Gestion Durable des Forêts (GDF) Boîte à outils

Les forêts et l’eau

Le module sur les forêts et l’eau souligne l’importance de la relation entre les forêts et l’eau et le rôle de l’eau dans différentes fonctions des forêts. Il présente des orientations générales sur les priorités de la gestion de l’eau dans les forêts, ainsi que des conseils plus détaillés sur des questions spécifiques concernant la gestion de l’eau, comme celles relatives aux forêts marécageuses, aux forêts sur des sols pouvant devenir salins, aux zones tampons riveraines et aux étangs vernaux.

Le module fournit aussi des liens vers des outils et études de cas clés sur la gestion efficace de l’eau dans les forêts.

Objectifs généraux de la gestion de l’eau en forêt

La GDF exige la prise en compte de l’importance de l’eau dans les différentes fonctions des forêts. Parmi les objectifs importants de la gestion de l’eau en forêt figurent les suivants:

  • le maintien de la hauteur idéale de l’eau souterraine (c’est-à dire l’eau dans les sols saturés dont la surface correspond au niveau de la nappe phréatique) pour créer des conditions (de croissance) stables pour les arbres;
  • la garantie que la quantité et la qualité de l’eau sont maintenues ou améliorées;
  • la protection des ressources naturelles et des infrastructures créées par l’homme contre les  dommages causés par l’eau;
  • le maintien ou l’amélioration des conditions permettant le repos et les loisirs en forêt.

Déterminer les ressources et besoins en eau des forêts

Déterminer les ressources et besoins en eau des forêts

Les activités visant à améliorer ou maintenir les ressources en eau dans une forêt donnée devraient se fonder sur l’identification au préalable des besoins en eau en fonction d’objectifs spécifiques de gestion forestière (en tenant compte des besoins en eau de toutes les fonctions des forêts). Des indicateurs hydriques devraient fournir des informations sur l’état général des ressources en eau forestières pour un site donné. Ces indicateurs pourraient inclure :

  • la mesure des masses d’eau (étendue de la côte et profondeur de l’eau stagnante, débits et niveaux de l’eau des cours d’eau) ;
  • la hauteur de la nappe phréatique ;
  • le volume des précipitations. 

Ces indicateurs pourraient fluctuer en fonction des saisons et d’une année sur l’autre. Une période fiable permettant d’observer les tendances à long terme est de l’ordre de 8 à 10 ans.

Régulation des débits des cours d’eau

Régulation des débits des cours d’eau

En règle générale, les forêts restituent moins d’eau aux sols que les herbages ou les terres cultivées à cause de leur contribution plus importante à l’humidité atmosphérique par le biais de l’évapotranspiration. L’infiltration et la rétention de l’eau sont encouragées dans les sols forestiers par des systèmes radiculaires denses et profonds et une couche organique superficielle épaisse et poreuse. Le ruissellement de surface est donc minimal dans les forêts et l’alimentation de la nappe souterraine est efficace, ce qui conduit à des débits plus abondants des cours d’eau au fil du temps par rapport à toute autre type de couverture du sol. Pour soutenir cette fonction régulatrice des forêts, les gestionnaires forestiers devraient viser à maintenir un couvert végétal permanent, limiter le compactage des sols, maintenir une grande quantité de matière organique dans le sol et augmenter la « rugosité de la surface» (c’est-à-dire l’irrégularité de la surface du sol qui favorise l’infiltration de l’eau).

Qualité de l’eau

Qualité de l’eau

Pour améliorer ou conserver une bonne qualité de l’eau dans une zone forestière, il est important de réduire au minimum l’érosion du sol et la sédimentation dans les masses d’eau en filtrant les polluants de l’eau dans la litière forestière et le sous-bois. Un bon couvert forestier avec un sous-bois sain est la couverture du sol la plus efficace pour minimiser l’accumulation de sédiments dans les cours d’eau. Du fait que la plupart des activités forestières n’exigent pas d’engrais ni de pesticides, les forêts sont vitales pour l’approvisionnement en eau potable et eau d’irrigation sûres. Si la forêt est exploitée, la production de sédiments (provenant des routes, des zones de stockage des grumes, des pistes de débardage et du compactage du sol) et la pollution chimique devraient être réduites au minimum par de bonnes pratiques forestières.

