La conservation dynamique des SIPAM passe par une Appropriation du programme par tous les acteurs
Les 02-04 octobre 2024 : Les représentants des sites SIPAM déjà reconnus et des sites potentiels en Afrique du Nord et en Espagne se sont réunis à Alicante, du 02 au 04 octobre 2024 dans le cadre d’un atelier de « Rencontres méditerranéennes sur les Systèmes ingénieux du patrimoine agricole mondial ». Cet événement organisé en partenariat avec l’Espagne, avec la participation du bureau sous-régional de la FAO pour l’Afrique du Nord, du Secrétariat SIPAM de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), de l'Union pour la Méditerranée (UpM) et de l'Agence Espagnole de Coopération Internationale pour le Développement (AECID) a constitué une étape marquante.
La lancement du programme des SIPAM, « Systèmes Ingénieux Patrimoine Agricole Mondial » par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), remonte à 2002. Aujourd’hui, les chiffres reflètent la croissance florissante de cette initiative, avec un total de 89 SIPAM dans 28 pays. Les sites reconnus se répartissent comme suit : - 3 sites en Afrique ; - 11 sites pour l’Europe et l’Asie centrale. 7 sites pour l’Amérique latine et les Caraïbes, 59 pour l’Asie et le Pacifique. Enfin, 9 sites pour la région NENA et l’Afrique du Nord.
L'Afrique du Nord, un espace de mixage d'expériences, d'identification des bonnes pratiques et de similarités porteuses de synergies avec l’Espagne.
Les travaux de cet atelier ont été marqués par une richesse d'échanges et de visites sur le terrain qui ont permis de sensibiliser les différents partenaires. L’Afrique du Nord a exposé les bonnes pratiques et réussites à la suite de cette reconnaissance SIPAM. En Tunisie, l’Oasis historique de Gafsa, qui a fait partie des sites pionniers reconnus comme SIPAM, a partagé son expérience de participation citoyenne et d’engagement communautaire et institutionnel. Le représentant a évoqué une forme de conservation dynamique en action et souligné le crédit reconnu dans la gestion des projets, ce qui confère une crédibilité pour la mobilisation des ressources. Un autre site, celui des jardins de Djebba el Olia, a exposé la diversité biologique considérable avec ses espèces animales et végétales spontanées et domestiques, niches spécifiques et refuges pour diverses espèces. Les savoir-faire sont transmis aux jeunes et aux femmes, qui sont associées aux activités agricoles telles que le travail des champs, les plantations, la caprification, la cueillette, le séchage et la transformation. Certains agriculteurs préservent encore leurs semences locales endémiques. Enfin, le site des systèmes culturaux El Ramli dans la lagune de Ghar El melah a investi dans la sensibilisation des agro-pêcheurs quant à l’importance de cette certification / reconnaissance, grâce à des réunions et des séminaires. Il a procédé à une expertise minutieuse sur le savoir-faire ancestral de cette agriculture unique et spécifique, qui permet à plusieurs familles de subvenir à leurs besoins et de générer des revenus.
L’Algérie affirme que la reconnaissance du site oasien du Ghout d’El Oued a marqué un tournant pour ce système. Cette reconnaissance a en effet donné une visibilité internationale aux pratiques agricoles oasiennes et a attiré l’attention sur la nécessité de les préserver. Cela a également encouragé l'Algérie à prendre des mesures pour valoriser et soutenir les Ghouts. Mieux encore, grâce à la réintroduction de certaines variétés végétales et animales locales et à la création de nouveaux Ghouts par les agriculteurs en autofinancement (134 nouveaux Ghouts), la revitalisation des pratiques agricoles diversifiées a été réalisée. La limitation de l’urbanisation incontrôlée, la restauration des jardins traditionnels et la promotion de pratiques agricoles durables adaptées aux conditions sahariennes ont été soutenues par la mise en place de programmes de protection nationaux et régionaux (arrêté du Wali pour protéger les Ghouts). Enfin, cinq associations ont été créées afin de poursuivre le programme de sensibilisation, en favorisant la transmission des savoirs traditionnels et en encourageant une gestion participative des ressources naturelles. Les associations locales s’intéressent de plus en plus à la préservation du système Ghout. Elles militent pour la diversification économique au sein des Ghouts, comme l'introduction de l'agrotourisme (trois projets sont en attente d'un financement).
