe à l’intérieur de chaque catégorie. Dans un pays donné, plusieurs systèmes agroalimentaires coexistent simultanément mais peuvent présenter des variations importantes sur le plan de leur structure ou de l’accès aux marchés et aux services, ou des interactions avec d’autres systèmes. Les principaux acteurs des systèmes agroalimentaires sont les producteurs, les fournisseurs d’intrants, les prestataires de services après récolte ou capture (entreposage, transport, transformation alimentaire, distribution et vente en gros ou au détail de produits alimentaires, etc.), et les consommateurs finals.

Les caractéristiques d’un système agroalimentaire déterminent sa capacité de prévenir, d’anticiper et d’absorber les chocs et les situations de stress, de s’y adapter et de se transformer rapidement en conséquence. Les systèmes agroalimentaires traditionnels sont généralement situés dans des régions particulières et sont vulnérables à des chocs délimités, tandis que les systèmes agroalimentaires locaux peuvent être du type moderne ou de transition. Les systèmes traditionnels souffrent généralement d’un manque d’infrastructures et d’accès à des intrants, aux marchés et à des services tels que le crédit, et sont plus vulnérables aux conditions météorologiques. Lorsqu’un choc se produit, par exemple une inondation, l’ensemble du système, y compris les acteurs, peut être gravement touché, avec des conséquences négatives à court, moyen ou long terme sur la sécurité alimentaire et les moyens d’existence.

De leur côté, les systèmes agroalimentaires modernes et de transition peuvent être touchés par le même événement de façons différentes, selon l’échelle de leurs activités, la structure et les relations contractuelles entre les acteurs, le niveau de protection des infrastructures et des capacités contre les risques; et leur accès aux intrants et aux services, par exemple à des assurances contre les risques climatiques. En devenant de plus en plus interconnectés et interdépendants avec d’autres systèmes agroalimentaires, ils sont susceptibles d’être plus vulnérables aux chocs survenus ailleurs et se propageant. La modernisation a contribué à la spécialisation et à l’intensification de l’agriculture, entraînant une diminution de la diversité des cultures et un processus de déforestation dans beaucoup de régions du monde et, par suite, une disparition d’écosystèmes et de paysages agricoles variés qui a porté un coup aux ressources biologiques des systèmes agroalimentaires.

Si l’on veut améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires, la première étape consiste à déterminer le type de système et ses composantes et acteurs, à comprendre les liens et interactions qui les unissent, et à évaluer les vulnérabilités, les menaces et les capacités qui déterminent les différents risques auxquels chacun d’eux est exposé.

Dans ce rapport, les composantes d'un système agroalimentaire correspondent à trois grandes catégories de fonctions de ce système. Leur nature et leurs caractéristiques, et leur influence sur les moyens d’existence des populations, peuvent varier considérablement d’un pays à l’autre et à l’intérieur d’un même pays.

  1. La production primaire comprend les denrées alimentaires d’origine agricole et non agricole, ainsi que les produits agricoles non alimentaires servant d’intrants à d’autres secteurs d’activité. L’agriculture signifie ici tous les sous-secteurs: cultures, élevage, pastoralisme, aquaculture, pêche et forêts. Les aliments peuvent être produits à la fois par des grands exploitants et des entreprises industrielles – ce qui est habituellement le cas dans les systèmes agroalimentaires modernes – et par des petits producteurs et des petites et moyennes entreprises agroalimentaires (PMEA) opérant dans différents systèmes traditionnels, de transition et modernes. Les petits exploitants produisent environ un tiers de la nourriture mondiale et contribuent de façon importante à la sécurité alimentaire et à la nutrition27.

  2. La distribution alimentaire assure le lien entre la production et la consommation par le biais des chaînes d’approvisionnement alimentaire et des réseaux intérieurs de transport alimentaire. Les chaînes d’approvisionnement alimentaire comprennent tous les acteurs et les activités intervenant dans la manutention après récolte ou capture, l’entreposage, le groupage, le transport, la transformation, la distribution et la vente de produits alimentaires. Elles vont des très longues chaînes modernes hautement intégrées où les sources d’approvisionnement sont nombreuses – et notamment internationales – jusqu’aux chaînes très courtes desservant principalement des populations locales urbaines, péri-urbaines ou rurales. De même, les réseaux intérieurs de transport alimentaire offrent un large éventail de situations, allant d’infrastructures bien développées reliant les producteurs aux consommateurs de façon performante (y compris par des échanges commerciaux internationaux), jusqu’aux réseaux reposant sur des infrastructures et des services fragiles facilement exposés à des perturbations entraînant des blocages et des pertes d’efficacité.

  3. La consommation est l’aboutissement en aval d'un système agroalimentaire qui fonctionne, soumis à des crises de la demande d’intensité variable, par exemple la perte de revenus, en fonction du pourcentage de personnes vulnérables dans la population. Plus ce pourcentage est élevé, plus il est difficile de protéger la sécurité alimentaire et la nutrition des chocs. Les ménages vulnérables englobent par exemple les petits cultivateurs, les petits pêcheurs et les pasteurs, les travailleurs agricoles sans terre, les groupes de population démunis, et ceux qui souffrent de plus grandes inégalités et de marginalisation, comme les peuples autochtones. Le niveau de résilience des systèmes agroalimentaires est un déterminant crucial d’un accès suffisant et stable à la nourriture.

Les différentes caractéristiques de ces composantes, les risques auxquels elles sont exposées, et leurs vulnérabilités et capacités inhérentes déterminent leur susceptibilité à divers chocs et situations de stress. Le même choc ou la même situation de stress peut produire des effets variables sur différentes composantes. Par exemple, parce qu’il dépend de processus naturels, le secteur agricole est davantage exposé et vulnérable aux aléas climatiques, en particulier aux sécheresses, aux inondations et aux tempêtes. Plus de la moitié des chocs ayant touché les cultures sont le résultat de phénomènes météorologiques extrêmes, d’où les inquiétudes sur la vulnérabilité des systèmes arables à l’instabilité climatique et météorologique28.La sécheresse est la première cause de pertes de production agricole, 82 pour cent de ses effets touchant l’agriculture11. Dans les systèmes aquatiques, il existe des liens bien établis entre les captures de poisson, la productivité de l’océan et la météorologie mondiale. Le climat mondial joue un rôle majeur dans les fluctuations de la productivité halieutique29, 30.

Les acteurs d’une même composante d’un système agroalimentaire peuvent être touchés différemment. Les petits producteurs agricoles ont davantage de risques de voir leurs moyens d’existence atteints par un choc car ils ont moins accès à des ressources que les grands exploitants. De même, les acteurs des marchés structurés seront moins touchés que ceux des marchés parallèles grâce à la réglementation, aux programmes gouvernementaux, à l’accès à des dispositifs de protection, des financements, des assurances et d’autres mécanismes d’atténuation des risques et des impacts.

Les composantes du système agroalimentaire sont interdépendantes, et leurs caractéristiques détermineront les répercussions qu’aura sur elles un choc ou une situation de stress se propageant dans le système. Les chocs ayant des effets sur la consommation des ménages en sont l’illustration parfaite. Les ménages qui dépendent du système agroalimentaire pour vivre – en tant que producteurs agricoles ou acteurs de la chaîne d’approvisionnement – seront pénalisés par n’importe quel choc subi par leur entreprise ou leur employeur. Les plus pauvres pâtiront le plus des hausses de prix car l’alimentation constitue une part plus importante de leur budget familial et qu’ils ont peu de possibilités d’accéder à des services de crédit et d’épargne ou de vendre des actifs pour couvrir des déficits31. Confrontés à un choc, ils sont plus susceptibles de réduire leurs dépenses alimentaires en achetant des denrées moins chères et moins nutritives et d’être aspirés dans une spirale négative les rendant plus vulnérables à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition.

Plus le pourcentage de ménages vulnérables est élevé, plus grande est la probabilité que les réactions de la demande en cas de choc (par exemple une baisse de la demande pour certains aliments) perturbent ou dérèglent d’autres composantes du système agroalimentaire, et en bout de chaîne gênent les flux de produits agricoles et même, à moyen et long terme, la structure du système entier. Tout comme les ménages vulnérables qui sont les plus touchés par les baisses brutales de revenu, les petits exploitants et les PMEA du secteur de la production agricole pourraient être plus exposés à cette onde de choc ainsi qu’à des situations de stress de plus longue durée, notamment le changement climatique. Leur vulnérabilité est souvent accentuée par le fait qu’ils possèdent peu d’actifs et ont peu accès à des services de crédit et d’assurance, ce qui peut limiter leur capacité à s’adapter et se transformer.

Le degré de diversité et de connectivité des réseaux de distribution influe également sur l’incidence des chocs. Les producteurs et les PME agroalimentaires qui sont bien connectés aux chaînes d’approvisionnement et relativement diversifiés sur le plan des fournisseurs et des produits ont de bonnes chances de surmonter des ruptures d’approvisionnement et de se relever plus rapidement après des perturbations. Être en prise avec les marchés internationaux est l’une des stratégies employées par les réseaux de distribution pour se prémunir contre les aléas de la production intérieure ou la variabilité de l’offre alimentaire dans le pays, qui peuvent secouer les systèmes agroalimentaires. La médaille a toutefois son revers: les mêmes liens peuvent se transformer en canal de transmission de chocs provoqués par les politiques publiques, comme on a pu le voir pendant la pandémie de covid-19 avec les confinements imposés, les fermetures de ports et les restrictions à l’exportation, qui ont bouleversé les chaînes d’approvisionnement alimentaire et les échanges internationaux. Le niveau de développement des infrastructures et de la logistique dans un pays entre en ligne de compte; ces deux facteurs peuvent soit représenter un poids supplémentaire, soit favoriser une reprise rapide.

Différents chocs et situations de stress touchent les systèmes agroalimentaires différemment

Les systèmes agroalimentaires sont exposés à des chocs et des situations de stress de types divers, qui diffèrent par leur nature et leur intensité. Certains peuvent avoir un impact positif, par exemple l’innovation technologique ou la pression sociale en faveur d’une plus grande inclusivité et d’une plus grande égalité. Mais dans la mesure où le présent rapport a pour thème l’amélioration de la résilience des systèmes agroalimentaires, il sera question ici des chocs et des situations de stress défavorables risquant de gêner les fonctions des systèmes. Cette analyse est indispensable pour pouvoir définir l’éventail de stratégies et d’investissements nécessaires pour prévenir, anticiper, absorber, s’adapter et se transformer.

Contrairement aux chocs qui ont un impact immédiat, les situations de stress sont des processus lents qui altèrent progressivement la nature interne des systèmes agroalimentaires, sapant leur capacité à s’adapter au changement et les rendant plus vulnérables. Les chocs et les situations de stress diffèrent également sur le plan de la prévisibilité. Une situation de stress représente une pression continue, souvent observable et prévisible – au moins en théorie – avec un degré de précision néanmoins variable. L’intensification de l’agriculture, par exemple, qui est une caractéristique des systèmes alimentaires modernes à haute productivité, peuvent menacer la durabilité environnementale et, à terme, la production32. Ce processus pouvant être observé et mesuré et ses conséquences faire l’objet de prévisions, il est possible d’agir pour le prévenir, s’y adapter et même se transformer, de manière à réduire les risques et les conséquences négatives. En revanche, les chocs constituent des bouleversements soudains, qui sont au mieux prévisibles sur la base de niveaux de probabilité et de l’expérience passée. Pour réduire la vulnérabilité et les risques, il est nécessaire d’identifier et de financer les mesures appropriées, notamment en matière d’évaluation des risques.

Les chocs et les situations de stress peuvent avoir de nombreuses origines relevant de divers domaines, notamment biophysique et environnemental, démographique et socioéconomique, biologique, et sociopolitique et juridique. Dans la sphère biophysique et environnementale, des exemples de chocs seraient des phénomènes météorologiques et géophysiques dangereux tels que séismes et tsunamis, tandis que le changement climatique et ses effets, l’érosion de la biodiversité et la dégradation des ressources naturelles constituent des sources de stress importantes. Les chocs d’origine démographique et socioéconomique comprennent par exemple les crises économiques, tandis que des inégalités socioéconomiques ou une forte poussée démographique, par exemple, engendrent des situations de stress. Dans la catégorie des chocs biologiques, on pense par exemple à des pandémies comme celle de la covid-19 ou à des accidents de sécurité sanitaire des aliments, tandis que des situations de stress peuvent être générées par l’apparition d’une résistance aux antimicrobiens ou par la persistance de problèmes de sécurité sanitaire des aliments. Dans le domaine sociopolitique, les chocs peuvent être des crises entraînant des troubles civils et des déplacements de population, ou l’instauration par un pays d’obstacles au commerce. Les exemples de situations de stress sociopolitiques comprennent la migration de détresse et la corruption endémique.

Les chocs et les situations de stress peuvent avoir des effets directs sur l’offre ou la demande agroalimentaire, ou les deux. Mais parce que la sécurité alimentaire dépend de manière fondamentale de l’existence de moyens de subsistance durables dans le secteur agroalimentaire, les impacts des chocs et des situations de stress sur l’offre agroalimentaire et sur la demande alimentaire sont étroitement liés. Lorsque les fournisseurs de produits agroalimentaires sont touchés, les revenus et le pouvoir d’achat des acteurs diminuent, ce qui peut ensuite se répercuter sur la demande de produits alimentaires et non alimentaires.

Pour savoir comment contrer les menaces auxquelles un système agroalimentaire est exposé, il est indispensable de comprendre les types de chocs et de situations de stress qui frappent le système, les mécanismes qui l'atteignent, et ses vulnérabilités propres. Par exemple, la sécheresse, les restrictions à l’exportation, les variations climatiques et les goulets d’étranglement dans les transports sont des problèmes qui peuvent tous réduire l’offre alimentaire, mais ils le font de différentes manières et par des canaux différents; de ce fait, les pays et les populations ne sont pas tous touchés de la même façon. L’impact d’un même choc ou d’une même situation de stress peut être extrêmement variable, en fonction des vulnérabilités du système agroalimentaire, des composantes touchées et de ses capacités de prévenir, anticiper, absorber, s’adapter et se transformer. Les conséquences d’un choc tel qu’une sécheresse sévère peuvent être atténuées par des investissements préventifs et anticipatifs dans l’irrigation; néanmoins, la sécheresse pourra quand même avoir des effets dévastateurs si les eaux de surface ou les eaux souterraines sont déjà surexploitées.

Le renforcement des capacités d’absorption au sein des systèmes agroalimentaires – thème principal du présent rapport – est complémentaire de la gestion des risques et devrait aller de pair avec elle, en particulier avec des mesures axées sur l’anticipation et la prévention. L’importance de renforcer la capacité d’absorption tient au coût et au potentiel souvent limité des initiatives d’intervention précoce, pourtant très payantes, compte tenu des moyens nécessaires pour anticiper à grande échelle des interventions ciblées sur des risques identifiables (encadré 2). En outre, une bonne capacité d’absorption est vitale face à des chocs dont la survenance et l’ampleur ne sont pas connus jusqu’à ce qu’ils se produisent et qui ne peuvent donc pas être contrés par des stratégies de gestion des risques permettant de réduire l’exposition et la vulnérabilité à des chocs anticipés.

La résilience des systèmes agroalimentaires dans des contextes mouvants

Si la résilience des systèmes agroalimentaires inquiète de plus en plus, c’est parce que la fréquence et l’intensité des chocs augmentent – depuis les catastrophes naturelles liées au climat et les zoonoses et maladies des cultures, jusqu’aux flambées de prix subites. Cottrell et al. (2019) associent ce phénomène à un nombre croissant de conflits exacerbés par le changement climatique et la raréfaction des ressources naturelles40. Les conflits s’avèrent être une cause majeure de la recrudescence de la faim ces dernières années41. En particulier, la prévalence de la faim a progressé au Moyen-Orient et en Afrique du Nord depuis 2012, principalement en raison du niveau croissant de conflits et d’instabilité42.

Le changement climatique a aussi des conséquences sur les systèmes agroalimentaires, les chaînes d’approvisionnement alimentaire et la sécurité alimentaire par le biais de chocs de courte durée, tels que des phénomènes météorologiques extrêmes, et de situations de stress s’installant lentement, comme l’élévation des températures, la désertification, la salinisation et l’appauvrissement de la biodiversité43. Le changement climatique est également associé à des modifications de l’occurrence géographique, de la prévalence et de l’intensité des attaques de ravageurs et des maladies transfrontières des animaux et des végétaux, et à des évolutions en matière de pathogènes, de mycotoxines, de biotoxines marines et de contamination par des métaux lourds, qui sont autant de menaces pour la sécurité sanitaire des aliments31, 44, 45. Les systèmes agroalimentaires sont néanmoins eux-mêmes un important facteur de changement climatique. Des mécanismes novateurs destinés à réduire les risques climatiques, l’adoption de techniques de production climato-intelligentes et la conservation et la remise en état des environnements naturels peuvent renforcer la durabilité et la résilience des systèmes agroalimentaires face à la plus grande variabilité du climat et à la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes12.

La mondialisation a modifié l’ensemble de risques auquel les systèmes agroalimentaires sont exposés. D’un côté, elle aplanit les aléas d’approvisionnement dus aux chocs intérieurs grâce au commerce international; de l’autre, elle favorise la propagation de chocs imprévisibles depuis des lieux éloignés. Par exemple, après la crise financière mondiale de 2008-2009, l’économie du Mexique a chuté de près de 7 pour cent en 2009, les ménages pauvres ont diminué leurs dépenses alimentaires et le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire grave est passé de 9,8 millions en 2008 à 12,2 millions en 201046.

Plus récemment, la crise sanitaire de la covid-19 a bien montré comment des crises touchant d’autres systèmes pouvaient atteindre les systèmes agroalimentaires: pour contenir la propagation du virus, les pouvoirs publics ont imposé des confinements qui ont déstabilisé les chaînes d’approvisionnement alimentaire mondiales et nationales. Les problèmes générés sur le plan de la disponibilité de la main-d’œuvre, de l’importation et de la distribution des intrants agricoles, et des réseaux logistiques et de transport ont fortement secoué les chaînes d’approvisionnement alimentaire, en particulier celles des produits périssables à valeur élevée tels que les fruits et légumes, suscitant des inquiétudes quant à la sécurité alimentaire et la nutrition47, 48.

De nombreuses chaînes d’approvisionnement alimentaire ont fait preuve d’une remarquable résilience et bénéficié du soutien des autorités gouvernementales qui ont souligné le caractère essentiel du secteur alimentaire. Heureusement aussi, lorsque la pandémie s’est déclarée, les marchés alimentaires mondiaux étaient bien approvisionnés et stables, et les rayons de la plupart des supermarchés sont restés garnis. Les pays ont tiré les leçons de la crise de 2008-2009 et pris des mesures pour réduire la vulnérabilité à de futures pénuries alimentaires. La plupart des pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, très dépendants des importations alimentaires, ont multiplié les initiatives destinées à encourager la production alimentaire intérieure, à diversifier les sources d’importation et à constituer des stocks alimentaires nationaux. La pandémie a aussi été l’occasion pour beaucoup de pays de revoir leurs débouchés commerciaux, par exemple pour vendre sur les marchés intérieurs au lieu d’être tributaires des exportations, comme cela a été le cas du secteur du café au Kenya49.

Selon une étude de Béné et al. (2021), malgré le désordre causé par les achats de panique les premiers temps, il n’est pas clairement établi que les disponibilités alimentaires aient diminué pendant la pandémie50. En fait, pendant la pandémie de covid-19, la sécurité alimentaire et la nutrition ont été menacées principalement non pas par le manque de disponibilités alimentaires mais par les difficultés souvent importantes d’accès physique et économique des ménages à de la nourriture, en particulier en milieu urbain et dans les pays à revenu faible ou intermédiaire50. La pandémie a provoqué des baisses dramatiques du pouvoir d’achat de nombreux ménages en raison des confinements et des autres restrictions ayant entraîné des pertes d’emploi et une chute des revenus. Le secteur des services, qui emploie la plus grande partie de la population dans beaucoup de pays, a été durement touché, ce qui a fait basculer de nombreux ménages vulnérables dans la pauvreté et l’insécurité alimentaire. Des millions de foyers ont été contraints de réduire leurs dépenses alimentaires, avec un risque élevé de diminution des apports caloriques globaux et de la qualité de l’alimentation.

Les répercussions de ces crises passées ou présentes montrent à quel point les systèmes agroalimentaires actuels sont fragiles et négligent certains aspects tels que l’équité, l’accès, la résilience et la durabilité. Ils ne fournissent pas à tous des aliments nutritifs en quantité suffisante et sont les premiers responsables de l’appauvrissement de la biodiversité, de la dégradation des terres et de la raréfaction de l’eau douce. Ils interfèrent fortement avec les cycles mondiaux de l’azote et du phosphore et représentent une source importante d’émissions de GES responsables du changement climatique51. La pandémie de covid-19 a aussi avivé les craintes de zoonoses dans les systèmes agroalimentaires52.

En devenant plus inclusifs, résilients et durables, les systèmes agroalimentaires peuvent garantir un accès à de la nourriture – un accès non seulement physique, mais aussi économique. Une solution pour y parvenir est de faire en sorte que l’agriculture puisse produire des produits alimentaires et non alimentaires et ainsi procurer des revenus et des moyens d’existence aux 3,4 milliards d’êtres humains qui vivent en milieu rural si l’on en croit les estimations53. La résilience est un moyen d’assurer la durabilité, en particulier pendant des périodes de bouleversement54, 55, et est donc indispensable pour permettre un développement durable56, 57. Améliorer la durabilité des systèmes agroalimentaires passe, entre autres, par la réduction de leurs vulnérabilités intrinsèques et par l’amélioration de leur capacité à gérer les risques associés à de nombreux chocs et situations de stress.

Cadre proposé pour renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires

La crise mondiale déclenchée par la pandémie de covid-19 et ses répercussions sur la sécurité alimentaire et les ressources des ménages vient conforter la nécessité de rechercher les points faibles des systèmes agroalimentaires, les risques auxquels ils sont exposés et pourquoi ils ne parviennent pas à fournir ce que l’on attend d’eux. L’exploration de ces questions aidera à renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires, élément essentiel des efforts déployés pour reconstruire en mieux et atteindre les ODD. Rendre les systèmes agroalimentaires résilients signifie améliorer leur capacité à prévenir, anticiper, absorber, s’adapter et se transformer face aux risques que représentent les chocs et situations de stress et à continuer de remplir leur mission, à savoir maintenir les moyens d’existence des acteurs des systèmes agroalimentaires et assurer la sécurité alimentaire et la nutrition de tous.

Un cadre concret pour analyser la résilience des systèmes agroalimentaires

Dans le prolongement des considérations qui précèdent, la figure 2 présente un cadre conceptuel permettant d’analyser la résilience des systèmes agroalimentaires. Il articule l’analyse autour de trois questions fondamentales: «Résilience à quoi?», «Résilience de quoi?» et «Résilience pour quoi?». L’objectif général est de développer la résilience des systèmes agroalimentaires aux chocs et aux situations de stress afin que tous les acteurs et les parties concernées – producteurs, intermédiaires et consommateurs – puissent prospérer tout en contribuant de manière durable à la sécurité alimentaire et nutritionnelle, dont ils bénéficieront eux-mêmes.

FIGURE 2
Analyse de la résilience des systèmes agroalimentaires – un cadre conceptuel

Comme on le voit dans la colonne de gauche de la figure 2 («Résilience à quoi?»), les chocs et les situations de stress peuvent être très divers et avoir différentes origines. La nature et l’ampleur de leurs effets dépendront non seulement des chocs et situations de stress eux-mêmes, mais aussi des vulnérabilités et de la capacité de résilience propres à chacune des composantes et des acteurs des systèmes agroalimentaires, ainsi que du contexte général (deuxième colonne «Facteurs contextuels»). Ces facteurs comprennent les dimensions climatique, environnementale, sociale, économique et politique qui influencent ou déterminent les activités des systèmes agroalimentaires. D’autres facteurs contextuels sont les systèmes et les secteurs (tels que l’énergie et la santé) qui sont extérieurs mais liés aux systèmes agroalimentaires. La pandémie de covid-19 constitue un bon exemple de l’interaction entre les systèmes alimentaire et sanitaire. Le secteur de l’énergie en est un autre: il faut de l’énergie pour faire pousser des végétaux, transformer et distribuer des produits alimentaires, mais l’on cultive aussi des plantes pour produire de l’énergie sous forme d’agrocarburants. De plus, les cultures agricoles non alimentaires – essentielles pour faire vivre bon nombre d’exploitants – sont en concurrence avec la production agricole pour l’utilisation de ressources limitées. Un système agroalimentaire résilient et durable doit trouver un juste équilibre entre ses deux objectifs de fournir de la nourriture à tous et de procurer des revenus tirés de produits non alimentaires, tout en préservant le capital de ressources naturelles. Le cadre met en évidence ces interactions, qui contribuent au fonctionnement des systèmes agroalimentaires et aux résultats qu’ils produisent.

La manière dont les chocs et les situations de stress touchent les systèmes agroalimentaires dépend aussi des caractéristiques de leurs composantes. La troisième colonne («Résilience de quoi?») présente des systèmes agroalimentaires nationaux dans lesquels les produits agricoles alimentaires et non alimentaires sont produits par des ménages agricoles (voir le glossaire), des producteurs et des entreprises qui sont tributaires du capital de ressources naturelles et des services fournis par les écosystèmes. Les denrées alimentaires sont ensuite transformées, entreposées, transportées et distribuées par des entreprises agroalimentaires jusqu’aux ménages et aux consommateurs, par l’intermédiaire des chaînes d’approvisionnement alimentaire et des réseaux de transport intérieurs. Il importe de noter le rôle déterminant joué par les chaînes d’approvisionnement alimentaire et les réseaux de transport alimentaire intérieurs pour connecter la production et la consommation. Que les produits alimentaires soient d’origine nationale ou importés, ils doivent passer par ces circuits pour parvenir jusqu’aux ménages et aux consommateurs. Les ménages agricoles vivant en milieu rural – c’est-à-dire les petits producteurs – sont à la fois consommateurs et producteurs de denrées alimentaires. L’impact des chocs sur la sécurité alimentaire et la nutrition des ménages agricoles dépend aussi de leur degré de participation aux activités agricoles et agroalimentaires (chapitre 4).

Pour développer la résilience des systèmes agroalimentaires, il est nécessaire d’agir sur toutes les composantes des systèmes agroalimentaires nationaux, depuis les producteurs jusqu’aux consommateurs, y compris le commerce international. Il faut également maintenir et restaurer les services écosystémiques et la biodiversité afin de préserver le capital de ressources naturelles dont l’agriculture dépend.

La quatrième colonne («Résilience pour quoi?») illustre les résultats ou les objectifs que l’on recherche en voulant accroître la résilience des systèmes agroalimentaires. Les ménages agricoles, les producteurs et les autres acteurs des chaînes d’approvisionnement alimentaire produisent, transforment et fournissent des produits alimentaires en utilisant des ressources, des innovations et des technologies à leur propre avantage. Leur objectif personnel est de maximiser les bénéfices, d’améliorer leurs moyens d’existence et de réduire les risques. Ils ont besoin d’être résilients pour rester économiquement viables face aux chocs et aux situations de stress. Les acteurs doivent être conscients qu’ils font partie d’un système socioenvironnemental plus vaste et doivent veiller à une gestion et une utilisation durables des ressources naturelles dans l’intérêt des générations actuelles et futures. Les chaînes d’approvisionnement alimentaire et les réseaux de transport alimentaire intérieurs doivent être résilients pour pouvoir fournir les biens publics et la coordination nécessaires à une circulation continue, durable et stable des marchandises dans l’ensemble du système. C’est une condition essentielle de réussite pour les agriculteurs et les entreprises agroalimentaires, permettant l’accès physique et économique de tous à des aliments sûrs et nutritifs, de manière à garantir la sécurité alimentaire des ménages et de chacun de leurs membres en tant que consommateurs finals. Le présent rapport se place au niveau des ménages; en effet, si un ménage se trouve en situation d’insécurité alimentaire, aucun de ses membres n’est assuré de manger à sa faim. Cependant, comme la nourriture n’est pas toujours distribuée de manière égale dans le cadre familial, même dans les ménages en situation de sécurité alimentaire, certaines personnes, en particulier les femmes en âge de procréer, les adolescentes et les jeunes enfants, peuvent se trouver en situation d’insécurité alimentaire. Les variabilités intrafamiliales doivent être prises en compte pour cibler convenablement les individus les plus vulnérables.

Il est important de souligner la complexité des relations entre les différentes parties du cadre d’analyse de la figure 2, ainsi que leur caractère bidirectionnel. Les chocs qui touchent directement la production alimentaire ou les importations alimentaires se propagent en aval par le biais des liens avec les marchés et finissent par toucher les ménages et les consommateurs et dégrader leur niveau de sécurité alimentaire. Simultanément, des chocs externes ayant des effets sur la consommation alimentaire ou d’autres parties du système peuvent aussi se répercuter en amont vers les producteurs primaires. Par exemple, des politiques nouvelles qui pénalisent les activités de production et les revenus dans d’autres secteurs économiques peuvent par ricochet toucher les systèmes agroalimentaires en réduisant la demande de produits tant alimentaires que non alimentaires. La suppression des subventions sur les carburants et combustibles a des effets directs sur les maillons de la chaîne d’approvisionnement alimentaire très consommateurs d’énergie, comme la transformation et le transport, déclenchant une série de retombées sur les producteurs primaires et les consommateurs.

Le cadre conceptuel proposé suggère cinq angles d’analyse de la résilience des systèmes agroalimentaires qui structurent le présent rapport:

  1. Les ménages et producteurs agricoles et les entreprises agroalimentaires, comprenant les petits exploitants et les PME agroalimentaires, dont l’objectif est d’améliorer au maximum leurs moyens d’existence et les résultats de leurs entreprises. L’agriculture (cultures, élevage, pêche, aquaculture et forêts) transforme la terre et les autres ressources naturelles, le capital et le travail en produits alimentaires et non alimentaires. Les entreprises agroalimentaires interviennent dans la transformation, la fabrication, le conditionnement et la distribution de produits alimentaires.

  2. Les chaînes d’approvisionnement alimentaire, dont l’efficacité, la résilience et les capacités – depuis l’échelle locale jusqu’au niveau mondial – dépendent de la structure du marché agroalimentaire et sont influencées par les infrastructures des réseaux et les moyens logistiques.

  3. Les réseaux alimentaires intérieurs qui s’étendent sur tout le continuum rural-urbain. La connectivité à l’intérieur d'un système agroalimentaire est fortement influencée par les infrastructures de transport et les moyens logistiques, qui jouent un rôle essentiel dans la manière dont le système gère les chocs auxquels le réseau est soumis.

  4. Les ménages, y compris les personnes qui les composent, qui représentent le niveau de la demande finale de produits alimentaires. L’analyse porte ici sur la sécurité alimentaire et la nutrition des ménages ruraux vulnérables, et sur la façon dont différents facteurs y contribuent, notamment l’accès aux services de base comme l’éducation et l’assainissement.

  5. Les systèmes agroalimentaires nationaux, qui regroupent tous les sous-systèmes – économiques, sociaux et environnementaux – comprenant l’éventail d’acteurs, de réseaux et de chaînes d’approvisionnement alimentaire qui contribuent à la sécurité alimentaire et à la nutrition et aux impacts sur l’environnement. Un système agroalimentaire englobe les conditions climatiques et environnementales, ainsi que les facteurs macroéconomiques, les institutions, les politiques et les réglementations, et le rôle du commerce international dans l’équilibrage de l’offre et de la demande.

La nécessaire gestion des arbitrages

Dans le cadre proposé à la figure 2, un choc qui se produit en un point du système agroalimentaire peut se propager aux autres composantes du système. Face à ce choc, tous les acteurs du système agroalimentaire auront besoin de solutions pour en absorber les effets et s’y adapter. Une possibilité pour les chaînes d’approvisionnement alimentaire est de diversifier leurs fournisseurs de produits alimentaires en développant les échanges internationaux. Un pays dont les systèmes agroalimentaires sont fortement connectés aux marchés mondiaux et régionaux peut plus facilement réagir à des chocs intérieurs en important ce dont il a besoin. Mais le pays peut alors être plus exposé à des chocs externes, en particulier ceux provoqués par des mesures publiques telles que des restrictions au commerce. Il doit donc trouver un compromis entre risques internes et externes. On comprend qu’une question importante se pose: comment gérer plusieurs risques provenant de sources diverses. Un pays très dépendant des importations alimentaires doit impérativement gérer ses échanges internationaux de manière à réduire son exposition aux risques externes. Il est possible d’équilibrer ses approvisionnements alimentaires intérieurs avec des importations diversifiées et des partenaires commerciaux étrangers ayant des profils socioéconomiques et climatiques différents afin de gérer de nombreux risques de sources diverses.

La diversification est une stratégie de résilience fréquente chez les ménages agricoles dans les pays à faible revenu. En l’absence de marchés fonctionnant bien dans le domaine du crédit et de l’assurance récolte et bétail, la diversification des cultures et leur intégration avec une production animale aident à atténuer les risques associés à la variabilité du climat et à l’instabilité des marchés. Les ménages agricoles diversifient également leurs activités en dehors de l’exploitation afin de pallier la saisonnalité des revenus agricoles et de contrer les chocs touchant la production agricole. En dehors de l’agriculture, les ménages travaillant aussi dans le secteur non structuré diversifient leurs moyens de subsistance et leurs sources de revenu pour faire face aux incertitudes attachées aux emplois informels. La diversification peut donc constituer un outil de résilience puissant, très utile lorsqu’un choc survient.

La diversification a toutefois un coût: elle empêche la spécialisation qui permet aux ménages d’accumuler de l’expérience. Un compromis peut donc être nécessaire entre renforcer la résilience en se diversifiant d’un côté, et améliorer l’efficience de l’autre. Il y a peu encore, on privilégiait la spécialisation, synonyme de gains d’efficience, au détriment de la diversification58, 59. Mais il est devenu de plus en plus évident que cette efficience accrue n’était possible que dans une situation stable. Dans un monde où les chocs imprévus se multiplient et s’ajoutent à des situations de stress au long cours, la spécialisation pourrait en réalité réduire l’efficience en cas de choc. L’arbitrage entre efficience et résilience est un exercice difficile car renforcer la résilience peut diminuer l’efficience à court terme mais l’améliorer à long terme.

Il faut donc se demander quel type de diversification est nécessaire et à quel degré doit-on y avoir recours pour que son utilité soit maximale? Le principe est de rechercher un ensemble varié de solutions à des problèmes précis – et non pas de faire de la diversification un but en soi – de sorte que la diversification facilite les synergies entre l’efficience et la résilience59. Les pays limités en ressources agricoles, comme la plupart de ceux du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, n’ont pas forcément beaucoup de possibilités de satisfaire leurs besoins alimentaires en augmentant et en diversifiant leur production agricole. Compte tenu de leurs ressources en terre et en eau peu abondantes, ils pourront avoir besoin de maximiser leur efficience en se spécialisant dans des produits pour lesquels ils possèdent des avantages comparatifs, tout en achetant les autres produits sur les marchés internationaux. Ils seraient ainsi plus dépendants des importations pour les denrées alimentaires essentielles qu’ils ne peuvent pas produire localement en quantités suffisantes. Les risques de dépendance importante à l’égard des importations peuvent être atténués d’une part en diversifiant les sources d’importation, c’est-à-dire en choisissant des pays et des régions aux profils climatiques différents, et d’autre part en constituant des stocks alimentaires afin de parer aux incertitudes d’approvisionnement en période de crise.

La redondance – la duplication d’éléments ou de fonctions critiques d'un système dans le but d’accroître la fiabilité de celui-ci – est une autre stratégie de résilience efficace. Elle renforce la capacité d'un système agroalimentaire à absorber les chocs en affectant la même tâche à plusieurs acteurs. Mais introduire de la redondance dans les systèmes agroalimentaires peut être coûteux pour la société et est particulièrement difficile à faire lorsque les moyens sont limités. Une plus grande redondance dans une composante du système peut amoindrir la résilience dans une autre. Par exemple, le choix d’importer des produits alimentaires ou d’augmenter la production alimentaire commerciale dans une nouvelle région peut exposer les petits producteurs agricoles à une concurrence insoutenable en cas de nouveau choc.

S’il est largement admis que la redondance et la diversification améliorent la résilience, elles peuvent avoir des contreparties en termes d’efficience et même d’équité. L’évaluation du niveau optimal de redondance et de diversification et le choix des parties d’un système où elles devraient être appliquées demeurent très dépendants du contexte et demandent de bien comprendre les différents risques et leurs incidences potentielles ainsi que les autres solutions possibles. Une diversification par l’intégration des productions végétale et animale peut créer des synergies entre la résilience et l’efficience: les résidus de récolte peuvent être utilisés pour nourrir les animaux, et les effluents d’élevage pour maintenir la bonne santé des sols. En même temps, l’existence d’un système performant d’assurance récolte et bétail peut encourager les producteurs à limiter la diversification et l’intégration des productions végétale et animale au niveau nécessaire pour augmenter la productivité (par exemple la rotation des cultures) et non pour réduire les risques. Le choix final dépendra de l’équilibre à trouver entre les coûts, sur le plan des pertes d’efficience, et les bénéfices retirés d’une meilleure résilience. Minimiser les coûts, maximiser les bénéfices et réduire les dommages et les pertes nécessite de trouver les combinaisons optimales qui créent des synergies et équilibrent les avantages et les inconvénients, de sorte que la redondance et la diversification augmentent l’efficience à long terme sans faire perdre les avantages de la spécialisation. Même si les considérations de durabilité peuvent orienter la réflexion, ces arbitrages peuvent être très complexes en raison des immenses incertitudes qui entourent les chocs, les situations de stress et les réactions en chaîne susceptibles de survenir.

