Mangez vos légumes verts! Un nouveau livre de cuisine fait revivre d’anciennes traditions nutritives des familles maya au Guatemala. ©FAO/Jorge Rodríguez Baeza
En haut des montagnes Cuchumatanes, au Guatemala, le repas est servi dans la famille Torres. Catarina, la mère, pose une assiette remplie d’empanadas toutes chaudes – un chausson farci avec des tomates, des oignons et des légumes verts – sur la table devant ses trois filles, dont les yeux brillent avant même de les déguster.
Même si cette recette est issue d'un nouveau livre de cuisine, créé spécifiquement pour environ 2 000 familles du Triangle d'Ixil, dans la région d'El Quiché, les recettes sont basées sur des connaissances ancestrales et des cultures locales. Après 36 années de guerre civile, ces recettes, normalement transmises de mère en fille, ont été perdues et les niveaux de pauvreté et de malnutrition étaient élevés. Les aliments transformés avaient remplacé les légumes et les herbes cultivées localement.
«Quand j'étais petite je ne savais même pas que ces herbes et ces légumes que je cuisine aujourd'hui existaient», explique Catarina, qui avait 15 ans lorsque la paix a finalement été rétablie dans sa région.
Ce ne sont pas seulement les personnes qui ont souffert pendant ces longues années de conflit, c'était aussi le mode de vie des Mayas. Lorsque la paix est revenue à Ixil, les rues étaient silencieuses, les terres agricoles laissées en friche, sans fleurs ni cultures. Le dépeuplement massif, directement forcé ou imposé par nécessité, a entrainé un déficit de connaissances et un profond décalage entre les générations.
Un Programme conjoint des Nations Unies pour le développement rural intégré mené par la FAO, le PNUD et l'OPS/OMS et financé par le Gouvernement de la Suède soutient désormais des familles rurales dans la région. Dans le cadre de leurs activités, la FAO et le MAGA (Ministère de l'élevage, de l'agriculture et de l’alimentation du Guatemala) ont mis en place un programme d'éducation en matière de nutrition, afin de faire revivre les vieilles traditions culinaires à base de cultures locales nutritives. Outre le livre de cuisine sur les plats typiques de la région, le programme propose également des formations relatives à la culture des plantes indigènes ainsi que des leçons de cuisine basées sur de meilleures pratiques nutritionnelles.
«L'idée est que les familles réintègrent leurs traditions culturelles ancestrales», explique Jonás Colón, technicien nutritionniste de la FAO. «Les familles peuvent facilement adopter ces pratiques car les personnes connaissent déjà le goût des denrées alimentaires qu’elles cultivent», ajoute-t-il. En s'inscrivant dans la droite ligne des traditions et en cultivant des espèces locales, les villageois peuvent gagner du temps et économiser de l’argent car ils n’utilisent pas d’engrais ni d’insecticide.
Des repas à base de produits locaux: cuisiner des empanadas de légumes ou d’autres aliments nutritifs issus des cultures et d’ingrédients locaux. ©FAO/Luis Gustavo Sánchez et Jorge Rodríguez Baeza
Alors que les taux de pauvreté et de malnutrition sont déjà élevés dans la région d’El Quiché, ces taux sont encore plus élevés au sein de la population d'Ixil. Le taux de pauvreté de l’ensemble des familles est d’environ 87%, alors que plus des deux-tiers des enfants des municipalités de Santa Maria Nebaj, de San Juan Cotzal et de San Gaspar Chajul souffrent de malnutrition chronique et qu’ils sont, pour leur âge, moins grands que la moyenne. Et, selon les données de la FAO, ces chiffres augmentent, en partie en raison de l'inaccessibilité des villages, mais également en raison du manque d’éducation des parents d'Ixil.
En 2015, le centre de récupération nutritionnelle a accueilli 50 enfants de la région d'Ixil souffrant de dépérissement intense. À l’aide d’une méthodologie de formation mise au point par la FAO, le personnel de ce programme conjoint des Nations Unies a élaboré des menus nutritionnels spécialement conçus pour les mères.
Catarina a rejoint un groupe de 17 femmes de la communauté pour en savoir plus sur la façon de cultiver les espèces d'herbes et de plantes locales et de les intégrer dans les régimes alimentaires de leurs familles de la manière la plus nutritive possible.
Le programme d’éducation nutritionnelle a fait une énorme différence pour la famille de cette femme de 37 ans et pour la communauté dans son ensemble. Les leçons de cuisine, le renforcement des connaissances nutritionnelles et le soutien technique contribuent à réduire toutes les formes de malnutrition. Et le livre de cuisine Ixil a également contribué à faire passer le message simple que les légumes verts sont bons pour la santé.
Aujourd’hui, sur les tables de la communauté, les bettes, les chipilín (Crotalaria longirostrata), une feuille locale qui ressemble aux épinards, la courge et l’amarante foisonnent. Les poules permettent aux villageois de se procurer des œufs.
«Chaque recette est concoctée avec des produits alimentaires produits par les villageois dans leurs jardins potagers et améliore ainsi la valeur nutritionnelle des différents plats», dit Colón.
Le livre de cuisine fournit des instructions sur la façon de réaliser 16 plats et 16 boissons. Les empanadas de Catarina étaient ainsi accompagnées d’une délicieuse boisson à base d'avoine et toutes les recettes utilisent des méthodes de cuisson que tous les ménages peuvent facilement adopter.
Le programme a engendré une baisse de la malnutrition chez les enfants de la communauté. ©FAO/Luis Gustavo Sánchez
«Depuis que nous avons commencé à manger différemment, mes enfants sont beaucoup plus contents des plats que je leur concocte», explique Catarina. «Désormais, ils ne dorment plus pendant l’après-midi et ont plus d’énergie pour jouer.» C’est une convertie. «Maintenant, je veux apprendre à préparer des desserts et à semer et à cultiver de nouvelles cultures», dit-elle en souriant.
«Avec la communauté, nous faisons revivre les connaissances ancestrales de cette culture millénaire», conclut Colón. «Notre mère la Terre a béni les produits agricoles qui ont été soigneusement préparés au fil des siècles par les parents pour leurs fils et leurs filles. C’est de cette manière que nous allons renforcer les générations futures.»
En investissant dans les communautés locales et en renforçant leurs propres traditions et leurs connaissances ancestrales, la FAO renforce les communautés et nous rapproche ainsi de l’objectif global de parvenir à la Faim Zéro.
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