Gestion Durable des Forêts (GDF) Boîte à outils

Application des réglementations forestières

Le module sur l’Application des réglementations forestières s’adresse aux parties prenantes de tous les secteurs impliqués dans la gouvernance forestière, en particulier dans l’application des lois et réglementations forestières. Il fournit des informations de base et des données plus exhaustives sur les principales exigences d’une bonne application des lois et d’une gouvernance efficace, parmi lesquelles on peut citer les capacités institutionnelles, les informations, la coopération internationale et l’action judiciaire. Le module fournit aussi des liens vers des outils et études de cas qui font la promotion d’une bonne application des réglementations forestières.

Exemples de pratiques illégales dans le domaine forestier

Exemples de pratiques illégales dans le domaine forestier

Occupation illégale des forêts

  • Des familles rurales, des communautés ou de sociétés privées envahissant les forêts publiques pour les convertir à l’agriculture ou à l’élevage.
  • Des sociétés privées ou des particuliers incitant des paysans sans terre à occuper illégalement des terres boisées pour forcer les gouvernements à leur octroyer des droits fonciers et acheter leurs terres par la suite.

Exploitation illégale

  • Extraire un volume de bois supérieur à celui autorisé
  • Exploiter sans autorisation
  • Obtenir des concessions forestières grâce à des pots-de-vin
  • Reproduire les permis de coupe
  • Provoquer la mort des arbres par annélation afin de pouvoir les exploiter de manière légale 
  • Passer des contrats avec des entrepreneurs locaux pour acheter des bois abattus dans des aires protégées.
  • Exploiter des essences protégées
  • Exploiter dans des aires protégées
  • Exploiter hors des limites de la concession
  • Exploiter dans des zones interdites comme les pentes escarpées, les berges des cours d’eau et les bassins versants
  • Éliminer des arbres sousdimensionnés ou surdimensionnés des forêts publiques
  • Déclarer des volumes élevés de bois extraits des concessions forestières pour masquer le fait qu’une partie du volume déclaré est tirée de zones non autorisées hors des limites de la concession.

Transport et commerce illégaux de bois d’œuvre, et contrebande de bois

  • Transporter des billes sans autorisation
  • Transporter du bois exploité illégalement
  • Transporter du bois clandestinement
  • Exporter et importer des essences dont le commerce est interdit au titre de lois internationales comme la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction
  • Exporter et importer du bois en contrevenant aux interdictions nationales.

Établissement des prix de cession et autres procédés comptables illégaux

  • Déclarer des valeurs et volumes inférieurs à ceux réellement exportés
  • Déclarer des prix d’achat supérieurs aux cours du marché pour des intrants comme le matériel ou les services de sociétés apparentées
  • Manipuler le flux de trésorerie affecté à la dette pour transférer de l’argent à une société subsidiaire ou apparentée, en gonflant par exemple le remboursement de la dette pour éviter l’impôt sur les bénéfices
  • Sous-évaluer, sous-mesurer et mal classifier des espèces exportées ou commercialisées localement.

Transformation illégale des produits forestiers

  • Opérer sans un permis de transformation.
  • Ignorer les lois et réglementations environnementales, sociales et du travail

Les éléments suivants devraient être pris en compte dans tout système stratégique visant à améliorer l’application des réglementations.

Définition de la légalité

Définition de la légalité

Un premier pas important dans l’application efficace des réglementations forestières est de définir, à l’aide d’une approche multi-parties prenantes, en quoi consiste la légalité dans le secteur forestier. Il faudra identifier tous les éléments de la légalité forestière en tenant compte des normes internationales, des lois nationales et locales et des circonstances. La définition devrait être simple et non ambiguë. Elle devrait aussi se fonder sur des approches testées et des procédures de contrôle claires avec des rôles et responsabilités précisément définis, et laisser un minimum de pouvoirs discrétionnaires (subjectivité).

La définition de la légalité devrait identifier les exigences qui devront être satisfaites pour assurer la conformité avec les lois existantes. Les éléments principaux dans une définition de la légalité sont les suivants :

  • principes (un moyen utile de grouper les intentions des différentes lois);
  • exigences (souvent désignées sous le nom d’indicateurs);
  • vérificateurs de la conformité (documents, rapports ou activités qui démontrent la conformité avec une exigence donnée);
  • référence juridique (textes législatifs justifiant chaque exigence).