Objet du présent rapport

Ce chapitre fait valoir l’urgence de renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires pour assurer la sécurité alimentaire et la nutrition de tous, aujourd’hui et dans le futur. Il souligne les liens étroits qui existent entre résilience et durabilité, avec leurs dimensions sociales, économiques et environnementales. Dans les dimensions économiques et sociales, une attention particulière doit être accordée à la nécessité d’assurer des moyens d’existence et des revenus convenables aux petits producteurs et aux autres personnes vulnérables dépendant du secteur agroalimentaire pour vivre. Il met en évidence la complexité et la diversité des systèmes agroalimentaires, ainsi que le large spectre de situations de stress et de chocs auxquels ils sont exposés. Tous ces facteurs compliquent singulièrement la tâche de rendre les systèmes agroalimentaires plus résilients; elle suppose qu’un ensemble d’acteurs publics, privés et locaux agissent d’urgence, collectivement et individuellement, dans la même direction. À cette fin, le présent chapitre propose un cadre conceptuel afin de comprendre les risques, les vulnérabilités et les capacités des systèmes agroalimentaires, axé plus spécialement sur la capacité d’absorption, ainsi que cinq angles d’analyse pour évaluer leur résilience: les ménages et producteurs agricoles et les entreprises agroalimentaires, les chaînes d’approvisionnement alimentaire, les réseaux alimentaires intérieurs, les ménages, et les systèmes agroalimentaires nationaux.

Le contenu des quatre chapitres suivants s’articule autour de ces angles d’analyse. Le chapitre 2 examine la capacité d’absorption des systèmes agroalimentaires à travers quatre indicateurs qui mesurent la solidité de la production primaire, les disponibilités alimentaires, l’accès physique à la nourriture et l’accès économique à la nourriture. Le chapitre 3 se penche sur la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire et des entreprises agroalimentaires. Le chapitre 4 porte sur la résilience des moyens d’existence des ruraux, en particulier des plus vulnérables. En conclusion de cette analyse, le chapitre 5 explore les mesures et investissements prioritaires pour renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires à différents niveaux.

Ce rapport s’inscrit dans la volonté exprimée lors du Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires de prendre une série de mesures concrètes pour favoriser une transformation des systèmes agroalimentaires permettant la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. L’appel à l’action lancé par le Sommet a mis en avant cinq objectifs, dont l’un est de renforcer la résilience face aux vulnérabilités, aux chocs et aux situations de stress afin d’assurer le fonctionnement ininterrompu de systèmes alimentaires sains et durables. Ce rapport apporte des informations et des recommandations susceptibles d’aider les acteurs des systèmes agroalimentaires à gérer la vulnérabilité aux chocs et aux situations de stress et à renforcer la capacité des systèmes agroalimentaires de procurer des moyens d’existence et d’assurer de façon durable l’accès permanent de tous à des quantités suffisantes d’aliments sûrs et nutritifs même en cas de perturbations.

Messages clés

Le secteur agricole est mieux armé pour absorber les perturbations lorsqu’il peut accéder à des marchés nationaux et internationaux diversifiés et lorsqu’il fournit une gamme de produits alimentaires et non alimentaires également diversifiée. Cette situation se rencontre principalement dans les pays à revenu élevé ou dans ceux qui possèdent un secteur agricole important.

Complétée par des stocks et des importations, une production intérieure diversifiée permet d’assurer des disponibilités alimentaires même en cas de perturbations. Cela étant, les stocks et les importations ne pourront pas forcément garantir à eux seuls la diversité de fruits, de légumes et d’autres denrées périssables nécessaires à une alimentation saine, du fait des contraintes logistiques inhérentes à ces produits.

Un réseau de transport robuste renforce la résilience des systèmes agroalimentaires en cas de chocs et de situations de stress, et garantit un accès physique à la nourriture au niveau local. Pourtant, pour la moitié des 90 pays analysés, la fermeture d’un itinéraire de transport d’importance critique pourrait accroître de 20 pour cent au moins le temps de trajet des aliments déviés de l’itinéraire en question, ce qui pourrait avoir une incidence sur le coût des aliments pour 845 millions de personnes.

L’une des caractéristiques essentielles d'un système agroalimentaire résilient est sa capacité à assurer l’accès à une nourriture nutritive suffisante, mais, sur les 143 pays analysés, quelque 3 milliards de personnes ne peuvent s’offrir une alimentation qui les mette à l’abri de la malnutrition, et il faut ajouter à ce chiffre le milliard de personnes qui courent le risque de se retrouver dans cette même situation si un choc vient à les priver d’un tiers de leurs revenus.

Les pays à faible revenu sont ceux où la probabilité de ne pouvoir s’offrir une alimentation saine est la plus forte. En revanche, dans 95 pour cent des cas, les personnes pour lesquelles une alimentation saine est abordable en temps normal mais qui restent sous la menace d’un choc ou de situations de stress vivent dans un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure ou supérieure. Dans les pays à faible revenu, le risque est plutôt qu’un nombre beaucoup plus grand de personnes ne puissent même plus se permettre une alimentation suffisamment énergétique si leurs revenus diminuent d’un tiers.

S’appuyant sur le cadre conceptuel décrit au chapitre 1, le présent chapitre utilise des indicateurs nationaux comme indicateurs supplétifs pour évaluer la vulnérabilité des systèmes agroalimentaires aux chocs et aux situations de stress. Il analyse l’une des cinq principales capacités de résilience, à savoir la capacité des systèmes agroalimentaires à absorber les perturbations auxquelles il sont soumis – qu’il s’agisse d’une catastrophe naturelle, d’une attaque de ravageurs ou d’une crise financière – à l’aide des multiples voies qui peuvent être empruntées pour protéger la sécurité alimentaire et maintenir les moyens d’existence des acteurs des systèmes agroalimentaires. Il est important d’étudier ces différentes voies possibles si l’on veut comprendre comment améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires. La capacité d’absorption est une caractéristique essentielle des systèmes agroalimentaires, qui permet de maintenir leurs fonctions, d’assurer des disponibilités d'aliments et de veiller à l’accessibilité de ceux-ci, et de générer des revenus.

L’analyse examine quatre dimensions clés des systèmes agroalimentaires: i) la vitalité de la production primaire; ii) les disponibilités en aliments; iii) l’accessibilité physique de ces aliments; et iv) leur accessibilité économique. Ces dimensions sont déterminantes pour la sécurité alimentaire, la nutrition et la pérennité des moyens d’existence. La résilience des systèmes agroalimentaires dépend d’un grand nombre de facteurs, dont certains – les dimensions sociales et environnementales, par exemple – ne figurent pas parmi ces indicateurs. Le présent chapitre examinant la résilience au niveau des systèmes, la capacité d’absorption des individus n’est pas abordée.

Résilience des fonctions des systèmes agroalimentaires

Évaluer la résilience des systèmes agroalimentaires nationaux est un défi, car chacun d’eux comporte de nombreux acteurs et composantes, à différents niveaux, par ailleurs interdépendants, de la production à la consommation, et notamment au stade des échanges internationaux. Certains de ces acteurs et composantes sont parfois plus résilients que d’autres, et un choc ou des situations de stress donnés peuvent toucher spécifiquement un ou plusieurs d’entre eux. Une évaluation de la résilience doit prendre en compte l’éventail complet des acteurs et des niveaux concernés. La première étape consiste à comprendre le fonctionnement de ces différents niveaux et à en déterminer les vulnérabilités. Un processus participatif et inclusif est susceptible de faciliter la participation des acteurs des systèmes à une riposte plus coordonnée aux chocs et aux situations de stress1.

Les systèmes agroalimentaires diffèrent considérablement sur le plan de la structure et de l’accès aux marchés et aux services, mais leurs principaux acteurs sont invariablement les producteurs agricoles, les transformateurs, les distributeurs et les consommateurs. Si l’on s’appuie sur le cadre conceptuel illustré à la figure 2, la résilience des systèmes agroalimentaires nationaux est fonction:

  1. du système national de production agricole existant;

  2. des disponibilités alimentaires offertes aux consommateurs en combinant la production intérieure, les stocks et les importations;

  3. de l’efficience et de la souplesse des systèmes de transport de denrées alimentaires, qui facilitent le commerce intérieur et permettent un accès physique à la nourriture;

  4. de l’accès économique des populations à la nourriture.

L’ensemble des chocs et des situations de stress qui touchent l’une de ces dimensions auront, selon toute vraisemblance, des effets sur les autres et influeront sur la sécurité alimentaire et sur les moyens d’existence des acteurs, en particulier les plus vulnérables. Les chocs peuvent aussi se propager par le biais des voies commerciales, des marchés financiers, des envois de fonds, etc. Lors de perturbations à grande échelle, comme la crise financière de 2008-2009 ou la pandémie de covid-19 dans les premiers temps, les restrictions à l’exportation ont eu une incidence sur les disponibilités alimentaires2, 3, 4. La diversification des partenaires commerciaux internationaux est cruciale pour se prémunir contre les chocs externes. Il faut pour cela tenir compte d’un certain nombre de facteurs qui influent sur le choix de ces partenaires – du prix et de la proximité au degré d’intégration dans l’économie mondiale. Leur diversification dépend alors de la balance entre le coût et les avantages d’une meilleure résilience.

Il est également essentiel à la sécurité alimentaire, à la nutrition et à la santé que l’on parvienne à diversifier la production alimentaire destinée au marché intérieur, les stocks et les exportations. Cela permet en effet aux systèmes agroalimentaires de maintenir les disponibilités alimentaires malgré les chocs, qu’il s’agisse d’attaques de ravageurs ou de variations brutales de la demande telles que celles enregistrées durant la pandémie de covid-19. Les exportations sont importantes pour créer des sources de revenu. Elles constituent également une ressource à laquelle recourir pour absorber les chocs sur l’offre et la demande, et traduisent l’ampleur de la base agricole d’un pays.

Absorber les chocs au niveau du secteur de LA production primaire

Au cours d’une campagne agricole, les producteurs doivent prendre des décisions malgré les incertitudes liées au temps, aux prix, à la logistique, aux ravageurs, aux maladies et à d’autres facteurs. Leur résilience dépend de la pertinence de leurs décisions concernant, par exemple, les stratégies de diversification de leur activité agricole ou de leurs revenus, mais aussi de facteurs contextuels tels que le capital de ressources naturelles, l’accès au crédit, aux marchés et aux infrastructures, et la viabilité des pratiques de production.

Associer ces différentes caractéristiques dans un même indicateur national est délicat. En termes simples, la capacité du secteur de la production primaire d’un pays à absorber un choc repose dans une large mesure sur deux facteurs: i) la diversité de la production; et ii) la diversité des marchés de produits quant aux partenaires commerciaux et à la demande intérieure de ces produits. Ces facteurs sont à la base de l’indice de souplesse de la production primaire (ISPP), élaboré pour le présent rapport afin de mesurer le degré de diversité des produits et la capacité potentielle de produire pour le marché intérieur ou les marchés d’exportation. Une valeur élevée de cet indice traduit de multiples possibilités de créer de la valeur agricole et de trouver des débouchés pour écouler la production primaire (en d’autres termes, une redondance des canaux de la demande), et donc une plus forte capacité à absorber les chocs. L’encadré 3 décrit les fondements méthodologiques de l’ISPP.

La diversification des partenaires commerciaux et des produits a un coût. Les producteurs prennent leurs décisions sur la base du prix des intrants et des extrants, et des contraintes de ressources, ce qui influe sur l’avantage comparatif des exportations agricoles d’un pays. Un pays peut avoir besoin de surmonter des obstacles au commerce, comme des infrastructures limitées ou la nécessité de respecter des mesures phytosanitaires, et de prendre des décisions fondées sur des relations établies de longue date avec d’autres pays ou sur une orientation politique. Ouvrir les marchés, éviter les restrictions à l’exportation, qui aggravent l’instabilité des marchés, et limiter le subventionnement des produits sont des exemples de bonnes pratiques permettant d’accroître la souplesse de la production.

La figure 3 présente les trois dimensions de l’ISPP exprimé en valeur protéique – un indicateur supplétif acceptable de la valeur agricole, compte tenu de la rareté des données sur les prix à la production – et calculé sous la forme d’une moyenne sur la période 2016-2018 de tous les produits de la culture et de l’élevage. La contribution de la diversité des exportations et des partenaires commerciaux est portée sur l’axe horizontal, et la contribution de la diversité de la production destinée au marché intérieur est portée sur l’axe vertical. La taille de la bulle indique la contribution de la balance entre ces deux éléments (ventes sur le marché intérieur ou exportations). Les lignes diagonales représentent la somme de la diversité des exportations et de celle du marché intérieur, les pays situés sur la même ligne affichant le même degré de diversité.

Figure 3
ISPP, en valeur protéique, 2016-2018

Les résultats indiquent que les pays ont plusieurs solutions pour diversifier leur production et pour vendre les produits agricoles sur les marchés intérieurs et à l’étranger. Ces solutions sont déterminées par une série de facteurs propres à chaque pays. Premièrement, l’avantage comparatif d’un pays (ou son absence d’avantage comparatif) concernant la production et l’exportation de produits agricoles dépend du capital de ressources, des infrastructures, du coût des intrants et de l’existence ou non d’un environnement propice aux affaires. Deuxièmement, lorsqu’un pays est ouvert aux échanges internationaux, les producteurs peuvent exporter aisément, sans restrictions ni obstacles au commerce de la part des importateurs. Troisièmement, l’ampleur de la demande intérieure par rapport aux marchés nationaux peut déterminer en partie l’importance des exportations. En Chine, en Inde et au Nigéria, par exemple, la faible contribution des exportations à la diversification (bulle ovale bleue de la figure 3) peut s’expliquer en partie par l’importance de leur secteur agricole et par une demande intérieure diverse. Cette situation, en revanche, accroît la vulnérabilité aux fléchissements économiques nationaux, signalée par la petite taille de la bulle orange, qui indique une orientation vers le marché intérieur.

Les pays à revenu élevé qui mènent des politiques d’ouverture des marchés, comme l’Australie, ou qui font partie de grands blocs commerciaux tels que l’Union européenne, enregistrent quelques-unes des valeurs les plus élevées de l’ISPP (voir l’ovale vert de la figure 3), associant diversité sur les marchés intérieurs et sur les marchés d’exportation. Cependant, le fait d’être ouvert au commerce et de posséder un avantage comparatif n’augmente pas nécessairement la souplesse de la production. En Argentine et au Brésil, plus de 70 pour cent de la valeur protéique proviennent de deux produits: le soja et le maïs. La spécialisation dans un petit nombre de produits d’exportation pour lesquels la demande intérieure est limitée accroît la vulnérabilité aux crises internationales, comme une baisse brutale des prix consécutive à l’offre excédentaire d’autres pays exportateurs.

Pour plus de 80 pour cent des pays, l’ISPP est déterminé par la diversité du marché intérieur. Cet aspect est particulièrement vrai pour les pays présentant une faible valeur d’ISPP, principalement dans le groupe des pays à faible revenu dont le commerce extérieur est peu développé et dont la majeure partie de la production est consommée localement (ovale rosé de la figure 3)7. La conséquence est une vulnérabilité particulière du secteur de la production primaire aux baisses brutales de revenu au niveau nationalc, même dans des pays très peuplés comme le Bangladesh et l’Indonésie, où la demande intérieure est forte mais où la diversité des produits est inférieure à celle de la Chine et de l’Inde, par exemple. Les pays à revenu élevé qui protègent leur secteur agricole et n’ont qu’un avantage comparatif limité dans ce domaine, comme le Japon et la Norvège, présentent également une faible diversité des exportations et des marchés intérieurs, ce qui indique une faible souplesse de la production. Un ISPP bas peut aussi être dû à un petit nombre des partenaires commerciaux, même si les exportations sont importantes. Là encore, le Brésil est un bon exemple, puisque le pays réalise 60 pour cent de la valeur de ses exportations avec un seul partenaire commercial. Un pays travaillant avec un petit nombre de partenaires commerciaux n’a que peu de marge de manœuvre lorsqu’un choc frappe l’un de ses partenaires.

Les petits pays, comme la Lettonie ou la Slovénie, malgré la faible taille de leur secteur agricole, affichent une valeur d’ISPP presque aussi élevée que ceux ayant un secteur agricole beaucoup plus important, comme le Canada ou la France, même en diversité d’exportations. Cela souligne le fait que l’indicateur ne mesure pas l’importance du secteur primaire, mais sa capacité d’absorption du fait de la diversité de la production intérieure et de la commercialisation.

Ces constatations peuvent aider les décideurs publics à déterminer quels sont les éléments de la production et des échanges qui renforcent la capacité d’absorption du secteur primaire de leur pays et quels sont ceux qui en accentuent la vulnérabilité. L’analyse exclut toutefois les produits primaires non alimentaires (le tabac et la laine, par exemple) faute d’informations sur les prix à la production pour tous les produits et parce qu’il est impossible de convertir ceux-ci en nutriments. Leur contribution à la capacité d’absorption du secteur primaire n’est donc pas prise en compte, bien qu’ils créent une valeur économique potentiellement importante pour les moyens d’existence des producteurs de ce secteur. L’encadré 4 analyse cette question, comparant l’ISPP en valeur agricole et en valeur protéique pour quelques pays pour lesquels on dispose de suffisamment d’informations sur les prix des produits primaires alimentaires et non alimentaires. Comme on le voit dans cet encadré, l’ISPP est généralement plus élevé lorsqu’il est mesuré en valeur agricole, du fait de l’ajout des produits non alimentaires, qui ouvrent aux producteurs du secteur de nouvelles voies de création de valeur. L’analyse ne fait aucune distinction entre les produits destinés à la consommation humaine, à la consommation animale ou à la production d’agrocarburants. Dans l’avenir, l’analyse devra prendre cet aspect en considération, car les cultures destinées à nourrir les animaux d’élevage ou à produire des agrocarburants sont susceptibles de réduire la production vivrière8. Ces résultats soulignent la nécessité d’approfondir notre compréhension de ces questions, en collectant davantage de données et des données de plus grande qualité, ainsi qu’en améliorant et en élargissant l’analyse.

En résumé, les résultats tirés de l’ISPP montrent que le secteur primaire est mieux armé pour absorber les perturbations lorsqu’il produit une gamme diversifiée de produits et lorsqu’il a accès à des marchés intérieurs et internationaux également diversifiés. Cette situation se rencontre principalement dans les pays à revenu élevé ou ceux qui possèdent un secteur agricole important.

Garantir les disponibilités en aliments nutritifs

La diversité des espèces produites, exploitées ou capturées dans la culture, l’élevage, la foresterie, la pêche et l’aquaculture stimule la productivité, favorise la stabilité et fortifie les services écosystémiques9, 10, 11. L’aquaculture, en particulier, s’est révélée être l’une des pratiques d’exploitation les plus diverses au monde sur le plan des espèces, des méthodes de production et des environnements utilisés. Les constatations indiquent que, dans l’avenir, le nombre d’espèces élevées dans le monde tournera autour de 428, dont 29 espèces dominantes et 116 espèces pertinentes, c’est-à-dire représentant 99 pour cent de la production annuelle12. La diversification des espèces aquatiques élevées peut jouer un rôle essentiel dans les résultats et la viabilité à long terme du secteur et lui permettre de maintenir la production vivrière dans des conditions qui évoluent. De fait, les pays qui élèvent une grande diversité d’espèces sont généralement associés à une plus forte production, les pays asiatiques, et en particulier la Chine, arrivant en tête sur ce point13.

Tout comme la diversité des produits contribue à asseoir la capacité de l’agriculture à absorber les perturbations, la diversité des disponibilités alimentaires renforce la résilience des consommateurs en leur apportant les nutriments essentiels à leur santé. Au-delà de la nécessité de produire davantage d’aliments pour répondre à la demande croissante d’une population toujours plus nombreuse et plus aisée, les systèmes agroalimentaires doivent fournir des aliments diversifiés et de haute valeur nutritionnelle7, 14. Or il s’avère que la diversité de l’offre nationale de produits alimentaires décline15, et cette tendance a toutes les chances de se maintenir à mesure que la taille des exploitations augmente14, ce qui suscite des inquiétudes quant à la diversité nutritionnelle mondiale. Maintenir la diversité des denrées alimentaires disponibles est impératif dans un contexte où la spécialisation et l’intensification des systèmes agroalimentaires conduisent à une perte de résilience des territoires agricoles, ce dont atteste un déclin de la diversité des cultures, de la multifonctionnalité des territoires et des systèmes écosystémiques régulateurs16.

Dans la plupart des pays à faible revenu, où les échanges internationaux sont généralement limités, une consommation diversifiée nécessite de produire une vaste gamme d’aliments dans le pays, comme le montrent les résultats de l’ISPP. Cette diversification de la production est donc fondamentale pour assurer la sécurité alimentaire et la nutrition. À l’inverse, les pays qui se spécialisent dans la production d’un petit nombre de produits peuvent améliorer leur offre alimentaire intérieure en important une série de produits et en multipliant leurs partenaires commerciaux. Ce point est particulièrement important lorsque les pays en question ont un secteur agricole étroit et que le climat ou le manque de terres ou d’eau limitent la diversification de leur production, comme dans le cas des petits États insulaires en développement (PEID) et des pays en développement sans littoral (PDSL). Il est plus aisé pour les pays qui possèdent un secteur agricole important de parvenir à la diversité alimentaire, en associant une production nationale variée et des échanges internationaux; la diversité de la production et celle de l’offre ne dépendent pas étroitement l’une de l’autre.

Les échanges internationaux sont l’une des nombreuses stratégies qui donnent la possibilité de se prémunir contre les chocs et les situations de stress et d’accroître la diversité de l’offre alimentaire. Ils permettent à des pays et des régions de préserver leur sécurité alimentaire et de remédier à leurs limites de croissance17, 18. Le commerce peut réduire la pression exercée sur les ressources naturelles telles que l’eau17, 18, contribuer à maintenir les prix bas3 et fournir des produits saisonniers toute l’année4. Les échanges tissent entre les systèmes agroalimentaires des liens d’interconnexion et d’interdépendance de plus en plus denses. Les données disponibles pour la période 1992-2009 montrent que les relations commerciales autour du blé et du riz ont été multipliées par deux à l’échelle mondiale, tandis que les flux commerciaux augmentaient de 42 pour cent pour le blé et de 90 pour cent pour le riz19. Le poisson et les produits de la pêche aussi font partie des produits alimentaires les plus échangés. En 2018, 67 millions de tonnes, soit 38 pour cent de la production totale de la pêche et de l’aquaculture, ont été échangées au niveau international20. Cela étant, s’ils permettent de se prémunir contre les chocs intérieurs, les échanges internationaux accentuent aussi l’exposition aux chocs extérieurs et peuvent eux-mêmes devenir un canal de transmission de ces chocs19, 21, 22.

Les études de résilience se focalisent souvent sur la réaction à un choc, commercial par exemple, sans se préoccuper des capacités de résilience, qui vont de la prévention, de l’anticipation et de l’absorption des chocs à l’adaptation et à la transformation des systèmes. Les responsables politiques prennent leurs décisions dans un contexte où les risques sont multiples et où la prochaine perturbation pourrait fort bien se produire dans leur pays. S’inspirant de Kummu et al. (2020)17, la FAO a élaboré, aux fins du présent rapport, un indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA) qui permet d’évaluer le rôle de la diversification de la production intérieure, des stocks et des importations afin de faire en sorte que la population d’un pays dispose des aliments nécessaires à une alimentation saine. Cet indice rend compte des multiples voies d’approvisionnement en une unité d’aliment (exprimée en résultats nutritionnels, comme les kilocalories), à partir de la production intérieure, des importations alimentaires et des stocks publics et privés d’un pays. Une valeur élevée indique que les voies d’approvisionnement possibles pour une unité d’aliment sont multiples (en d’autres termes, les sources sont redondantes). L’ISAA mesure donc la souplesse d’approvisionnement en une unité d’aliment spécifique. Les systèmes agroalimentaires nationaux qui se fournissent en aliments auprès de différentes sources sont plus souples et mieux armés pour absorber les chocs sur l’offre. Pour une description plus détaillée de l’indicateur, voir l’encadré 5, et pour une description complète de la méthode, voir l’annexe 1. Cet indice complète l’indice de souplesse de la production primaire (ISPP) en élargissant l’analyse de la production agricole intérieure aux importations et aux stocks alimentaires, afin de rendre compte des différentes voies par lesquelles une unité d’aliment peut parvenir au consommateur. En résumé, l’ISAA mesure la capacité des systèmes agroalimentaires à absorber les chocs et à assurer l’approvisionnement des consommateurs en produits alimentaires, tandis que l’ISPP mesure la capacité d’assurer des moyens d’existence aux producteurs primaires.

La figure 4 illustre l’ISAA exprimé en kilocalories et calculé sous la forme d’une moyenne sur la période 2016-2018 pour l’ensemble des produits de la culture, de la pêche et de l’élevage qui sont inclus dans les nouveaux bilans alimentaires de la base de données FAOSTAT et pour lesquels on dispose de données commerciales dans cette même base. Pour fournir une alimentation saine, les pays ont également besoin d’un approvisionnement en divers autres nutriments23. Le rapport élargit donc l’analyse pour couvrir trois autres composants de la nutrition: les fruits et les légumes, les lipides et les protéines (voir l’annexe 2). D’autres nutriments, comme les vitamines et le fer, sont également nécessaires à une alimentation saine, mais les données correspondantes ne figurent pas dans les bilans alimentaires de la FAO.

FIGURE 4
ISAA, en kilocalories, 2016-2018

À part les composants nutritionnels, l’ISAA peut aussi être scindé en différents éléments contribuant à la diversité de l’approvisionnement alimentaire: la production intérieure, les importations et les stocks. Le graphique en bulles de la figure 4 illustre ces trois dimensions de l’ISAA en kilocalories: la contribution des importations et de leur diversité quant aux partenaires commerciaux et aux produits est portée sur l’axe horizontal; et la contribution de la production intérieure, sur l’axe vertical; la taille des bulles correspond à la contribution des stocks estimésd. Il est important de noter que la diversité des importations (axe horizontal) comprend également la balance entre les importations et les disponibilités intérieures. Cette balance représente le dosage de production intérieure et d’importations dont le pays dépend. De la même façon, la balance entre les exportations et la production destinée au marché intérieur – qui représente le potentiel agricole d’un pays et sa capacité à produire un excédent – est comprise dans la diversité de la production intérieure.

Deux résultats ressortent clairement de la figure 4: premièrement, les pays diversifient leurs sources de produits alimentaires de différentes façons; deuxièmement, l’efficacité de la diversification ne dépend ni de la taille ni de la catégorie de revenu du pays. Ce dernier point est illustré par le fait que des pays classés dans des catégories de revenu différentes se trouvent sur la même ligne diagonale, ce qui signifie que la somme des niveaux de diversité des importations et de la production de ces pays est la même.

Les pays dotés d’un secteur agricole important et qui comptent davantage sur leur production intérieure (comme les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, l’Inde et le Nigéria) et ceux qui diversifient davantage leur approvisionnement en recourant à des importations (comme le Sénégal, la Tunisie et la Turquie) peuvent présenter une valeur d’ISAA similaire. Compte tenu de la diversité des possibilités d’importation, certains des pays qui misent sur ce mode d’approvisionnement y recourent en en diversifiant considérablement les partenaires commerciaux et les produits, ce qui les prémunit contre les chocs sur l’offre et leur permet d’atteindre un ISAA parmi les plus élevés (Émirats arabes unis, Japon, Jordanie, Norvège et République de Corée, entre autres). De façon générale, si l’on excepte la France et la Pologne, les pays de l’Union européenne, et en particulier la Belgique et les Pays-Bas, diversifient beaucoup leur approvisionnement en recourant à des importations, tirant parti de la libre circulation des biens à l’intérieur de l’Union.

Il est rare que l’on dispose de données fiables et cohérentes sur les stocks, mais les résultats indiquent que ceux-ci ont tendance à revêtir une plus grande importance pour les pays dont la valeur d’ISAA est plus faible (représentés au-dessous de la ligne diagonale centrale), c’est-à-dire qui comptent davantage sur la production nationale et diversifient relativement peu leur approvisionnement par les importations. Comme on l’a vu pour l’ISPP, sans surprise, les pays à faible revenu, comme ceux d’Afrique subsaharienne, sont parmi les pays qui ont la diversité d’importations la moins importante (voir l’encadré 6 pour une comparaison entre les méthodes et les résultats respectifs de l’ISAA et de l’ISPP), ce qui s’explique en partie par le faible volume d’échanges de certains aliments de base, comme le mil, le sorgho et le fonio. Dans ces pays, la souplesse des systèmes alimentaires est principalement déterminée par la production destinée au marché intérieur. Les responsables politiques en sont donc réduits, lorsqu’une crise se produit, à gérer la diversité de la production pour absorber le choc ou à utiliser les stocks constitués.

Répartir la dépendance entre la production nationale et les importations est un point essentiel pour diminuer les risques autant que possible, surtout dans le cas des plus petits pays. Quant à ceux dont les ressources naturelles intérieures sont insuffisantes et qui dépendent donc fortement des importations, comme les pays du Proche-Orient, les petits États insulaires en développement et les pays en développement sans littoral, il est crucial qu’ils diversifient leur panier d’importations et leurs partenaires commerciaux internationaux, tout en investissant dans des stocks nationaux.

Contrairement à l’ISAA calculé en valeur calorique, l’indice calculé pour les fruits et les légumes, éléments clés d’une alimentation saine, est clairement associé à la catégorie de revenu du pays, du fait des contraintes logistiques qu’imposent le transport et le stockage de ces produits périssables. Les pays à revenu élevé d’Amérique du Nord, d’Europe et du Golfe Persique affichent des valeurs d’ISAA nettement supérieures, à quelques exceptions près (voir l’annexe 2). Les pays dont l’ISAA en kilocalories est plus élevé que celui calculé, en tonnes, pour les fruits et légumes, comme la Chine, l’Éthiopie et l’Ouganda, ont probablement une plus forte capacité d’absorption des chocs lorsque ceux-ci touchent les aliments de base plutôt que les fruits et les légumes.

Garantir un accès physique à la nourriture au niveau infranational – le réseau intérieur de transport des produits alimentaires

La robustesse des systèmes agroalimentaires dépend de la convergence de divers facteurs. L’assurance d’une production adéquate, de disponibilités alimentaires et d’un accès économique à la nourriture est en partie ce qui fait la résilience des systèmes. L’état du pays sur le plan logistique joue également un rôle fondamental dans l’accès physique à la nourriture et dans la production d’extrants agricoles non alimentaires. Les systèmes agroalimentaires sont soutenus par un réseau couvrant le continuum rural-urbain, et la façon dont ils réagiront aux chocs dépendra de la connectivité au sein du réseau. En cas de conditions météorologiques anormales et de pertes de rendement dans une région, les chaînes d’approvisionnement alimentaire peuvent compter sur d’autres régions du pays ou sur un dosage d’importations et d’achats nationaux pour faire en sorte que des aliments abordables restent disponibles. Ces voies de substitution aident les chaînes d’approvisionnement alimentaire à maintenir leurs fonctions essentielles. Des réseaux bien huilés de transport des produits agricoles non alimentaires, comme le bois, réduisent les coûts de production – main-d’œuvre, matières premières et énergie. La rentabilité s’en trouve améliorée, ce qui génère des revenus pour les producteurs concernés.

La connectivité renforce la résilience de l’ensemble du réseau en cas de chocs. Appliquée aux chaînes d’approvisionnement alimentaire24, 25, 26, 27, la théorie des réseaux donne des indications sur la façon dont on peut mesurer la résilience des systèmes agroalimentaires et sur d’éventuels points de départ pour une analyse des réseaux nationaux de transport de produits alimentaires, comme la criticité des liaisons de transport et la redondance de certains itinéraires en cas de rupture d’une liaisone. Une telle approche peut être utile pour comprendre l’effet que peut avoir sur les systèmes agroalimentaires un maillage plus dense du réseau – question essentielle, car la densité du réseau s’accroît généralement au fil du temps25.

La présente section analyse la résilience des réseaux de transport de produits alimentaires de 90 pays qui représentaient 7 milliards de personnes (92 pour cent de la population mondiale) en 2017. Sur la base de ces données, trois indicateurs nationaux ont été calculés pour saisir la vulnérabilité des réseaux de transport dans le monde (pour plus d’informations sur la méthode, voir l’encadré 7). En raison du manque de données, l’analyse porte uniquement sur les produits cultivés (à l’exception des cultures d’oléagineux) et n’intègre pas le transport d’autres produits agricoles, notamment les produits non alimentaires. L’analyse se limite donc à la composante alimentation des systèmes agroalimentaires, et plus spécifiquement aux produits végétaux. Il est possible que certains des produits alimentaires pris en compte ne soient pas destinés aux consommateurs, mais soient utilisés dans le secteur de la transformation agroalimentaire ou servent à fabriquer des aliments pour animaux ou des agrocarburants. Les analyses ne distinguent pas ces différentes destinations.

L’axe vertical de la figure 5 est celui de l’indicateur de la résilience fondée sur la proximité, établi pour 43 pays; le code couleur indique la catégorie de revenu. L’axe horizontal mesure la durée moyenne d’un transport de produits alimentaires. Un niveau de résilience fondée sur la proximité (axe vertical) égal à 1 indique que la production peut répondre à la demande de sa zone de chalandise propre, ce qui sous-entend que cette zone pourrait redevenir un système agroalimentaire ville-région indépendant, si nécessaire. Aucun pays ne se rapproche de ce point limite toutefois, étant donné la très faible probabilité qu’un réseau de transport national s’effondre complètement. On observe des variations considérables selon les pays, ceux qui bénéficient d’une durée moyenne de transport plus courte (axe horizontal) présentant généralement une résilience fondée sur la proximité plus élevée (axe vertical).

FIGURE 5
Résilience fondée sur la proximité en tant que fonction du temps moyen de transport des denrées alimentaires, dans divers pays

Ce n’est pas surprenant car une durée de transport plus courte indique que les produits alimentaires sont livrés sur un site proche du lieu de production. C’est le cas de la France, de la République de Corée et de la Turquie. À l’autre extrême se trouvent des pays beaucoup plus vastes, où les réseaux de distribution sont plus longs, comme l’Australie, le Brésil et le Canada. Certains grands pays toutefois, comme la Chine et le Nigéria, ont fait en sorte que leurs production et distribution alimentaires soient plus compatibles avec des chaînes d’approvisionnement courtes et peuvent aisément, si les coûts de transport augmentent, procéder à des réajustements. Il semble également que la résilience fondée sur la proximité ne soit pas corrélée à la catégorie de revenu du pays. Enfin, ces résultats ont des conséquences sur le plan de la durabilité, car des réseaux de transport moins étendus n’abaissent pas seulement les coûts de transport et probablement aussi de maintenance du réseau, ils réduisent également les coûts environnementaux du fait d’une dépense d’énergie et d’une pollution moindres. La figure 5 rend compte de la souplesse des réseaux de transport à se réorganiser localement, mais elle ne prend en considération ni la probabilité d’une perturbation ni sa localisation et son incidence sur les producteurs et les fournisseurs.

Le deuxième indicateur (redondance des itinéraires) mesure la disponibilité de parcours de substitution en cas d’interruption d’une liaison routière. Le troisième, l’indicateur du coût relatif d’une déviation, rend compte de l’incidence d’une perturbation de liaisons d’importance critique. Pour estimer le coût de déviation, on calcule le coût supplémentaire qu’entraîne la fermeture de liaisons d’importance critique, en déterminant les itinéraires les plus courts et la différence entre les durées de transport avant et après la perturbation. Divisée par la durée du trajet, cette différence donne la sensibilité des systèmes à la fermeture de liaisons. D’après cette mesure, dans 47 des 90 pays analysés, la fermeture d’un itinéraire de transport d’importance critique peut accroître de 20 pour cent au moins le temps de trajet des aliments déviés de l’itinéraire en question, ce qui peut avoir une incidence sur le coût des aliments de 845 millions de personnesf au total. Les effets sont plus locaux dans certains pays que dans d’autres: la part de la population potentiellement touchée varie de 25 pour cent au Nigéria à 78 pour cent en Afrique du Sud.

Le tableau 1 présente les trois indicateurs côte à côte. Les cellules de couleur verte signalent un score de résilience très élevé pour le pays et l’indicateur concernés, et les cellules orange foncé, un score faible. Les indicateurs ne sont pas corrélés entre eux, mais brossent un tableau plus complet de la résilience d’un réseau de transport et de ses vulnérabilités lorsqu’ils sont analysés ensemble. La Chine a les moyens de s’ajuster à des systèmes alimentaires davantage fondés sur la proximité et possède de nombreux itinéraires redondants (cellules vertes dans les colonnes Résilience fondée sur la proximité et Redondance des itinéraires), ce qui réduit la probabilité que les systèmes soient contraints de se réorganiser localement. Si une liaison d’importance critique est perturbée, le temps de trajet moyen n’augmente pas dans des proportions considérables (voir les cellules vertes dans les colonnes Coût relatif d’une déviation [impact local et impact cumulé]), ce qui tend à indiquer que le réseau de transport de la Chine est résilient. À l’autre extrême, dans un pays comme la Somalie, où les systèmes alimentaires ne sont pas organisés pour redevenir locaux, mais où les itinéraires redondants sont peu nombreux (voir les cellules orange foncé et orange), il peut arriver que des perturbations sur des liaisons d’importance critique contraignent néanmoins les systèmes alimentaires à se relocaliser localement pour un temps, ce qui peut être difficile.

