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3. L’évolution des facteurs déterminants de la consommation alimentaire en milieu urbain


3.1 Les disponibilités physiques de produits dans les villes
3.2 Le pouvoir d’achat
3.3 Les conditions objectives de vie en milieu urbain
3.4 Les composantes culturelles
3.5 Le comportement d’achat et d’approvisionnement: Les modalités d’approvisionnement

La question de l’accessibilité des urbains aux aliments qu’ils souhaitent consommer est une question centrale quand on aborde la question des déterminants de la consommation alimentaire en Afrique. En effet nous sommes dans le plupart des cas dans une situation où l’offre de produits est insuffisante là où l’on en a le plus besoin. La question de l’accessibilité présente ainsi deux aspects: la disponibilité du produit en quantité et en qualité là où se trouve le consommateur, et la disponibilité de ressources du ménage.

3.1 Les disponibilités physiques de produits dans les villes

L’organisation des villes en quartiers reflétant les différentes catégories sociales est le premier déterminant de la disponibilité des aliments. Les villes africaines construites pendant la période coloniale concentrent dans les centres villes les marchés les plus importants. C’est le cas à Dakar (Sandaga, kermel), à Cotonou (Dantokpa) et à Ouagadougou (Grand marché). En réalité il ne s’agit pas de marchés de gros mais surtout de grands marchés de détail où la gamme de produits est large («on trouve tout»).

Pour les habitants des quartiers du centre-ville l’accès est facile. C’est également dans ces quartiers qu’on trouve les supermarchés qui vendent les produits de luxe d’origine européenne.

Dans les quartiers périphériques de la banlieue on trouve des marchés secondaires et des boutiques. Les quartiers aisés ont donc un accès facile et prioritaire aux produits et disposent également de plus de marge de négociation étant mieux informés sur les prix. Cet avantage est valable aussi bien pour les produits d’origine locale que pour les produits importés. Les habitants des quartiers périphériques ont peu de choix sur les qualités et dépendent des intermédiaires, qui jugent selon leurs stratégies personnelles, l’opportunité de la distribution d’un produit donné. Certains produits locaux comme le soumbala à Ouagadougou, l’huile de palme à Cotonou et à Dakar, sont directement accessibles aux consommateurs à travers des réseaux ethno-géographiques de distribution qui relient directement les vendeurs des quartiers aux producteurs-transformateurs des villages.

3.2 Le pouvoir d’achat

Les revenus urbains sont essentiellement dominés par les salaires des fonctionnaires de l’administration. Dakar regroupe à lui seul 55 pour cent de la masse salariale payée aux fonctionnaires au Sénégal. Le rapport doit être sensiblement le même dans les autres capitales compte tenu de la concentration du pouvoir administratif et des infrastructures dans les capitales. Les revenus du secteur commercial et de l’industrie sont aussi variables selon les villes. A côté de ces couches sociales relativement sécurisées les capitales regroupent une population composée majoritairement de ménages dont les revenus sont très faibles et surtout très irréguliers et aléatoires. A Dakar une enquête menée par la Direction des statistiques établie une classification des revenus annuels qui donnent des indications sur les classes de revenus:


FCFA/an

->

FCFA/mois

1:

< 342000

28800

2:

342000 - 655000

55583

3:

655001 - 1080000

90000

4:

1080001 - 1872000

156000

5:

> 1872000



Le pouvoir d’achat ne sera pas déterminé uniquement par le niveau des revenus mais aussi par l’importance des autres charges, en particulier les charges locatives. Il va également varier en fonction des types de ménages (polynucléaires ou mononucléaires) et des apports des différents composants de l’unité de consommation. Les données disponibles ainsi que les méthodologies d’approche des enquêtes statistiques réalisées pour d’autres objectifs ne permettent pas faire de telles analyses.

Si la différence de revenus induit des clivages sociaux, elle ne conduit pas à la démarcation des choix des plats de base. C’est l’importance accordée aux différents composants des plats qui va changer. La réduction des proportions se fera dans l’ordre suivant:

- viande/ poisson frais,
- huile,
- ingrédients,
- feuilles,
- céréales.
Ainsi «quand le pouvoir d’achat des ménages diminue, la viande et le poisson sont sacrifiés avant les légumes de base (oignons, feuilles de manioc, oseilles de gunée)».

Pour la plupart des plats en sauce, la présence de la viande est un signe d’aisance et a une valeur symbolique. En outre la consommation à domicile de plats à «dominante viande» tend à disparaître quand augmente la pauvreté.