Protection contre les inondations

Protection contre les inondations

Les sols forestiers agissent comme des éponges et retiennent l’eau plus longtemps que les sols soumis à d’autres utilisations. L’élimination des arbres et des forêts augmente donc l’évacuation de l’eau et le risque d’inondations pendant la saison des pluies et de sécheresse lors des saisons sèches. Le reboisement et le boisement ont un effet inverse sur la quantité de l’eau. Dans le cas de précipitations plus intenses, à plus grande échelle et d’une plus longue durée, la fonction protectrice du couvert forestier contre les inondations est moins significative. Cette fonction de protection est plus importante dans le cas de  précipitations à plus petite échelle, de courte durée et à faible impact, et il faut en tenir compte dans la planification des activités de gestion des forêts. Si la gestion a pour objectif d’augmenter les rendements en eau dans une zone boisée grâce à l’élimination des arbres, les effets potentiellement négatifs sur la qualité de l’eau, le risque de glissement de terrain, la protection contre les avalanches et la biodiversité devront être pris en considération.

Protection du sol

Protection du sol

Les forêts jouent un rôle efficace dans la réduction de l’érosion superficielle pour une série de raisons ; ainsi, leur couvert, sous-bois, litière et autres débris forestiers réduisent l’impact des gouttes de pluie sur les sols nus, leurs sols poreux favorisent l’infiltration réduisant par là même les écoulements d’eau superficiels et leurs systèmes racinaires unissent les particules de sol. Les forêts peuvent aussi contribuer à stabiliser les pentes et à les protéger contre les glissements superficiels. Les zones sensibles aux glissements de terrain devraient rester boisées (ou maintenues en tant que terres boisées ou systèmes agroforestiers/sylvopastoraux avec de fortes densités d’arbres) pour réduire la fréquence et la gravité des glissements de terrain superficiels, et les activités d’exploitation forestière dans ces zones devraient être limitées et non mécanisées. Il convient de noter que même si les forêts peuvent jouer un rôle important dans la stabilisation  des sols, il existe des cas et des sites où elles ne pourront interdire ou atténuer les glissements de terrain d’orignie tectoniques. 

Forêts tropicales humides de montagne

Forêts tropicales humides de montagne

Les forêts de montagne sont étroitement liées à l’eau douce : elles recueillent l’eau provenant non seulement des précipitations verticales normales (pluie et neige) mais aussi en absorbant l’eau des brouillards et des nuages qui se déplacent horizontalement à travers elles. Les forêts tropicales humides de montagne (appelées parfois forêts de brouillard ou forêt de nuage) sont donc très importantes pour la production d’eau. Les arbres peuvent être plantés de manière stratégique dans des sites plus nuageux ou de brouillard pour maximiser l’absorption d’eau. Les forêts de nuage sont caractérisées par des liens complexes avec la flore, la faune et les sols et leur perte est irréversible. Étant donné leur importance dans la production d’eau et la conservation de la biodiversité, et leur inaptitude générale à remplir d’autres fonctions (en raison, par exemple, délimitations liées à la nature des sols et du climat souvent peu favorable à l’agriculture), les forêts de nuage devraient être protégées et identifiées dans les inventaires nationaux.

Forêts marécageuses

Forêts marécageuses

Les forêts marécageuses sont des zones écologiquement fragiles dans lesquelles le maintien de l’intégrité hydrologique devrait être une priorité de gestion. Elles sont des sources importantes de produits alimentaires aquatiques, de bois d’œuvre et de bois de feu et jouent un rôle fondamental dans le maintien de la quantité et de la qualité de l’eau. Les forêts marécageuses continentales rendent des services précieux dans la protection des bassins versants tandis que les forêts marécageuses côtières offrent une protection contre les raz-de-marée, l’élévation du niveau de la mer et les catastrophes naturelles telles que les tsunamis. 