Tableau 1
Indicateurs de la résilience et de la vulnérabilité des réseaux de transport alimentaire, dans divers pays

Le peu de redondance des itinéraires n’est pas l’exclusivité des pays à faible revenu (voir le Chili, l’Indonésie et la Papouasie-Nouvelle-Guinée dans le tableau 1. Cela étant, sur cette question des réseaux de transport de produits alimentaires, ce sont ces pays qui doivent relever les défis les plus importants pour prendre des mesures de renforcement de la résilience de l’ensemble du système, car ils cumulent une faible capacité d’ajustement à des systèmes fondés sur la proximité et un grand nombre de liaisons sans itinéraires de rechange en cas de perturbation. Les pays à revenu élevé, comme les États-Unis d’Amérique et la France, se placent à l’autre extrémité du spectre, encore qu’il y ait des exceptions car la résilience fondée sur la proximité dépend de la façon dont la production est répartie par rapport à la demande. Ainsi, l’Australie, le Canada et le Chili sont vulnérables à ce titre.

Le coût relatif d’une déviation (colonne de droite) met en évidence le fait que, pour certains pays, la fermeture de liaisons d’importance critique peut être incroyablement coûteuse. Pour des pays comme le Bangladesh, le Brésil, Haïti, Madagascar, le Niger, les Philippines, la République démocratique du Congo, le Sénégal et le Soudan, le temps de trajet augmente en moyenne de 30 pour cent ou davantage, ce qui accroît le coût des produits alimentaires. Pour certains d’entre eux, comme les Philippines et le Soudan, l’impact des fermetures de liaisons d’importance critique se ressent au niveau national, et pas uniquement à l’échelle locale.

Le tableau 1 présente seulement l’effet moyen d’une perturbation aléatoire de liaisons d’importance critique. On peut toutefois examiner le coût relatif d’une déviation associé à des perturbations spécifiques. L’encadré 8 analyse des scénarios particuliers de perturbation dans des régions sujettes aux inondations du Nigéria et du Pakistan.

Globalement, cette analyse met en lumière l’importance critique d’un réseau de transport robuste pour soutenir la résilience des systèmes alimentaires face aux chocs et aux situations de stress et garantir un accès physique à la nourriture au niveau local. Un réseau de transport robuste permet d’éviter l’allongement du temps de trajet – et son effet domino sur le coût des produits alimentaires – si une liaison d’importance critique se retrouve fermée.

Assurer l’accès économique à l’alimentation

Travailler à rendre les systèmes agroalimentaires résilients a pour objectif d’assurer à tous la sécurité alimentaire et un accès continu à une nourriture suffisante, saine et nutritive (voir «Résilience pour quoi?» à la figure 2), mais il ne sert pas à grand-chose de veiller à ce que des produits alimentaires soient toujours disponibles si les gens n’ont pas les moyens de les acheter. La présente section se penche sur la question de savoir si les disponibilités alimentaires provenant de la production intérieure et des échanges internationaux sont économiquement accessibles à tous les habitants d’un pays. Si la capacité d’un pays à assurer un approvisionnement et une diversité alimentaires est solide mais que la demande est fragile, alors les systèmes agroalimentaires aussi sont fragiles. Avoir accès à la nourriture est principalement une question de prix et de revenus. Les ménages qui ne disposent pas de revenus réguliers et substantiels sont limités dans leurs choix en période de crise, par exemple quand les prix des produits alimentaires s’envolent, que les récoltes sont mauvaises ou que ces ménages perdent leurs biens30. Du côté de l’offre, différents facteurs contribuent à faire monter le coût d’une alimentation saine: de faibles niveaux de productivité agricole, une diversification insuffisante, un stockage inadéquat des aliments ou des infrastructures routières médiocres, par exemple. Au-delà des effets directs des systèmes agroalimentaires sur le coût de l’alimentation, d’autres systèmes interconnectés, comme les systèmes environnementaux, les systèmes de santé et les systèmes de protection sociale, exercent aussi une influence sur l’accès à des aliments nutritifs. Il est donc indispensable de veiller à la cohérence entre les systèmes alimentaires et ces autres systèmes, comme on l’explique plus en détail dans le présent rapport31.

Les pays où le pourcentage des habitants qui disposent de revenus suffisants pour conserver une sécurité alimentaire après un choc frappant leurs moyens d’existence est le plus élevé sont aussi ceux où la résilience des systèmes agroalimentaires, la sécurité alimentaire et la nutrition sont les meilleures. Bien que le présent rapport se limite à la composante alimentation des systèmes agroalimentaires, la production agricole non alimentaire joue aussi un rôle essentiel dans la création de sources de revenus pour les petits producteurs et l’agro-industrie, et améliore l’accès économique à la nourriture. L’encadré 9 résume les avantages que les personnes tirent des forêts pour s’assurer un revenu.

Seekell et al. (2017) vérifient dans quelle mesure le revenu par habitant des plus pauvres leur permet de se nourrir, en rapportant le revenu du quintile inférieur de la population de chaque pays au coût moyen de l’alimentation34. Ils constatent ainsi que, dans de nombreux pays, les personnes entrant dans les catégories socioéconomiques les plus basses peinent toujours à accéder à la nourriture. Mais quel est le niveau de revenus réguliers dont un ménage a besoin pour absorber les chocs et conserver une sécurité alimentaire? Suivant en cela l’approche adoptée dans l’édition 2021 de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde31, nous prenons, comme objectif d’alimentation saine, un régime qui comprend des aliments de plusieurs groupes, avec une plus grande diversité au sein de chaque groupe, afin d’aider à prévenir la malnutrition sous toutes ses formes. Or cette alimentation – pourtant désignée comme étant l’«alimentation saine la moins chère» – est encore largement inabordable pour 3 milliards de personnes environ.

Nous estimons pour chaque pays la part de la population qui ne peut plus se permettre cette alimentation saine après une réduction d’un tiers de ses revenus réels (pour une description de cette approche, voir l’encadré 10). Ce seuil a été choisi à partir des données probantes récemment collectées sur les effets de la pandémie de covid-19 sur les revenus. Au Cambodge, plus de 60 pour cent des personnes touchées ont subi une perte de revenus d’au moins un tiers, tandis que, pour 90 pour cent, la perte était d’au moins un cinquième35. Une autre étude portant sur neuf pays a établi que la perte de revenus était courante sur tous les sites considérés, 51 pour cent des répondants du Myanmar et 79 pour cent de ceux du Libéria ayant indiqué que leurs revenus avaient «beaucoup baissé», voire avaient «totalement disparu»36. Une étude réalisée auprès des médecins brésiliens a permis de constater que, parmi ceux dont les revenus avaient été touchés, 31 pour cent avaient enregistré une baisse de 25 à 50 pour cent, et 60 pour cent environ, une diminution de plus de 50 pour cent37. Ces estimations montrent que les seuils pris ici comme hypothèse se situent dans le bas de la fourchette de perte de revenus chez les personnes frappées par un choc. Cela signifie que le nombre de personnes que nous estimons ici comme courant le risque de ne plus pouvoir se permettre une alimentation saine après un choc est vraisemblablement une valeur minimale.

D’après FAO et al. (2021), 3 milliards de personnes environ, soit autour de 40 pour cent de la population mondiale, ne peuvent pas se permettre une alimentation saine31. D’après ce rapport, sur les 143 pays analysés, près de 1 milliard de personnes supplémentaires pourraient se retrouver dans cette même situation si un choc venait à réduire leurs revenus d’un tiers (tableau 2). Sur ce milliard de personnes, la plupart vivent dans des pays à revenu intermédiaire des tranches inférieure et supérieure et représentent respectivement 16 pour cent et 17 pour cent de la population. Cette proportion est bien moindre dans les pays à faible revenu, où 88 pour cent de la population ne peut déjà pas se permettre une alimentation saine, et encore moins disposer d’une réserve de revenu de 50 pour cent pour faire face à un choc qui réduirait les revenus d’un tiers. Dans ces pays, si les revenus sont réduits d’un tiers, le problème qui se pose alors est que le nombre de personnes pour lesquelles une alimentation de base simplement suffisante en énergie cesse d’être abordable devient beaucoup plus important (encadré 11). L’incidence d’une vulnérabilité de cette nature n’est que de 1 pour cent dans les pays à revenu élevé.

Tableau 2
Indicateurs de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine

La plupart des personnes exposées au risque de ne plus pouvoir se permettre une alimentation saine en cas de choc vivent en Asie de l’Est et Asie du Sud-Est (398 millions), en Asie du Sud (303 millions), en Amérique latine et aux Caraïbes (85 millions), en Afrique subsaharienne (81 millions) et en Afrique du Nord et Asie de l’Ouest (60 millions).

C’est au niveau national qu’il est le plus intéressant d’étudier l’accès économique. La figure 6 réunit des mesures de l’accès économique à une alimentation saine et l’ISAA pour les fruits et les légumes (en tonnes). L’axe horizontal indique la proportion de la population pour laquelle une alimentation saine est inabordable et l’axe vertical la proportion de la population pour laquelle elle risque de le devenir si les revenus diminuent d’un tiers. La taille des bulles représente la valeur de l’ISAA en ce qui concerne les fruits et les légumes, mesurés en tonnes. L’ISAA pour les fruits et les légumes est intéressant, car ces produits contribuent de manière essentielle à une alimentation saine et sont susceptibles d’influer sur l’accessibilité de celle-ci si leurs disponibilités sont limitées.

FIGURE 6
Positionnement de divers pays d’après le degré d’accessibilité économique d’une alimentation saine et indice ISAA pour les fruits et les légumes (en tonnes), 2016-2019

Les pays se répartissent le long d’un U inversé; dans un grand nombre d’entre eux (notamment en Afrique subsaharienne), plus de 80 pour cent de la population ne peut pas se permettre une alimentation saine et a terriblement besoin que celle-ci lui soit plus accessible (ovale orange). À cela s’ajoute la faible variété des fruits et des légumes (la bulle est assez petite), alors qu’il s’agit de l’un des éléments clés d’une alimentation saine. Parallèlement aux nombreuses personnes pour lesquelles une alimentation saine est inabordable, de nombreux pays présentent également des segments importants de population pour lesquels elle risque de le devenir si les revenus diminuent d’un tiers (ovale vert). Les pays asiatiques sont particulièrement concernés: Bangladesh, Inde, Indonésie, Pakistan et Philippines.

D’autres pays, principalement à revenu élevé, parviennent à mieux garantir l’accès économique à une alimentation saine (ovale vert). On constate de manière inattendue que dans certains pays, principalement à revenu intermédiaire, où les deux tiers des personnes ou davantage peuvent se permettre une alimentation saine en temps normal, une grande part de la population risque de ne plus pouvoir se permettre une telle alimentation après une réduction d’un tiers de ses revenus (ovale bleu). C’est notamment le cas en Amérique latine et dans les Caraïbes, où il est alarmant de constater que plus de la moitié des travailleurs de la région sont dans le secteur informel, et occupent de ce fait des emplois plus vulnérables et de moindre qualité. N’ayant pas de contrat de travail ni d’accès à l’assurance chômage, ils dépendent du travail proposé au jour le jour, qu’ils ne peuvent pas exécuter de chez eux, et sont particulièrement vulnérables face aux fluctuations de leurs revenus à la suite de chocs, tels que la pandémie de covid-19, par exemple41.

Ces résultats peuvent donner une image plus complète de la résilience des systèmes alimentaires nationaux, et indiquent que l’ISAA et le pouvoir d’amortissement des revenus des ménages sont des mesures complémentaires de la capacité d’absorption. Les pays dont la capacité d’absorption est importante au regard de ces deux aspects sont principalement des pays à revenu élevé. Ils sont moins susceptibles d’avoir à mettre en place des mesures d’urgence pour garantir une alimentation saine à leur population. Les pays qui au contraire affichent de faibles valeurs pour ces deux indicateurs sont exposés à des perturbations à grande échelle en temps de crise, en particulier si les prix des produits alimentaires augmentent. Dans les situations intermédiaires, il convient de réexaminer les forces et les faiblesses des systèmes alimentaires afin d’adapter les interventions.

Une large part de la population mondiale est exposée à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition lorsqu’elle fait face à une baisse brutale de ses revenus – ce qui constitue une autre raison de travailler à rendre les systèmes agroalimentaires résilients du côté de l’offre et du côté de la demande. Cette vulnérabilité est due à la faiblesse des revenus, conjuguée au coût d’une alimentation saine et à son inaccessibilité économique. Le problème de la faiblesse des revenus n’est, pour beaucoup de personnes, pas dû uniquement à ce qui se passe dans les systèmes agroalimentaires mais, d’un autre côté, les déterminants des coûts d’une alimentation saine sont évidents dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement alimentaire, dans l’environnement alimentaire et dans l’économie politique qui façonne les mesures relatives au commerce, aux dépenses publiques et à l’investissement.

Pour s’attaquer à ces déterminants des coûts, il faudra opérer des transformations majeures dans les systèmes agroalimentaires, et trouver des compromis et des synergies pour différents pays en l’absence de solution universelle42. Si l’on veut que les connaissances nutritionnelles et les changements de comportement influencent réellement les choix, il faudra remédier aux obstacles liés aux prix et aux revenus42. De nombreux pays ont besoin de rééquilibrer leurs politiques dans les domaines de l’agriculture et d’une protection sociale tenant compte de la nutrition, afin d’accroître l’efficience à tous les stades de la chaîne d’approvisionnement alimentaire et de faire en sorte qu’une alimentation plus saine devienne plus abordable pour les populations vulnérables. Cela les aiderait ensuite à remédier au problème de la faiblesse des revenus, lequel, comme nous l’avons mentionné plus haut, n’est pas uniquement dû aux systèmes agroalimentaires. L’effet de ces politiques et de ces programmes sur l’accroissement de l’accessibilité économique dépendra entre autres de l’efficacité du ciblage, de l’adéquation des montants et des modalités des transferts, ainsi que de l’intégration de composantes expressément axées sur la nutrition.

Conclusion

On a vu dans le présent chapitre un ensemble d’indicateurs de la résilience des pays, qui mettent en évidence les points faibles des diverses fonctions des systèmes agroalimentaires et les risques auxquels elles sont exposées. Quatre dimensions clés sont essentielles aux systèmes agroalimentaires pour faire face à des perturbations: i) la vitalité de la production primaire; ii) les disponibilités en aliments; iii) l’accessibilité physique des aliments; et iv) leur accessibilité économique.

Les constatations indiquent qu’une grande partie de la population mondiale vit dans des pays où l’on peut se procurer et mettre à disposition des produits alimentaires de manière assez souple, mais que l’accès économique à une alimentation saine pourrait être largement amélioré dans un grand nombre de pays, notamment lorsqu’un choc vient réduire les revenus. On a vu très clairement ce type de problème chez les ménages touchés par de grands chocs systémiques, comme la pandémie de covid-1942. Beaucoup de gouvernements et de donateurs ont craint que la pandémie n’entraîne un arrêt des chaînes d’approvisionnement, voire des systèmes agroalimentaires nationaux tout entiers, les obligeant à intervenir sur le marché et à s’y substituer. Du fait de l’ampleur du marché et de la demande alimentaire, cela n’aurait pas été possible, ni nécessaire d’ailleurs dans de nombreux cas, étant donné les mesures prises par les acteurs des systèmes alimentaires pour s’adapter et renforcer la résilience43. Au lieu de cela, l’incidence de la pandémie sur les acteurs des systèmes agroalimentaires et leur sécurité alimentaire a principalement pris la forme d’une baisse des revenus et, par voie de conséquence, du pouvoir d’achat1. Dans de nombreux cas, le coût d’une alimentation saine se situe au-delà du seuil de pauvreté, établi à 1,90 USD par jour en parité de pouvoir d’achat (PPA). Cela met une alimentation suffisante, saine et nutritive hors de portée de nombreuses personnes qui vivent au-dessous ou juste au-dessus du seuil de pauvreté officiel, en particulier dans les pays à faible revenu et ceux à revenu intermédiaire de la tranche inférieure.

Les disponibilités en aliments semblent de manière générale beaucoup moins vulnérables face aux chocs que l’accès économique des consommateurs à l’alimentation. Par conséquent, si l’on veut renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires, il faut s’attaquer aux facteurs qui poussent à la hausse le coût des produits alimentaires. S’agissant des types de diversité qui sont les plus importants pour la souplesse de l’approvisionnement alimentaire d’un pays, on constate des différences notables dans: la composition de la production intérieure; le dosage entre les importations, la production nationale et les stocks; et le nombre de partenaires commerciaux. Dans son analyse de l’indicateur de l’ISAA, le présent chapitre a proposé des types d’intervention qui visent à renforcer la résilience dans l’approvisionnement alimentaire et à faire en sorte qu’il existe de multiples voies par lesquelles on puisse mettre à disposition des aliments nutritifs.

En ce qui concerne la capacité du secteur de la production primaire à absorber les variations brutales de la demande sur les marchés nationaux et les marchés d’exportation, on constate une contribution significative de la diversité du marché intérieur à la capacité d’absorption globale des pays. Ceux dont les systèmes agroalimentaires comprennent une proportion importante d’exportations sont principalement des pays à revenu élevé qui possèdent une solide base agricole. On note en outre une corrélation entre la souplesse de la production primaire et le revenu d’un pays, d’une part, et son secteur agricole, d’autre part. On constate cependant des exceptions, ce qui indique que d’autres facteurs entrent en jeu.

Il faudra encore beaucoup de travail sur les indicateurs pour arriver à mieux comprendre ce qui fait la résilience des systèmes agroalimentaires. Les indicateurs ne rendent pas compte de la résilience des chaînes d’approvisionnement agroalimentaires intermédiaires (voir l’annexe 1) et ne reflètent pas le rôle des composants non alimentaires dans la résilience. La pêche et l’aquaculture sont également exclues des indices relatifs à la souplesse de la production et du réseau de transport, du fait de limitations liées aux données, et pourtant elles font partie des secteurs agricoles les plus diversifiés dans le monde au regard du nombre d’espèces. Il faudra également s’attacher à représenter d’autres capacités qui contribuent à la résilience des systèmes agroalimentaires, à savoir la capacité de prévenir, anticiper, adapter et transformer. Les indicateurs qui ont été présentés dans le chapitre apportent de nouveaux éclairages importants sur la capacité des systèmes agroalimentaires nationaux à absorber les chocs environnementaux, sociaux et économiques.

Au niveau national, la résilience est notamment vue comme la capacité de maintenir les fonctions des systèmes en cas de perturbations. Les systèmes comprenant généralement, entre autres, une multitude d’exploitations agricoles, d’entreprises commerciales, de chaînes de valeur et d’institutions, la résilience des systèmes agroalimentaires nationaux ne coïncide pas forcément avec la résilience des individus. La manière dont les acteurs des chaînes de valeur font face aux chocs et aux situations de stress est un aspect essentiel de la résilience des systèmes agroalimentaires. Elle est abordée en détail dans le chapitre suivant.

Messages clés

Les chaînes d’approvisionnement alimentaire – ainsi que les chaînes connexes d’approvisionnement en intrants et en services – doivent impérativement fonctionner sans interruption pour que tous aient accès sans difficulté aux produits alimentaires, de façon stable et dans des conditions durables.

L’impact des chocs et des situations de stress varie selon le type de chaîne d’approvisionnement alimentaire. Les chaînes en phase de transition sont généralement longues et comptent de nombreuses petites et moyennes entreprises agroalimentaires (PMEA), qui sont particulièrement vulnérables face aux chocs dus à des causes diverses et qui ont une capacité de résilience limitée.

Des chaînes d’approvisionnement alimentaire diversifiées, redondantes et bien connectées contribuent à renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires en offrant de multiples voies qu’il est possible d’emprunter pour la production, l’approvisionnement et la distribution.

Si l’on veut accroître la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire, il faut réaliser des investissements coûteux et trouver un équilibre entre résilience et efficience, et résilience et inclusivité; les grandes entreprises, pour la plupart, sont dotées de capacités d’investissement suffisantes et peuvent gagner en résilience sans perdre en efficience, mais de nombreuses PMEA auxquelles ces capacités font défaut risquent de faire faillite.

Une plus grande coordination et une meilleure organisation des chaînes d’approvisionnement alimentaire, obtenues grâce à des consortiums et à des outils agroterritoriaux, peuvent permettre aux PMEA de surmonter les contraintes liées à leur taille et de créer des effets de synergie entre résilience, inclusivité et efficience.

L’appui des pouvoirs publics est indispensable pour créer un environnement favorable à une meilleure coordination des chaînes d’approvisionnement alimentaire et trouver les bons compromis. Cet appui peut par exemple prendre la forme d’investissements publics dans les infrastructures et la recherche, ou encore de mécanismes qui relient un système amélioré de recherche et d’enseignement au secteur agroalimentaire.

On trouvera au chapitre 2 un état des lieux de la résilience des systèmes agroalimentaires aux niveaux national et infranational. On y analyse les facteurs qui jouent un rôle déterminant dans la vulnérabilité des systèmes agroalimentaires nationaux: i) la diversité de la production agricole primaire et de ses circuits de vente; ii) la diversité des denrées alimentaires disponibles, y compris celles provenant des importations et des stocks; iii) des réseaux de transport qui permettent d’accéder physiquement aux aliments au niveau local; iv) l’accès économique à la nourriture. Le chapitre 2 aboutit à la conclusion que la diversification des partenaires commerciaux et des aliments produits sur le territoire national, stockés et importés, associée à de solides réseaux de transport alimentaire, confère aux systèmes agroalimentaires nationaux une certaine latitude et une capacité globale d’absorber les chocs.

La résilience des systèmes agroalimentaires nationaux dépend également de la manière dont fonctionnent les chaînes d’approvisionnement. Le présent chapitre est axé sur les chaînes d’approvisionnement alimentaire car celles-ci occupent une place prépondérante dans les systèmes agroalimentaires et parce que les produits agricoles non alimentaires, qui font certes partie de ces systèmes (voir le chapitre 1), sont considérés comme n’y appartenant plus dès lors qu’ils entrent dans les chaînes d’approvisionnement non alimentaire. La composante alimentaire des systèmes agroalimentaires est bien plus importante que la composante non alimentaire: en 2018, les produits alimentaires primaires représentaient plus de 97 pour cent de la valeur totale de la production agricole primaire, hors secteur des forêts1. Le secteur primaire ne génère par ailleurs qu’une petite part de la valeur totale des produits alimentaires qui parviennent jusqu’aux consommateurs. À partir de données sur la période 2005-2015 qui provenaient de 61 pays et couvraient 90 pour cent de l’économie mondiale, une étude a récemment conclu que 16 à 38 pour cent seulement (pour une moyenne mondiale de 27 pour cent) de la valeur des aliments consommés dans les foyers revenaient aux producteurs agricoles2. Cette constatation va dans le sens d’une estimation antérieure selon laquelle, en Asie et en Afrique, la production alimentaire primaire ne représente que 40 pour cent de cette valeur, et les segments intermédiaires et ceux situés en aval de la chaîne que 40 et 20 pour cent respectivement3, 4.

Des chaînes d’approvisionnement alimentaire diversifiées et bien connectées sont mieux à même d’absorber les chocs et les situations de stress et de s’en relever, contribuant à la résilience des systèmes agroalimentaires. Des chaînes d’approvisionnement alimentaire résilientes offrent davantage de possibilités de croissance aux agriculteurs et aux entreprises, et garantissent à tous un approvisionnement alimentaire stable et continu (voir la figure 2).

Le présent chapitre porte sur les chaînes d’approvisionnement alimentaire, l’une des principales composantes des systèmes agroalimentaires. On y décrit, à partir d’un cadre simplifié, les principaux éléments constitutifs de ces chaînes et leurs interactions. On y verra aussi comment les entreprises agroalimentaires, notamment les acteurs du secteur de la transformation et les grossistes, se procurent des intrants et vendent leurs produits, et si ces entreprises sont reliées aux consommateurs de telle sorte que les préférences de ces derniers puissent être exprimées et satisfaites. Les principaux facteurs de changement dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire – à savoir le crédit, la demande, les prix, la logistique, la manière dont les risques sont perçus, la technologie, l’évolution des politiques et les perturbations qui touchent les systèmes agroalimentaires – sont passés en revue. L’accent est mis explicitement sur la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire, mais il ne faut pas oublier que les chocs et les situations de stress qui touchent la production primaire non alimentaire peuvent également se propager par l’intermédiaire des secteurs de l’économie qui utilisent comme intrants des produits primaires non alimentaires et avoir des répercussions sur eux.

Sachant qu’il existe différents types de chaînes d’approvisionnement alimentaire dans le monde – chaînes traditionnelles, chaînes modernes et chaînes de transition – et qu’elles-mêmes se composent d’entreprises de tailles diverses, le présent chapitre décrit les stratégies d’entreprise et les domaines d’action prioritaires qui facilitent l’ajustement face à un choc et contribuent à la résilience. Il présente des exemples concrets provenant de différentes régions du monde ainsi que des orientations stratégiques et des interventions qui permettent de renforcer la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire.

Présentation générale – le principe de résilience appliqué aux chaînes d’approvisionnement

On s’intéresse de plus en plus à la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire car les chocs gagnent en intensité et en fréquence5 et les chaînes qui approvisionnent les villes, en croissance rapide, sont plus longues, plus complexes et potentiellement plus vulnérables. Il est primordial de créer des chaînes d’approvisionnement alimentaire résilientes capables de faire face aux perturbations et de préserver les moyens d’existence des acteurs qui interviennent dans ces chaînes, mais aussi la sécurité alimentaire et la nutrition de tous. Ce sont là les objectifs ultimes de tout système agroalimentaire résilient.

Un élément essentiel à avoir à l’esprit est qu’une chaîne d’approvisionnement alimentaire englobe des activités interconnectées qui sont exécutées par différents acteurs, situés au sein et en dehors de la chaîne. Toutes les chaînes sont exposées à de multiples risques, chocs et situations de stress. En plus d’être reliés entre eux au sein des chaînes d’approvisionnement, les agriculteurs et les entreprises de transformation et de distribution dépendent d’acteurs de chaînes connexes qui n’appartiennent pas aux systèmes agroalimentaires et qui leur fournissent des intrants et des services de logistique et de transport. Ces acteurs sont exposés à des chocs et à des situations de stress, dont les retombées peuvent perturber les chaînes d’approvisionnement alimentaire.

Les producteurs de denrées primaires et les autres acteurs des chaînes d’approvisionnement alimentaire produisent, transforment et distribuent des aliments dans leur propre intérêt en recourant à diverses ressources, innovations et techniques. Leur objectif est d’améliorer leur propre bien-être, tout en tenant compte des contraintes liées au crédit et des risques auxquels ils font face. Afin que leur activité reste viable sur le plan économique, ils doivent faire un usage efficient des ressources mais aussi être résilients face aux chocs et aux situations de stress. Toutefois, l’interconnexion des acteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire fait que la résilience, à tous les stades de la chaîne, dépend des performances générales le long de la chaîne. Les décisions prises par un groupe d’acteurs ont des répercussions sur les autres. Si un choc touche un segment de la chaîne d’approvisionnement, il est rare que celui-ci reste le seul concerné. Il est probable que le choc se propagera à d’autres segments, en amont et en aval. Pendant la pandémie de covid-19, les mesures de confinement ont fait baisser les revenus des consommateurs et la demande alimentaire, ce qui a nui aux acteurs situés en amont: commerçants, grossistes et enfin producteurs. Les chaînes d’approvisionnement alimentaire sont donc des systèmes socioéconomiques complexes dont les éléments interagissent à différents niveaux, à différentes distances les uns des autres et à différents moments. Tout cela doit être pris en considération lorsqu’on s’intéresse à la résilience6.

Étant donné que les chaînes d’approvisionnement alimentaire sont liées aux chaînes d’approvisionnement en intrants et en services, ces trois types de chaînes doivent être résilientes face aux chocs et aux situations de stress pour que les systèmes agroalimentaires fonctionnent efficacement et pour que les gens puissent se procurer des aliments sûrs et nutritifs en quantité suffisante. Selon leur structure, les chaînes d’approvisionnement ne subiront pas les chocs et les situations de stress avec la même force et ne réagiront pas de la même manière.

La figure 7 présente schématiquement les trois chaînes d’approvisionnement. Les produits agricoles sont produits en amont, dans les exploitations, puis acheminés vers les entreprises agroalimentaires, soit le segment intermédiaire, qui transforment les denrées pour ensuite les expédier en aval, aux détaillants. Ces trois fonctions principales, essentielles dans presque toute chaîne d’approvisionnement alimentaire, utilisent des intrants et des services fournis par les deux chaînes d’approvisionnement connexes. Si un choc devait toucher l’un des éléments de ces chaînes, les performances de la chaîne d’approvisionnement alimentaire pourraient s’en trouver réduites. Les décisions qui sont prises par les prestataires des chaînes connexes en cas de perturbation auront une incidence importante sur le fonctionnement général de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Des prestataires résilients se relèvent plus vite et contribuent à la résilience de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement alimentaire.

FIGURE 7
Représentation schématique d’une chaîne d’approvisionnement alimentaire et des liens avec la chaîne d’approvisionnement en intrants et la chaîne d’approvisionnement en services

Les chaînes d’approvisionnement en intrants et en services interagissent avec les chaînes d’approvisionnement alimentaire à tous les stades. Les chaînes d’approvisionnement en intrants fournissent des intrants variables, notamment des semences, de l’engrais, du carburant et de la main-d’œuvre, et des intrants quasi fixes, comme par exemple des machines agricoles, du matériel pour les usines de transformation ou des chambres froides pour les denrées périssables. Les chaînes d’approvisionnement en services comprennent les activités et les acteurs liés aux mouvements des intrants et des produits, comme par exemple les transporteurs et les exploitants d’entrepôts. Elles font le lien entre la production et la consommation. Au Nigéria, par exemple, une chaîne de prestataires logistiques achemine 75 pour cent du maïs récolté vers des grossistes situés dans le sud du pays, à près de 1 000 kilomètres de producteurs qui eux se trouvent dans le nord. En outre, presque tous les grossistes dépendent des mêmes prestataires pour ce qui est du stockage8.

Même la main-d’œuvre et les services de crédit peuvent être considérés comme des chaînes d’approvisionnement et non pas simplement comme des facteurs de production, car une chaîne de décisions et d’actions qui échappent au contrôle des prestataires directs peut influencer la disponibilité de la main-d’œuvre et du crédit. La disponibilité de la main-d’œuvre peut dépendre de la mobilité des personnes sur de longues distances ainsi que des pratiques de recrutement. Elle peut donc varier suite à des perturbations dans les transports, le recrutement ou la mobilité, par exemple, comme ce fut le cas lors de la crise de la covid-198. Les services de crédit formels et informels sont tributaires des conditions socioéconomiques et leur disponibilité peut être réduite en cas de choc financier ou d’autres crises, sans compter les politiques monétaires et budgétaires.

La plupart des recherches et des débats sur la résilience des systèmes agroalimentaires sont axés sur les chaînes qui approvisionnent en intrants le secteur agricole4. Or ce secteur ne représente qu’une petite part de l’économie alimentaire (entre 16 et 37 pour cent2), le reste étant constitué par la manutention après récolte, la transformation et la distribution3, 4. Chaque segment intermédiaire dépend lui aussi des chaînes d’approvisionnement en intrants pour la main-d’œuvre, l’eau, les intrants physiques et le matériel3, 4.

L’ampleur des répercussions que les perturbations dans les chaînes connexes peuvent avoir sur les chaînes d’approvisionnement alimentaire ainsi que sur l’agriculture non alimentaire montre à quel point les systèmes agroalimentaires peuvent être ébranlés par les difficultés rencontrées par d’autres systèmes, comme par exemple les transports et l’industrie. Le secteur énergétique est un exemple particulièrement parlant: un choc qui a pour effet d’interrompre la circulation des navires pétroliers peut faire baisser la disponibilité de carburant et faire cesser brutalement les activités de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. La pandémie de covid-19 a provoqué d’autres situations révélatrices: les restrictions à la mobilité de la main-d’œuvre durant les premières semaines ont fortement compromis la récolte de fruits dans de nombreux pays; la classification de la production de bois parmi les activités non essentielles, dans certains pays, a entravé l’approvisionnement en fruits en faisant cesser la production de cageots; en décidant de considérer les marchés de gros comme essentiels mais une grande partie des activités logistiques des chaînes d’approvisionnement comme non essentielles, de nombreux pays ont gravement perturbé les chaînes d’approvisionnement alimentaire9.

Les différents types de chaînes d’approvisionnement alimentaire

Les denrées alimentaires sont produites, transformées et distribuées par des chaînes d’approvisionnement qui évoluent constamment, sous l’impulsion de changements dans les sphères socioéconomique, biophysique et technologique. L’innovation technologique, l’évolution démographique et le développement économique, par exemple, favorisent la création de nouvelles chaînes d’approvisionnement alimentaire ou la transformation des chaînes existantes. Elles déterminent les conditions qui façonnent les trois grands types de systèmes agroalimentaires présentés au chapitre 1: chaînes traditionnelles, de transition et modernes.

Ce classement peut aider les décideurs à savoir dans quels domaines il faut agir en priorité dans les différentes chaînes d’approvisionnement alimentaire, qui ont chacune leur propre degré de vulnérabilité face aux chocs et aux situations de stress. Les vulnérabilités et les capacités de résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire dépendent en effet en grande partie de leurs caractéristiques structurelles et des caractéristiques de leurs produits. Les chaînes d’approvisionnement où dominent les PMEA subissent les chocs différemment de celles où les grandes entreprises sont prédominantes. Les chaînes d’approvisionnement en fruits et en légumes frais sont plus sensibles aux fluctuations des marchés à court terme que celles qui sont par exemple spécialisées dans les céréales, en particulier si aucun entreposage frigorifique n’est disponible. La stratégie de résilience la plus adaptée dépendra des vulnérabilités de chaque chaîne d’approvisionnement alimentaire face aux différents risques10. Avant d’examiner dans quelle mesure les chocs et les situations de stress fragilisent les chaînes d’approvisionnement alimentaire, il convient de rappeler les principales caractéristiques de chaque type de chaîne.

Chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles

Les chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles sont courtes et comptent peu d’intermédiaires. Y circulent des denrées saisonnières qui proviennent principalement de petits producteurs locaux et qui sont vendues au niveau local. Les aliments de base représentent une grande part des denrées et la part des produits à valeur ajoutée dans les secteurs après récolte est faible. Les aliments subissent uniquement une transformation de base (séchage des fruits, mouture des céréales pour faire de la farine ou transformation du lait), généralement dans les ménages. Les filières de vente en gros et d’activités logistiques sont de petite taille car les aliments ne parcourent pas de grandes distances, et les microentreprises et petites entreprises d’agrotransformation (les plus petites des PMEA) dominent le marché. La transformation des produits alimentaires incombe très largement aux femmes: dans de nombreux pays africains, les femmes passent en moyenne quatre heures par jour à piler le grain11. La faible diversification de la production, le fait qu’il y ait peu de normes de qualité et de normes sur la sécurité sanitaire des aliments, et la difficulté de réaliser des économies d’échelle sont des contraintes qui limitent les systèmes traditionnels. Les techniques employées nécessitent une main-d’œuvre importante, les transactions se font essentiellement au comptant et les contrats sont rares. Généralement, on n’assiste à une concentration des chaînes d’approvisionnement que lorsque les pouvoirs publics subventionnent la production céréalière par l’intermédiaire d’entités semi-publiques afin d’approvisionner en aliments de base des populations urbaines croissantes8.

Chaînes d’approvisionnement alimentaire de transition

Les chaînes d’approvisionnement en phase de transition sont plus longues et comptent de nombreux intermédiaires, notamment les secteurs de la transformation, de la vente en gros et de la vente au détail, qui ajoutent de la valeur aux aliments et assurent leur distribution dans les zones rurales et les zones urbaines. Les filières courtes continuent de dominer sur les marchés des denrées très périssables, comme par exemple les produits laitiers et les légumes feuilles. La part des produits à valeur ajoutée dans les secteurs après récolte (vente en gros, transformation, logistique et vente au détail) est relativement importante, mais ces secteurs sont largement dominés par les PMEA. Les aliments transformés, essentiellement produits et vendus au détail par des PMEA, représentent également une part non négligeable de l’alimentation, car les femmes étant plus nombreuses à occuper un emploi, le coût d’opportunité de leur temps disponible s’est accru. La transformation à domicile, par exemple le pilonnage à la main que l’on trouve dans les systèmes traditionnels, a cédé la place à la mouture par les petites et moyennes entreprises, et par quelques grandes entreprises émergentes8. Les petites et moyennes entreprises côtoient des microentreprises, principalement un grand nombre de marchands ambulants de plats tout faits11; ces vendeurs installés sur la voie publique ont particulièrement souffert des restrictions à la mobilité imposées pendant la pandémie de covid-19 (encadré 12).