Dans la plupart de villes africaines les politiques d’ajustement structurel et la dévaluation ont fait progresser la pauvreté. La récession économique des années 80, caractérisée par une contraction importante des recettes d’exportation et une augmentation substantielle du service de dette, a entraîné un accroissement de la population défavorisée.

Le revenu monétaire non-agricole moyen a chuté de 45 pour cent entre 1978 et 1985. D’après la Centrale des Bilans de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), le secteur moderne a accusé une baisse de l’emploi de l’ordre de 30 pour cent entre 1979 et 1984.

Aux problèmes de licenciements dans les entreprises et de départs volontaires dans l’administration s’ajoute celui du non-versement prolongé des salaires dans certains pays. Parallèlement, on constate une progression majeure du secteur informel. La dévaluation du franc CFA en janvier 1994 s’est traduite en milieu urbain par une contraction notable des pouvoirs d’achat et de la qualité de la vie, conduisant à une paupérisation nette et générale.

On assiste ainsi à l’adoption de stratégies de survie individuelles et collectives. Pour les plus pauvres le problème principal est celui de la sécurité alimentaire. Tout le ménage se mobilise pour tenter de faire face à l’augmentation du coût de la vie et en premier lieu, des prix des denrées. Les hommes sont à la recherche permanente d’emplois ou de travail souvent occasionnels ou mal rémunérés et cumulent plusieurs activités. Pour pallier à la diminution de la contribution du mari à la préparation des repas, les femmes se consacrent au petit commerce, à la confection et à la vente de vêtements, à la fabrication de bière, de façon permanente ou en période de soudure, ou pour faire face à des besoins d’argent spécifiques.

L’alimentation de rue constitue en fait souvent la première stratégie d’insertion dans la vie économique urbaine dans la mesure où elle ne requiert qu’un minimum d’investissement et de formation. Les enfants ne vont plus à l’école et se consacrent au gardiennage des voitures, au transport des paniers sur les marchés, voire au vol ou à la mendicité.

Certaines catégories de ménages urbains se retrouvent le plus souvent en situation d’insécurité alimentaire. Il s’agit en particulier:

Les systèmes de solidarité sont encore vivaces dans certaines villes et permettent parfois à certaines catégories de faire face aux difficultés. C’est ainsi que les réseaux familiaux entre ville et campagne basés sur l’envoi de vivres de la campagne à la ville, et de la ville à la campagne, en période de soudure ou en cas de famine, sont essentiels à la sécurité alimentaire de bien des ménages en particulier des migrants récents et de ceux qui ont encore des attaches rurales. Mais les systèmes d’entraide familiale subissent les effets de la récession économique et s’effritent progressivement. Certains ménages urbains solvables préfèrent même prendre leurs repas à l’extérieur dans la mesure où ceci leur permet d’échapper à leurs obligations d’hôtes. On constate donc une dégradation de la valeur sociale des repas chez les plus pauvres.

La question de la sécurité alimentaire des plus pauvres mérite une étude approfondie pour l’identification de stratégies adaptées, mais la question de base reste celle de savoir s’il faut accepter cette tendance comme une donnée structurelle à laquelle les SADA doivent s’adapter ou la considérer comme une anomie sociale à résoudre en s’attaquant aux racines, notamment à la question de l’emploi.

3.3 Les conditions objectives de vie en milieu urbain

L’évolution historique de la distribution des fonctions dans les villes africaines montre un éloignement progressif des lieux de travail de ceux de résidence. Les services (commerces, petits métiers) se sont également rapprochés des lieux de travail et on assiste en une concentration des activités dans les centres-villes. Les moyens de transport sont déficients et les conditions de déplacement difficiles et coûteuses en temps et en argent. On parlera ainsi de villes-dortoirs pour désigner ces quartiers de la banlieue où résident la majorité des travailleurs des couches moyennes et du secteur indépendant.

La consommation domestique (partage en famille du repas de midi) devient une contrainte objective à laquelle les ménages tentent de s’adapter. Les chefs de ménages et les femmes commerçantes sont ainsi obligés de déjeuner sur les lieux de travail et de prévoir les repas de midi à domicile pour les enfants et les dépendants. Cela alourdit les charges d’alimentation et obligent les ménages à réajuster leurs dépenses. C’est ainsi que les dépenses pour les repas de midi préparés pour les dépendants et les enfants sont réduites au juste nécessaire et les «repas de qualité», réservés aux week-end.