Le Maroc a présenté le site des Oasis froides d’Imilchil/Amellago, qui connaît depuis sa reconnaissance une appropriation par les acteurs locaux, notamment par l’Association Akhyam pour le Développement. Celle-ci motive et soutient les coopératives de jeunes, de femmes et d’agriculteurs. Autre site, les ksours de Figuig, constitués de cultures oasiennes et pastorales, autour de la gestion sociale de l'eau et des terres, ont vu la mise en place d’un plan de gestion garantissant l'utilisation durable de ces ressources fragiles à travers une amélioration de la résilience, une conservation et gestion des ressources naturelles, une conservation et gestion des ressources patrimoniales, une amélioration du cadre de vie de la population et la sécurisation des services et des activités socio-économiques de la zone. La requalification des savoir-faire traditionnels et la revitalisation des ressources oasiennes, culturelles et techniques, le savoir-faire ancestral étant la passerelle entre les deux entités (oasienne et pastorale), permettent ainsi la diversification des revenus de la population par la promotion du tourisme. Enfin, le système agro-sylvo-pastoral de l’arganier dans l’espace Ait Souab-Ait Mansour a reçu une attention particulière et des fonds considérables ont été investis dans son expansion dans le cadre de projets intégrés impliquant plusieurs acteurs. Il a accueilli de nombreuses visites de délégations ministérielles, dont la dernière en mars 2024 du Chef du Gouvernement, du ministre de l’Agriculture et de plusieurs ministres de différents secteurs.
La coopération et l’institutionnalisation des SIPAM à travers la Méditerranée, seuls garants pour relever les défis communs
Les défis soulevés lors des échanges ont souligné plusieurs pistes pour soutenir une conservation dynamique des SIPAM en Méditerranée. Il a été exprimé que le renforcement des capacités nationales en Afrique du Nord était une priorité. Les expériences et les visites sur le terrain dans la région d’Alicante ont démontré la richesse et les similitudes de ces patrimoines agricoles, identifiés par les SIPAM des deux rives. La particularité des expériences présentées a révélé des pistes qui ont mis en avant l’importance de la diversité des intervenants. À titre d'exemple, le rôle du secteur privé a été mis en avant à travers la présentation du site de la vallée salée d'Añana, dans la province d'Alava, au Pays basque, en Espagne. L’importance du réseautage pour soutenir les activités et les perspectives de promotion des produits SIPAM a été illustrée à travers la présentation du projet européen VALSIPAM géré par le gouvernement local d’Andalousie. Le rôle de la recherche scientifique est également mis en avant, à travers la participation de l’Université polytechnique de Valence, qui a précisé comment l’approche SIPAM donne de la visibilité aux communautés rurales et offre une reconnaissance territoriale du patrimoine agricole. Cela permet d’améliorer la valeur des biens et des services fournis par les communautés rurales. Le tourisme durable et son potentiel pour valoriser les produits des SIPAM a été souligné par la responsable de la Mancomunitat Taula del Sénia.
Si les défis et les difficultés entre les SIPAM méditerranéens ont des points communs, les leviers et solutions ont également une racine commune. Concernant l’implication et la collaboration des différentes parties prenantes, l’accent a été mis sur l’importance de l’institutionnalisation des sites SIPAM pour une meilleure prise en charge de la mise en œuvre des plans d’actions nationaux. À cet égard, les participants ont unanimement souligné l'importance d'intensifier les efforts de sensibilisation et d'améliorer l'appropriation du programme par toutes les parties prenantes. Un cadre institutionnel adapté et favorable aux SIPAM est essentiel pour assurer leur pérennité et les positionner en tant qu'exemples de développement durable, grâce à la préservation des systèmes agricoles traditionnels. Dans cette perspective, la formation et le renforcement d'un réseau d'échange d'expériences entre les différents SIPAM du monde, ainsi qu'entre les pays membres, représentent une étape cruciale pour progresser et amorcer une coopération à long terme. Les SIPAM ont été présentés comme des écosystèmes d'éco-innovations sociales et technologiques liées à la fourniture de services alimentaires et environnementaux. Ils représentent un modèle de système alimentaire capable de relever les défis des Objectifs de Développement Durable, dans l’intérêt des communautés agricoles, des sociétés et du patrimoine agricole ancestral.
Contacts
Faten Aouadi – Communication Officer – FAO Afrique du Nord
GSM : 00 216 98 703 026
Mohamed ElHady Sidatt – Expert protection et production des plantes et végétaux – FAO Afrique du Nord
Mail : [email protected]
Aurélie Fernandez – Chargée de programme SIPAM – FAO
Mail : [email protected]