La fragmentation est une caractéristique fondamentale des chaînes d’approvisionnement en transition, qui s’appuient sur une multitude de petits producteurs de denrées primaires et de PMEA. Ces chaînes font appel à des techniques à fort coefficient de main-d’œuvre, ce qui est possible du fait du faible coût de la main d’œuvre, mais aussi à des machines. Des services de récolte adaptés et d’autres services agronomiques et commerciaux personnalisés aident les petits producteurs de produits alimentaires et non alimentaires à accéder aux technologies d’intensification, à de la main-d’œuvre qualifiée et aux services. On peut citer comme exemple les négociants qui fournissent des pulvérisateurs aux producteurs de mangues en Indonésie, ou les équipes mobiles qui proposent des services de récolte par moissonneuse-batteuse aux producteurs de riz en Chine21,22. Les transactions s’effectuent surtout au comptant mais des contrats commencent à faire leur apparition dans les chaînes d’approvisionnement en produits destinés au marché national et à l’exportation.

Les céréales et d’autres aliments de base représentent une part beaucoup plus faible de l’économie alimentaire totale car, à mesure que leurs revenus augmentent, les gens consomment moins d’aliments de base riches en féculents et davantage d’aliments transformés, riches en nutriments et plus coûteux. La diversification de la production alimentaire, en particulier en faveur des produits d’origine animale et des produits horticoles, est donc plus importante. Ces produits ont des chaînes d’approvisionnement relativement longues et doivent être transportés et stockés au froid dans des conditions plus strictes, ce qui les rend plus vulnérables aux perturbations. Les chaînes d’approvisionnement en denrées périssables étant plus longues, la sécurité sanitaire des aliments est une question qui doit être réglée d’urgence, sachant qu’il est souvent difficile de faire respecter les normes de qualité.

Chaînes d’approvisionnement alimentaire modernes

Les chaînes modernes desservent les grandes populations urbaines. Elles peuvent être longues ou courtes selon la production primaire qui fait l’objet d’une demande de la part des ménages. La demande d’aliments de base est moindre et les chaînes fournissent principalement des denrées périssables, comme par exemple des produits horticoles et des produits d’origine animale. Ces denrées peuvent trouver leur origine au niveau local, mais peuvent également être produites loin des villes et acheminées congelées ou réfrigérées. À mesure que la demande de produits d’origine animale augmente, l’approvisionnement alimentaire est de plus en plus sensible aux maladies animales, à la résistance aux antimicrobiens et aux problèmes de sécurité sanitaire des aliments.

Les supermarchés et les grands acteurs du secteur de la transformation traitent directement entre eux et, dans certains cas, achètent directement auprès des producteurs et des marchés de gros, qui occupent une place moins importante que dans les chaînes en phase de transition. L’entreposage frigorifique, le conditionnement et l’application de normes de qualité privées imposées aux fournisseurs sont également bien plus répandus. La chaîne d’approvisionnement est fortement concentrée et est dominée par des entreprises multinationales. Les PMEA peuvent rester compétitives si elles diversifient leur production ou si des coûts de transaction élevés dissuadent les grandes entreprises de mener des activités dans des zones reculées ou moins développées. Les techniques employées sont surtout à fort coefficient de capital, et les outils à base d’informatique, comme par exemple les systèmes de positionnement mondial (GPS) et les drones, sont plus répandus. Les transactions se font au comptant dans le secteur des fruits et des légumes, mais ailleurs les contrats sont la norme. En aval des chaînes modernes, on trouve le secteur de la restauration (restaurants et chaînes de restauration rapide).

Ces 30 dernières années, des chaînes d’approvisionnement modernes ont commencé à faire leur apparition, certes de façon inégale, dans des régions à faible revenu. Des entreprises alimentaires multinationales et de grands supermarchés se sont implantés en grand nombre en Afrique australe, en Asie de l’Est et du Sud-Est et en Amérique latine, et commencent tout juste à s’établir dans le reste de l’Afrique subsaharienne et en Asie du Sud. Les chaînes d’approvisionnement modernes dominent également le commerce international.

Les chaînes d’approvisionnement alimentaire ne subissent pas toutes les chocs de la même façon et y font face différemment

Les systèmes agroalimentaires et leurs chaînes d’approvisionnement subissent différents chocs et autres situations de stress. Ceux-ci surviennent dans les environnements socioéconomiques ou naturels et peuvent être provoqués par l’homme ou avoir des causes naturelles. Il est essentiel de savoir quels chocs et quelles situations de stress sont les plus susceptibles de frapper une chaîne d’approvisionnement alimentaire si l’on veut renforcer les capacités de résilience afin d’atténuer les effets potentiels et d’aider la chaîne à se relever.

Les différences marquées entre les trois types de chaînes d’approvisionnement alimentaire – traditionnelles, de transition et modernes – font qu’un même choc ou une même situation de stress peut avoir des retombées très différentes. La vulnérabilité et les capacités de résilience de toute chaîne d’approvisionnement alimentaire, quelle qu’elle soit, dépendent, du moins en partie, des caractéristiques de celle-ci. La figure 8 illustre de façon très simplifiée le niveau général de vulnérabilité et de résilience des différentes chaînes d’approvisionnement. Les répercussions des chocs et des situations de stress dépendront de ces deux facteurs pris ensemble, mais aussi de la nature du choc lui-même. Par exemple, les restrictions imposées par les pays pour endiguer la propagation de la covid-19 ont compromis la mobilité de la main-d’œuvre et réduit l’offre de main-d’œuvre accessible aux agriculteurs et aux acteurs des secteurs de la transformation et de la distribution dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire et aussi dans les chaînes d’approvisionnement en intrants et en services (voir la figure 7). Toutefois, l’impact n’est pas le même. Comme elles sont courtes, les chaînes d’approvisionnement traditionnelles pourraient être les moins durement touchées, car la mobilité est pour elles un facteur secondaire. Elles sont également moins exposées aux chocs causés par des perturbations de l’approvisionnement en intrants et en services dans les segments intermédiaires, et ont tendance à dépendre de quelques intermédiaires seulement, locaux pour la plupart.

FIGURE 8
Représentation simplifiée de trois types de chaînes d’approvisionnement alimentaire du point de vue de leur vulnérabilité en cas de choc ou de situation de stress et de leur capacité de résilience

Les publications et articles récents sur les chaînes d’approvisionnement alimentaire donnent des exemples intéressants qui montrent que la pandémie a permis aux chaînes traditionnelles d’apparaître comme une solution de rechange face aux longues chaînes, modernes et de transition, qui, elles, ont été perturbées par la crise23 à 28. Confrontés à la fermeture des frontières et aux restrictions imposées à la circulation au sein des pays et entre eux, de nombreux consommateurs n’ont eu d’autre choix que de se tourner vers les secteurs alimentaires traditionnels, qui dépendent moins des grandes installations de transformation et du transport en vrac et ont surtout recours à la main-d’œuvre locale29. Malgré des capacités financières limitées, de nombreuses chaînes d’approvisionnement ont su faire preuve de souplesse, en particulier dans les pays à revenu élevé, qui disposent de capacités plus importantes et de bonnes infrastructures24, 25, 28.

Par rapport aux chaînes traditionnelles, les chaînes de transition et les chaînes modernes peuvent être gravement touchées par les chocs subis dans les segments intermédiaires, segments qui peuvent être nombreux entre la production primaire et la remise finale des aliments aux consommateurs. Les différences entre les chaînes de transition et les chaînes modernes expliquent aussi que les chocs et les situations de stress n’ont pas forcément les mêmes effets. Les chaînes modernes se composent essentiellement de grandes entreprises qui ont plus facilement accès au capital que les PMEA des chaînes en phase de transition. Les grandes entreprises se caractérisent généralement par une forte intensité de capital et peuvent donc plus facilement se tourner vers un nouveau marché et augmenter leur ratio capital/main-d’œuvre pour réduire leur dépendance à l’égard de la main-d’œuvre salariée10, 30. C’est pourquoi les chaînes d’approvisionnement modernes ont mieux résisté que les chaînes de transition aux chocs causés par la covid-19 (principalement aux restrictions imposées au commerce et à la mobilité de la main-d’œuvre): elles fonctionnent au niveau mondial et peuvent s’adapter aux perturbations sur les plans géographique et temporel et, dans une certaine mesure, peuvent adapter la composition de leurs produits10. Toutefois, les grandes quantités d’énergie qu’elles consomment pour l’entreposage frigorifique et pour faire tourner les machines les rendent très vulnérables aux chocs qui touchent le secteur énergétique.

La nature fragmentée des chaînes d’approvisionnement alimentaire de transition, qui englobent une multitude de PMEA et sont très dépendantes de la main-d’œuvre, les rend particulièrement vulnérables en cas de choc touchant l’offre de main-d’œuvre. D’après des études de cas réalisées en Australie, en Égypte, au Pakistan et en République-Unie de Tanzanie, cette vulnérabilité a été clairement mise en lumière par les restrictions imposées au début de la pandémie de covid-1917, 20. Les effets sur les PMEA variaient selon les produits, la diversité des marchés de destination et la capacité générale des entreprises de faire face aux chocs. Les risques relatifs aux transports peuvent perturber toutes les PMEA, mais des études de cas concernant l’Australie12 et l’Égypte20 montrent que les entreprises du secteur des denrées alimentaires périssables étaient beaucoup plus touchées. En Égypte, les PMEA spécialisées dans la vente de fruits frais présentes sur les marchés intérieurs et sur de multiples marchés d’exportation étaient moins exposées aux risques liés à la pandémie car elles pouvaient changer de marché d’exportation ou se tourner vers le marché intérieur20.

Les risques et les chocs associés au climat, qui concernent tout particulièrement le secteur agroalimentaire, ont également des effets différents selon les chaînes d’approvisionnement alimentaire. Les chaînes traditionnelles, du fait qu’elles sont très dépendantes des intrants d’origine locale et des marchés locaux, sont les plus susceptibles de souffrir des chocs climatiques. Les petites entreprises et les petits producteurs, qui composent les chaînes d’approvisionnement traditionnelles, n’ont pas les mêmes avantages que les grandes entreprises en ce qui concerne les coûts. En effet, comme elles ne peuvent réaliser des économies d’échelle, leurs coûts de production sont plus élevés, ce qui les rend moins compétitives et les expose aux chocs exogènes sur l’offre et la demande, un risque qui concerne également les chaînes d’approvisionnement de transition27.

Les chaînes de transition et les chaînes modernes sont moins vulnérables aux chocs locaux car elles ont accès à des sources d’intrants et à des débouchés commerciaux plus diversifiés. Les chaînes modernes sont généralement moins vulnérables aux chocs climatiques et environnementaux que les chaînes de transition, car les grandes entreprises peuvent plus facilement mettre en place des mesures de protection, par exemple imposer des mesures de biosécurité à leurs fournisseurs de denrées primaires.

Les conditions socioéconomiques et les politiques en vigueur ont une incidence sur les risques auxquels sont exposées les chaînes d’approvisionnement alimentaire et sur leur vulnérabilité et leur capacité de résilience, et elles varient considérablement d’un pays à l’autre. D’après une étude sur les incidences de la pandémie de covid-19 en Australie, au Pakistan et en République-Unie de Tanzanie, les petites et moyennes entreprises de transformation de produits alimentaires dans les trois pays ont vu les prix des intrants augmenter, ont perdu des acheteurs et ont souffert d’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, mais contrairement à leurs homologues australiennes, les entreprises pakistanaises et tanzaniennes ont été très fragilisées financièrement et se sont heurtées à de grandes difficultés pour accéder au crédit. Le résultat, c’est qu’au Pakistan et en République-Unie de Tanzanie, beaucoup de petites installations de transformation ont fermé, mais pas en Australie, où les pouvoirs publics sont venus en aide au secteur alimentaire et ont joué un rôle déterminant dans la survie de nombreuses PMEA. La même étude indique que la capacité d’adaptation des PMEA est très variable. En République-Unie de Tanzanie et au Pakistan, elles ont continué de fonctionner comme à l’habitude, parce qu’elles ne connaissaient pas d’autres façons de faire, alors que la plupart des PMEA australiennes sont passées au commerce en ligne et à la vente au détail par de multiples canaux et ont adopté rapidement des mesures sanitaires, comme la distanciation physique et le port du masque. Les capacités des PMEA australiennes, notamment grâce à l’aide qu’elles ont reçue, font qu’elles ont pu se remettre rapidement du choc initial, poursuivre et diversifier leurs activités et investir dans des innovations. Le tableau 3 montre qu’au Pakistan et en République-Unie de Tanzanie ces options étaient très limitées17.

Tableau 3
Incidences de la covid-19 sur la chaîne d’approvisionnement alimentaire de trois pays et mesures d’adaptation prises

Les chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles et les chaînes de transition sont également plus vulnérables car elles comptent en leur sein beaucoup d’entreprises informelles. Les entreprises de petite taille, informelles ou semi-formelles, sont essentiellement familiales et sont la principale source de revenus pour nombre de groupes vulnérables, qu’ils soient propriétaires ou employés. Elles ont donc peu de chances de disparaître, même si leur existence est illégale et même si l’État tente de les faire entrer dans le rang31. Elles sont en revanche fortement exposées aux chocs, comme l’ont montré les fermetures causées par la pandémie. Le caractère informel des entreprises rend invisibles de nombreux acteurs des chaînes traditionnelles dans les statistiques nationales, ce qui signifie que les répercussions des chocs peuvent ne pas être prises en compte et des programmes essentiels de protection sociale rester hors d’atteinte32. Il n’existe pas de statistique officielle sur la part des entreprises informelles dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire, mais certaines estimations donnent à penser que la part des activités informelles peut présenter un sérieux défi pour les pays à faible revenu, où 90 pour cent environ des acteurs des chaînes d’approvisionnement alimentaire, y compris les producteurs de denrées primaires, relèveraient de l’économie informelle. Les activités informelles sont moins répandues dans les pays à revenu intermédiaire mais demeurent relativement élevées (dans une proportion de 50 pour cent environ)32.

Gérer la résilience de la chaîne d’approvisionnement alimentaire

Lorsqu’on s’intéresse à la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire, il importe d’avoir à l’esprit qu’une chaîne n’est pas simplement la somme de ses acteurs ou de ses activités. Une chaîne est un réseau dynamique d’acteurs et d’activités qui subit régulièrement des transformations, sous l’effet de facteurs tels que l’innovation et les nouvelles technologies, les changements démographiques, l’évolution des revenus ou les relations contractuelles et commerciales. Les caractéristiques socioéconomiques des entreprises agroalimentaires et la façon dont elles interagissent avec ces transformations déterminent en grande partie les capacités dont ces entreprises disposent pour prévenir, anticiper et absorber les chocs et les situations de stress, s’y adapter et se transformer. Toute transformation crée des gagnants et des perdants. De même, les chocs et les situations de stress peuvent avoir des effets dévastateurs sur certains acteurs des chaînes d’approvisionnement, et offrir à d’autres des possibilités de transformer et d’améliorer leurs activités. Pour être résiliente, une chaîne d’approvisionnement alimentaire n’a pas besoin que tous ses acteurs soient résilients. Une chaîne qui continue de fonctionner et de fournir des produits malgré des perturbations peut être considérée comme résiliente, indépendamment de ce qu’il advient des acteurs pris individuellement8.

Si l’on veut véritablement accroître la résilience, il ne suffit pas de gérer les chaînes d’approvisionnement alimentaire dans un objectif de croissance et d’optimisation et d’appliquer les outils habituels de gestion des risques. Il faut garder à l’esprit que les chocs et les situations de stress et leurs répercussions sur les chaînes d’approvisionnement alimentaire peuvent être extrêmement imprévisibles, et il faut se laisser la possibilité d’emprunter diverses voies en vue d’une adaptation et d’une transformation. La capacité de transformation, qui ne fait pas l’objet du présent rapport, est particulièrement importante; elle permet d’explorer des possibilités nouvelles en temps de crise, de percevoir diverses manières de surmonter les obstacles, d’aller de l’avant et d’accroître encore plus la résilience face aux difficultés à venir33, 34.

Lorsqu’on élabore des politiques et des interventions pour renforcer la résilience des entreprises agroalimentaires, on se heurte à plusieurs dilemmes. Premièrement, cela signifie souvent réaliser des investissements coûteux qui peuvent exiger que l’on fasse des choix entre résilience et efficience. Ces investissements sont plus problématiques pour les petits producteurs et les PMEA, qui n’ont qu’un accès limité au crédit. Un autre équilibre à trouver est le choix entre résilience et inclusivité: le renforcement de la résilience de certains acteurs de la chaîne d’approvisionnement peut pousser d’autres acteurs à la faillite. On aborde dans le reste du présent chapitre ces questions stratégiques, ainsi que les mesures d’incitation à la résilience et la manière dont sont prises les décisions d’investissement dans la résilience, compte tenu des équilibres à trouver. On y évoque également les politiques et les interventions publiques qui peuvent déterminer la capacité des chaînes d’approvisionnement alimentaire d’appliquer des stratégies de résilience, l’accent étant mis sur le rôle des politiques publiques.

Les stratégies de renforcement de la résilience peuvent exiger que l’on trouve un équilibre entre efficience et inclusivité

Les entreprises agroalimentaires, que l’on retrouve dans toutes les chaînes d’approvisionnement alimentaire, présentent une grande hétérogénéité en ce qui concerne les économies d’échelle, la composition des intrants, le recours à la technologie et les produits. Les biens qu’elles produisent vont des denrées livrées en vrac aux articles de niche qui ne dépassent pas le niveau local, en passant par les produits différenciés. Les entreprises ont également des capacités différentes pour ce qui est de faire face aux risques et de réaliser des investissements importants dans la résilience. Ces capacités dépendent du capital humain, de l’accès à l’information et au crédit, et des bénéfices non distribués, autant de facteurs qui sont généralement fonction de la taille de l’entreprise35. Selon l’activité de l’entreprise, elles sont mises à profit pour diversifier (les intrants, les modalités logistiques, les marchés en aval, etc.) ou pour introduire des redondances comme stratégies de renforcement de la résilience.

Les entreprises qui proposent des produits différenciés, et qui sont en concurrence sur la base des caractéristiques de leurs produits, comme la qualité, davantage que sur la base des coûts, sont plus limitées lorsqu’elles veulent diversifier leurs sources d’intrants que celles qui se fournissent en vrac et en biens indifférenciés. En effet, pour produire des articles de qualité, il faut disposer de technologies complexes et de ressources spécifiques, par exemple des machines onéreuses qui ne peuvent être utilisées que pour un produit donné, ou faire des investissements qui deviendront en grande partie inutiles si l’entreprise change sa gamme d’articles36. La marge de manœuvre générale de l’entreprise est réduite car le passage à un nouveau produit peut nécessiter des investissements coûteux. Les entreprises spécialisées dans des produits de qualité doivent obtenir de leurs fournisseurs d’intrants, par des mesures d’incitation ou des investissements conjoints, qu’ils fassent les investissements spécialisés nécessaires, et les contraindre à respecter les normes voulues et à se soumettre à des contrôles.

Au vu des difficultés qu’elles peuvent rencontrer pour diversifier leurs sources d’intrants, les entreprises peuvent envisager de diversifier leurs fournisseurs et de s’approvisionner dans différentes zones, en investissant dans la redondance. Par exemple, une entreprise agroalimentaire peut établir un réseau de fournisseurs dans des zones secondaires et tertiaires, qui serviront de fournisseurs «de secours» si ceux de la zone d’approvisionnement primaire subissent un choc climatique. Elle doit alors dépenser de l’argent pour inciter les fournisseurs à faire les investissements spécialisés voulus, et organiser l’infrastructure de la chaîne d’approvisionnement dans chaque zone. En Thaïlande, le Charoen Pokphand Group, première entreprise d’usinage du riz au niveau mondial, a adopté cette stratégie: l’entreprise a construit deux ports en amont de son installation primaire afin que les matières premières puissent lui parvenir même en cas de typhon. Seules les plus grandes entreprises peuvent se permettre un tel niveau de diversité et de redondance. Les PMEA, en particulier celles qui opèrent dans des chaînes d’approvisionnement fragmentées, doivent quant à elles trouver un compromis entre efficience et résilience. Les PMEA qui souhaitent investir dans la résilience se heurtent à des contraintes financières et logistiques mais restent efficientes et compétitives. Toutefois, leur approvisionnement dépend de zones moins nombreuses et plus proches, ce qui les expose aux répercussions des chocs qui pourraient toucher leurs fournisseurs.

Afin de trouver le meilleur équilibre possible, les entreprises peuvent recourir à des partenariats d’investissement avec des entreprises complémentaires, des intermédiaires par exemple. Encore une fois, cette possibilité ne s’offre pas à toutes. Par exemple, sur un marché national de la tomate, une entreprise pourrait s’approvisionner auprès de grossistes spécialisés qui sont en relation, de manière systématique, avec des fournisseurs situés dans des zones à faible risque et à fortes capacités37 – des relations contractuelles avec des fournisseurs dans des zones où les coûts de transaction sont faibles étant une autre possibilité38. L’investissement peut se présenter sous la forme de coûts de recherche, de création de réseaux d’approvisionnement ou de réseaux d’intrants (y compris pour les investissements dans le capital humain), d’achat de biens durables – entrepôts et postes d’amarrage, par exemple – et de droits d’accès aux marchés. Ces coûts posent problème à la plupart des PMEA, qui se heurtent à la double difficulté de devoir être résilientes face aux chocs tout en étant capables de faire concurrence aux entreprises plus grandes.

Les entreprises peuvent également diversifier leurs activités en trouvant un équilibre entre résilience et inclusivité. Les grandes entreprises de transformation des aliments peuvent diversifier leur palette de produits pour y inclure des intrants ou d’autres facteurs provenant des segments intermédiaires, ou accroître leur propre production primaire afin de moins dépendre des petits producteurs qui sont vulnérables aux chocs (par exemple aux risques liés au climat ou aux maladies des végétaux). Cette transformation s’est opérée au Kenya et au Zimbabwe dans les années 1990, lorsque les exportateurs de légumes ont commencé à se procurer les légumes pour moitié auprès de leurs propres plantations et pour l’autre moitié auprès d’autres grandes exploitations39. Dans ce cas, la résilience des exportateurs est acquise aux dépens de l’inclusivité économique, car les petits producteurs sont privés de l’accès aux marchés lucratifs tandis que les grandes entreprises gagnent en souplesse.

Les entreprises des chaînes d’approvisionnement alimentaire peuvent diversifier leurs moyens logistiques de manière à éviter les répercussions de chocs tels que la fermeture des ports ou les dégâts causés aux zones de transit par les ouragans. Encore une fois, cela signifie investir dans des infrastructures privées ou acquérir un espace dans des infrastructures publiques (sections réservées dans les chantiers navals, points de ravitaillement, ports, etc.), ainsi que dans des véhicules et des conteneurs, qui sont trop onéreux pour la plupart des PMEA.

Les entreprises peuvent aussi devoir faire face à des chocs qui surviennent en aval sur la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Pendant la pandémie de covid-19, lorsque les fournisseurs de produits alimentaires ont vu le nombre de consommateurs dans les magasins et dans les restaurants chuter brutalement, nombre d’entre eux ont diversifié leurs canaux de vente en recourant au commerce en ligne et en faisant appel à des entreprises de livraison qui se sont rapidement adaptées à la livraison à domicile. Cette évolution était déjà présente dans de nombreux pays avant la pandémie, mais elle s’est accélérée10, à un rythme différent selon les infrastructures, les capacités de gestion et le capital humain disponibles17.

Les infrastructures publiques, notamment les routes, les canaux, le réseau électrique, l’eau courante, les systèmes d’irrigation et les ports, sont une composante essentielle de toutes ces stratégies de résilience. Elles sont indispensables pour éviter ou atténuer les chocs, et plus ou moins efficaces de ce point de vue selon leur configuration, leur robustesse et leur degré de redondance. En amont des chaînes d’approvisionnement alimentaire, la capacité des producteurs agricoles de supporter les chocs dus au changement climatique est en partie déterminée par les infrastructures disponibles et leur qualité. Les producteurs qui se trouvent dans des territoires où les infrastructures sont bien développées sont plus à même de résister aux chocs, en particulier si les exploitations agricoles ont accès à l’irrigation, à la technologie et à l’information.

Si les producteurs d’aliments primaires ou les territoires agricoles sont résilients face aux chocs, mais les partenaires des chaînes d’approvisionnement alimentaire ou d’approvisionnement en intrants ou en services ne le sont pas, les répercussions d’un choc, amplifiées par les connections entre les chaînes d’approvisionnement alimentaire et l’interdépendance des acteurs, pourraient perturber les moyens d’existence des agriculteurs. On voit donc à quel point il est important que tous les segments des chaînes d’approvisionnement alimentaire et des chaînes connexes d’approvisionnement en intrants et en services soient résilients. Les infrastructures publiques (routes, réseau électrique et réseaux d’irrigation) doivent être complétées par des infrastructures privées ou collectives mises à disposition par des acteurs et des entreprises des chaînes connexes d’approvisionnement en intrants et en services. Il peut s’agir de points de collecte, de camions ou d’entrepôts réfrigérés. Les entreprises qui sont mieux à même d’investir et de faire face aux risques ont plus de chances de survivre et d’évincer celles qui ont moins de moyens, et les entreprises qui ne parviennent pas à investir pourraient être éjectées du marché. La fréquence accrue des chocs dus au changement climatique ou à des crises sanitaires, comme la pandémie de covid-19, vient s’ajouter aux pressions concurrentielles qui entraînent déjà la concentration rapide des segments non agricoles au sein des chaînes d’approvisionnement alimentaire. Les chaînes traditionnelles et les chaînes de transition, dominées par des PMEA et des microentreprises, risquent de perdre davantage de terrain au profit de chaînes plus modernes où les grandes entreprises sont majoritaires. Ce risque doit impérativement être pris en compte lorsqu’on cherche à concilier résilience et inclusivité: le coût social d’une hausse du chômage et de la perte de moyens d’existence causées par la fermeture des petites et moyennes entreprises peut être supérieur aux gains obtenus grâce au renforcement de la résilience des grandes entreprises.

Les entreprises agroalimentaires, les agriculteurs et les territoires agricoles exclus perdent un lien crucial avec les marchés urbains et les marchés d’exportation, qui sont leurs principaux débouchés. Ils se retrouvent pris au piège de la pauvreté, où la convergence de l’évolution des marchés et du changement climatique peut rendre particulièrement vulnérables des territoires pauvres en ressources et en infrastructures. Lorsque la résilience est insuffisante, l’appui des pouvoirs publics, et notamment l’accès au crédit, est nécessaire pour remédier aux défaillances des infrastructures et atténuer les difficultés auxquelles se heurtent les entreprises et les exploitations vulnérables, non seulement lorsqu’elles veulent investir dans leur résilience mais aussi quand elles doivent surmonter une crise.

Les équilibres à trouver, abordés dans la présente section, sont importants car l’efficience et l’inclusivité sont deux éléments indispensables pour établir des systèmes agroalimentaires résilients, où l’objectif est d’assurer la sécurité alimentaire et la nutrition pour tous et de protéger et d’améliorer les moyens d’existence des acteurs des systèmes. Il faut s’attacher à trouver les meilleurs compromis possibles, voire, dans la mesure du possible, créer des effets de synergie, en mettant en place un environnement, des politiques et des investissements qui soient porteurs.

Créer des effets de synergie entre résilience, efficience et inclusivité au profit des PMEA et des petits producteurs

La taille économique détermine fortement la capacité de résilience des acteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. En raison de leurs ressources limitées, les PMEA et les petits producteurs auront souvent plus de mal à se relever après un choc. Il est essentiel de leur venir en aide dans des délais rapides, notamment en leur donnant accès au crédit, non seulement pour qu’ils survivent aux crises, mais aussi pour que de l’argent soit investi dans des interventions qui réduisent les vulnérabilités de ces acteurs et créent une résilience systématique. Dans les pays à faible revenu, où les chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles et de transition sont majoritaires, de meilleures infrastructures publiques et un meilleur accès au crédit et à l’information peuvent créer des effets de synergie entre efficience et résilience au profit des PMEA et des petits producteurs.

De bonnes infrastructures publiques bien conçues et redondantes sont indispensables pour éviter les effets des chocs ou du moins les atténuer. Par exemple, l’installation de digues et de canaux peut aider les agriculteurs en cas de sécheresse. Ces mêmes installations peuvent aider face aux phénomènes climatiques extrêmes, ouragans et tempêtes par exemple, car elles empêchent les inondations de rendre les routes impraticables, ce qui permet aux aliments de circuler40. De meilleures infrastructures permettent d’améliorer la connectivité, de réduire les coûts de transaction et d’accroître la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire et des liens qu’elles entretiennent entre elles en atténuant les chocs climatiques et en renforçant les capacités d’absorption des entreprises agroalimentaires.

Outre des investissements dans les infrastructures physiques, des investissements importants dans les institutions et le capital humain sont souvent nécessaires. Par exemple, lors de la crise due à l’encéphalopathie spongiforme bovine (la «maladie de la vache folle»), qui a poussé une grande partie des consommateurs des pays à revenu élevé à consommer de préférence du poulet et du porc, les entreprises de la filière du bœuf, aux États-Unis d’Amérique, avaient de meilleures chances de survie si leurs produits étaient traçables et bien identifiables sur le marché41. Pendant la pandémie de covid-19, les institutions phytosanitaires d’Afrique du Sud, en collaboration avec le secteur privé, ont grandement contribué aux mesures prises par le secteur des agrumes face à l’adoption soudaine sur le marché européen, leur principal marché, de nouvelles exigences en matière de biosécurité42. Il était également important pendant la pandémie de disposer d’une bonne capacité de gestion, pour pouvoir passer rapidement au commerce en ligne et aux outils numériques afin de diversifier les débouchés17. Les infrastructures numériques, la recherche-développement et un environnement favorable aux entreprises sont également des éléments importants.

Si l’on veut accroître la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire, les pouvoirs publics doivent garder à l’esprit que ces chaînes peuvent être très informelles, en particulier dans les pays à faible revenu. Malgré la place qu’elles occupent dans l’économie des zones rurales, les entreprises alimentaires informelles – principalement des micro-entités et souvent des entreprises familiales – risquent d’être laissées pour compte car elles manquent de ressources et de moyens et n’ont pas suffisamment accès au crédit ni à la protection sociale. On part du principe que les petits entrepreneurs qui gagnent tout juste de quoi vivre n’ont pas pour ambition de développer leur activité, ni n’ont de ressources à réinvestir dans leur entreprise43. Les politiques adoptées face au secteur informel sont souvent ambiguës et incohérentes, alternant aide, répression et indifférence44. Or, d’après des enquêtes menées en Afrique du Sud, au Rwanda et au Sénégal, si les entreprises informelles peinent à se développer c’est uniquement à cause d’obstacles institutionnels et par manque de ressources, que ces d’entreprises soient dirigées par des hommes ou par des femmes, hommes et femmes ayant pratiquement les mêmes niveaux d’ambition43.

Les pouvoirs publics peuvent faciliter la coordination et l’organisation des chaînes d’approvisionnement alimentaire de façon à permettre aux acteurs de la chaîne de renforcer leur résilience. L’un des moyens consiste à créer des consortiums, qui permettent aux PMEA de fédérer leurs ressources et de contourner les obstacles liés à leur taille, afin de mieux faire face aux risques climatiques et à d’autres chocs. Les risques climatiques ne peuvent être totalement écartés, mais le capital social que se constituent les PMEA en se mettant en réseau et en créant des alliances stratégiques peuvent les aider à en atténuer les effets. Les interactions entre consortiums peuvent créer du capital relationnel, structurel et intellectuel et ainsi renforcer la capacité de gestion des risques grâce à la mise en commun des ressources45.

Les petites et moyennes entreprises, lorsqu’elles fonctionnent isolément, n’ont pas toujours accès aux technologies modernes, au savoir-faire et au matériel dont elles auraient besoin, mais elles peuvent y avoir plus facilement accès dès lors qu’elles agissent collectivement et qu’elles mettent leurs ressources en commun. Les politiques qui visent à renforcer la résilience des PMEA doivent encourager la mise en commun des ressources et le renforcement de la confiance afin de créer des effets de synergie qui permettent d’améliorer l’efficience, d’éviter les doublons et d’élargir l’accès à de nouvelles ressources.

On peut également encourager la coordination et accroître le capital relationnel en recourant à des outils de développement des territoires46, 47. D’après une étude sur les effets de la pandémie sur les PMEA en Chine, les comtés ruraux où l’on trouve le plus de pôles d’activité ont été moins touchés par les confinements successifs, comme en attestent le nombre de créations d’entreprises et les performances des entreprises déjà établies. Dans ces zones où les entreprises sont nombreuses, les acteurs déjà établis se sont réparti les risques et ont aidé les nouveaux arrivants originaires des mêmes villes qu’eux48.

Les consortiums et d’autres initiatives de coopération et de coordination peuvent permettre de développer l’activité, la visibilité et l’influence des petites entreprises, ce qui peut leur faciliter l’accès aux financements, privés et publics. Dans les pays où les marchés du crédit sont imparfaits ou insuffisamment développés, le développement de pôles d’activité peut aider les PMEA à accéder au crédit48. Le capital relationnel peut aussi faciliter leur accès aux marchés internationaux et leur ouvrir de nouveaux débouchés45, encourageant du même coup la diversification des ventes, ce qui en temps de crise renforce grandement la résilience. D’après une étude sur les PMEA égyptiennes, la forte dépendance de ces entreprises à l’égard d’un petit nombre de marchés de destination les a rendues vulnérables aux changements brusques et aux chocs. Il est recommandé que les politiques qui visent à accroître la résilience des PMEA s’efforcent de renforcer le rôle que jouent les PMEA sur les marchés nationaux et aussi de promouvoir la diversification des marchés d’exportation et de créer un environnement institutionnel et réglementaire qui les rende plus compétitives sur les marchés mondiaux20. À cet égard, comme indiqué au chapitre 2, la création de zones de libre-échange et l’extension de celles qui existent déjà permet de faciliter la diversification des marchés, y compris pour les PMEA.

L’organisation en consortiums et en pôles d’activité est un excellent moyen de développer la formation et les compétences, et de faciliter l’échange d’informations sur les risques et les solutions face aux catastrophes45, 48. Ils contribuent également à accélérer l’adoption des technologies numériques. Souvent, en particulier dans les pays à faible revenu, seul le personnel d’encadrement maîtrise ces technologies et en bénéficie17. Les technologies numériques permettraient aux PMEA d’échanger des données de façon instantanée, avant et après une crise, et les aideraient à ouvrir de nouveaux circuits de vente. Toutefois, compte tenu des difficultés qu’elles ont à adopter des innovations et des technologies nouvelles, les décideurs devront mettre au point des stratégies pour les aider à devenir plus compétitives et plus résilientes49, 50.

Conclusion

Les aliments sont produits, transformés et distribués par des chaînes d’approvisionnement qui diffèrent par leur composition, les technologies qu’elles mettent en œuvre et les produits qu’elles fournissent. Les changements que connaissent aujourd’hui les chaînes d’approvisionnement alimentaire sont la conséquence de changements socioéconomiques et technologiques, mais aussi biophysiques et environnementaux51. De nouvelles découvertes en biologie et en informatique, ainsi que l’évolution démographique et le développement socioéconomique, ne cessent de transformer les chaînes d’approvisionnement et de susciter de nouvelles chaînes, de nouveaux produits et de nouveaux risques.

La plupart des innovations voient le jour dans les économies plus avancées, mais la mondialisation accélère leur adoption partout dans le monde. Les supermarchés, la réfrigération, les téléphones portables, les ordinateurs et le commerce en ligne ont tous joué un rôle décisif dans la transformation des systèmes agroalimentaires. Les chaînes d’approvisionnement alimentaire continueront de créer davantage de produits différenciés du fait des changements démographiques, climatiques et socioculturels et de l’évolution des revenus. Alors que la modernisation et la mondialisation progressent, la différenciation pourrait créer de nouvelles vulnérabilités mais aussi de nouvelles capacités face aux perturbations systémiques, comme le changement climatique, la perte de biodiversité ou les pandémies. Les acteurs des chaînes d’approvisionnement alimentaire doivent s’adapter pour rester économiquement viables et continuer de participer aux systèmes agroalimentaires. De leur côté, les pouvoirs publics doivent créer les conditions qui permettront à ces transformations d’être écologiquement durables et de favoriser l’inclusion sociale.

L’innovation en matière d’alimentation et d’informatique contribue à accroître le capital humain et la capacité des populations locales de gérer de nombreux risques et de s’adapter à de nouvelles circonstances. Un système amélioré de recherche et d’enseignement peut jouer un rôle déterminant en contribuant à renforcer les capacités qui permettront d’ajouter de la valeur dans les chaînes d’approvisionnement et de protéger ces chaînes contre les risques. Il faut renforcer les liens entre le secteur universitaire et le secteur agroalimentaire pour favoriser l’entrepreneuriat, ainsi que les capacités de prévention, d’anticipation, d’absorption, d’adaptation et de transformation. Il importe également de promouvoir les innovations institutionnelles, sociales et financières au sein des filières, dans l’accès aux marchés et dans la vente.