Dans les lieux de travail plusieurs options sont offertes aux travailleurs. Les restaurants offrent une variété de plats cuisinés, mais en général il faut payer comptant. Pour les clients fidèles, le paiement à la fin du mois est permis. Il arrive également que les travailleurs s’organisent et confient à une préparatrice un budget de préparation4. Ce système est cependant contraignant dans la mesure où il crée des obligations de gestion. C’est ainsi que des femmes ont pu exploité ce créneau en livrant sur place des plats cuisinés qu’elles préparent chez elles.

Cette innovation, qui semble avoir plus de succès à Dakar depuis l’instauration de la «journée continue» dans l’administration, présente l’avantage de la qualité et de la flexibilité pour les deux parties. Les prix sont réduits par le fait que la restauratrice n’a aucune charge locative. Pour le consommateur, les options proposées lui permettent de réajuster en permanence ses dépenses. Il décide de prendre ou non un repas en fonction de sa situation financière et de ses besoins prioritaires. La qualité est parfois un argument avancé. En définitive, il se crée un climat familial entre les travailleurs d’une entreprise qui partagent les repas et les femmes restauratrices.

L’organisation en commun des repas répond aussi à des préoccupations d’économie d’échelle. A Dakar, en calculant les plus bas prix par repas achetés dans les restaurants (sandwich ou plats cuisinés), soit 350 franc CFA par repas, les besoins financiers d’une famille de dix personnes se chiffrent autour de 3 500 franc CFA/jour. Avec cette somme la famille peut préparer correctement des repas pour au moins deux jours. A titre illustratif un repas de riz au poisson ou à la sauce de dix personnes nécessite les dépenses suivantes5:

Produit

FCFA

Riz ( 2 kg):

500

Huile (1/2 litre)

325

Poisson:

500

Légumes:

250

Ingrédients:

200

Energie:

125

Total: 1900 FCFA soient 190 FCFA par personne
Pour le riz à la sauce les dépenses d’huile, de poisson ou de viande sont moins élevées. Par contre les dépenses d’ingrédient peuvent être plus élevées. Il faut noter que les dépenses de légumes et de condiment varient fortement selon les saisons.

Dans un contexte où l’alimentation individuelle est une tradition et où le repas se vend à des prix abordables, l’attribution à chaque membre de la famille de sa «dépense» quotidienne devient possible. C’est le cas à Cotonou où l’aliment de base est constitué de pâtes de tubercules avec de la sauce. Les résultats d’une enquête budget-consommation réalisées à Cotonou montrent que sur sept jours, les ménages n’ont préparé le repas à domicile que 1,8 fois «Ceux-ci sont complétés par des plats préparés ou des produits supplémentaires achetés pour les trois quarts d’entre eux, à raison de 3,65 produits par jour. Autrement dit, sur les 5,49 produits utilisés par jour et par ménage seul le tiers est cuisiné à domicile» (THUILLIER et BRICAS, 1996).

Les auteurs de cet ouvrage soulignent également que «pour une dépense hebdomadaire moyenne de 4 145 franc CFA, on sait que 1 091 franc CFA, soit plus du quart (26 pour cent) sont consacrés aux dépenses de restauration de d’alimentation de rue (...). La consommation de préparations marchandes que ce soit à domicile après achat, dans la rue, sur les lieux de travail, à l’école ou dans les petits restaurants apparaît comme une caractéristique importante des styles alimentaires à Cotonou. Par ce biais, la population accède à des aliments que les contraintes de la vie urbaine ne lui permettent pas de préparer ou de consommer à domicile. Pour la population défavorisée ce mode d’alimentation constitue un moyen de se nourrir à faible coût.» (THUILLIER et BRICAS, 1996).

Dans ce contexte les repas du soir sont surtout pris à domicile pour disposer d’un moment de regroupement de la famille. En effet l’enquête révèle que seuls «14 pour cent des enquêtés déclarent avoir pris leurs repas du soir hors de leurs domiciles».

On ne dispose pas de données sur les prix des plats cuisinés à Cotonou mais le fait que seuls 33,6 pour cent des aliments soient utilisés pour des préparations domestiques prouve que les plats préparés ne présentent pas des écarts de coût significatifs. La nature de ces plats expliquent certainement cette particularité. En effet, les plats consommés à Cotonou sont des bouillies de céréales, des pâtes fermentées de maïs («akassa»), des semoules de manioc («gari») et divers produits transformés à base de tubercules et de racines.