Capacité institutionnelle et ressources humaines

Capacité institutionnelle et ressources humaines

La plupart des juridictions ont plus d’une institution chargée d’appliquer les lois. Pour que soit efficace l’application des réglementations forestières, il est important de définir clairement et d’assigner les rôles et responsabilités des différentes institutions, promouvoir des liens inter-institutions aux niveaux national, régional et local, et assurer une formation et une dotation en personnel adéquates. Pour réduire les possibilités de pots-de-vin et d’autres formes de corruption, les salaires des fonctionnaires chargés de l’application de la loi devraient être proportionnels à leurs responsabilités et charge de travail. Ces fonctionnaires devraient être autorisés à conduire des recherches, interviewer des témoins et suspects, entrer dans les établissements, saisir des biens et faire des arrestations. Des procédures et codes devraient être établis pour assurer l’intégrité des fonctionnaires et de leurs départements, et  les rendre responsables de leurs décisions.

Les organisations internationales pourraient fournir une assistance dans le renforcement des capacités institutionnelles à appliquer les réglementations forestières. Ainsi l’Organisation mondiale des douanes met en œuvre le projet GAPIN pour aider les administrations douanières en Afrique à combattre le trafic illégal de la faune sauvage protégée par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES).

Information. Des informations exactes et à jour – comprenant la collecte, la vérification, l’analyse et la diffusion de données – sont indispensables à la détection, surveillance, prévention et suppression des illégalités dans le domaine forestier. Les responsables de l’application des réglementations forestières et d’autres parties prenantes, comme les communautés locales, doivent avoir connaissance de ces données sur les illégalités forestières et en mesure de les utiliser. Il a été démontré que des mécanismes indépendants, où les communautés locales (au besoin appuyées par des organisations non gouvernementales – ONG) participent à la surveillance des forêts et à la détection des illégalités, sont efficaces dans de nombreux pays (voir cas).

Coopération internationale

Coopération internationale

La coopération transfrontalière est indispensable pour assurer le bien-fondé des enquêtes et des poursuites relatives aux infractions forestières comprenant le commerce international des produits forestiers. Des organisations internationales comme l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et Interpol peuvent fournir une formation ciblée, un appui spécialisé en matière d’enquêtes et des données pertinentes et des circuits sûrs pour la communication.

Interpol facilite l’application transfrontalière des lois et aide les pays à recueillir des preuves et à localiser les transgresseurs et leurs biens. L’organisation est formée de 188 États membres dont la plupart ont établi des bureaux nationaux centraux pour  agir en qualité de points focaux pour la coopération avec Interpol et d’autres bureaux centraux nationaux. Ces bureaux agissent aussi comme centres de liaison entre les unités nationales d’application des réglementations concernant les forêts et la faune sauvage et Interpol.

Accords commerciaux et conventions internationales. Divers outils internationaux sont disponibles pour aider les pays à appliquer leurs lois. Par exemple :

  • Les accords de partenariat volontaires (APV) sont des accords commerciaux juridiquement contraignants, entre l’Union européenne (UE) et certains pays producteurs de bois hors de l’UE. Leur objectif est d’assurer que le bois et les produits ligneux exportés vers l’UE proviennent de sources légales. En mars 2014, six pays avaient signé des accords volontaires de partenariat avec l’UE et élaboraient les systèmes nécessaires pour contrôler, vérifier et autoriser le bois légal. Neuf autres pays avaient entamé des négociations avec l’UE d’un accord de partenariat volontaire.
  • La CITES est le principal instrument international de contrôle, dont l’objectif est de contrôler et régulariser le commerce international d’espèces protégées, et d’assurer que le commerce international de ces espèces ne menace pas leur survie.

Action judiciaire

Action judiciaire

L’application réussie des réglementations forestières exige un système judiciaire performant où des décisions impartiales et transparentes sont prises, et les transgresseurs condamnés à des peines justes. Les sanctions devraient être suffisantes pour encourager la conformité avec la loi. L’action judiciaire est souvent l’aspect le plus faible de l’application des réglementations forestières. En effet, l’importance des questions environnementales est peu prise en compte par les juges et le système judiciaire en général.

Des mesures peuvent être prises pour assurer que le système judiciaire favorise l’application des réglementations forestières. Par exemple, LAGA, au Cameroun, et Conservation Justice, au Gabon, organisent des enquêtes sur l’illégalité forestière en collaboration étroite avec leurs gouvernements. Ces organisations aident à collecter les informations nécessaires pour arrêter les trafiquants de produits forestiers illégaux, et présenter des preuves concrètes aux tribunaux.

Participation publique. Les gouvernements ont peu de chances d’être efficaces s’ils tentent d’appliquer les réglementations forestières sans la participation d’autres parties prenantes. Les ONG indépendantes peuvent agir en qualité de surveillants, souvent en collaboration étroite avec les médias, et jouent souvent un rôle utile dans l’identification d’activités illégales et l’assurance que des mesures correctives sont prises. Les communautés locales et le grand public devraient participer aussi à la lutte contre les crimes forestiers.