Les interactions entre les différents acteurs, au sein des chaînes d’approvisionnement et d’une chaîne à l’autre, influencent de façon déterminante la réaction des systèmes agroalimentaires face aux chocs et aux situations de stress. Les producteurs agricoles sont extrêmement vulnérables aux chocs qui touchent directement le secteur, mais aussi à ceux qui touchent leurs fournisseurs et leurs clients. L’adaptation des acteurs intermédiaires aux chocs aura des répercussions sur les producteurs d’un côté et sur les consommateurs de l’autre, et tous les acteurs des chaînes d’approvisionnement alimentaire seront touchés par les chocs qui frappent les chaînes connexes d’approvisionnement en intrants et en services. Les chocs et les situations de stress peuvent certes menacer la viabilité des chaînes d’approvisionnement, mais ils peuvent aussi favoriser l’émergence de chaînes plus adaptées et plus résilientes. Compte tenu de l’importance des interactions au sein des chaînes d’approvisionnement et entre elles, il faut adopter des stratégies intégrées pour améliorer la capacité globale des chaînes de faire face aux chocs. Et pour ce faire, il convient de mettre en œuvre les dispositions des cadres mondiaux existants, en particulier le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030)52 et les directives communes des Nations Unies sur les sociétés résilientes, qui sont applicables à tous les secteurs.

La pandémie de covid-19 a montré combien les chocs peuvent être coûteux et combien les mesures d’adaptation sont elles aussi coûteuses. Les chaînes d’approvisionnement mondiales se sont certes bien adaptées mais le coût global de la crise, mesuré en nombre de vies perdues, de moyens d’existence détruits et de dégâts infligés à l’économie, a été énorme. Les pays à faible revenu ont souvent payé le prix fort. Il faut donc de toute urgence investir dans la gestion des risques et renforcer la résilience, en particulier face aux perturbations engendrées par le changement climatique, les pandémies futures et les crises économiques, en trouvant les meilleurs compromis possibles et en exploitant au maximum les synergies potentielles.

Il faut planifier et investir si l’on veut doter les chaînes d’approvisionnement alimentaire des cinq grandes capacités dont elles ont besoin pour être résilientes: prévention, anticipation, absorption, adaptation et transformation, face aux chocs et aux situations de stress. Il est essentiel d’investir dans les infrastructures (routes, installations de stockage et systèmes de secours) et les mécanismes d’appui économique. Dans certains cas, les chocs de longue durée peuvent entraîner une délocalisation de la production agricole et des PMEA. Il faut en priorité élaborer des plans qui tiennent compte des choix et de l’intérêt des différents acteurs des chaînes d’approvisionnement, ainsi que de la capacité des secteurs public et privé de gérer des risques multiples.

Les ménages, qui sont le sujet central du chapitre 4, sont au bout des chaînes d’approvisionnement alimentaire et sont exposés, à des degrés divers, à des chocs qui influencent leur demande de nourriture et donc leur sécurité alimentaire et leur nutrition. Les consommateurs les plus vulnérables sont les ménages de petits exploitants, de pêcheurs, d’éleveurs pastoraux et d’ouvriers agricoles, au sein de la filière alimentaire, ainsi que les pauvres des zones urbaines et les populations gravement touchées par les inégalités et la marginalisation, notamment les femmes et les peuples autochtones. Dans toute société, la sécurité alimentaire des ménages vulnérables est un facteur déterminant de la résilience des systèmes agroalimentaires. On analysera dans le chapitre suivant les moyens d’existence des ménages des zones rurales et l’on verra en quoi les moyens d’existence déterminent l’accès des personnes à des aliments nutritifs en quantité suffisante.

Messages clés

Le renforcement de la résilience des ménages ruraux est un objectif en soi – il contribue à améliorer les moyens d’existence des ménages en milieu rural, et permet aussi de renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires.

Les ménages ruraux subissent les chocs et les situations de stress différemment selon leur situation socioéconomique, la protection sociale et autres programmes d’aide dont ils bénéficient, et selon qu’ils sont principalement vendeurs ou acheteurs de produits alimentaires. Les ménages principalement féminins sont les plus touchés par les chocs et les situations de stress, en raison, surtout, d’un manque d’accès à la terre et aux autres actifs.

Les dommages subis par les nourrissons et les jeunes enfants peuvent être irréversibles et ont un coût économique à long terme, pour l’individu et pour la société. Les programmes de protection sociale dont les ressources sont limitées doivent donner la priorité aux nourrissons et aux enfants afin de prévenir les répercussions de la malnutrition, notamment le retard de croissance et l’émaciation.

L’éducation et la diversification des revenus peuvent fortement contribuer au renforcement de la résilience des moyens d’existence en milieu rural dans les pays à faible revenu. Pour les ménages qui vivent dans des conditions difficiles, les ménages pastoraux notamment, l’accès aux services de base tels que l’eau propre et l’assainissement est essentiel.

La création d’associations et de coopératives de producteurs ou leur renforcement, et l’adoption de pratiques de production plus durables (agroécologie, agriculture climato-intelligente et conservation de la biodiversité) sont importants pour renforcer la résilience.

En réduisant les contraintes qui pèsent sur le crédit, l’épargne et les liquidités, les mesures de protection sociale fondées sur l’analyse des risques et réactives face aux chocs permettent d’éviter que les ménages vulnérables n’adoptent des stratégies de survie aux conséquences préjudiciables et les rendent moins vulnérables face aux chocs.

Les politiques doivent s’appuyer sur la résilience intrinsèque des ménages agricoles de telle sorte que leurs moyens d’existence soient inclusifs et durables, en associant protection sociale classique et aide aux initiatives productives.

Le chapitre 1 proposait une grille d’analyse de la résilience des systèmes agroalimentaires, le chapitre 2 une analyse de la résilience agroalimentaire aux niveaux national et infranational, et le chapitre 3 une analyse de la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire et des entreprises agroalimentaires. Le présent chapitre apporte un complément en mettant l’accent sur la capacité de résilience des moyens d’existence et des ménages en milieu rural. Les moyens d’existence dans les zones rurales sont les capacités, les biens et les activités dont ont besoin les populations rurales pour gagner leur vie1, et peuvent inclure des activités agricoles et non agricoles, même si l’agriculture est dans la majorité des cas l’activité essentielle.

Les incidences des chocs et des situations de stress sur les moyens d’existence, la sécurité alimentaire et la nutrition se manifestent surtout dans les ménages, qui revêtent dès lors un intérêt particulier dans l’analyse de la résilience. Beaucoup de ménages ruraux jouent un rôle important en tant que producteurs au sein des systèmes agroalimentaires, soit dans la production agricole, soit dans le secteur agroalimentaire, où ils tiennent de petites entreprises. Les centaines de millions d’exploitations familiales de toutes tailles, paysans, pêcheurs et éleveurs pastoraux, dont les moyens d’existence dépendent de la production primaire, sont la clé de voûte de l’agriculture dans la plupart des pays. Les ménages ruraux qui mènent de front plusieurs activités différentes pour améliorer leurs moyens d’existence peuvent mieux s’adapter aux chocs et aux situations de stress et reprendre pied plus facilement, ce qui contribue à rendre les systèmes agroalimentaires plus résilients. En maintenant ou en accroissant les capacités et les actifs sans porter atteinte à la base de ressources naturelles, les moyens d’existence ruraux contribuent également à la durabilité des systèmes agroalimentaires.

Le présent chapitre s’intéresse aux moyens d’existence des ménages ruraux et à l’incidence plus élevée de la pauvreté dans les zones rurales. Selon les dernières estimations relatives à la pauvreté multidimensionnelle, sur le nombre total de personnes dans le monde qui sont en situation de pauvreté multidimensionnelle (1,3 milliard de personnes), 84,2 pour cent vivent en zone rurale2. Ainsi, la majorité des personnes (au nombre de 3 milliards) qui n’ont pas les moyens d’une alimentation saine et de celles (un autre milliard) qui risqueraient de rejoindre leurs rangs si leurs revenus chutaient d’un tiers (voir le chapitre 2) a toutes les chances de vivre dans une zone rurale et de dépendre dans une grande mesure, de manière directe ou indirecte, de l’agriculture pour subsister. Comme l’agriculture joue un rôle essentiel dans la réduction de la pauvreté et dans la sécurité alimentaire et la nutrition, le présent chapitre s’intéresse aux ménages agricoles des zones rurales (voir le glossaire). De fait, des milliards de personnes dans le monde dépendent d’une manière ou d’une autre des systèmes agroalimentaires, de par leurs moyens d’existence. Une analyse nuancée de la vulnérabilité des ménages et des liens qui les rattachent aux systèmes agroalimentaires, dont ils tirent leur subsistance, sera utile à l’élaboration de politiques qui visent à obtenir des résultats en matière de nutrition et de sécurité alimentaire pour les millions de personnes exposées à des chocs et à des situations de stress.

Partant d’une analyse empirique, le présent chapitre aborde dans un premier temps les facteurs déterminants de la résilience des moyens d’existence ruraux face aux chocs et aux situations de stress. Il s’intéresse ensuite aux difficultés que rencontrent les ménages agricoles dans les zones rurales et les petits producteurs pour gérer les risques et renforcer leurs capacités face aux chocs et aux situations de stress, et propose des solutions qui permettent de répondre aux besoins des ménages vulnérables et de renforcer les synergies entre la résilience des ménages, l’efficience et la durabilité.

Les incidences des chocs sur les ménages étant parmi les principaux facteurs de pauvreté et d’insécurité alimentaire, la capacité d’affronter les chocs fait l’objet de recherches et de débats intenses sur les politiques à mener. Les chocs que subissent les ménages peuvent être idiosyncratiques, dès lors qu’ils ne touchent qu’une personne ou un ménage (maladie ou décès, par exemple), ou ils peuvent être covariants, dès lors qu’ils sont d’une grande ampleur et frappent une large population (sécheresses, inondations, conflits, épidémies ou infestations d’organismes nuisibles, par exemple) (voir le glossaire)3, 4, 5. Les ménages adoptent différentes stratégies d’adaptation en fonction du type de choc. S’agissant des chocs idiosyncratiques, la préparation peut se faire au niveau des ménages et des communautés, tandis que dans le cas des chocs covariants, il peut être nécessaire de répartir le risque entre des groupes et des secteurs de populations plus importants6. Cependant, quel que soit le type de choc, idiosyncratique ou covariant, les capacités dont disposent les ménages pour les prévenir, les anticiper, les absorber, s’y adapter et se transformer – en résumé, leurs capacités de résilience – dépendent fortement de leur situation socioéconomique (par exemple de leur niveau de revenu) et de leurs réseaux sociaux et de soutien, ainsi que de la protection sociale et des programmes d’aide aux initiatives productives.

Les facteurs déterminants de la résilience des moyens d’existence ruraux

Les moyens d’existence en milieu rural dépendent dans une grande mesure de l’agriculture et des activités agricoles. Ils sont non seulement exposés aux chocs causés par les fluctuations des prix et les perturbations des chaînes d’approvisionnement en denrées alimentaires ou en intrants (voir le chapitre 3), mais aussi aux événements, tels que les inondations, les sécheresses, l’érosion des sols ou encore les infestations d’organismes nuisibles4. D’après le Rapport sur le développement humain 2014 du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de 2000 à 2012, plus de 200 millions de personnes, la plupart dans les pays à faible revenu, ont été touchées chaque année par des catastrophes naturelles, en particulier des inondations et des sécheresses7. Les sécheresses peuvent réduire l’approvisionnement local et faire monter les prix, touchant en particulier les ménages qui sont davantage acheteurs que vendeurs de denrées alimentaires8. Au Malawi, une récente étude a montré que les chocs météorologiques – sécheresse ou inondation, par exemple –, lorsqu’ils surviennent durant une campagne agricole, peuvent entraîner une réduction de 9 pour cent de la consommation de nourriture des ménages. Les difficultés telles que le manque d’infrastructures peuvent aggraver les préjudices subis en cas de choc météorologique. Selon cette même étude, les incidences des phénomènes météorologiques extrêmes conjuguées au manque d’infrastructures entraînaient une chute de 17 pour cent de la consommation alimentaire3. Même dans les pays qui ne sont pas classés parmi les pays à faible revenu, les chocs peuvent avoir des répercussions importantes sur les moyens d’existence. Il ressort d’une étude réalisée à l’aide de données de panel et portant sur la période 1994-2004 que plus de 50 pour cent des ménages russes avaient été touchés par des chocs qui les avaient contraints à ajuster rapidement et dans une large mesure leurs dépenses alimentaires. Ce sont les ménages ruraux qui avaient moins accès aux mécanismes de lissage des revenus, à savoir l’emprunt ou des assurances, qui avaient le plus souffert9.

Selon une récente étude mondiale de la FAO, les pertes économiques associées à l’ensemble des catastrophes – climatiques, hydrologiques, biologiques et géophysiques – se sont élevées en moyenne à environ 170 milliards d’USD par an sur les dix dernières années. D’après les données de 71 évaluations post catastrophes portant sur les besoins, réalisées entre 2008 et 2018, l’agriculture (culture, élevage, forêts, pêche et aquaculture) subit 26 pour cent du total des incidences des catastrophes de moyenne à grande ampleur, dans les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, et 63 pour cent du total des dommages et des pertes sur l’ensemble des secteurs de l’agriculture, de l’industrie, du commerce et du tourisme10.

Lorsqu’ils se trouvent dans un environnement à risque, les ménages agricoles ruraux, en particulier dans les pays à faible revenu, emploient un ensemble de stratégies pour gérer les risques, ex ante, et les chocs, ex post. Ils peuvent diversifier leurs sources de revenus, en diversifiant leurs activités d’élevage ou de culture, sur l’exploitation, ou en prenant part à l’économie rurale non agricole. Ils gèrent leurs risques agricoles en investissant dans des stratégies de réduction des risques (irrigation, drainage ou lutte contre les organismes nuisibles, par exemple). Confrontés à des conditions climatiques défavorables, ils adaptent leurs pratiques agricoles de manière à réduire l’érosion du sol et les risques de glissement de terrain, diversifient les cultures et modifient leur calendrier d’ensemencement. Lorsqu’un choc survient, ils utilisent leur épargne, se défont de leurs actifs ou empruntent pour faire face à la situation. Certains ménages ruraux font appel à des compagnies d’assurance formelles ou s’appuient sur des systèmes d’assurance informels qui regroupent d’autres ménages au sein de leur réseau communautaire11.

Les ménages n’ont pas tous la même capacité d’utiliser ces stratégies, que ce soit une seule ou plusieurs à la fois. La résilience est un processus dynamique, ce qui signifie qu’il est important que les stratégies visant à réduire des risques ou à faire face à des chocs ne diminuent pas la capacité générale des ménages d’affronter les chocs ultérieurs. Dans une large mesure, les décisions qui sont prises pour gérer les risques et faire face aux chocs dépendent des programmes d’aide et de la situation socioéconomique des ménages. D’après les résultats d’une enquête nationale menée en Inde auprès des ménages, ceux qui ne sont pas dans la pauvreté anticipent activement les chocs en renforçant leurs dispositifs de sécurité. Ils ont également davantage tendance à compter sur des sources de crédit informelles. Ces possibilités sont plus limitées pour les ménages pauvres, en particulier pour les ménages extrêmement pauvres en situation d’insécurité alimentaire élevée.

Pour examiner les capacités de résilience des ménages ruraux, on a appliqué le modèle de mesure et d’analyse de l’indice de résilience (RIMA) de la FAO (encadré 13) aux données de 46 enquêtes en grappes à indicateurs multiples (EGIM) de l’UNICEF, menées auprès des ménages dans 23 pays (deux enquêtes par pays) (voir la liste des pays à l’annexe 4). Bien qu’il s’agisse de ménages en zone rurale, tous ne travaillent pas forcément dans le secteur agricole et certains tirent exclusivement leurs moyens d’existence d’activités non agricoles. On constate d’après les résultats que l’éducation, la diversification des revenus et les transferts (formels et informels) sont les principaux facteurs qui contribuent au renforcement progressif des capacités de résilience des ménages ruraux. Dans le cas des ménages agropastoraux, les principaux facteurs sont un meilleur accès aux services de base, notamment l’école, les soins de santé et les services d’assainissement. Les chocs, en particulier les chocs les plus intenses, réduisent peu à peu les capacités de résilience des ménages. Ce sont les chocs sur les prix qui semblent être les plus préjudiciables à la résilience des ménages. Ils ont des effets plus importants que des chocs plus fréquents, comme les chocs d’ordre sanitaire ou environnemental12.

Le modèle RIMA a également été appliqué aux ménages agricoles (agriculture, pastoralisme ou agropastoralisme) de 12 autres pays qui ont été couverts dans le cadre de 17 enquêtes supplémentaires (voir la liste complète à l’annexe 4). Il s’agit exclusivement de ménages agricoles, mais certains tirent une partie de leurs moyens d’existence de l’économie rurale non agricole. La figure 9 présente une synthèse des résultats pour 12 pays, qui permet, à partir des quatre volets de la résilience des ménages – à savoir l’accès aux services de base, les actifs, les dispositifs de protection sociale et les capacités d’adaptation –, de déterminer les facteurs qui sont les plus importants pour la résilience des ménages agricoles (voir la description du modèle RIMA et des quatre volets à l’encadré 13). Les résultats sont présentés en fonction de différentes caractéristiques: niveau de revenu des pays, existence ou non d’une crise prolongée, type de zone agroécologique et principaux moyens d’existence des ménages. Le code couleur indique le degré d’importance de chaque volet dans la résilience des ménages agricoles, du vert clair pour les volets les moins importants au vert foncé pour les volets les plus importants.

FIGURE 9
Volets de résilience du modèle RIMA, par profil de pays

Dans tout juste un peu plus de la moitié des classements de la figure 9, les actifs (productifs et non productifs) sont le volet qui contribue le plus à la capacité de rebond des ménages après un choc. Les actifs détenus par les ménages sont, à tout moment, essentiels au maintien de leurs moyens d’existence et à la production de revenus. Lors d’une crise, ils jouent un rôle important dans leur stratégie de survie de dernier ressort et la vente d’actifs productifs et non productifs permet aux ménages de se protéger des chocs. Or cette stratégie peut les précipiter dans le piège de la pauvreté, en particulier les plus pauvres d’entre eux, s’il leur reste trop peu d’actifs.

La figure 9 montre que la capacité d’adaptation des ménages est également l’un des volets essentiels de leur résilience. La capacité d’adaptation des ménages est étroitement liée au niveau d’instruction et au développement des capacités humaines, qui donnent à leurs membres une valeur plus importante sur le marché du travail. L’accès aux services de base (installations sanitaires et eau de meilleure qualité, par exemple) et aux services élémentaires (écoles, hôpitaux et marchés agricoles, en particulier) est essentiel à la résilience des ménages, notamment dans les zones hyperarides et pour les ménages qui pratiquent le pastoralisme.

Le tableau 4 dresse une synthèse des facteurs qui contribuent à la résilience des ménages dans les 35 pays couverts par les deux ensembles de données (les enquêtes EGIM de l’UNICEF, qui portent sur 23 pays, et le modèle RIMA, appliqué à 12 pays; voir l’annexe 4) ainsi que des principales conséquences qui en découlent pour les politiques visant à renforcer la résilience des ménages ruraux.

Tableau 4
Facteurs de la résilience des ménages ruraux et conséquences qui en découlent pour les politiques à mener

L’analyse réalisée à l’aide du modèle RIMA montre également que les ménages ruraux majoritairement féminins sont les plus touchés pendant et après les chocs. Les femmes ont tendance à avoir beaucoup moins accès que les hommes à la terre et aux autres actifs alors que ceux-ci sont des facteurs qui contribuent de manière importante à la résilience. En général, leur principale stratégie pour faire face aux difficultés consiste à vendre leurs biens, mais c’est risqué à long terme car leur capacité de production de revenus s’en trouve réduite. Ces effets peuvent être contrecarrés en renforçant l’accès des femmes aux actifs et à la protection sociale. Si elles ont accès aux actifs productifs, les femmes peuvent reconstituer les moyens à leur disposition et rebondir après un choc sans mettre en péril leur sécurité alimentaire. L’éducation joue un rôle essentiel dans le renforcement de la capacité de résilience des femmes. Il est donc important d’élargir l’accès de l’éducation à tous, et en particulier aux filles. Les femmes, lorsqu’elles sont plus instruites, ont davantage de possibilités d’accès au marché du travail et peuvent élargir la palette d’activités rémunératrices à leur disposition12.

Les enfants sont eux aussi vulnérables aux chocs et aux situations de stress. Sur le plan nutritionnel, les nourrissons et les jeunes enfants sont les plus touchés par les chocs. D’après une étude récente, les chocs covariants ont des effets qui sont permanents sur la croissance des enfants dans les pays à faible revenu, et la plupart des études montrent que les chocs de grande ampleur se traduisent par une augmentation de la prévalence du retard de croissance et de l’insuffisance pondérale chez les enfants de moins de 2 ans14. On dispose de beaucoup moins de données suivies sur les effets de la dénutrition aiguë (rapport poids/taille de référence ou état d’émaciation) sans doute parce qu’il peut y avoir reprise de poids dès le choc passé. Les données n’apparaissent donc pas dans les études à moins d’être relevées sur le champ. Les effets du retard de croissance sont en grande partie irréversibles: s’ils peuvent reprendre du poids, les enfants ne peuvent pas rattraper de la même façon la taille perdue. Il existe peu de données sur les effets des chocs sur les carences en micronutriments, qui mériteraient pourtant d’être examinées de plus près. L’état nutritionnel des enfants influe sur les résultats des tests cognitifs, les résultats scolaires et les débouchés ultérieurs sur le marché du travail15, 16, ce qui conduit à penser que les chocs peuvent avoir des coûts économiques à long terme pour les individus et pour la société14.

Les petits producteurs agricoles supportent un double fardeau

L’agriculture (culture, élevage, pêche, aquaculture et forêts) est une activité à risque. Tous les secteurs agricoles dépendent de processus naturels et de ressources naturelles limitées et sont plus exposés aux risques naturels que les secteurs de la transformation et du commerce des aliments. L’agriculture est de plus en plus fréquemment exposée à de nouveaux chocs, situations de stress et facteurs de risque dont les origines sont diverses, qu’il s’agisse de phénomènes climatiques extrêmes et plus fréquents, de l’érosion de la biodiversité, de nouvelles maladies, du changement climatique, de la dégradation des ressources naturelles, du vieillissement de la population agricole, des pénuries de main-d’œuvre saisonnière, des craintes liées à la sécurité sanitaire des aliments ou de la volatilité des prix des produits de base17.

Or, les ménages ruraux n’ont pas tous les mêmes capacités de faire face aux risques. Ceux qui ont une petite exploitation sont soumis à des contraintes plus fortes car ils ont un accès plus limité à la terre et à l’eau, aux ressources, à l’information, aux technologies, aux capitaux et aux actifs18,19. Ils ont à supporter un double fardeau, lié à leur vulnérabilité face aux risques et aux chocs: outre qu’ils sont exposés aux risques propres à l’activité agricole, ils sont exposés au risque d’être écartés des actifs productifs et des marchés lucratifs au stade de la transformation sur la chaîne d’approvisionnement alimentaire (voir le chapitre 3)20.

Les effets des chocs sur la sécurité alimentaire et sur la nutrition des ménages agricoles dépendent également de l’ampleur de leur participation à la production agricole et alimentaire. Les chocs et les situations de stress qui pèsent sur l’agriculture et la production alimentaire (ravageurs des cultures, maladies, sécheresse ou encore perturbation des chaînes d’approvisionnement alimentaire) touchent davantage les ménages qui sont des producteurs nets de produits alimentaires (voir le glossaire). En revanche, les ménages qui sont consommateurs nets de produits alimentaires dépendent davantage de l’économie non agricole. Ils pratiquent l’agriculture à temps partiel et, en tant que consommateurs, sont davantage exposés aux chocs qui ont un effet sur le pouvoir d’achat, comme par exemple les flambées des prix et les crises économiques généralisées.

Qu’on classe les ménages agricoles dans une catégorie ou dans une autre, il n’existe clairement aucune stratégie unique de renforcement de leur résilience face aux chocs. Les ménages agricoles, en particulier les petits exploitants, ne disposent guère d’outils de gestion des risques agricoles, à cause du défaut de gouvernance, d’investissements et de politiques multirisques, à cause des défaillances du marché ou parce que les marchés sont sous-développés ou absents. Dans un monde idéal, les petits exploitants pourraient utiliser des outils de répartition du risque (crédit, assurance sur les récoltes et le cheptel, contrats à terme négociés de gré à gré, contrats à options et contrats à terme négociés sur un marché organisé, etc.) qui leur permettraient de transférer leurs risques sur l’économie générale et de gérer leur exploitation plus efficacement. Or les outils tels que les assurances agricoles ont besoin d’un soutien actif des pouvoirs publics, ce qui n’est pas encore possible dans tous les pays. Les autres outils (par exemple les contrats à terme négociés sur un marché organisé et les contrats à options) ne sont quant à eux applicables que dans un nombre limité de situations, même dans les pays à revenu élevé, car ils nécessitent des compétences spécifiques dont ne disposent pas la majorité des ménages agricoles.

Les systèmes de gestion des risques sont particulièrement peu développés dans les secteurs de l’aquaculture et de la pêche par rapport aux autres secteurs de la production alimentaire21. En 2018, l’aquaculture fournissait 52 pour cent du poisson destiné à la consommation humaine22, mais le secteur reste par nature plus risqué que les autres secteurs de production alimentaire en raison de la fluctuation plus importante des rendements et des recettes et de sa sensibilité à de multiples aléas biologiques (maladies et incidents liés à la sécurité sanitaire des aliments)23, 24, 25. Il en résulte que dans les pays à faible revenu, les moyens d’existence de 20,5 millions de personnes, dont la plupart sont des travailleurs de l’aquaculture artisanale engagés à temps complet, à temps partiel ou occasionnellement, peuvent être mis en péril en cas de choc22. Les ménages qui pratiquent la pêche artisanale dans les pays à faible revenu sont dans une situation analogue: ils sont touchés de manière disproportionnée en cas de choc ou de crise. Ils sont moins préparés en raison de leur faible niveau d’épargne et du fait de mécanismes de crédit et d’assurance inadéquats26. Il leur est extrêmement difficile d’accéder à des programmes d’assurance ou de crédit qui soient favorables, en raison du caractère imprévisible de leurs revenus (qui dépendent de la capture de poisson) et parce qu’ils n’ont pas suffisamment de biens à offrir en garantie27.

Compte tenu des défaillances du marché en ce qui concerne les outils de répartition du risque, les ménages agricoles emploient d’autres stratégies pour gérer les multiples risques auxquels ils font face. Ils diversifient leur gamme de produits pour réduire les risques et atténuer les effets des chocs éventuels et par ailleurs ils se constituent une épargne et accumulent des biens pour pouvoir se relever après un choc. Au niveau des exploitations agricoles, les ménages font face aux interactions imprévisibles entre les facteurs naturels, technologiques et sociaux en reconfigurant et en utilisant différemment les ressources à disposition28. Ils peuvent ainsi affronter les changements, prévisibles et imprévisibles28, en renforçant leurs capacités de prévenir les chocs, de les anticiper, de les absorber, de s’y adapter et de se transformer.

Comme le changement climatique et la fréquence accrue des catastrophes font partie du nouvel ordre des choses, les capacités de résilience des ménages agricoles sont de plus en plus mises à l’épreuve. D’après une analyse de la résilience climatique des éleveurs pastoraux et agropastoraux en Afrique subsaharienne, des améliorations sont nécessaires (encadré 14), même si leurs capacités et leurs connaissances ont pu leur être utiles face aux chocs imprévus et à la variabilité du climat. Les populations les plus vulnérables sont exposées de manière disproportionnée aux catastrophes et au changement climatique10. Pendant la pandémie de covid-19, les petits producteurs ont eu moins accès aux intrants, à la main-d’œuvre et aux terres agricoles, ce qui a entraîné un manque à produire, des baisses de revenus pour les ménages et un recul des niveaux de nutrition. La gravité des préjudices subis dépend de plusieurs facteurs, notamment le moment où la pandémie de covid-19 a éclaté et les répercussions des mesures d’endiguement de la pandémie sur le calendrier agricole, le prix des intrants et la demande29, 30, 31.

Des solutions potentielles pour des moyens d’existence résilients en milieu rural

La résilience des systèmes agroalimentaires a pour fonction ultime de garantir à tous une nourriture suffisante, saine et nutritive en cas de perturbation, et de maintenir les moyens d’existence des acteurs des systèmes. La suite du chapitre met l’accent sur des solutions qui pourraient orienter les politiques et les interventions visant à renforcer la résilience des moyens d’existence des ménages ruraux. Ces solutions peuvent être regroupées en trois catégories principales: les solutions institutionnelles, les solutions techniques et les politiques transversales.

Des institutions au service du renforcement de la résilience

La capacité de résilience des ménages ruraux est tributaire des facteurs contextuels et des circonstances locales. Les répercussions économiques des épisodes de sécheresse dépendent d’une multitude de facteurs locaux: qualité des sols, plantes cultivées, infrastructure d’irrigation et flexibilité des prestataires de services de crédit et des partenaires de la chaîne d’approvisionnement33. L’éloignement physique des marchés et des centres urbains conditionne en grande partie l’accès aux produits, aux intrants et au crédit, accès qui est déterminant. Les ménages ruraux sont intégrés dans des réseaux locaux et interagissent de manière formelle et informelle avec d’autres acteurs dans des contextes agroécologiques, socioéconomiques et territoriaux spécifiques. Ces interactions sont des éléments constitutifs de leurs systèmes de production et de leurs modes de subsistance17, 34. Leurs moyens d’existence et leur résilience dépendent également des interactions avec leur environnement. Les réseaux sociaux jouent un rôle crucial dans la résilience des ménages pauvres du fait qu’ils leur donnent accès à des mécanismes informels de crédit et d’épargne qui les aident à faire face aux situations d’urgence et aux chocs. Cependant, les chocs covariants, lorsqu’ils se produisent, touchent la plupart des ménages, et les réseaux sociaux peuvent s’avérer incapables d’apporter un soutien. Il faut que les politiques et les stratégies de renforcement de la résilience des populations pauvres vulnérables des zones rurales tirent parti des dispositifs de protection informels et corrigent leurs lacunes. Elles peuvent, par exemple, encourager la création de réseaux sociaux formels et établir des passerelles entre, d’une part, ces réseaux, et, d’autre part, les entreprises productives et les services financiers27.

Les producteurs n’ont pas tous les mêmes niveaux d’intégration dans les chaînes d’approvisionnement de denrées alimentaires et les chaînes latérales de fourniture de services et d’intrants (voir le chapitre 3). Ceux qui pratiquent une agriculture de subsistance ont avant tout pour objectif de produire des aliments qu’ils consommeront, un objectif qui est moins important pour les ménages agricoles bien connectés au secteur agroalimentaire, auprès duquel ils s’approvisionnent en intrants, obtiennent des prêts et vendent leurs produits. Les agriculteurs qui ont une grande exploitation peuvent même fournir des emplois et accorder des crédits informels. Les petits ménages agricoles ont des liens moins étroits avec les chaînes d’approvisionnement alimentaire et s’appuient largement sur les réseaux communautaires pour accéder aux crédits informels, à l’information, aux technologies et aux réseaux de vente. Marginalisés et exclus des marchés plus lucratifs, ils sont davantage exposés aux risques et aux chocs et ne peuvent avoir une activité efficiente et productive. Les difficultés auxquelles ils se heurtent pèsent sur leurs moyens d’existence et limitent leurs possibilités de croissance, ce qui sape leur résilience et celle des systèmes agroalimentaires. Ces trois points faibles – activité à petite échelle, accès limité aux ressources et faible poids sur le marché – peuvent créer un cercle vicieux.

Les politiques qui visent à mettre en place ou à consolider des associations et des coopératives peuvent contribuer à briser ce cercle vicieux et à améliorer les moyens d’existence de plusieurs manières: mise en commun des ressources pour obtenir des économies d’échelle; accès aux moyens de production (machines et outillage, crédits, etc.); et renforcement du pouvoir de négociation sur le marché. En achetant leurs intrants et en vendant leurs produits de manière groupée, les petits producteurs peuvent se protéger des fluctuations du marché, obtenir de meilleurs intrants et vendre à meilleur prix. Les clubs Dimitra de la FAO sont des associations communautaires généralement implantées dans des zones isolées ou touchées par des conflits. Leurs membres se réunissent sur la base du volontariat pour discuter de leurs difficultés communes et mener ensemble des actions, le but étant d’améliorer les moyens d’existence des communautés rurales et de les rendre plus autonomes, en particulier les femmes35.

La coordination avec les autres acteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire est également essentielle dans la gestion des risques du marché. Elle permet de tisser des liens de confiance et de favoriser la création de réseaux, la coopération et l’échange d’informations entre les petits producteurs et les autres acteurs de la chaîne de valeur. Elle permet aussi de tirer des avantages mutuels de mécanismes tels que l’agriculture contractuelle36 dans le cadre de laquelle les petits producteurs (cultivateurs, éleveurs, aquaculteurs) bénéficient de prix garantis pour leurs produits, tandis que les transformateurs et les distributeurs obtiennent des produits de la qualité souhaitée37.

L’agroécologie et l’adaptation au changement climatique au service du renforcement de la résilience

L’adoption de pratiques de production plus durables constitue une autre stratégie importante de renforcement de la résilience des ménages agricoles. Les pratiques proposées sont tout particulièrement adaptées aux petits exploitants. Elles créent des synergies durables entre le renforcement de la résilience et l’amélioration de la productivité et sont en outre accessibles aux petits producteurs, qui n’ont pas à réaliser des investissements importants et risqués. L’agroécologie est l’une des approches que les petits producteurs peuvent adopter face au changement climatique et pour s’adapter à ses effets. De plus en plus d'éléments montrent qu’elle présente des avantages pour l’environnement, la biodiversité, les revenus des exploitants agricoles, l’adaptation au changement climatique et la résilience aux multiples chocs et situations de stress. Mais ces éléments sont dispersés dans tout un ensemble d’études de cas, d’expériences isolées et d’observations sur le terrain, et basés sur des méthodes et des données hétérogènes portant sur des échelles et des durées diverses38.

Pour combler le manque de données systématiques, la FAO, en collaboration avec un grand nombre de partenaires, a élaboré un outil qui permet d’évaluer les performances de l’agroécologie (TAPE). Il s’agit d’un cadre novateur qui vise à regrouper au niveau mondial des données sur la contribution de l’agroécologie à la transformation des systèmes agroalimentaires pour qu’ils deviennent plus durables et plus résilients39. La résilience y est évaluée de manière explicite à l’aide des échelles descriptives suivantes:

  • diversification générale du système de production – diversité des cultures, des animaux, des arbres et des activités économiques;

  • résilience économique – stabilité de la production et des revenus et capacité de se remettre des perturbations;

  • résilience sociale – mécanismes de protection sociale qui réduisent la vulnérabilité;

  • résilience environnementale – capacité d’adaptation de l’écosystème agricole face au changement climatique.

Dans les 25 pays, répartis sur cinq continents, auxquels cet outil a été appliqué, un lien étroit a été observé entre l’agroécologie et la diversité biologique et économique: les exploitations agroécologiques les plus avancées sont caractérisées par une plus grande diversité des cultures, des arbres et des animaux d’élevage, mais aussi par une plus grande diversité sur le plan de l’activité économique, ce qui leur confère une résilience économique et environnementale accrue. La résilience, lorsqu’elle est renforcée, se traduit souvent par une meilleure alimentation et une plus grande sécurité alimentaire. Le cheptel, en particulier, joue un rôle essentiel dans le renforcement de la résilience40. D’après les résultats tirés de l’outil TAPE, les exploitations les plus avancées ont des bêtes en bonne santé, de races bien adaptées. La biodiversité y est plus importante et la santé du sol meilleure, ce qui contribue à renforcer la résilience écologique et les services écosystémiques.

D’après une évaluation menée au Mali avec cet outil, les recettes nettes des exploitations les plus avancées en agroécologie sont plus élevées que celles des exploitations classiques qui utilisent des quantités importantes d’intrants chimiques. De fait, les exploitations agroécologiques ont des coûts beaucoup moins élevés, car les synergies biologiques auxquelles elles ont davantage recours se substituent aux intrants externes41, 42. À titre d’exemple, elles utilisent les effluents d’élevage comme engrais et les résidus de récoltes pour alimenter les bêtes. En outre, fortes d’une plus grande biodiversité, les exploitations agroécologiques sont mieux à même de résister aux organismes nuisibles et aux maladies43.

Au-delà des avantages qu’elle confère aux producteurs agricoles, l’agroécologie peut contribuer, à condition qu’elle se généralise, à inverser la tendance à l’appauvrissement de la diversité biologique et à renforcer la biodiversité au service de l’alimentation et de l’agriculture. Les systèmes de production qui prédominent contribuent à appauvrir la biodiversité (destruction des habitats, monoculture, utilisation excessive d’intrants – engrais et produits chimiques – et concentration sur un petit nombre d’espèces, de races et de variétés, avec pour conséquence une réduction de la diversité des ressources phyto et zoogénétiques)44.