3.4 Les composantes culturelles

Les produits et plats typiques comme élément d’identité

Les plats constituent un élément d’identification culturelle de premier ordre à tel point que les nouveaux citadins tentent de conserver certaines habitudes de consommation typiques de leur région d’origine. Ces divers styles de consommation se retrouvent tous en ville favorisant ainsi la diversité, mais chacun aime rappeler son plat de terroir d’origine. C’est le cas des populations originaires du sud du Sénégal à Dakar pour un lot de plats typiques à base d’huile de palme. A Cotonou trois régimes alimentaires coexistent6 bien que ce soit le modèle rural du Sud qui domine. Cette volonté d’identification se retrouve aussi dans le choix des produits locaux transformés. A ce sujet, E. Cheyns souligne à propos du soumbala, un produit typique burkinabé que «la consommation du soumbala permet d’affirmer une identité, en exprimant son appartenance à un terroir (...). Les soumbala n’ont pas les mêmes méthodes de fabrication donc pas les mêmes caractéristiques intrinsèques. Selon les régions du Burkina Faso, la population distingue les soumbala «Bobo», «Mossi», «Bissa», etc. Consommer du soumbala de son village ou produit par une personne de même origine ethnique ou géographique, fait partie de jeu de l’identité culturelle» (CHEYNS, 1996). On peut rapprocher le cas du soumbala à celui du couscous à Dakar. Les membres de l’ethnie serère achètent aux préparatrices du même groupe ethnique pour la qualité un peu fermentée du couscous qu’elles proposent.

Le repas comme moment de socialisation

Les repas sont en général au nombre de trois dans la journée et constituent traditionnellement des moments où toute la famille et les dépendants (sourga) se retrouvent autour du chef de famille qui en profite ainsi pour réaffirmer sa position.

C’est donc un moment privilégié de réaffirmation des rôles et places de chacun. Dans les ménages polygames les petits déjeuners sont organisés autour des sous-ménages (chaque mère avec ses enfants). Il en est de même avec les ménages polynucléaires où chaque couple gère son petit déjeuner. La gestion de la «popote» ou de la dépense par les femmes constitue un symbole quotidien de réaffirmation de leur rôle central. Cette fonction d’intégration sociale, de communication et d’éducation du repas permet de comprendre la difficulté des familles urbaines à s’adapter à la «journée continue». Cette situation frustrent alors la majorité des familles et seules les familles aisées arrivent à satisfaire ce besoin culturel.

La perception des aliments

La manière dont les aliments sont perçus influence fortement les modalités d’approvisionnement. Ainsi on comprend la difficulté pour les populations d’intégrer la viande congelée dans leurs habitudes de consommation car les femmes estiment que la viande congelée perd de son goût. La viande fraîchement abattue est préférée et perçue comme plus saine. E. Cheyns parle de «trajectoire du goût»: «la viande est appréciée pour son goût et pour sa capacité à agrémenter la sauce (...) la viande découpée en petits morceaux et mijotée dans la sauce a surtout le rôle de donner du goût à la sauce: elle est perçue comme un exhausteur de goût, et ce qui est attendu d’une viande, c’est son pouvoir de diffusion dans la sauce. (...) c’est donc une viande abattue depuis peu et bien saignante qui prime sur la tendreté.».

A part les plats que préparent les familles riches et pauvres et dont les différences dépendent seulement du niveau d’investissement, dans la perception commune certains plats sont «typés» «plats de pauvres» ou «plats de riches». C’est le cas au Sénégal où les plats de riz dans lesquels le poisson frais est remplacé par le poisson séché ou fumé est considéré comme un repas de misérables. Bien que ces types de plats soient réputés plus riches sur le plan nutritionnel et malgré les campagnes faites par les nutritionnistes auprès des populations, les réticences restent fortes. A l’opposé les plats à base de viande et de poulet sont considérés comme des «plats de riches».

On note les mêmes clivages à Ouagadougou en ce qui concerne la base des plats, notamment les plats à base de spaghettis ou de tubercules. Les ménages transforment les plats et leurs compositions . Quand le pouvoir d’achat diminue, les plats de spaghettis ou de tubercules sont réduits, voire supprimés pour ne laisser que le tô et le riz.