Forêts sur des sols exposés à la salinité

Forêts sur des sols exposés à la salinité

La déforestation devrait être évitée dans les zones boisées ayant des sous-sols ou des eaux souterraines salines. Grâce à leur utilisation de l’eau de pluie et de l’eau souterraine, les forêts et les arbres aident à éviter la montée des nappes phréatiques en  équilibrant la recharge (le mouvement descendant de l’eau à travers un profil de sol jusqu’à une nappe phréatique) et la décharge (la perte d’eau d’une nappe phréatique). La perte des arbres et des forêts risque d’altérer cet équilibre de manière telle que le niveau de la nappe phréatique s’élève, ce qui aura pour effet de dissoudre les sels emmagasinés dans le sol et les apporter à la surface où ils peuvent nuire gravement à la croissance des plantes.

Dans les zones déjà salinisées, le reboisement avec des essences à croissance rapide – en particulier dans les zones de recharge de l’eau souterraine (comme au sommet ou au milieu des pentes) – peut contribuer à réduire la recharge et augmenter la décharge réduisant ainsi la salinisation des sols (voir Restauration et remise en état des forêts).

Zones tampons le long des cours d’eau

Zones tampons le long des cours d’eau

Les arbres sur les rives de lacs et le long des cours d’eau ont des fonctions importantes de protection de l’eau. Les profonds systèmes racinaires de ces arbres stabilisent les berges des rivières et des lacs, les protégeant contre l’érosion et les apports de sédiments et de polluants tout en fournissant un habitat à la faune aquatique et terrestre. Pour être efficaces, les zones tampons riveraines devraient mesurer au moins 30 m de large – voire même davantage si les pentes sont escarpées ou lorsque les masses d’eau côtoient des terrains agricoles. Ces zones ne sont pas normalement exploitées pour le bois et leur gestion devrait viser à minimiser leurs perturbations. Les zones tampons riveraines dégradées devraient être restaurées pour assurer la bonne qualité de l’eau (voir outils et cas).

Étangs vernaux

Étangs vernaux

Les étangs forestiers vernaux sont de petites mares éphémères qui ont des cycles annuels de remplissage et de vidange. Ils jouent un rôle crucial dans la conservation de la biodiversité des amphibiens, et leur perturbation et dégradation devraient être évitées. Une zone  tampon formée de deux bandes – où la perturbation est minimisée -  est recommandée pour protéger les étangs vernaux. Le tampon intérieur devrait consister en la zone inondée plus un tampon de 15 m où l’exploitation forestière est interdite. Le tampon extérieur (de 15 m aussi) devrait être soumis à une exploitation ou une modification limitées car la présence de végétation  forestière dans cette zone ralentit l’assèchement des étangs et étend l’aire d’alimentation de la faune amphibie sauvage. Les étangs vernaux peuvent être difficiles à détecter lorsqu’ils sont vides (pendant la saison sèche, par exemple) mais leur aspect en forme de coupe, l’absence de végétation et une couche organique plus épaisse que la normale peuvent être de bons indicateurs.

Forêts de protection contre les avalanches

Forêts de protection contre les avalanches

Les forêts peuvent influencer fortement la formation d’avalanches. Les arbres dont la hauteur est d’au moins le double de la profondeur de la neige peuvent éviter le déclenchement des avalanches, mais les arbres plus courts qui sont entièrement recouverts de neige risquent de les provoquer (par le mouvement élastique de leurs branches). Les forêts occupant des pentes de plus de 58 pour cent dans des zones où les apports neigeux sont suffisants pour déclencher des avalanches sont des forêts de protection potentielle contre les avalanches. La gestion de ces forêts est complexe et devrait être guidée par des conseils d’experts.

Paiements pour les services environnementaux liés à l’eau

Paiements pour les services environnementaux liés à l’eau

Les propriétaires de forêts pourraient obtenir des rémunérations des habitants et industries en aval pour le service qu’ils fournissent en protégeant les bassins versants. Il s’agit là d’un potentiel « paiement pour services environnementaux » , un concept qui gagne en intérêt au niveau international et dans certains pays et villes. Voir gestion des bassins versants pour plus d’informations sur les systèmes de paiements pour services environnementaux liés à l’eau.

Plus de lignes directrices sur le thème des forêts et de l’eau sont disponibles dans outils et cas.