Fondée sur le principe de la biodiversité pour l’alimentation et l’agriculture, l’agroécologie peut créer des synergies qui favorisent des moyens d’existence résilients tout en renforçant la durabilité environnementale. Elle contribue à stabiliser et à accroître les rendements, à favoriser la culture et l’élevage de variétés et de races locales, à améliorer les revenus et à diversifier l’alimentation des ménages45. La biodiversité pour l’alimentation et l’agriculture contribue aussi indirectement au renforcement de moyens d’existence résilients en milieu rural en donnant accès à des aliments issus de la faune et de la flore sauvages et à d’autres ressources, en particulier le bois de chauffage. On trouvera à l’encadré 15 des exemples d’approches qui peuvent générer, dans le respect de l’agroécologie et de la biodiversité, des moyens d’existence résilients pour les populations rurales des zones de montagne.

L’agriculture climato-intelligente (ACI) est une autre approche inscrite dans cette démarche et qui vise à promouvoir la sécurité alimentaire, des moyens d’existence résilients et une agriculture résiliente face au climat48, 49. Selon le principe qui sous-tend cette approche, l’agriculture classique ne peut nourrir de manière durable une population mondiale de plus en plus nombreuse, car elle dégrade l’environnement et épuise les ressources naturelles, qui sont limitées50. Des études de cas en Afrique montrent que l’ACI présente des avantages multiples. Elle aide les petits producteurs à gérer les terres de manière durable, à ralentir la désertification et à mieux résister aux épisodes de sécheresse tout en améliorant leur productivité et leurs revenus. Elle renforce aussi la capacité des ménages agricoles, en particulier des ménages dirigés par des femmes, à s’adapter au changement climatique51.

On trouve un exemple réussi de mise en œuvre de l’agriculture climato-intelligente dans la réserve forestière de Kodroka dans le nord du Soudan. Une grande partie de la forêt a été gravement dégradée par un ensemble de facteurs, notamment la progression du désert, le changement climatique et des pratiques de gestion de l’eau inefficaces. De nombreux agriculteurs avaient déjà commencé à s’adapter au changement climatique en adaptant leur calendrier (semences et récoltes) à des étés qui sont de plus longue durée et à des précipitations qui sont imprévisibles. La FAO a travaillé avec les communautés qui vivent à proximité de la forêt pour planter des rangées d’arbres (tels que l’acacia et l’eucalyptus) autour des cultures sur les terres dégradées. En quelques cycles de récolte, la zone est devenue à nouveau verdoyante et productive. Les arbres font tampon contre l’expansion du désert; grâce aux cultures, les moyens d’existence sont améliorés; et la coupe des arbres, bien gérée, produit des revenus supplémentaires52.

La protection sociale, un levier essentiel dans le renforcement de la résilience des ménages ruraux

La précarité de beaucoup de moyens d’existence dans les zones rurales fait que ceux-ci sont plus vulnérables en cas de choc, ce qui peut fragiliser la base d’actifs et la capacité de la population de gérer les futurs chocs de manière efficace53. Des centaines de millions de familles rurales sont piégées dans le cercle vicieux de la faim, de la pauvreté et d’une faible productivité, causant des souffrances qui pourraient être évitées et entravant le développement de l’agriculture et la croissance économique dans son ensemble. Pour briser ce cercle vicieux, il faut agir dans deux domaines complémentaires: la protection sociale et les secteurs productifs de l’économie. Dans de nombreux pays en développement, la plupart des pauvres vivent dans les zones rurales et l’agriculture est le principal secteur productif. La protection sociale, lorsqu’elle est associée au développement agricole, est un levier qui peut être efficace pour briser le cercle vicieux de la pauvreté rurale54.

Les politiques de protection sociale des pays en développement sont initialement apparues pour aider les franges de leur population touchées par les programmes d’ajustement structurel, dans les années 1980 et au début des années 1990. L’aide sociale n’est plus, désormais, leur seule vocation. Elles mettent de plus en plus l’accent sur la réduction des risques et des répercussions des chocs sur les moyens d’existence fragiles ainsi que sur le renforcement de l’inclusion économique et productive55. Lorsque, dès leur conception, elles prennent en considération les questions de genre, la nutrition et les risques, et visent à être réactives face aux chocs, les politiques de protection sociale contribuent à augmenter les revenus et à combler les déficits de consommation des ménages pauvres, qui ont alors la possibilité d’investir et de se lancer dans des activités productives. La protection sociale joue un rôle particulièrement intéressant lorsqu’elle est associée à l’adoption d’approches climato-intelligentes dans les stratégies de gestion des risques climatiques (on trouvera des exemples dans l’encadré 16).

De nombreuses données montrent que les dispositifs de protection sociale peuvent être efficaces pour maintenir les revenus et préserver les actifs et la sécurité alimentaire56, 57, 58. Lorsqu’ils sont garantis, réguliers et prévisibles, ils ont aussi des effets sur la productivité du fait qu’ils procurent un certain niveau d’assurance et un certain montant de liquidités, ce qui permet aux ménages d’exploiter des débouchés économiques. De plus, la protection sociale peut avoir des effets multiplicateurs bénéfiques pour les communautés et les économies locales59.

La protection sociale a évolué. Elle recouvre désormais des initiatives publiques et privées qui visent à aider les communautés, les ménages et les individus à gérer les risques. Elle regroupe trois éléments: i) l’assistance sociale (par exemple les transferts en nature ou en espèces et les programmes d’aide sociale); ii) l’assurance sociale; et iii) les programmes liés au marché du travail64. L’aide sociale, en améliorant leurs revenus et leurs capacités en général, permet aux ménages de se relever après un choc55. Lorsque ces initiatives sont déjà établies, elles peuvent être complétées relativement rapidement par une assistance sociale supplémentaire et être élargies aux ménages qui sont frappés pour la première fois par une situation de vulnérabilité65.

D’après les données sur l’utilisation de la protection sociale au cours de la pandémie de covid-19, les pays ont réagi en partie par une plus grande générosité des programmes existants et en étendant ces programmes à de nouveaux publics. Le nombre de nouveaux programmes est devenu important: 63 pour cent de l’aide sous forme de transferts en espèces qui a été fournie pour faire face à la pandémie a été octroyée dans le cadre de nouveaux dispositifs66. Ces interventions n’ont pas été les mêmes d’un pays et d’une région à l’autre sur le plan de la rapidité, de la couverture, de la générosité et de la durée de la protection sociale. En moyenne, elles n’ont été mises en œuvre que pendant trois mois, ce qui est bien plus court que la durée de la crise, et 40 pour cent environ des programmes se sont présentés sous la forme d’un versement unique66. Les pays qui possédaient des systèmes de protection sociale plus élaborés étaient mieux préparés à protéger les revenus de la population. Il est donc important d’investir dans leur renforcement en temps normal, pour pouvoir les élargir facilement en période de crise et répondre aux besoins des personnes vulnérables67.

Les interventions de protection sociale peuvent aider les petits ménages agricoles à adopter des stratégies qui leur permettent de gagner davantage mais qui seraient, sans cela, hors de portée en raison des risques supplémentaires qui en découlent54. Elles fournissent aux ménages pauvres des zones rurales qui dépendent principalement de l’agriculture d’autres possibilités pour éviter d’adopter des stratégies de survie aux conséquences préjudiciables. En se séparant par exemple de leurs actifs, ces ménages se rendent encore plus vulnérables et sapent leurs capacités de revenu futures. Ces interventions permettent de réduire la vulnérabilité des ménages ruraux en allégeant leurs difficultés financières (crédit, épargne et liquidités) et en leur apportant une aide en espèces et en nature. Les instruments de protection sociale qui apportent une aide régulière et prévisible permettent aux ménages de mieux gérer les risques et de s’engager dans des activités agricoles et des moyens de subsistance plus rémunérateurs. Bien conçus, ils peuvent agir en synergie avec les activités et les investissements productifs, renforçant la résilience et la durabilité des moyens d’existence des petits producteurs68.

Les programmes de protection sociale et les programmes d’aide aux initiatives productives sont tout à fait complémentaires et de plus en plus fréquents dans les zones rurales. Selon une étude de la FAO sur des politiques porteuses qui ont été appliquées entre 2007 et 2018, ces programmes ont contribué à lutter contre la pauvreté rurale64. L’étude met en évidence les approches qui permettent, en particulier, de créer d’autres synergies:

  • Dans le monde, les programmes d’aide sociale les plus répandus sont les programmes d’alimentation dans les écoles et les transferts en espèces non assortis de conditions. Cependant, peu de programmes mettent l’accent sur les communautés rurales, où les besoins sont les plus importants. Les programmes nationaux devraient comporter des volets spécialement conçus pour relever le défi de la pauvreté rurale.

  • La plupart des programmes d’aide sociale qui comportent un élément de soutien agricole sont assortis de programmes d’achat publics, en particulier pour les cantines scolaires et les subventions alimentaires. Mais il y a encore à faire pour améliorer les liens entre la protection sociale et la passation de marchés publics.

  • En dehors des programmes d’achat publics, il est encore rare de voir des éléments d’aide sociale dans les programmes d’aide aux initiatives productives. Il faudrait renforcer les liens entre les transferts en espèces et les programmes associés aux facteurs de production (intrants, crédit ou encore irrigation, par exemple).

  • Les programmes d’assurance agricole gagnent du terrain et il est crucial de les soutenir fortement en raison de leur potentiel: ils contribuent à accroître la production et à réduire la pauvreté et la vulnérabilité dans les zones rurales.

Il faut s’attacher à développer les programmes existants pour relever les défis particuliers que présente la pauvreté rurale et tirer profit des liens potentiels entre les programmes de protection sociale et les programmes d’aide aux initiatives productives. La protection sociale doit aller de pair avec des approches et des pratiques agricoles efficaces, telles que l’agroécologie et l’agriculture climato-intelligente, pour accroître les synergies et démultiplier les effets dans le cadre des deux types d’aide, comme le montre une étude de cas sur la Zambie69. Les programmes de protection sociale fondés sur l’analyse des risques et réactifs face aux chocs peuvent agir en synergie avec les dépenses publiques en faveur du développement rural et agricole, ce qui, dans les deux cas, favoriserait l’inclusion. Les programmes ciblés ont eu des résultats positifs, en particulier dans les domaines de la santé, de la nutrition et de la fréquentation scolaire. Bien conçus, ils ont aussi pour effet de limiter le travail des enfants, car les familles ont davantage tendance à laisser leurs enfants à l’école. Élargir la protection sociale aux petits producteurs, y compris dans les secteurs de la pêche et de l’aquaculture, ainsi qu’aux travailleurs du secteur informel, doit être une priorité si l'on veut renforcer la résilience des ménages vulnérables dans les zones urbaines et rurales.

Il faut veiller en particulier à élargir la couverture sociale aux petits pêcheurs et aussi aux travailleurs de la pêche du secteur informel. Selon une étude approfondie menée par la FAO, ces catégories ne sont pas convenablement voire pas du tout protégées face aux multiples risques auxquels elles sont exposées. Sur le plan économique, elles ont des vulnérabilités qui leur sont propres par rapport aux autres petites activités agricoles, et sur le plan social, leur vulnérabilité peut être considérable. Des interventions innovantes sont par conséquent nécessaires pour les protéger contre l’ensemble des difficultés particulières auxquelles elles sont exposées, dans chaque contexte national et local70.

Pour qu’elle soit plus inclusive, la protection sociale doit être suffisamment flexible et s’adapter à la mobilité géographique et sectorielle en donnant aux ménages la possibilité de saisir les occasions qui se présentent dans différents secteurs et différents lieux. C’est particulièrement crucial dans les pays et les régions où la croissance économique est rapide, car les transformations structurelles peuvent renforcer les inégalités et exclure les ménages qui sont plus vulnérables et plus marginalisés.

Le coût de ces programmes fait qu’ils ne peuvent être maintenus sur le long terme, sauf si la croissance économique et la productivité s’inscrivent dans la durée et si les recettes publiques augmentent. Il faut adopter une approche équilibrée: les politiques et les investissements agroterritoriaux doivent favoriser la croissance et créer des emplois, tandis que la protection sociale et la politique fiscale doivent viser à réduire les inégalités et à favoriser l’inclusion tout en garantissant la viabilité et la durabilité budgétaires des programmes.

L’inclusion économique à long terme dépend de l’existence d’un système global de protection sociale qui comporte une gamme complète de mesures – prévention, protection, promotion et transformation – en vue non seulement d’apporter une réponse à la grande diversité de vulnérabilités des populations pauvres des zones rurales mais aussi de soutenir les moyens d’existence. Par exemple, les programmes nationaux d’aide en espèces en Afrique subsaharienne ont permis aux ménages agricoles pauvres et marginalisés de se constituer des actifs, de devenir autonomes et de créer des activités productives sur le plan économique, ce qui montre bien que la protection sociale est véritablement un investissement qui permet d’améliorer les moyens d’existence. Le montant des transferts, la prévisibilité et la régularité des paiements et le type de communication qui les accompagne sont d’autres éléments essentiels qui peuvent en augmenter l’impact économique et productif. En conjuguant des interventions fiables et prévisibles de protection sociale et des actions d’accompagnement agricole, et en facilitant par exemple l’accès aux actifs productifs et à la formation, il est possible d’optimiser les retombées des démarches d’inclusion économique durable et d’accroître la probabilité de leur réussite71.

La pauvreté et la vulnérabilité ont une dimension territoriale; certaines zones risquent de se trouver isolées et de s’appauvrir si elles perdent des liens cruciaux avec les marchés des zones urbaines et les marchés d’exportation. Ces zones tireront profit d’investissements dans les infrastructures publiques et privées visant à stimuler le développement des filières. Sur le plus long terme, il est essentiel de faciliter l’accès au crédit, aux actifs productifs et aux formations techniques pour soutenir les moyens d’existence ruraux et accroître la productivité. En l’absence d’une telle démarche, les programmes de protection sociale ne sont pas viables. Cependant, l’inclusion économique nécessite une approche plus globale et de plus longue haleine, avec des interventions graduelles qui fournissent un soutien intensif pendant une certaine période et dont l’ambition est d’ouvrir progressivement la voie à des moyens d’existence durables. En étant associés, les programmes d’aide sociale et d’assurance sociale peuvent contribuer de manière importante au renforcement de la résilience des moyens d’existence ruraux. Ils peuvent aussi être très utiles pour aider les pauvres des zones rurales à progresser pas à pas dans leur parcours d’inclusion économique, limitant ainsi la nécessité de recourir à la protection sociale71.

Conclusion

Le présent chapitre a passé en revue les facteurs qui contribuent à la résilience des ménages ruraux. Selon des données empiriques portant sur 35 pays, les actifs (productifs et non productifs), la diversification des revenus et l’accès à l’éducation et aux services de base, notamment les installations d’assainissement, sont des facteurs décisifs de la résilience des ménages. Il est par conséquent essentiel d’élargir l’accès aux actifs productifs et non productifs et d’encourager la diversification des revenus agricoles et non agricoles. Il ressort également de ces données que l’élargissement de l’accès à l’éducation, en favorisant les possibilités d’accès de la population à des emplois stables et rémunérateurs, joue un rôle fondamental dans le renforcement de la résilience. L’eau, l’assainissement et l’hygiène (EAH) jouent un rôle essentiel dans le renforcement de la résilience des ménages, en particulier des ménages pastoraux, qui vivent en général dans des environnements hostiles. Il est fortement recommandé de mettre en place des interventions visant à améliorer la disponibilité d’infrastructures de qualité pour les ménages pastoraux.

Le chapitre a également mis en lumière la grande diversité d’initiatives, comme on peut le voir dans les études citées, qui mettent l’accent sur le renforcement de moyens d’existence résilients, l’objectif étant de parvenir à des compromis et de créer des synergies, d’améliorer l’efficacité et de promouvoir la durabilité de la production agricole à petite échelle. Il a souligné le rôle essentiel des démarches collectives s’agissant de rendre résilients les moyens d’existence en milieu rural en renforçant les réseaux et la coopération entre les petits producteurs ainsi qu’entre les autres acteurs de la chaîne de valeur, tels que les associations et les coopératives de producteurs. L’agroécologie, l’agriculture climato-intelligente et la conservation de la biodiversité peuvent également contribuer au renforcement de la résilience face aux chocs climatiques et à la création de moyens d’existence en milieu rural, tout en améliorant la durabilité environnementale.

Des instruments de protection sociale assurant une aide régulière et prévisible, fondés sur l’analyse des risques et réactifs face aux chocs, assortis de programmes d’appui aux initiatives productives, peuvent donner aux ménages les moyens de mieux gérer les risques et d’entreprendre des activités agricoles durables et plus rentables. Les programmes d’assurance ou d’aide d’urgence peuvent également apporter un soutien essentiel en mettant par exemple des semences à disposition des agriculteurs et du bétail à disposition des éleveurs après une catastrophe, pour leur assurer une protection et leur permettre de commencer à se relever.

Les politiques visant à préserver la sécurité alimentaire et la nutrition doivent tenir compte des segments de la population les plus vulnérables face aux chocs et aux situations de stress et de ceux qui travaillent dans le secteur informel, et les programmes de protection sociale doivent être inclusifs. Pour atteindre ce dernier objectif, il peut être nécessaire de prendre des mesures innovantes de sorte que les ménages aient accès aux services et à l’information et gagnent confiance en eux. Il faut des systèmes globaux de protection sociale qui mettent à disposition des populations pauvres des zones rurales, en cas de choc, différents types d’interventions et de programmes visant à faciliter leur participation à des activités productives, dans des conditions d’emploi décentes, et à leur éviter de retomber dans des stratégies de survie.

Les ménages qui sont essentiellement féminins sont les plus vulnérables et doivent être davantage ciblés dans les programmes d’aide et de protection sociale, dès la conception de ces programmes. Leur vulnérabilité résulte avant tout de leur mise à l’écart des ressources et des actifs productifs. Des programmes d’autonomisation sont dès lors nécessaires pour bâtir et renforcer leur résilience en leur donnant accès aux ressources et à l’éducation. Les nourrissons et les jeunes enfants sont tout particulièrement vulnérables, car leur santé peut être atteinte de manière irréversible par les chocs qui ont une incidence sur leur sécurité alimentaire et leur nutrition. Si les ressources des programmes de protection sociale sont limitées, il convient de soutenir en priorité les nourrissons et les enfants en luttant contre le retard de croissance, l’émaciation et les autres formes de malnutrition.

Les politiques visant à instaurer des moyens d’existence résilients doivent tenir compte des conditions spécifiques et des multiples risques auxquels sont exposés les ménages ciblés. Les mesures prises ne doivent pas simplement se substituer aux stratégies de résilience des ménages, les rendant dépendants des politiques et encore plus vulnérables si jamais elles cessent. Par exemple, les politiques de plafonnement des prix des produits alimentaires peuvent rendre les ménages dépendants de ces aides et les exposer au risque d’être privés de leurs stratégies de résilience. Les politiques de maintien de la stabilité macroéconomique peuvent en revanche renforcer la résilience des ménages en facilitant le recours aux mécanismes d’auto-assurance, tels que l’épargne.

Si l’agriculture est le principal secteur économique, il est crucial de développer l’économie rurale non agricole et d’autres secteurs urbains pour que les agriculteurs et les communautés rurales puissent disposer de sources de revenus plus diversifiées et plus attrayantes. Le développement de l’économie non agricole est particulièrement important pour les ménages agricoles qui ont de très petites exploitations, dont la viabilité économique est fragile. Il faut de toute urgence que les pouvoirs publics interviennent largement dans le développement technologique pour que les exploitations agricoles à faible revenu puissent tirer profit des innovations dans le secteur agricole. Il est également nécessaire de privilégier davantage les investissements qui contribuent à l’intérêt général et qui réduisent les risques, par exemple les réseaux d’irrigation et de drainage ou la culture de variétés résistantes et à haut rendement.

Pour conclure, la résilience des moyens d’existence en milieu rural dépend du contexte dans lequel ils s’inscrivent, souvent caractérisé par des facteurs strictement locaux, depuis le développement socioéconomique jusqu’aux conditions environnementales et agroclimatiques. La réussite des stratégies de résilience des ménages dépend également d’une grande diversité d’interventions, qui doivent contribuer au renforcement des capacités de résilience et de gestion des risques à de multiples niveaux des systèmes agroalimentaires: chaînes d’approvisionnement alimentaire, gouvernance et institutions, sans oublier les infrastructures qui les soutiennent. Ces aspects sont abordés de manière approfondie dans le chapitre suivant qui est le dernier de ce rapport.

Messages clés

Assurer la résilience des systèmes agroalimentaires devrait être en soi un objectif majeur des pouvoirs publics; c’est une condition préalable à l’existence de systèmes agroalimentaires durables qui fonctionnent bien.

La pandémie de covid-19 nous a appris que la résilience des systèmes agroalimentaires dépendait de facteurs dépassant les sytèmes agroalimentaires eux-mêmes; elle a mis en évidence les liens étroits entre santé humaine, santé animale et santé environnementale, et donc la nécessité d’une approche globale telle que l’approche «Une seule santé» de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

La capacité d’absorption des systèmes agroalimentaires, décisive face à des chocs et des situations de stress, est meilleure lorsque les produits, les acteurs et les sources de nourriture sont plus diversifiés, que l’on dispose de réseaux de transport robustes et redondants, et qu’une alimentation saine est à la portée d’un plus grand nombre de bourses.

Les stratégies de gestion des risques – évaluations multirisques, prévisions utiles, systèmes d’alerte rapide et plans d’interventions précoces – complètent la capacité d’absorption en aidant tous les acteurs des systèmes agroalimentaires à prévenir et anticiper les perturbations importantes.

Les chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles, de transition et modernes, courtes et longues, jouent différents rôles dans les systèmes agroalimentaires nationaux, mais elles peuvent toutes concourir à contrer des chocs et des situations de stress.

La résilience des ménages ruraux peut être améliorée par un meilleur accès à des outils de gestion des risques – notamment à des systèmes d’alerte rapide, des dispositifs d’assurance et de protection sociale et des services sociaux tels que l’éducation et l’assainissement – et par une diversification des revenus et des actifs.

Une bonne compréhension du fonctionnement des systèmes agroalimentaires, notamment de leurs capacités de résilience et de la manière dont ils sont affectés par les facteurs contextuels, peut aider les responsables publics à concevoir des mesures appropriées et à éviter que celles-ci n’aient des effets indésirables.

Au cours de l’histoire, les systèmes agroalimentaires n’ont pas été épargnés par les chocs et les situations de stress. La pandémie de covid-19 a frappé de plein fouet les systèmes agroalimentaires dans beaucoup de pays, touchant plus que tous autres les pauvres et les plus vulnérables. Les mesures de confinement décidées par les pouvoirs publics les ont empêchés d’accéder à des emplois et des sources de revenus, ce qui les a conduits à réduire leurs dépenses alimentaires. Par ricochet, les acteurs des chaînes d’approvisionnement alimentaire, depuis les commerçants jusqu’aux grossistes, aux entreprises de transformation et enfin aux producteurs, ont vu leurs moyens d’existence se dégrader. Les pertes de revenus et de pouvoir d’achat se sont traduites par une hausse de 118 millions du nombre de personnes sous-alimentées1. L’impact de la pandémie sur la sécurité alimentaire a généré à la fois une demande et un élan d’action pour rendre les systèmes agroalimentaires mondiaux plus résilients face aux chocs et aux situations de stress. À cette fin, des mesures doivent être prises pour renforcer la capacité des systèmes agroalimentaires de prévenir, d’anticiper, d’absorber, de s’adapter et de se transformer. Afin de replacer les priorités d’action dans leur contexte, il est utile de revenir brièvement aux trois questions fondamentales du chapitre 1:

  • Résilience à quoi? Des chocs et des situations de stress, souvent imprévus, surviennent à l’intérieur et à l’extérieur des systèmes agroalimentaires et altèrent leur fonctionnement en perturbant les activités des institutions et des acteurs concernés.

  • Résilience de quoi? L'analyse porte principalement sur les systèmes agroalimentaires nationaux, qui comprennent tous les acteurs et les activités interconnectées d’ajout de valeur intervenant dans la production, l’entreposage, la distribution et la consommation de produits alimentaires.

  • Résilience pour quoi? Le renforcement de la résilience a pour but d’assurer la disponibilité et l’accès de tous à des quantités suffisantes d’aliments sûrs et nutritifs, même en cas de perturbations. Cette résilience améliore les conditions d’existence des acteurs des systèmes agroalimentaires – producteurs, intermédiaires et consommateurs – et favorise la durabilité.

Ce chapitre s’emploie à répondre à la question essentielle du Comment? Un problème important lorsque l’on cherche à améliorer la résilience est que toute modification d’un système agroalimentaire peut entraîner des conséquences et des rétroactions inattendues touchant les acteurs et les activités du système, et avoir des effets positifs ou négatifs. Afin de concilier des objectifs divergents, il est nécessaire de prendre des mesures (notamment établir des stratégies et des budgets) pour mettre en phase les activités et décisions de différents acteurs (publics, privés et de la société civile) et encourager des pratiques innovantes et durables contribuant à améliorer la résilience et à lutter contre la malnutrition, le changement climatique et le manque d’inclusion1, 2.

La figure 2 du chapitre 1 illustre les relations entre les différents niveaux et les différents acteurs des systèmes agroalimentaires. Les responsables publics doivent être conscients de ces relations bien avant qu’un choc ne vienne frapper les systèmes agroalimentaires d’un pays et créer un besoin d’interventions correctrices ou de mesures d’urgence. La performance globale d’un système dépend de ces relations et interactions entre les facteurs contextuels, notamment les institutions et les réglementations, et les composantes du système. Les caractéristiques des composantes déterminent non seulement leur aptitude à s’adapter aux chocs mais aussi la capacité d’absorption de tout le système – l’aspect de la résilience qui constitue le principal objet d’étude de ce rapport. Par exemple, une chaîne d’approvisionnement alimentaire qui réagit rapidement à des chocs en changeant de partenaires commerciaux est plus résiliente et contribue à la résilience des systèmes agroalimentaires. L’adoption rapide de mesures efficaces implique une collaboration entre différents acteurs de la chaîne d’approvisionnement. Pendant la pandémie de covid-19, beaucoup d’entreprises agroalimentaires sont passées au commerce électronique par l’intermédiaire de plateformes logistiques qui n’étaient pas présentes jusqu’alors dans le secteur alimentaire.

Les méthodes choisies pour renforcer la résilience devront être adaptées à la grande variété de chocs et de situations de stress auxquels les systèmes agrolimentaires peuvent être confrontés et aux différentes manières dont ceux-ci se propagent par les systèmes. Les données des précédents chapitres indiquent que, pour renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires, il est important que les politiques publiques, les stratégies et les programmes suivent trois principes directeurs:

  1. Qui dit résilience, dit préparation à des perturbations. Dans un environnement sujet à de nombreux risques, être résilient suppose de s’être préparé à affronter à la fois des perturbations prévisibles et d’autres impossibles à anticiper compte tenu du degré d’incertitude qui les entoure. Se préparer à l’inconnu nécessite d’évaluer les caractéristiques structurelles des systèmes agroalimentaires, notamment leur capacité d’absorption, qui résulte de leur connectivité et de la diversité de leurs sources d’approvisionnement, de leur production et de leurs débouchés (voir le chapitre 2), ainsi que leur capacité d’adaptation, qui dépend de la diversité de leurs acteurs et des ripostes mises en œuvre (voir le chapitre 3). Les systèmes sont alors capables de maintenir leurs fonctions même en présence de perturbations imprévues.

  2. Renforcer la résilience implique de travailler sur l’ensemble du système, et donc de nombreux risques, acteurs et secteurs. Par conséquent, il est nécessaire d’analyser chacune des composantes du système et les risques particuliers auxquels elles sont exposées. Cela veut dire s’intéresser aux chaînes d’approvisionnement alimentaire, aux petits producteurs et aux ménages vulnérables, et trouver des mesures, des pratiques et des conditions favorables qui améliorent leur résilience en tenant compte des risques. Il est indispensable de cartographier les relations en jeu pour assurer la bonne gouvernance des systèmes agroalimentaires, la coordination optimale des composantes des systèmes et leur concordance avec différents objectifs.

  3. D’autres domaines de l’action publique ont d’importantes incidences sur la résilience. Il faut réfléchir à la nécessité de prendre des mesures qui dépassent le cadre des systèmes agroalimentaires, par exemple qui fassent progresser l’égalité des genres et l’inclusion des femmes, la qualité et l’inclusivité des systèmes de santé, la durabilité des systèmes énergétiques et l’utilisation durable des ressources naturelles en général, et cela avec une bonne connaissance des risques. Cela demande des évaluations multirisques détaillées et des politiques et des pratiques cohérentes entre les secteurs et niveaux et à l’intérieur de chacun d’eux.

La figure 10 rappelle la complexité des systèmes agroalimentaires, dont il importe d’être conscient lorsque l’on veut renforcer la résilience et appliquer les principes ci-dessus. Se fondant sur le cadre conceptuel du chapitre 1 (figure 2), elle représente les systèmes agroalimentaires et leurs relations avec les facteurs contextuels. Les cercles concentriques rouge et bleu illustrent les différentes composantes des systèmes agroalimentaires examinées aux chapitres 2 à 4 – les systèmes agroalimentaires nationaux, les chaînes d’approvisionnement alimentaire et les ménages – ainsi que les principaux problèmes à résoudre pour renforcer la résilience. Les zones rouges montrent le degré de préparation des systèmes agroalimentaires aux chocs et aux situations de stress, ou plus exactement la partie des composantes des systèmes agroalimentaires et des acteurs concernés (par exemple les producteurs agricoles et les PMEA, les ménages et les systèmes agroalimentaires nationaux en général) qui n’a pas les moyens nécessaires pour se préparer aux perturbations. Les flèches dans le cercle extérieur représentent les facteurs contextuels situés en dehors des systèmes agroalimentaires – les conditions climatiques et environnementales et les conditions macroéconomiques, ainsi que la situation des autres secteurs, et enfin les institutions, les politiques et les réglementations – qui ont des incidences importantes sur les systèmes agroalimentaires et leur résilience.

FIGURE 10
Composantes des systèmes alimentaires et facteurs contextuels

Ainsi, si l’on se réfère aux trois principes directeurs, les zones rouges de la figure 10 soulignent qu’il importe de se préparer aux perturbations (premier principe) notamment pour les acteurs et les composantes des systèmes agroalimentaires qui ne disposent actuellement pas des moyens de le faire. Les cercles concentriques bleu et rouge illustrent la nécessité d’analyser les différentes composantes des systèmes agroalimentaires et les relations entre elles (second principe). Et les facteurs contextuels représentés dans le cercle extérieur rappellent l’importance des autres domaines de l’action publique (troisième principe).

Le présent chapitre part de ces trois principes pour explorer les mesures et investissements permettant de renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires nationaux et celle des différentes chaînes d’approvisionnement alimentaire et des activités et acteurs qui les composent. Il examine tout d’abord les moyens de réduire les risques et les vulnérabilités des systèmes alimentaires dans leur globalité et de préserver leurs diverses fonctions. Les enjeux déterminants ici sont la diversité des sources et des produits et la notion étroitement liée de connectivité pour assurer la circulation ininterrompue des marchandises pendant une perturbation. Le chapitre se penche ensuite sur la résilience des producteurs agricoles, des entreprises agroalimentaires, des chaînes d’approvisionnement alimentaire et des ménages vulnérables sur le plan de leurs capacités de prévenir, d’anticiper, d’absorber, de s’adapter et de se transformer face à des chocs et des situations de stress. Pour terminer, la résilience est replacée dans le contexte plus général de l’action publique avant la présentation des conclusions finales, qui récapitulent les conseils formulés dans le chapitre.

Comment améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires nationaux: les caractéristiques structurelles

Les mesures et les investissements destinés à améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires doivent prendre en compte à la fois les risques et les incertitudes. Dans le cas d’un risque, une distribution de probabilités peut être attribuée aux résultats possibles; une incertitude, en revanche, est caractérisée par une probabilité de résultat inconnue, soit par manque d’information, soit parce qu’elle est totalement imprévisible. Gérer un risque consiste généralement à réduire l’exposition et la vulnérabilité à un événement négatif identifiable bien précis, par exemple une sécheresse. En conjuguant des mesures de prévention, d’atténuation et de préparation, les stratégies de gestion multirisques aident aussi les systèmes agroalimentaires à devenir plus résilients et mieux à même de faire face à l’imprévu.

La gestion des risques doit toutefois être complétée par la diversité suffisante de ripostes qui fait la capacité d’absorption, car les systèmes agroalimentaires sont habituellement confrontés à des incertitudes simultanées et à de multiples risques provenant de sources diverses. Renforcer la capacité d’absorption, c’est garantir cette diversité et être préparé aux perturbations pouvant toucher les systèmes agroalimentaires; il ne s’agit pas de cibler un événement précis mais d’avoir des solutions prêtes lorsqu’un événement perturbateur survient. Améliorer à la fois la diversité et la gestion des risques permettra ainsi aux composantes et aux acteurs des systèmes agroalimentaires de s’adapter à des perturbations imprévues, tout en maintenant les fonctions centrales des systèmes agroalimentaires et en se transformant éventuellement pour parvenir à un état plus durable et résilient.

La diversité est un élément clé de la résilience

Comme il a été dit tout au long de ce rapport et souligné au chapitre 2, la diversité des acteurs et des ripostes est une condition essentielle de la résilience des systèmes agroalimentaires face à de nombreux risques et incertitudes. La diversité crée tout un réseau de chemins possibles pour apprendre et se transformer, prévenir les risques et amortir les chocs, et réagir avec souplesse à des besoins variables ou des occasions nouvelles. Dans les systèmes agroalimentaires, la diversité se caractérise par la production de produits différents et le recours à différentes sources d’approvisionnement et de demande, tant intérieures qu’extérieures. Les chaînes d’approvisionnement alimentaire qui ont accès à des sources d’intrants et à des débouchés plus diversifiés sont moins vulnérables. De même, travailler avec un ensemble de partenaires commerciaux peut améliorer la résilience lorsque l’on «importe» de différentes sources ou que l’on «exporte» vers des points de demande différents, ce qui permet de diluer les effets que des chocs synchrones à un endroit peuvent avoir dans d’autres régions et secteurs. Dans une société civile locale, des circuits commerciaux diversifiés – des coopératives à l’agriculture urbaine en passant par l’agriculture soutenue par la communauté – peuvent garantir aux populations la sécurité alimentaire et une bonne nutrition3. Prévoir d’autres sources de nourriture, par exemple des stocks alimentaires, est une autre stratégie de parade4.

Le chapitre 2 a apporté un nouvel éclairage sur les synergies possibles et les arbitrages à prévoir lorsque l’on cherche à équilibrer autosuffisance alimentaire et commerce international. Il a souligné qu’il importe d’introduire de la redondance dans les systèmes. Du côté des producteurs agricoles, la redondance des circuits de demande permet de produire pour le marché intérieur ou d’exporter vers un ensemble diversifié de partenaires commerciaux. Du côté des consommateurs, il y a des avantages à pouvoir trouver dans les magasins des produits provenant de diverses sources – production nationale, importations et stocks alimentaires.

Même si l’offre intérieure représente une part importante des systèmes agroalimentaires, il est important de disposer d’un ensemble varié d’aliments nutritifs provenant de sources nationales et extérieures pour diversifier les risques, en particulier dans les petits pays. Dans le cas des pays peu agricoles, plus dépendants des importations alimentaires, il est vital de gérer la connectivité commerciale en important un panier diversifié d’aliments nutritifs depuis des pays présentant des profils socioéconomiques et climatiques hétérogènes afin de diversifier les risques et de réduire la vulnérabilité aux chocs externes.

Cependant, l’indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), présenté au chapitre 2, montre que le commerce international n’est pas neutre sur le plan de la qualité nutritionnelle: pour beaucoup de pays à faible revenu, les importations apportent une souplesse d’approvisionnement en termes de kilocalories, mais très peu pour les fruits et les légumes – en partie à cause des contraintes logistiques du transport ainsi que de l’entreposage de produits périssables. Dans ces pays, il peut être nécessaire de prendre des mesures et d’investir pour faciliter le commerce international d’aliments nutritifs afin de garantir leur disponibilité en cas de perturbations1. Les obstacles au commerce diminuent aussi la souplesse d’approvisionnement en produits alimentaires. Les actions menées au niveau international pour mettre en place de nouvelles zones de libre-échange et élargir l’éventail de produits de base et de marchandises couvert par celles qui existent déjà peuvent être mutuellement avantageuses pour tous les participants et améliorer la résilience.

Comparativement à la spécialisation et à l’optimisation (par exemple de la logistique des transports), la diversification peut faire craindre une efficience moindre. Ce n’est pas nécessairement vrai au niveau des systèmes agroalimentaires. Très souvent, différents types de chaînes d’approvisionnement et d’acteurs occupent des créneaux particuliers du marché et se complètent les uns les autres. La diversification dans ce sens large ne signifie pas que les producteurs ne doivent pas se spécialiser. Cela veut dire que, à l’échelon national, ils ne doivent pas tous se spécialiser dans le même produit, car cela augmenterait la vulnérabilité des systèmes à un choc touchant ce produit précis. S’il y a des arbitrages à faire, le bon choix de diversification dépendra de l’équilibre entre les coûts du point de vue des pertes d’efficience, et les avantages procurés par une résilience accrue sur le plan d’une hausse des revenus et d’une diminution des dommages et des pertes causés par d’éventuelles perturbations. Il dépendra aussi du compromis à trouver entre les pertes immédiates et les gains à long terme – potentiellement importants – dus au fait d’être plus résilient et donc plus apte à gérer des chocs imprévisibles5.