3.5 Le comportement d’achat et d’approvisionnement: Les modalités d’approvisionnement

Les modalités d’approvisionnement peuvent se classer en cinq types:

1. l’auto-production;
2. l’achat en gros ou demi-gros auprès des marchés ruraux pour le stockage;
3. l’achat en gros et demi-gros dans les marché urbains pour le stockage;
4. l’achat au détail dans les marchés et lieux fermés;
5. l’achat au détail dans la rue et auprès des marchands ambulants.
L’autoconsommation

L’autoconsommation reste encore une des modalités d’approvisionnement dans certaines villes (Ouagadougou et Cotonou) où subsistent encore des populations qui ont une activité de production agricole. A Ouagadougou les enquêtes de E. Cheyns (1996) montrent que c’est surtout le maraîchage qui fait l’objet d’autoproduction (31 pour cent). Pour les céréales seuls 5,4 pour cent des ménages affirment en avoir produit eux-mêmes7. Les dons de céréales sont plus importants (9,3 pour cent) et proviennent des villages d’origine. Le même phénomène est observé à Dakar mais concerne surtout les régions proches (50 à 60 km).

A Cotonou, l’autoproduction représente 10 pour cent des céréales et seulement 6 pour cent des tubercules et racines qui sont les denrées les plus utilisées. Le taux de viande autoproduite est de 2 pour cent et correspond à l’aviculture domestique. Au Sénégal les enquêtes disponibles n’abordent pas cette question mais il semble selon certaines informations qu’avec le recul de la ceinture verte, la production maraîchère des citadins diminue. Par contre une intense activité d’aviculture se développent dans les quartiers populaires sur les terrasses des maisons mais il n’existe aucune estimation disponible du poids de cette activité dans l’autoconsommation en viande. Il en est de même pour la production de poisson et l’on sait qu’une partie importante de la population de Dakar est constituée de pêcheurs et s’auto-approvisionne.

L’acquisition marchande

On peut distinguer par ordre de présence dans la filière de distribution des produits alimentaires les lieux d’achat suivants:

Ces différents marchés ont des fonctions distinctes, mais qui peuvent se combiner selon le produit ou la situation locale.

Les lieux d’achat n’ont pas seulement des fonctions commerciales pour les consommateurs; ils ont également des fonctions sociales. Le marché est un lieu où s’établissent des réseaux de relations, où l’on échange des informations et où l’on fait des transactions. Le marché dépasse le simple cadre d’approvisionnement en produits de consommation. C’est aussi un lieu de communication qui a trait à tous les aspects de l’existence de l’homme, de la vie matérielle à la vie spirituelle: rencontres, cosmétiques, pagnes, restauration, voyants, etc.

L’analyse des lieux d’achat peut donc se faire par type de marché et de fonctions, mais dans ce cas, la difficulté est de comparer différentes situations locales. On peut mieux analyser les choix des lieux d’achat à travers les produits recherchés et les objectifs poursuivis.

Compte tenu de la difficulté de comparer les données quantitatives disponibles, nous nous sommes limités à traduire les informations et données disponibles en appréciations qualitatives.

Le premier mode d’achat reste important à Cotonou où 17 pour cent des ménages s’approvisionnent directement dans les nombreux marchés ruraux. En général l’approvisionnement dans les marchés ruraux n’est pas systématique. C’est à l’occasion de déplacements pour des raisons sociales et professionnelles que les «gens en profitent pour s’approvisionner». Ce sont donc les achats en gros et en détail en ville qui constituent les modalités dominantes.

On note partout le peu d’achats faits dans les supermarchés modernes, mais cette observation cache des spécificités sociales: en effet certaines catégories de cadres s’approvisionnent essentiellement dans les supermarchés. Les supérettes de quartier sont également très sollicitées pour les produits de supermarché (fromage, laits, saucissons, gâteaux, boissons, etc.) qu’elles vendent en détail.

Il en est de même des boucheries modernes (Bamako, Ouagadougou et Dakar) qui offrent une viande de qualité qui est préférée par les ménages moyens et aisés pour la préparation des plats qui demandent de la viande tendre (steak, etc.). Le classification de la viande est de type occidental (gigot, steak, épaule, entrecôte, etc.) et les prix sont fixes et plus élevés (CHEYNS, 1996).

L’acquisition du poisson et de la viande est essentiellement marchande.

En ce qui concerne les produits cuisinés les choix sont plus restreints et font plus appel à des critères de prix, de qualité, de confiance et de proximité (voir le tableau 1).


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