En choisissant la stratégie de diversification la plus efficace, les pays peuvent augmenter les gains retirés d’une résilience accrue. Pour cela, les responsables publics peuvent s’aider des données sur l’exposition et la vulnérabilité aux perturbations contenues dans les indicateurs de souplesse présentés au chapitre 2, qui leur permettront de prévoir plus précisément les vulnérabilités de chaque composante et d’anticiper les interventions afin d’améliorer la capacité d’absorption des systèmes (encadré 17).

La connectivité est un élément clé de la diversité

Les systèmes agroalimentaires doivent être connectés non seulement à des partenaires commerciaux internationaux, mais aussi à des infrastructures physiques et autres, telles que des réseaux de communication et de transport, indispensables pour assurer la diversité des approvisionnements et une adaptation rapide aux chocs. Des systèmes agroalimentaires bien connectés peuvent surmonter des perturbations et s’en relever plus vite et plus facilement en changeant de sources d’approvisionnement et d’itinéraires de transport et de commercialisation des produits alimentaires, des intrants agricoles et de la main-d’œuvre, ainsi que de sources de connaissances et de capitaux. Il est indispensable pour cela d’être connecté aux marchés internationaux grâce à des infrastructures, et d’avoir noué des relations commerciales solides.

La mise en place et l’entretien d’un réseau de transport alimentaire intérieur robuste et diversifié peut faciliter l’accès physique à la nourriture dans tous les territoires et les espaces urbains d’un pays. De même, l’existence d’infrastructures physiques assurant des liaisons commerciales internationales (ports, réseaux ferroviaires internationaux, etc.) est importante. Pendant la pandémie de covid-19, beaucoup d’États ont pris des mesures d’aide et adopté une approche coordonnée pour maintenir la circulation des denrées alimentaires. Par exemple, l’Organisation maritime internationale (OMI) a demandé aux gouvernements de considérer les marins et les employés du secteur maritime comme des travailleurs clés fournissant un service essentiel et donc de ne pas leur appliquer les restrictions de déplacement afin qu’ils puissent rejoindre leur embarquement ou en revenir et transiter par un aéroport6. En Europe, des ports et des terminaux privés ont appelé instamment les États membres de l’Union européenne à inclure les ports dans les infrastructures critiques et à prendre des mesures d’aide appropriées pour éviter la désorganisation et prévenir d’importantes pertes d’emplois7. La Chine a ouvert une voie verte pour les produits agricoles frais et employé des plateformes de commande en ligne pour résoudre les problèmes logistiques d’accès des petits producteurs aux communautés urbaines et en même temps réduire la fréquentation des marchés alimentaires afin de minimiser les risques de contamination8.

Garantir la connectivité nécessite aussi de gérer les risques susceptibles de la perturber. Les catastrophes naturelles et les crises peuvent avoir de graves répercussions sur les infrastructures et les services, par exemple les routes, les transports et les installations d’entreposage, dans l’agriculture et les chaînes d’approvisionnement alimentaire. Elles peuvent entraîner des pertes et des dommages catastrophiques pour les personnes, l’environnement et l’économie. Il est important d’évaluer et de protéger la connectivité contre les risques, ainsi que de planifier, concevoir et mettre en place de nouvelles infrastructures conçues en tenant compte des risques et résilientes face au climat; améliorer la résilience face au climat suppose d’évaluer les vulnérabilités physiques. L’aménagement du territoire devrait aussi être amélioré de manière à prévenir ou réduire les risques liés aux aléas.

Une autre dimension importante de la connectivité sur le plan des risques est la nécessité d’avoir un système de gestion de la sécurité sanitaire des aliments opérationnel partout, qui assure une vigilance en la matière dans tout le système agroalimentaire. Il est beaucoup plus facile de changer de fournisseur en cas de choc lorsque l’on est certain que les normes de sécurité sanitaire des aliments seront respectées. La pandémie de covid-19 a mis en évidence les relations étroites entre la santé humaine, la santé animale et la santé environnementale, ainsi que le besoin urgent de s’emparer de ces questions d’une manière globale. Selon des études récentes, le phénomène d’émergence ou de réémergence de maladies infectieuses est étroitement lié à des modifications des facteurs écologiques, du climat et des comportements humains9,10, 11. On estime que 75 pour cent des maladies infectieuses récemment découvertes ou émergentes sont des zoonoses (c’est-à-dire transmises à l’homme par des animaux)12.

Il importe de renforcer les institutions et la coopération internationales en matière de sécurité alimentaire et de détection et d’endiguement des maladies contagieuses13. À cet égard, l’approche «Une seule santé» de l’OMS est un bon exemple des principes à suivre dans les programmes, les politiques publiques, la législation et les travaux de recherche si l’on veut progresser dans le domaine de la santé publique14. Elle implique une coordination entre différents secteurs, depuis la santé végétale et animale, la sécurité sanitaire des aliments, la nutrition et la biodiversité, jusqu’au changement climatique, à l’exploitation forestière et à la protection de l’environnement. Elle demande aussi d’intégrer les principes de l’égalité des genres et de la responsabilité économique et sociale dans le développement des capacités normatives et opérationnelles. La réglementation crée un contexte favorable à la promotion et à la mise en application de ces pratiques, en instaurant les règles nécessaires pour renforcer la santé animale et végétale dans les espaces agricoles ou naturels, mais aussi assurer la sécurité sanitaire des aliments. Elle contribue aussi à préserver et à restaurer les écosystèmes en introduisant des mécanismes destinés à prévenir et à lutter contre la contamination de l’environnement, l’appauvrissement de la biodiversité, la dégradation des forêts et les effets du changement climatique15.

Interventions publiques qui améliorent la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire

Comme nous l’avons vu au chapitre 3, la résilience des systèmes agroalimentaires nationaux dépend fortement aussi du degré de diversité et de connectivité des chaînes d’approvisionnement alimentaire, et de la manière dont les exploitations agricoles et les entreprises agroalimentaires faisant partie de ces chaînes se procurent leurs intrants et vendent leurs productions. Cette section explore les principales interventions publiques qui améliorent la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire. Une chaîne d’approvisionnement peut être résiliente sans forcément que tous ses acteurs le soient. Les chocs et les situations de stress peuvent provoquer des dommages désastreux à certains acteurs, mais aussi permettre à d’autres de se transformer et de se développer. Ce type de dynamique fait toujours des gagnants et des perdants: certains acteurs peuvent se développer et d’autres disparaître. L’important, lorsque des chaînes d’approvisionnement sont résilientes, est que les chocs et les situations de stress devraient globalement entraîner une amélioration de leur fonctionnement et des services fournis. Les coûts socioéconomiques consécutifs devraient être minimisés par des mesures de protection sociale, par exemple, ou par le recours aux stocks alimentaires existants.

Le choix des priorités d’action doit donc tenir compte des éventuels compromis à faire dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire entre la résilience d’un côté, et l’efficience, l’inclusivité et l’équité de l’autre. Des arbitrages peuvent être nécessaires, par exemple, entre intégrer un certain degré de duplication et de redondance, qui renforce la résilience, et minimiser les coûts, qui est avantageux à court terme sur le plan de l’efficience. De même, une chaîne d’approvisionnement alimentaire peut être résiliente mais pas inclusive si l’amélioration de la résilience exclut les petits producteurs agricoles vulnérables. Toute la difficulté est de mettre en œuvre la bonne combinaison de politiques et d’interventions qui aideront à développer la capacité à optimiser les arbitrages et à créer des synergies permettant de rendre les chaînes d’approvisionnement alimentaire résilientes mais aussi efficientes et inclusives.

La diversité est une source de résilience mais nécessite des mesures de réduction des risques

Pour assurer la résilience des systèmes agroalimentaires, il est important de maintenir une certaine diversité à l’intérieur des chaînes d’approvisionnement alimentaire et entre elles. Dans le chapitre 3, les chaînes d’approvisionnement alimentaire sont classées en trois grandes catégories: les chaînes traditionnelles, de transition et modernes, qui ont chacune leurs avantages et leurs points faibles face aux chocs et aux situations de stress. Les politiques et interventions destinées à renforcer la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire devraient avoir les caractéristiques suivantes:

Permettre la coexistence de chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles, de transition et modernes. Ces chaînes d’approvisionnement jouent des rôles différents au sein des systèmes agroalimentaires nationaux, mais elles peuvent toutes servir à contrer des chocs et des situations de stress de différents types. Parce qu’elles sont longues et desservent des territoires étendus, les chaînes modernes et de transition peuvent plus facilement réagir à des chocs locaux et assurer la disponibilité de produits alimentaires dans les zones directement touchées. Les grandes entreprises agroalimentaires, prédominantes dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire modernes, ont davantage accès à des capitaux et à des ressources. Leur puissance financière leur permet d’absorber les chocs sur une longue durée. De plus, elles jouent un rôle central dans le commerce international, ce qui est essentiel pour diversifier les sources d’approvisionnement afin d’améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires et de se prémunir contre les chocs intérieurs.

Néanmoins, les chaînes traditionnelles et locales, en particulier celles reposant sur des petits producteurs et des PMEA, peuvent contribuer de façon importante à améliorer la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire face à des perturbations de grande ampleur. La FAO a constaté par exemple que, grâce à leur proximité étroite avec les zones de production et des chaînes d’approvisionnement plus courtes, les systèmes agroalimentaires de petits villages étaient plus résilients aux chocs que ceux desservant des zones urbaines plus étendues via des chaînes plus longues16. Cela a été évident aussi pendant la pandémie de covid-19, où de nombreuses chaînes d’approvisionnement locales ont su réagir aux modifications de la demande en faisant preuve d’une grande souplesse17. Les PMEA peuvent également être sophistiquées, efficientes et résilientes lorsqu’elles ont accès à des sources de crédit et des infrastructures suffisantes.

La pandémie de covid-19 a été l’occasion de mettre davantage en avant les produits alimentaires locaux, accessibles par des circuits courts17. Compte tenu du petit nombre d’intermédiaires et des délais de distribution raccourcis, les chaînes d’approvisionnement alimentaire locales sont souvent capables de fournir aux consommateurs des aliments plus frais et plus nutritifs et apparaissent intéressantes sur le plan du développement et de la durabilité en raison de la moindre consommation d’énergies fossiles et du soutien à l’économie locale17, 18, 19. L’amélioration des infrastructures rurales-urbaines et le renforcement de la capacité des acteurs des chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles à utiliser les outils numériques peuvent créer des synergies entre l’efficience, l’inclusivité et la durabilité, tout en augmentant la diversité des systèmes agroalimentaires dans leur globalité. La livraison de nourriture à domicile et les autres plateformes en ligne reliant acheteurs et vendeurs par divers outils numériques ont connu une forte accélération pendant la pandémie afin de compenser les pertes subies par les points de vente traditionnels (voir le chapitre 3).

Des chaînes d’approvisionnement alimentaire modernes mais courtes peuvent également diversifier davantage les disponibilités alimentaires à partir d’aliments du futur tels que les microalgues et la viande synthétique. Produits dans des environnements fermés, ces aliments présentent divers avantages du point de vue de la résilience, à savoir: ils réduisent l’exposition à des facteurs de risque biotiques et abiotiques, et ils fournissent des aliments nutritifs via des chaînes d’approvisionnement alimentaire décentralisées et locales. Bien que nécessitant d’importants investissements financiers et de nouvelles compétences techniques, les technologies alimentaires du futur peuvent satisfaire des besoins locaux en apportant un nouvel élément de diversité dans les sources d’approvisionnement alimentaire, en particulier dans les pays peu agricoles20.

Prendre acte de l’hétérogénéité des exploitations et des entreprises dans le continuum urbain-rural. Remédier aux vulnérabilités et améliorer la résilience à différentes échelles suppose une perspective territoriale. Par exemple, une évaluation mondiale récente de la FAO a montré que la pénurie de main-d’œuvre dans l’agriculture et le secteur alimentaire provoquée par les restrictions de déplacement dues à la covid-19 était extrêmement variable selon la taille de l’agglomération urbaine. En règle générale, les petites villes de 5 000 à 25 000 habitants, où la distance domicile-travail est plus courte, ont été moins touchées, tandis que les métropoles de plus de 5 millions d’habitants ont été plus vulnérables aux perturbations16.

La diversité constitue également un élément de résilience au niveau des producteurs, et l’agriculture continuera très probablement à comporter des unités d’échelles diverses. Par le passé, les producteurs agricoles ont appris à faire face aux effets de chocs multiples et simultanés pouvant être transitoires ou persistants. Les capacités de résilience des producteurs dépendent fortement des caractéristiques de leurs exploitations et de leurs interactions avec leur milieu environnant, c’est pourquoi les politiques et interventions doivent s’intéresser au contexte régional dans lequel les systèmes agricoles opèrent21. Pour renforcer la résilience des producteurs, il faut s’appuyer sur leurs forces et remédier aux facteurs critiques qui freinent la croissance de la productivité, comme le manque d’accès au crédit et aux marchés. Les politiques publiques doivent également éviter de remplacer les propres stratégies des producteurs ou de rendre ces derniers dépendants des interventions publiques.

Tenir compte du contexte et de l’hétérogénéité. Des types différents de producteurs agricoles, d’entreprises agroalimentaires et de chaînes d’approvisionnement alimentaire présentent des degrés variables d’exposition et de vulnérabilité aux chocs et aux situations de stress. Les mesures prises pour réduire les vulnérabilités, notamment diversifier les moyens d’existence et trouver des solutions de remplacement, doivent être adaptées au contexte local et tenir compte de l’hétérogénéité des situations. La réduction des risques de catastrophe, les bonnes pratiques d’adaptation au changement climatique, les technologies et les innovations peuvent toutes diminuer les causes profondes de vulnérabilité lorsque les principaux risques viennent de l’exposition à des catastrophes naturelles et à des chocs liés au climat. Des pratiques et des technologies résilientes au climat au niveau de l’exploitation et/ou de l’entreprise et du territoire peuvent aider à augmenter les rendements et favoriser la durabilité de la production, améliorer la diversification et réduire les risques de mauvaise production à la suite d’un choc ou d’une situation de stress à caractère climatique22.

Diverses pratiques peuvent contribuer à réduire les vulnérabilités et les risques dans les systèmes agroalimentaires, notamment le fait de favoriser les variétés de cultures, d’animaux d’élevage, d’arbres et de poissons qui résistent mieux aux inondations, aux sécheresses et à la salinité23. Les pratiques pédologiques et hydriques telles que l’agriculture de conservation, l’agroforesterie, la conservation de fourrage et un meilleur stockage des semences sont d’autres exemples de bonnes pratiques résilientes au climat24, 25. Selon une étude de 2019 sur le rapport avantages-coûts des bonnes pratiques de réduction des risques de catastrophe, elles ont généré des gains en moyenne 2,2 fois supérieurs à ceux procurés par les pratiques utilisées auparavant par les agriculteurs exposés à des aléas26.

Créer un environnement favorable pour les chaînes d’approvisionnement alimentaire

Les performances de n’importe quelle chaîne d’approvisionnement alimentaire résultent des nombreuses décisions prises par les différents acteurs – y compris dans les chaînes d’approvisionnement des intrants et des services concernés auxquels ils sont connectés (voir le chapitre 3) – et de la manière dont ces décisions interagissent et changent dans diverses situations. Si l’on veut élaborer et mettre en œuvre des stratégies d’amélioration de la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire, il faut que chaque acteur bénéficie d’un environnement favorable. Les principales conditions propices à la création de ces infrastructures de chaînes d’approvisionnement résilientes sont décrites ci-dessous:

Exploitation des technologies de l’information et de la communication (TIC) et des outils numériques dans le domaine de la logistique. Les administrations centrales et locales, mais aussi le secteur privé, les ONG et les organisations internationales de développement, ont un rôle important à jouer s’agissant de promouvoir les TIC. Des outils bien dimensionnés peuvent servir à détecter précocement des signaux de risque, fournir des prévisions utiles, mettre en place des stratégies d’alerte rapide et diversifier les ripostes27. Les TIC et les outils numériques peuvent également améliorer considérablement l’accès à l’information dans le secteur agricole, et permettre ainsi une amélioration sensible de la couverture des services de vulgarisation agricole et de conseil et des apprentissages28. Ils aident aussi à faire des choix éclairés concernant les ressources naturelles, les systèmes de culture, les ravageurs, les maladies, etc. Suite à la pandémie de covid-19, on observe partout dans le monde une tendance au développement de relations de distribution en ligne entre producteurs et consommateurs, comme le commerce électronique, ce qui pourrait améliorer l’accès à des produits frais, notamment des fruits et légumes29.

Amélioration des capacités de gestion des risques et d’alerte rapide. Une approche intégrée de la résilience des systèmes agroalimentaires peut aider à prédire la probabilité des chocs et leur impact sur les vies, les moyens d’existence, la sécurité alimentaire et la nutrition. Elle doit comprendre, entre autres, une surveillance agroclimatique, des évaluations de la vulnérabilité et des risques de catastrophes et de crises (y compris dues à des ravageurs et des maladies) et des données sur les dommages et les pertes agricoles30, 31, 32. Les pouvoirs publics, à tous les échelons et en coordination avec les milieux scientifiques, les centres de recherche et le secteur privé, devraient donner accès à ces données dans l’ensemble des systèmes agroalimentaires pour que les décisions puissent être prises avec une bonne connaissance des risques et des crises33. Un système d’alerte rapide associe des mécanismes de surveillance et d’évaluation des risques à des systèmes et des processus de communication et de préparation qui permettent de déclencher des interventions anticipées pour atténuer les effets des catastrophes et des crises34. Un partenariat public-privé est essentiel pour mettre en place des systèmes d’alerte rapide afin de faire face à plusieurs aléas se produisant simultanément ou se succédant dans le temps, ainsi qu’à toutes les éventuelles réactions en chaîne. Les systèmes d’alerte rapide multirisques doivent être couplés à des dispositifs d’alerte opérationnels déclenchant une action immédiate et des mécanismes de riposte d’urgence. Pour ce faire, le système d’alerte rapide doit être relié à différentes institutions publiques et acteurs locaux dans le cadre de plans d’interventions anticipées et de plans d’urgence clairs et financés afin que les mesures nécessaires puissent être prises sur la base du système d’alerte.

Une gouvernance et des institutions inclusives pour une meilleure gestion des risques. La gouvernance est l’ensemble des processus permettant aux acteurs publics et privés de formuler leurs intérêts, de délimiter et de hiérarchiser les problèmes, ainsi que de prendre des décisions, de les mettre en œuvre, de les suivre et d’en assurer l’exécution. Une gouvernance inclusive permet de se préparer en acquérant les connaissances et les capacités nécessaires pour riposter efficacement aux chocs et aux situations de stress. Conjuguée à une bonne analyse des risques et des crises potentielles et à des systèmes d’alerte rapide, la gouvernance est un élément clé pour réagir sans délai en cas de nécessité et se relever rapidement34. À côté de ces instruments d’action nationaux, il importe aussi d’élaborer des stratégies de gestion multirisques infranationales et locales afin de traiter les vulnérabilités sous-jacentes et les facteurs de risque, en renforçant les capacités institutionnelles en fonction du contexte local. Lorsque plusieurs organes de gouvernance à différents échelons travaillent bien ensemble, ils permettent de mener des actions coordonnées face aux risques et aux incertitudes, et apportent une souplesse utile pour gérer les problèmes à l’échelon approprié36. On en a un exemple avec l’approche «système alimentaire ville-région», qui prend acte du lien existant entre les centres urbains et les zones rurales, tout en reconnaissant les relations entre durabilités économique, environnementale et sociale et la nécessité d’adopter une vision plurisectorielle (voir FAO, 201737).

Des instruments nationaux de gestion des catastrophes naturelles et des risques adaptés aux chaînes d’approvisionnement alimentaire. L’intégration de ces instruments dans les lois, les politiques, les réglementations et les stratégies nationales relatives aux chaînes d’approvisionnement alimentaire permettra aux parties concernées de fonctionner de façon efficace et conjointe à l’intérieur de chaque secteur et entre les secteurs. Le fait de promouvoir un approvisionnement alimentaire diversifié auprès de différents marchés et régions (voir le chapitre 2), d’encourager des processus décisionnels plurisectoriels et de mettre en place des protocoles qui réduisent certains risques précis (par exemple d’ordre météorologique ou biologique) permettra aux parties prenantes de réduire les risques et les effets négatifs de nombreux chocs et situations de stress. La diversification des sources d’intrants et des réseaux de distribution est susceptible aussi d’améliorer la disponibilité de denrées alimentaires lorsque des perturbations se produisent. Les organismes de réglementation publics doivent aussi veiller à ce que les produits et services disponibles soient de haute qualité et fournis par un secteur privé dynamique et concurrentiel. L’approche «Une seule santé» de l’OMS évoquée plus haut favorise la résilience des chaînes d’approvisionnement alimentaire car elle améliore la productivité tout en diminuant les risques de menaces biologiques le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. L’idée est d’intégrer les secteurs de l’agroalimentaire et de la santé de manière à coordonner plus efficacement les interventions d’urgence face aux ravageurs et aux maladies grâce à une meilleure prévention des attaques de ravageurs et des maladies, à des alertes rapides et à une gestion des risques sanitaires nationaux et mondiaux, y compris le bon usage des antimicrobiens afin de limiter la résistance à ces médicaments25.

Des innovations dans les stratégies de distribution et une large participation. Pour atteindre les objectifs à long terme de durabilité et de résilience des systèmes agroalimentaires, il est nécessaire de renforcer la capacité des chaînes d’approvisionnement alimentaire à fournir des produits alimentaires de façon constante, efficiente et efficace. Il est particulièrement compliqué pour les petits producteurs, les exploitants de taille moyenne et beaucoup de PME agroalimentaires (PMEA) de trouver des circuits de commercialisation d’une échelle appropriée. Ils sont souvent trop petits pour pouvoir distribuer leurs produits de manière économique par l’intermédiaire des grandes chaînes de commerce alimentaire à intégration verticale, mais leurs volumes sont trop importants pour des circuits de vente directe au consommateur, comme les marchés de producteurs38. Créer un environnement favorable et encourager la coordination le long des chaînes d’approvisionnement alimentaire peut les aider à surmonter les problèmes d’échelle qui freinent leur accès aux marchés. Il est aussi possible d’aider les petits producteurs et les PMEA à accéder aux marchés et à adopter des stratégies qui améliorent la résilience et l’efficience en encourageant leur participation active à des associations de producteurs, des coopératives, des consortiums et des pôles agro-industriels, avec des mesures créant des conditions propices à la coordination.

Le transport des produits alimentaires depuis des exploitations agricoles rurales et dispersées vers des centres de demande urbains coûte souvent trop cher, en particulier pour les produits réfrigérés ou congelés. La plupart des petits exploitants n’ont pas les compétences, les fonds ou l’accès au crédit nécessaires pour acquérir et utiliser ces moyens logistiques. Leurs systèmes de distribution sont en général fragmentés et moins efficients que les réseaux centralisés des chaînes d’approvisionnement alimentaire modernes39, c’est pourquoi les produits alimentaires d’origine régionale sont plus chers. Des bonnes pratiques logistiques sources de gains d’efficience peuvent abaisser les coûts et améliorer l’accès des consommateurs à des produits alimentaires provenant de régions sans accès à des supermarchés. Il est particulièrement important d’améliorer la logistique pour aider les petits producteurs et les PMEA à rester compétitifs lorsque la pandémie de covid-19 sera terminée, notamment parce que beaucoup de consommateurs se sont habitués à la commodité de s’approvisionner à un seul endroit, de se faire livrer à domicile et d’acheter des produits à valeur ajoutée40. Pour cela, différentes solutions existent: optimisation des itinéraires et programmation et groupage des expéditions; mise en place de centres logistiques (encadré 18); choix de types et de tailles de véhicules adaptés aux objectifs des chaînes d’approvisionnement; livraisons ponctuelles et fréquentes; sous-traitance des transports; collaboration horizontale; et optimisation des implantations (c’est-à-dire du nombre et de l’emplacement des entrepôts)17.

Un meilleur accès à des outils professionnels qui améliorent la réactivité et la flexibilité. Il importe aussi d’aider les producteurs et les entreprises agroalimentaires à adopter des outils professionnels qui améliorent la résilience. Les interventions publiques recommandées dans ce domaine seront axées notamment sur:

  • Le développement des compétences en matière de gestion d’entreprise tout le long de la chaîne d’approvisionnement et la mise en place et la promotion de services d’innovation et d’incubation pour les entreprises, ainsi que de formations sur les mesures à prendre à l’avance pour se préparer à des chocs à court ou long terme.

  • L’amélioration de l’accès et du recours à des outils et des ressources (internet, crédits, assurances, etc.) pour aider les producteurs et les entreprises à renforcer leurs capacités. Les pouvoirs publics et les partenaires de développement pourraient encourager les innovations dans le commerce électronique en investissant dans des infrastructures physiques et intellectuelles et en créant un environnement favorable au commerce et aux entreprises, aussi bien les grandes que les PME agroalimentaires.

  • Le financement de travaux de recherche-développement (R-D) et de services de vulgarisation agricole ciblés sur les stratégies d’adaptation de l’agriculture, notamment les meilleures pratiques agronomiques et d’adaptation au changement climatique, par exemple les variétés améliorées, les meilleures périodes de semis et plantation et de récolte, et une meilleure gestion des nutriments42, 43, 44. La R-D participative s’appuie sur les connaissances existantes et répond aux besoins des producteurs agricoles.

Améliorer les capacités de résilience des petits producteurs et des ménages vulnérables

La résilience des systèmes agroalimentaires est indissociable de celle des moyens d’existence, qui garantit l’accès à de la nourriture même en cas de choc. Parmi les ménages les plus vulnérables aux chocs, ceux qui exercent des activités de production primaire à caractère artisanal – cultures, élevage, pastoralisme, pêche et aquaculture – bénéficieront le plus du soutien logistique, des innovations dans la production et de la gouvernance inclusive des chaînes d’approvisionnement alimentaire dont il a été question dans la précédente section. Au-delà des aides apportées à ces ménages, il est important d’assurer l’accès physique et économique de tous à une alimentation saine. Ce rapport estime qu’outre les quelque 3 milliards d’êtres humains qui n’ont pas les moyens de se nourrir de façon saine1, environ 1 milliard supplémentaire risque de ne plus pouvoir le faire si un choc venait amputer leurs revenus d’un tiers. Même dans les pays à revenu élevé, la sécurité alimentaire des ménages peut être menacée par des chocs45.

Les ménages des pays à faible revenu sont toutefois atteints de manière disproportionnée. Les ruraux pauvres sont parmi les plus défavorisés. Ils travaillent généralement pour leur propre compte et leurs moyens de subsistance reposent essentiellement sur la main-d’œuvre familiale et les ressources naturelles. Ils sont pénalisés par des marchés qui ne fonctionnent pas bien et le manque d’accès à des crédits, à des assurances et à des services publics corrects – de santé et d’éducation, entre autres. Tous ces facteurs rendent les ménages ruraux très vulnérables aux chocs, par exemple à des catastrophes météorologiques et écologiques imprévues, aux effets du changement climatique, et à des crises financières et économiques46. Ce type de chocs a des répercussions sur leurs moyens d’existence et est susceptible d’entamer leurs actifs et leur capacité à bien gérer les risques47. Pour améliorer les capacités de résilience des petits producteurs et des ménages vulnérables, les pouvoirs publics doivent s’employer à:

Faciliter une meilleure gestion des risques et développer les capacités de résilience des ménages. Cet aspect est particulièrement important pour les ménages agricoles et ruraux exerçant des activités de culture, d’élevage, de pastoralisme, de pêche ou d’aquaculture à une petite échelle, ainsi que pour les ménages urbains et ruraux qui travaillent dans le secteur alimentaire informel, par exemple en tant que vendeur de rue ou ouvrier dans un atelier de transformation. Pour donner des résultats, les mesures prises devraient s’attaquer aux problèmes qui défavorisent certains acteurs des systèmes agroalimentaires, en particulier les femmes, les jeunes et les peuples autochtones, et renforcer leurs capacités de prévenir, d’anticiper, d’absorber, de s’adapter et de se transformer face à des chocs.

Suite à l’analyse RIMA exposée au chapitre 4, les autres interventions majeures qui peuvent améliorer la résilience des moyens d’existence des ruraux consistent notamment à améliorer l’accès à des actifs de production et à d’autres actifs, à encourager la diversification des revenus agricoles et non agricoles, et à améliorer l’accès à des services sociaux (d’éducation et d’assainissement, par exemple). Ces derniers revêtent une grande importance pour les ménages ayant des conditions de vie très rudes, comme les populations pastorales. Les interventions de ce type devraient être complétées par des mesures de consolidation des institutions locales et des réseaux de soutien traditionnels, renforçant les connaissances locales, améliorant les infrastructures et favorisant l’accès à des intrants et des marchés. L’amélioration des services de conseil rural aidera à répondre aux besoins de conseil des petits producteurs sur la manière de gérer au mieux les cultures, les sols, l’eau, les nutriments, les ravageurs et les maladies.

Les politiques et interventions ciblées sur les ménages principalement féminins sont fortement encouragées car les femmes et les filles payent le plus lourd tribut pendant et après les chocs. Parce qu’elles ont peu accès à des ressources comme la terre et d’autres actifs, elles ont plus de probabilités d’avoir recours à des mécanismes de survie négatifs en cas de choc, par exemple vendre des biens – une stratégie risquée et qui n’est pas viable à long terme. Faire en sorte que les femmes et les filles puissent accéder davantage à des moyens de production et à des emplois convenables, c’est les rendre capables d’absorber les chocs et de rebondir ensuite sans mettre en péril leur sécurité alimentaire ni entamer leurs actifs. L’éducation contribue de façon essentielle à renforcer la capacité de résilience des femmes, d’où l’importance d’élargir l’accès de tous à l’éducation, y compris pour les filles. Avec un niveau d’instruction plus élevé, les femmes accèdent plus facilement au marché du travail et ont un choix plus large d’activités rémunératrices possibles.

Dans le cas des ménages exerçant des activités de production primaire, il importe aussi de faire la distinction entre les vendeurs nets et les acheteurs nets de produits alimentaires. Les vendeurs nets ont besoin d’une assistance qui porte sur la dimension commerciale de leurs activités de production et qui favorise leur intégration inclusive dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire. Pour les ménages acheteurs nets, les mesures d’aide doivent améliorer et garantir leur pouvoir d’achat et faciliter la diversification de leurs sources de revenu et de leurs moyens d’existence.

Compte tenu de la fréquence et de l’intensité plus grandes des phénomènes climatiques extrêmes que l’on observe aujourd’hui, les producteurs vont être confrontés à des risques croissants. Il importe donc d’étendre l’accès des petits exploitants à des systèmes d’alerte rapide agroclimatique afin de réduire les risques liés aux catastrophes naturelles, ce qui pourra demander des formations et des subventions pour les rendre abordables. Par ailleurs, un meilleur accès à des assurances (assurance récolte, assurance aléas météorologiques, par exemple) permettra aux petits producteurs de souscrire davantage de prêts à la production et de s’engager dans des activités agricoles plus risquées mais plus rémunératrices.

Concevoir des mesures de protection sociale qui améliorent la résilience des ménages en cas de choc. Les programmes de protection sociale aident les ménages vulnérables à éviter les stratégies de survie négatives qui vont compromettre leurs moyens d’existence et leur capacité à faire face à de futurs risques et chocs. Ils sont particulièrement utiles aux ménages ruraux vulnérables, notamment ceux qui exercent des activités artisanales de pêche ou d’aquaculture, ainsi qu’aux travailleurs informels et aux pauvres des villes. Lorsqu’ils sont conçus pour être attentifs à l’égalité des genres et à l’amélioration de la nutrition et pour réagir à de nombreux risques et chocs, les programmes de protection sociale peuvent apporter une aide non seulement aux bénéficiaires habituels tels que les retraités, mais aussi à des populations à risque et exposées à des crises avant, pendant et après un choc. Ils peuvent étendre les prestations en fonction des nouveaux besoins, aider les ménages pauvres à acheter ce dont ils manquent, et leur permettre d’investir et de se lancer dans des activités productives. Les systèmes de protection sociale peuvent aussi permettre une augmentation des prises en charge au moyen de fonds d’urgence déclenchés par des systèmes d’alerte rapide ainsi que des procédures opérationnelles standard48.

De cette manière, les mesures de protection sociale peuvent concourir à maintenir les disponibilités alimentaires et l’accès à la nourriture même en cas de choc et éviter la propagation des effets par le biais des chaînes d’approvisionnement alimentaire. En Éthiopie par exemple, le Programme de protection sociale fondé sur les activités productives cible les ménages en situation d’insécurité alimentaire chronique; il fournit des transferts monétaires ou des vivres selon un calendrier prévisible pendant cinq ans, ainsi que des aides financières et techniques. L’objectif est d’aider ces ménages à constituer des actifs qui pourront leur permettre de traverser des crises futures, tout en contribuant à mettre en place des infrastructures rurales49. Les résultats de l’analyse RIMA du chapitre 4 montre que le fait de pouvoir bénéficier d’une protection sociale à un moment opportun a aidé les femmes et les filles en particulier à surmonter des chocs, en leur évitant de recourir à des mécanismes de survie négatifs. Des dispositifs de protection sociale bien conçus permettent des synergies avec des investissements et des programmes de soutien aux activités productives, qui renforcent à la fois la résilience et la durabilité des moyens d’existence des petits producteurs50. Les actions et les réformes visant à renforcer les liens entre les programmes de protection sociale et de soutien aux activités productives sont fortement encouragées.

Voir plus loin en englobant les autres domaines et priorités de l’action publique

De nombreux enjeux et priorités de l’action publique, dépassant parfois le cadre des systèmes agroalimentaires, peuvent avoir des conséquences importantes en matière d’amélioration de la résilience des systèmes agroalimentaires:

Garantir l’accessibilité économique d’une alimentation saine doit être une priorité, et pas uniquement dans les pays à faible revenu. Le chapitre 2 a montré qu’un pourcentage important de la population mondiale n’avait pas les moyens d’avoir une alimentation saine, ou risquait de ne plus en avoir les moyens en cas de choc entraînant une perte de revenu, comme il a été rappelé plus haut. Cette vulnérabilité est due à la fois au niveau insuffisant des revenus et au coût d’une alimentation saine. Il est donc essentiel d’augmenter les revenus et de transformer les systèmes agroalimentaires pour rendre plus abordable une alimentation saine. La figure 6 fait apparaître quatre grands profils de pays: à l’une des extrémités du spectre, on trouve les pays à revenu élevé ayant peu de problèmes d’accessibilité économique; l’autre extrémité est constituée de pays, surtout des pays à faible revenu d’Asie et d’Afrique subsaharienne, où plus de 80 pour cent de la population ne peut se permettre une alimentation saine et a cruellement besoin que l’accessibilité économique de la nourriture s’améliore indépendamment des chocs. On constate aussi que dans beaucoup de pays, principalement à revenu intermédiaire, un grand nombre d’habitants qui ont les moyens d’avoir une alimentation saine sont néanmoins jugés à risque. Les priorités d’action et les investissements nécessaires dépendront de l’endroit où un pays se trouve sur ce spectre. Certains pays peuvent accorder plus d’importance à des enjeux structurels tels que le niveau et la répartition des revenus, tandis que d’autres privilégieront la gestion des risques et la diversification.

Les politiques publiques doivent avoir des effets directs sur la capacité d’adaptation des acteurs des systèmes, en particulier les ménages. L’un des enseignements notables de la pandémie de covid-19 est que la résilience des ménages en matière de sécurité alimentaire dépend de politiques et de mesures extérieures au secteur agroalimentaire. Dans la précédente section, l’importance des dispositifs de protection sociale pour les pauvres des zones urbaines et rurales a été évoquée. Un autre domaine de l’action publique qui a un impact clair sur la résilience des ménages est l’existence de services de santé et d’assurance-maladie solides et inclusifs. L’éducation et la formation sont également déterminantes pour renforcer la résilience des ménages à long terme. Des politiques publiques plus générales visant à promouvoir l’égalité des genres et l’inclusion des femmes auront des répercussions sensibles sur la résilience au niveau des ménages et plus largement dans les systèmes agroalimentaires, grâce à la plus grande participation des femmes dans tous les secteurs des systèmes agroalimentaires. Des mesures destinées à stimuler l’emploi peuvent soutenir les moyens d’existence et les revenus et avoir ainsi des effets positifs sur l’ensemble d'un système agroalimentaire.

Des interventions publiques sont indispensables pour promouvoir la bonne gestion de l’environnement nécessaire à la durabilité des systèmes agroalimentaires. Les pressions démographiques et environnementales en hausse et les immenses incertitudes qui entourent les futurs chocs et situations de stress ont fait de la résilience des systèmes agroalimentaires une préoccupation majeure au niveau international. Le renforcement de cette résilience doit faire partie intégrante des efforts déployés pour parvenir à la durabilité, en particulier sur le long terme. Au lieu d’aggraver le changement climatique et la dégradation des ressources naturelles, les systèmes agroalimentaires doivent devenir les gardiens de l’environnement. Il importe d’intégrer systématiquement la question de la biodiversité dans les politiques agroalimentaires afin de protéger la santé et la diversité des écosystèmes. La biodiversité est essentielle pour réduire les effets négatifs des aléas liés au climat tels que les sécheresses, les inondations et les tempêtes. Des écosystèmes diversifiés et en bonne santé fournissent des services écologiques fondamentaux, tels que de l’eau douce, un air propre, des sols fertiles et la pollinisation, qui contribuent à la sécurité alimentaire et procurent des moyens d’existence résilients51, protégeant contre les risques climatiques ainsi que les menaces géophysiques et biologiques. Parmi les mesures qui visent à favoriser la bonne santé et la diversité des écosystèmes, les solutions fondées sur la nature permettent de protéger, gérer de façon durable et restaurer les écosystèmes, tout en remédiant à des problèmes sociétaux52. Des pratiques comme la gestion de bassin versant, les approches paysagères, l’agroécologie et l’agriculture climato-intelligente ont un rôle important à jouer dans des scénarios gagnant-gagnant, qui non seulement améliorent la résilience des systèmes agroalimentaires, mais offrent aussi des possibilités d’investissements à long terme très rentables53, 54.

Les infrastructures vertes – broussailles, vergers, haies, prairies, étangs, mares, oueds et zones humides – peuvent aussi réduire les vulnérabilités et les risques dans les systèmes agroalimentaires tout en allant dans le sens de la durabilité environnementale55. Parce que les peuples autochtones et les populations locales occupent souvent une place centrale dans la gestion des ressources naturelles grâce à leurs liens étroits, y compris de dépendance, avec l’environnement et l’utilisation des ressources naturelles dont ils ont besoin pour vivre, la résilience de ces communautés est indissociable de l’état de l’environnement et de la gestion de ses ressources56.

Les politiques publiques doivent être cohérentes et coordonnées pour que la résilience soit intégrée dans la planification nationale de tous les secteurs. Comme dans les autres domaines, la cohérence des politiques est indispensable lorsque l’on cherche à répondre aux besoins des systèmes agroalimentaires. L’impact mondial de la pandémie de covid-19 – une crise sanitaire dont l’origine serait un virus transmis à l’homme par des animaux – et les mesures prises pour y faire face montrent bien que la protection de la santé et la prévention des perturbations causées aux systèmes agroalimentaires demandent des actions coordonnées dans différents secteurs en rapport avec les animaux, les êtres humains, le végétal et l’environnement: c’est l’approche «Une seule santé»57.

Il faut également être conscient que les politiques publiques peuvent avoir des conséquences inattendues. Pour éviter de mettre en place des restrictions qui pénalisent les acteurs des systèmes agroalimentaires, les décideurs doivent comprendre comment ces systèmes fonctionnent et comment leurs acteurs interagissent. Pendant la pandémie de covid-19, par exemple, l’Afrique du Sud a classé le secteur du bois parmi les secteurs non essentiels, une décision malheureuse pour les fruticulteurs qui ont besoin de caisses en bois pour distribuer leurs produits. À l’inverse, dans les pays où l’agriculture a été jugée essentielle, le secteur a fait preuve d’une relative résilience. Au Mexique, le secteur agricole a été considéré comme une activité prioritaire et les prix alimentaires sont restés relativement stables58.

La cohérence des politiques est importante s’agissant des subventions et des autres instruments de soutien à l’agriculture. Si les subventions peuvent apporter une aide immédiate de courte durée aux producteurs agricoles, elles peuvent aussi diminuer leur capacité à s’adapter aux chocs. La protection éventuellement apportée aux producteurs à court ou moyen terme peut avoir comme contrepartie de rendre des systèmes agroalimentaires entiers moins résilients, avec des retours de bâton pour les producteurs. C’est ce qui s’est produit en République arabe syrienne, où les aides publiques permanentes servant à financer le soutien des prix à la production et à subventionner des cultures très irriguées (le blé et le coton) ont entraîné une utilisation excessive des eaux souterraines et un épuisement des aquifères. La capacité d’adaptation des agriculteurs syriens s’en est trouvée réduite lors de la grave sécheresse qui a sévi au Proche-Orient en 2007-2008. La situation a empiré en 2008 lorsque les pouvoirs publics ont supprimé les subventions au carburant diesel, utilisé dans l’irrigation: les prix ont grimpé de 300 pour cent en une nuit59, 60, suite à quoi des milliers de ménages agricoles ont abandonné leurs exploitations et sont partis vivre en ville. Selon les estimations des Nations Unies, la crise a provoqué le déplacement de plus de 300 000 personnes en 2009; dans les régions de Hassakeh et de Deir ez-Zor, 60 à 70 pour cent des villages ont ainsi été désertés61, 62. La grande leçon à tirer est qu’il importe d’analyser attentivement les politiques publiques et les interventions qui touchent les systèmes agroalimentaires afin d’évaluer leur durabilité sur le long terme et leurs répercussions sur la résilience des différents acteurs et des systèmes dans leur globalité.

Une autre question importante concerne la durabilité des dispositifs de protection sociale. Ces programmes jouent un rôle essentiel dans la résilience des populations vulnérables mais, tout comme les subventions et n’importe quelle mesure publique destinée à favoriser la résilience des systèmes agroalimentaires, ils doivent être viables sur le plan budgétaire.

Pour pouvoir assurer la cohérence et la coordination des politiques en matière de renforcement de la résilience, tous les secteurs et les échelons de l’administration publique doivent être mobilisés. Il convient d’insister davantage sur la nécessité d’un alignement vertical des politiques et des actions aux niveaux national et infranational. En particulier, les collectivités locales jouent un rôle décisif dans la riposte aux chocs et l’amélioration de la résilience. L’enquête réalisée par la FAO afin d’évaluer l’impact de la pandémie de covid-19 sur les systèmes alimentaires urbains a clairement mis en évidence le rôle clé des administrations locales pour ce qui est de remédier aux effets produits sur la sécurité alimentaire et la nutrition16. Donner des moyens aux administrations locales peut faire une grande différence en permettant d’éviter une crise de la sécurité alimentaire à la suite d’un choc.

Beaucoup de ces idées sont aujourd’hui intégrées dans les cadres de gestion des risques agricoles de certains pays, mais elles s’inscrivent rarement dans une stratégie globale d’amélioration de la résilience sectorielle et intersectorielle. Il est nécessaire de prendre systématiquement en compte la résilience dans les politiques agroalimentaires et dans tous les secteurs. La résilience devrait être un objectif en soi, et non simplement un outil pour en atteindre d’autres. Le secteur agricole et les institutions gouvernementales devraient collaborer dans tous les secteurs pour mieux anticiper les situations de stress, comme la raréfaction de l’eau et les zoonoses émergentes qui pourraient un jour déstabiliser les systèmes. Des études de cas portant sur la résilience à la sécheresse en Australie, aux catastrophes naturelles au Canada et aux maladies des animaux et des plantes en Italie et aux Pays-Bas fournissent des exemples concrets de la manière dont les pays conceptualisent la résilience63.

Conclusion

La pandémie de covid-19 a ouvert la voie à de nouvelles lectures de la résilience dans les systèmes agroalimentaires. La résilience telle qu’elle est présentée dans ce rapport implique de se préparer à des chocs et à des problèmes futurs encore inconnus, en améliorant la capacité des systèmes agroalimentaires de prévenir, d’anticiper, d’absorber, de s’adapter et de se transformer face à n’importe quelle perturbation. L’objectif général de cette préparation est de gérer les situations de stress et les chocs de manière à assurer la disponibilité ininterrompue d’aliments nutritifs accessibles à tous en quantité suffisante. Il faut pour cela trouver les moyens et les outils permettant de renforcer la capacité de résilience des systèmes agroalimentaires et de faciliter leur transformation afin de les rendre durables et inclusifs.

Reprenant le cadre global présenté au chapitre 1 dans l’optique de renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires nationaux, le chapitre 5 a proposé trois principes directeurs pour aider au choix de politiques, de stratégies et de programmes appropriés. Ces principes reposent sur la préparation, la coopération, la coordination, l’inclusivité et l’équité. Ils visent à favoriser l’intégration systématique des objectifs de résilience dans les cadres d’action et à créer des incitations propres à encourager des changements dynamiques chez les différents acteurs et dans les différentes composantes des systèmes agroalimentaires.

Le tableau 5 récapitule les différents points d’entrée possibles pour gérer les risques et les incertitudes dans les systèmes agroalimentaires, ainsi que les facteurs contextuels à prendre en compte. Une distinction est faite entre les points d’entrée conçus pour faire face à des incertitudes (Chocs difficiles à prévoir) et ceux adaptés à la gestion de risques précis (Chocs plus prévisibles).

Tableau 5
Points d’entrée pour la gestion du risque et de l’incertitude dans les systèmes agroalimentaires

La capacité de résilience des systèmes agroalimentaires peut être améliorée par des politiques et des interventions qui encouragent la diversité, la connectivité et la flexibilité; qui favorisent le dialogue, la transparence et l’apprentissage collectif dans les réseaux et les chaînes d’approvisionnement du secteur alimentaire; et qui garantissent l’accès des ménages vulnérables à une alimentation saine, même quand un choc vient diminuer les revenus. Sachant que des arbitrages peuvent être nécessaires, ce chapitre a recommandé d’évaluer les rôles déterminants de la diversité et du commerce international dans les systèmes agroalimentaires face aux chocs et aux situations de stress, afin d’aider les acteurs à concevoir leurs stratégies de gestion de la résilience.

Ce chapitre a également pointé les interventions majeures susceptibles d’améliorer la résilience des acteurs des chaînes d’approvisionnement, qui conditionne celle des systèmes agroalimentaires nationaux. Elles consistent notamment à élaborer des stratégies novatrices pour le transport et la distribution des produits alimentaires, à exploiter les TIC, à maintenir une diversité et à promouvoir une gouvernance inclusive et une large participation. Les politiques publiques doivent aussi aider les petits producteurs, les petites et moyennes entreprises et les ménages vulnérables à accéder aux outils professionnels dont ils ont besoin pour améliorer leur résilience.

L’un des objectifs de la présente édition du rapport La Situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture est de contribuer au dialogue et au débat sur les moyens d’améliorer la résilience des systèmes agroalimentaires dans le sillage du Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires. Elle entend guider le travail réalisé sur le terrain pour établir des systèmes agroalimentaires résilients et aider ainsi de façon concrète à exploiter le pouvoir de ces systèmes afin d’atteindre les 17 ODD. Le renforcement de la résilience est une condition nécessaire et intrinsèquement liée à la réalisation des ODD et de l’ensemble du Programme de développement durable à l’horizon 2030. La résilience des systèmes agroalimentaires va directement dans le sens de de l’ODD 2 (Faim zéro) et est indispensable pour progresser vers plusieurs autres ODD portant aussi bien sur des aspects socioéconomiques que sur la durabilité environnementale. Œuvrer à la paix et à la prospérité pour toutes les populations de la planète d’ici à 2030 (dans le droit fil de l’ODD 16, Paix, justice et institutions efficaces) empêchera de nombreuses perturbations – ou du moins en atténuera beaucoup l’impact. La résilience des systèmes agroalimentaires y participe.

Indice De Souplesse De La Production Primaire (Ispp)

Description

L’ISPP se rapporte aux différentes voies par lesquelles le secteur primaire d’un pays peut générer de la valeur à partir de la production agricole. S’il dispose de nombreuses voies possibles, le secteur primaire aura une plus grande capacité à absorber les chocs. Deux principaux facteurs entrent en jeu: i) le niveau de diversification de la production; et ii) l’accès aux marchés pour écouler les produits. L’ISPP tient compte de ces deux facteurs pour mesurer la diversité des produits et la possibilité de produire pour le marché intérieur ou les marchés d’exportation en fonction de la part de chaque produit et de sa destination finale (marché intérieur ou exportation). Il indique quelles espèces un producteur moyen est susceptible de cultiver et la destination, à savoir le marché intérieur ou les marchés d’exportation. Une valeur élevée traduit de multiples possibilités de créer de la valeur agricole et de placer la production primaire sur les marchés (en d’autres termes, une redondance des canaux de la demande), et donc une plus forte capacité à absorber les chocs. Les différentes voies possibles sont illustrées à la figure A1.1.

Figure A1.1
Production agricole et vente sur le marché intérieur et les marchés d’exportation, en valeur agricole: les voies possibles

L’ISPP est donc une mesure combinée de la possibilité de choisir ce que l’on veut produire et de la redondance des canaux de la demande (pour l’écoulement de la production). L’entropie informationnelle sert à mesurer l’incertitude concernant ce qui est produit et le marché sur lequel la production est vendue. L’expression de l’ISPP peut être dérivée de la mesure standard de l’information, ou de l’absence d’information, à savoir l’entropie de Shannon1, définie ci-après.

Soit X une variable aléatoire discrète qui prend un nombre fini de valeurs possibles x1, x2, …, xn associées aux probabilités p1, p2, …, pn respectivement, de sorte que l’entropie informationnelle liée à l’incertitude quant à la valeur réelle de x est alors la suivante:

L’entropie informationnelle peut être interprétée comme étant l’information contenue dans un message, qui révèle la valeur prise par la variable aléatoire. Elle a trois propriétés importantes (voir Shannon, 1948)1:

  1. Continuité – sa valeur est continue dans les probabilités;

  2. Monotonicité – si toutes les valeurs pi sont égales (pi=1/N), alors H est une fonction à croissance monotone de N;

  3. Récursivité – si un choix se scinde en deux choix successifs, la valeur d’origine H est la somme pondérée des différentes valeurs de H.

pi est la proportion (i/N) de voies à un niveau donné de la figure A1.1 divisée par le nombre total de voies recensées (N), et H est l’entropie de l’ensemble de probabilités.

L’entropie informationnelle est la seule fonction qui satisfait aux trois propriétés. La troisième est particulièrement importante, car elle permet de calculer l’entropie informationnelle pour les unités d’aliment (en valeur) de différents produits pour le marché intérieur et les marchés d’exportation.

Prenons un pays dans lequel M produits sont produits et supposons que pi soit la probabilité qu’une valeur unitaire (en USD) de ventes vienne spécifiquement du produit i. Si le pays n’exporte pas de produits alimentaires (branche gauche de l’arborescence illustrée à la figure A1.1 uniquement), l’entropie informationnelle associée à la diversité de la production intérieure de ce pays est:

L’entropie informationnelle augmente si l’on suppose que ces produits M peuvent également être exportés. Cette augmentation peut être dérivée en fonction de la propriété de récursivité, selon laquelle l’entropie informationnelle est indépendante de la séquence illustrée à la figure A1.1. L’entropie informationnelle globale peut être exprimée comme suit:

pi est la part de la valeur en produits alimentaires qui va au marché intérieur (i=1) ou qui est exportée (i=2), pij est la part de la valeur générée par le produit j en cas de vente sur le marché intérieur (i=1; j=N1) ou d’exportation (i=2; j=N2), et pijk est la part de la valeur provenant du pays k en cas d’exportation (i=2; j=N2; k=N2j).

Notez que la somme de pi, pij et pijk est égale chaque fois à 1, car ces éléments correspondent à des parts de la valeur des aliments exportés ou vendus localement, ou issue d’un produit donné (dans les exportations, et les ventes sur le marché local), ou provenant d’un pays importateur donné. L’équation de l’ISPP peut être désagrégée en fonction des différentes contributions illustrées à la figure A1.1, comme suit:

  1. Contribution de la diversité de la production nationale destinée au marché intérieur:

  2. Contribution de la diversité des exportations:

  3. Contribution de la balance des ventes (marché intérieur ou exportations):

Sur la figure 3 (chapitre 2), les valeurs de l’axe des Y correspondent à la diversité des exportations, les bulles à la balance des ventes, et les valeurs de l’axe des X à la diversité de la production nationale destinée au marché intérieur.

Données et méthode

Les données d’entrée utilisées pour l’analyse proviennent des données de FAOSTAT relatives à la production, aux prix à la production et aux matrices du commerce détaillées2. L’étude couvre les années 2016 à 2018. Les données de FAOSTAT sur la production (en masse) ont été converties en valeur et en tonnes de protéines à l’aide respectivement des prix à la production et des facteurs de conversion en protéines par produit, pays et année (à partir des bilans alimentaires de FAOSTAT). En cas d’absence de teneur en protéines dans les bilans alimentaires, les moyennes sous-régionales, régionales, continentales ou mondiales ont été utilisées (en fonction des données disponibles). Pour tenir compte de la fluctuation des données à court terme, d’une année sur l’autre, toutes les valeurs de l’ISPP ont été calculées sous la forme d’une moyenne des années 2016 à 2018. Les données ont également été normalisées entre 0 et 1.

Les animaux vivants ayant été déclarés en nombre de têtes, ces valeurs ont d’abord été transformées en poids approximatif (en appliquant un rendement par pays, animal et année à partir des données primaires sur l’élevage), puis en valeur ou en tonnes de protéines au moyen des valeurs des composants nutritionnels du produit parent issues des bilans alimentaires. Les statistiques du commerce n’indiquent pas si les animaux vivants qui sont échangés sont destinés à la production de viande ou de lait. Les auteurs du rapport sont partis de l’hypothèse qu’une fois importés dans un pays, les animaux sont abattus à la fin de leur cycle de vie pour produire des denrées alimentaires, et ont donc compté tous les animaux vivants en tant que viande.

Indice De Souplesse De L’Approvisionnement Alimentaire (Isaa)

Description

L’ISAA rend compte des multiples voies par lesquelles une unité d’aliment (exprimée en résultats nutritionnels) est mise à la disposition d’un consommateur. S’il bénéficie de nombreuses sources d’approvisionnement différentes, un système alimentaire aura une plus grande capacité à absorber les chocs sur l’offre.

Les trois voies par lesquelles une unité d’aliment (mesurée en kilocalories) peut atteindre un consommateur, représentées sous la forme d’une arborescence à la figure A1.2, sont les suivantes: i) aliments produits au niveau national; ii) aliments importés; et iii) réserves datant de l’année précédente (importations ou production intérieure, publiques ou privées). Les aliments produits au niveau national sont ensuite ventilés en fonction de leur destination (marché local ou exportation) puis par produit. Les importations sont également ventilées en fonction des partenaires commerciaux et de la diversité des importations. La balance entre les importations et ce qui est produit ou stocké dans le pays mesure le rôle du commerce dans l’approvisionnement en produits alimentaires et la diversité des approvisionnements.

Figure A1.2
Approvisionnement alimentaire à partir des stocks, de la production intérieure ou des importations, en kilocalories: les voies possibles

Comme pour l’ISPP, l’expression de l’ISAA peut être dérivée de la mesure standard de l’information, ou de l’absence d’information, à savoir l’entropie de Shannon1. Elle présente les trois propriétés importantes que sont la continuité, la monotonicité et la récursivité.

À partir de ce qui précède et de la figure A1.2, un indice d’entropie de base de la souplesse de l’approvisionnement alimentaire se définit comme suit:

pi est la part de produits alimentaires disponibles dans le pays (i=1) ou importés (i=2). pij est la probabilité qu’une unité d’aliment soit produite dans le pays (i=1; j=1) ou provienne des stocks régulateurs (i=1; j=2) ou du pays j si elle est importée (i=2; j=N2). pijk est la probabilité qu’une unité d’aliment soit vendue sur le marché intérieur (i=1; j=1; k=1) ou soit exportée (i=1; j=1; k=2); ou qu’elle soit procurée par le produit k si elle provient des stocks régulateurs (i=1; j=2; k=N12) ou par le produit k si elle provient des importations (i=2; j=N2; k=N2j). Et pijkl est la probabilité qu’une unité d’aliment soit procurée par le produit l une fois que l’on sait si celui-ci est destiné au marché intérieur (i=1; j=1; k=1; l=N111) ou s’il doit être exporté (i=1; j=1; k=1; l=N112).

Notez que la somme de pi, pij, pijk et pijkl est égale chaque fois à 1, car ces éléments correspondent à des parts d’aliments, dans des composants nutritionnels qui sont importés, qui proviennent de stocks (si disponibles dans le pays), qui sont exportés (si produits dans le pays), ou qui sont issus d’un certain produit (dans les stocks, les importations, les exportations ou le marché local), ou d’un pays exportateur donné.

L’équation de l’ISAA peut être désagrégée en fonction des différentes contributions illustrées à la figure A1.2, comme suit:

  1. Contribution de la diversité de la production nationale destinée au marché intérieur:

  2. Contribution de la diversité des exportations:

  3. Contribution de la diversité des stocks:

  4. Contribution de la diversité des importations et des partenaires commerciaux:

  5. Contribution de la balance des approvisionnements (intérieurs ou extérieurs):

Sur la figure 4 (chapitre 2), les valeurs de l’axe des Y sont obtenues en additionnant les contributions des expressions 1) et 2), tandis que les valeurs de l’axe des X correspondent à la somme des contributions des expressions 4) et 5). La taille des bulles correspond à la contribution de la diversité des stocks.

Données et méthode

Les données d’entrée utilisées pour l’analyse proviennent des bilans alimentaires et des matrices du commerce détaillées de FAOSTAT2. Les données relatives aux stocks régulateurs proviennent des comptes disponibilités et utilisation de FAOSTAT2; du Système d’information sur les marchés agricoles (AMIS)3; du Système mondial d’information et d’alerte rapide sur l’alimentation et l’agriculture (SMIAR) de la FAO4; et de la base de données Production, Supply and Distribution (PSD) du Département de l’agriculture des États-Unis5. Ces données ont été utilisées comme suit: en l’absence de comptes disponibilités et utilisation dans FAOSTAT, on a calculé la moyenne des trois sources de données restantes. On sait cependant que les données sur les stocks sont difficiles à estimer de manière précise. L’étude couvre les années 2016 à 2018.

Les données des bilans alimentaires de FAOSTAT (en masse) ont été converties en énergie alimentaire (en kilocalories), en lipides (en tonnes) et en protéines (en tonnes) à l’aide des facteurs de conversion par produit, pays et année (également fondés sur les bilans alimentaires). Pour les fruits et les légumes, on a utilisé le poids (en tonnes). Les données des matrices du commerce ont également été transformées en composants nutritionnels à l’aide des données des bilans alimentaires de FAOSTAT pour le produit «parent» correspondant. Par exemple, la valeur des composants nutritionnels pour la viande de bovins a été dérivée des valeurs de «viande bovine» communiquées par les pays. Les animaux vivants ayant été déclarés en nombre de têtes, ces valeurs ont d’abord été transformées en poids approximatif (en appliquant un rendement par pays, animal et année), puis en kilocalories, tonnes de protéines et tonnes de lipides au moyen des valeurs des composants nutritionnels du produit parent.

Pour tenir compte de la fluctuation des données à court terme, d’une année sur l’autre, toutes les valeurs de l’ISAA ont été calculées sous la forme d’une moyenne des années 2016 à 2018. Les données ont également été normalisées entre 0 et 1. Les épices, les articles non alimentaires et l’alcool n’ont pas été pris en compte dans l’analyse.

Ajout De La Probabilité De Perturbations À L’Ispp Et À L’Isaa

Il a été possible d’intégrer les informations relatives aux menaces – réelles ou perçues – afin de dériver un ensemble d’indicateurs corrigés des risques. L’ISPP et l’ISAA pouvant être décomposés en différents éléments, les informations relatives à la probabilité de perturbations dans les différentes voies possibles peuvent être incorporées lorsqu’elles sont disponibles. Les éléments de l’ISAA sont: i) la contribution de la diversité des importations et des partenaires commerciaux; ii) la contribution de la diversité de la production nationale; et iii) la contribution de la diversité des stocks. L’ISAA peut donc être exprimé sous la forme:

(1) ISAA = ISAA (importations)+ISAA (production intérieure)+ISAA (stocks)

Si l’on dispose d’informations au niveau des pays indiquant la probabilité que les voies concourant à ces différentes contributions soient défaillantes, on peut définir un ISAA corrigé des risques, comme suit:

(2) ISSArisque = (1pimp)∙ISSA(importations)+(1pintérieure)∙ISSA (production intérieure)+(1-pstock)∙ISSA(stocks)

Où les probabilités, p, expriment pour chaque contribution la probabilité qu’un ensemble de voies ne soient pas disponibles et qu’on ne puisse pas les utiliser comme solutions de remplacement en cas de perturbations.

On peut également interpréter ces probabilités comme la proportion d’une contribution à la diversité sur laquelle on ne peut pas compter. Par exemple, si pstock est égal à 0 cela signifie que des stocks sont disponibles et seront mis sur le marché en cas de choc sur l’offre. Si, au contraire, pstock est égal à 1, les stocks ne pourront pas être utilisés. La réalité se situera en fait quelque part entre les deux. Par exemple, les stocks ne pourront être débloqués que si le choc sur l’offre dépasse un certain seuil. Dans ce cas, la valeur de pstock correspondra à la probabilité que le choc sur l’offre n’atteigne pas le seuil requis pour débloquer les stocks. L’ISAA corrigé des risques sera toujours inférieur à l’ISAA. L’écart dépendra de la fiabilité, réelle ou perçue, des différentes voies possibles.

Indice De Souplesse Des Segments Intermédiaires (Issi)

Description

L’ISSI a pu être élaboré à l’aide de la logique qui sous-tend l’ISPP et l’ISAA, en mesurant la diversité des aliments transformés, de l’approvisionnement (production nationale ou importation) et des marchés de produits (intérieurs et extérieurs). Une valeur élevée traduit de multiples possibilités de produire et de vendre des aliments transformés (en valeur). L’ISSI indique l’aliment transformé qu’un acteur du secteur de la transformation est susceptible de produire, s’il finit sur le marché intérieur ou les marchés d’exportation et si les intrants utilisés pour le produire provenaient d’une source intérieure ou extérieure. Il donne ainsi des informations utiles sur la souplesse du secteur de la transformation. Comme dans le cas de l’ISPP et de l’ISAA, l’entropie informationnelle peut être utilisée pour mesurer cette incertitude.

Difficultés de mesure

Comme le montre la figure A1.3, l’ISSI est plus complexe que l’ISPP (figure A1.1) et que l’ISAA (figure A1.2), étant donné que les marchés des intrants comme ceux des produits remplissent un rôle. Une autre difficulté est le manque de données, notamment sur l’origine des intrants (intérieure ou extérieure) utilisés pour la transformation et sur les prix. Cela signifie que de nombreuses voies possibles de production ne sont pas prises en compte, ce qui entraîne une sous-estimation de l’indicateur et donc de la résilience du secteur de la transformation.

Dans le présent rapport, l’analyse de la résilience des réseaux de transport peut servir d’indicateur supplétif pour le concept plus large de résilience des segments intermédiaires. Cela étant, l’estimation de l’indicateur de souplesse des segments intermédiaires permettra de combler un vide important, et mettra en lumière la nécessité de disposer de données plus complètes et de meilleure qualité pour réaliser une analyse plus poussée.

Données Et Méthode Relatives À L’Indicateur De L’Accès Économique

Une alimentation saine garantit non seulement un apport suffisant de calories, mais aussi des niveaux satisfaisants s’agissant de l’ensemble des nutriments essentiels pour mener une vie saine et active. Elle offre une grande diversité d’aliments appartenant à différents groupes. Le coût de cette alimentation est tiré de l’édition de 2021 de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde6. Pour une description complète de la méthode de détermination du coût et des sources de données, veuillez vous reporter à l’annexe 3 de FAO et al. (2020)7.

Pour estimer le nombre de personnes exposées au risque de ne pas pouvoir se permettre une alimentation saine si un choc fait diminuer leurs revenus d’un tiers, nous définissons le niveau de revenus requis comme étant le montant nécessaire pour avoir une alimentation saine, couvrir les besoins non alimentaires (logement, par exemple) et disposer d’une réserve de revenu de 50 pour cent pour faire face à une crise éventuelle. Nous comparons ce niveau de revenus à l’estimation de la répartition des revenus d’un pays donné en 2019 issue de la base de données PovcalNet de la Banque mondiale8. Une alimentation est considérée comme inabordable lorsque son coût (y compris la réserve de revenu) dépasse 63 pour cent des revenus moyens dans un pays donné. Ces 63 pour cent représentent la part du seuil de pauvreté que l’on peut considérer de manière crédible comme étant réservée à l’alimentation, et sont fondés sur des observations qui indiquent que le segment le plus pauvre de la population dans les pays à faible revenu dépense en moyenne cette proportion de ses revenus en nourriture9, 10, 11, 12. Cet indicateur de l’accessibilité économique a été calculé pour 143 pays en 2019, comme suit:

(1+0,5) × Coût de l'alimentation/0,63

Figure A1.3
Approvisionnement en intrants pour la production d’aliments transformés et leur vente sur le marché intérieur et à l’exportation aux fins de la création de valeur: les voies possibles

À titre d’exemple, si le coût d’une alimentation saine dans un pays donné est de 3 USD par jour, une personne doit avoir un revenu minimum de 4,76 USD par jour pour pouvoir satisfaire ses besoins alimentaires et non alimentaires. Pour réussir à les satisfaire en cas de choc qui réduit ses revenus d’un tiers, le revenu de base de la personne doit être de 7,14 USD.

Cette mesure permet d’estimer la part de la population qui ne peut pas se permettre une alimentation saine en cas de choc ayant pour effet de réduire les revenus d’un tiers. Les pourcentages sont ensuite multipliés par la population de chaque pays (chiffres de 2019 obtenus à partir des indicateurs du développement dans le monde de la Banque mondiale) afin d’obtenir le nombre de personnes exposées au risque qu’une alimentation saine soit hors de leur portée13.

La figure 6 (chapitre 2) présente les résultats de cette mesure, à savoir la proportion de personnes exposées au risque de ne pas pouvoir se permettre une alimentation saine (axe vertical) par rapport à la proportion de personnes qui ne peuvent pas se permettre une alimentation saine alors même que leurs revenus ne diminuent pas (axe horizontal).

Description Des Indicateurs De La Résilience Des Réseaux De Transport

Nelson et al. (à paraître) ont élaboré trois indicateurs nationaux pour mesurer la vulnérabilité structurelle du réseau de transport d’un système alimentaire face aux perturbations: i) la résilience fondée sur la proximité; ii) la redondance des itinéraires; et iii) le coût relatif d’une déviation14. Ces indicateurs sont décrits en détail ci-après.

Résilience fondée sur la proximité

La résilience fondée sur la proximité est un indicateur de la résilience des réseaux de transport lié à la matrice des produits alimentaires (distribution des produits alimentaires entre l’endroit où ils sont produits et celui où ils sont consommés)g. Cette matrice permet d’estimer le tonnage de produits agricoles acheminés entre les zones d’origine (où ils sont produits) et les zones de destination (où ils sont consommés). Ces dernières sont les zones de chalandise situées autour de toutes les villes. L’attraction totale du modèle est fonction de l’offre totale de produits agricoles (tonnage, à l’exclusion des exportations). Ce total est distribué de manière proportionnelle en fonction de la population de chaque zone. On distingue différents produits en raison des exigences spécifiques liées au transport. Les produits hautement périssables, comme les fruits, par exemple, pourront être transportés sur des distances plus courtes que les produits non périssables comme le riz. La fonction de distribution décrit la propension à transporter des produits alimentaires entre A et B, indépendamment de la production et de l’attraction, respectivement, comme suit:

f(c)=e-βc

c est le coût du trajet entre les zones d’origine et de destination et β est la pente de la fonction de distribution.

Le temps de trajet est défini comme étant la meilleure option disponible pour exprimer le coût du transport. Le coefficient β indique la vitesse à laquelle l’attractivité décroît lorsque le temps de trajet (coût) augmente. En principe, la solution la plus économique consiste à proposer les produits là où ils sont produits. Cependant, en raison de facteurs tels que les mécanismes de marché et les préférences des consommateurs, la fonction de distribution peut comporter un β relativement peu élevé.

Indépendamment de β, les systèmes seront plus résilients s’il y a équilibre entre la production et la consommation. Lorsque les zones de production et de consommation coïncident, les produits agricoles ne voyagent pas très loin. Les systèmes seront donc plus résilients face aux perturbations du réseau, du fait de la possibilité d’écouler les produits localement. En revanche, si le lieu de production est éloigné du lieu de consommation, le temps de transport est plus important même si la valeur de β est élevée, ce qui accroît la vulnérabilité du réseau face aux perturbations. En d’autres termes, lorsque le temps de trajet moyen est plus long que dans la situation optimale d’équilibre entre production et consommation, les systèmes sont moins résilients. L’indicateur de la résilience fondée sur la proximité correspond au rapport entre la durée de trajet moyenne dans la situation optimale d’équilibre entre production et consommation et cette même durée dans la situation réelle où les produits agricoles doivent voyager pour atteindre les consommateurs dans diverses zones.

L’analyse des résultats montre une corrélation claire entre cette mesure de la résilience et la taille du pays. Ainsi, la durée de trajet moyenne, et donc la résilience fondée sur la proximité, d’un petit pays est élevée, en raison de sa taille. De la même façon, les déviations seront en moyenne plus courtes dans les petits pays, mais les déviations relatives seront en moyenne plus longues. Cela s’explique simplement par le fait qu’il y a (en général) plus d’itinéraires de substitution pour les longs trajets. Ces schémas ne sont pas liés à la résilience réelle conférée par les investissements réalisés dans un réseau de transport, mais au contexte géographique. Pour corriger ce problème, on multiplie la résilience fondée sur la proximité par la racine carrée du tonnage total des produits agricoles transportés et on la divise par le facteur d’échelle moyen pour conserver le même ordre de grandeur dans les deux mesures. Cela permet de faire des comparaisons utiles de la résilience fondée sur la proximité entre les pays.

Redondance des itinéraires

Cet indicateur correspond au rapport entre le tonnage qui passe par des liaisons pour lesquelles il existe un itinéraire de substitution et le tonnage total pour l’ensemble des liaisons:

Il s’agit donc d’une mesure de la résilience fondée sur l’existence d’itinéraires de substitution. Plus la valeur de l’indicateur est élevée, plus le réseau de transport est résilient. Pour la plupart des pays, cette valeur est supérieure à 0,80, ce qui indique qu’il existe de nombreux itinéraires de rechange. Pour la Somalie, cependant, cette valeur est de 0,31 environ; en d’autres termes, 69 pour cent du tonnage est transporté sur des liaisons pour lesquelles il n’y a pas d’itinéraire de substitution, ce qui dénote une très faible résilience.

Coût relatif d’une déviation

Cet indicateur permet de calculer le nombre de tonnage-minutes supplémentaires résultant de la fermeture d’une des 20 liaisons importantes. La sélection des liaisons les plus importantes nécessite: i) de fermer chaque liaison associée à du trafic et de calculer le temps de trajet (coût) avec l’itinéraire de substitution (entre les nœuds de départ et d’arrivée de la liaison fermée); et ii) de multiplier ce temps de trajet par l’intensité du transport sur la liaison. Plus la valeur est élevée, plus la suppression de la liaison aura d’impact. Les liaisons présentant les valeurs d’impact les plus élevées sont sélectionnées. Cependant, on ne peut pas se contenter de sélectionner les 20 liaisons associées à la plus forte intensité de transport, car un certain nombre d’entre elles pourraient se trouver le long de l’itinéraire le plus utilisé, ce qui reviendrait à simuler plusieurs fois une fermeture similaire. Par conséquent, on tient compte de toutes les relations origine-destination pour la liaison présentant la valeur d’impact la plus importante. On répète ensuite l’exercice en excluant les transports sur les relations origine-destination déjà sélectionnées lors d’une précédente itération, et en reprenant la procédure depuis la première étape jusqu’à ce que 20 liaisons soient sélectionnées. Cette mesure de la résilience fondée sur les itinéraires, appelée coût relatif d’une déviation, correspond à la différence relative moyenne (en pourcentage) entre les tonnage-minutes en situation normale et lorsque l’une des 20 liaisons à forte intensité de transport est supprimée.

La fermeture de liaisons à forte intensité (dans la mesure du coût relatif d’une déviation) aura un impact sur la population qui consomme les produits alimentaires dont le transport est retardé. On estime l’impact sur la population, en nombre de personnes touchées par le retard dans le transport des produits alimentaires exclusivement, en considérant tour à tour chaque liaison fermée et en déterminant quelles paires (origine-destination) de nœuds (zones de chalandise) sont concernées lorsque la liaison est supprimée, et s’il s’agit de la zone d’origine ou de destination (les deux pouvant être touchées si des biens sont acheminés dans les deux sens). Ensuite, on calcule, sans double comptage, le nombre moyen de personnes touchées (consommateurs) dans les zones de destination concernées pour toutes les fermetures de liaison, à partir de la population connue dans chaque zone. Cette mesure ne tient pas compte de la quantité de produits alimentaires dont le transport est retardé, ce qui implique que le nombre de personnes touchées dans une zone est le même, quelle que soit la quantité en question.

Figure A2.1
Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), en valeur protéique, 2016-2018
Figure A2.2
Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), en valeur lipidique, 2016-2018
Figure A2.3
Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), en tonnes de fruits et légumes, 2016-2018
Tableau A3.1
Indice de souplesse de la production primaire (ISPP) en valeur protéique, 2016-2018
TABLEAU A3.2
Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), contribution en kilocalories et en tonnes de fruits et légumes, 2016-2018
TABLEAU A3.3
Indice de souplesse de l’approvisionnement alimentaire (ISAA), contribution en valeur protéique et en valeur lipidique, 2016-2018
TABLEAU A3.4
Indicateurs de résilience et de vulnérabilité des réseaux de transport de produits alimentaires
TABLEAU A3.5
Accessibilité économique d’une alimentation suffisamment énergétique et saine en 2019
Tableau A4.1
Liste des pays du modèle FAO-RIMA
Tableau A4.2
Liste des pays de l’enquête en grappes à indicateurs multiples (EGIM)

Glossaire

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Chapitre 5

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Annexe 1

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