L’environnement naturel des forêts de montagne
Dans les forêts de montagne, les conditions peuvent varier considérablement sur de courtes distances. Ainsi, un flanc de montagne peut être sec et chaud et, 100 m plus loin, devenir froid et humide. Comprendre l’environnement naturel des forêts de montagne aide à prendre des décisions de gestion judicieuses. Les forêts de montagne se caractérisent par des gradients altitudinaux: du pied d’une montagne à son sommet, la température décroît, les précipitations – sous forme de pluie, brouillard et neige – augmentent, les sols deviennent moins profonds et le rayonnement solaire devient plus intense. Les précipitations s’intensifient avec l’altitude parce que l’air humide qui arrive au pied d’une montagne est forcé à s’élever et se condenser. En outre, l’évaporation diminue aussi avec l’altitude de sorte que les précipitations tombant sous forme de neige s’accumulent et deviennent disponibles au besoin. Les infrastructures, comme les chemins forestiers, devraient être tracés de manière à affronter les écoulements abondants (c’est-à-dire que des systèmes de drainage efficaces sont nécessaires).
Les sols forestiers se développent plus lentement en montagne qu’ailleurs à cause du climat plus froid (et, partant, du faible taux de croissance de la végétation) et de l’érosion continue. Les grandes opérations de coupe rase dans les forêts de montagne devraient être évitées, car elles risquent d’entraîner des niveaux élevés d’érosion lors d’événements de pluie extrêmes et la perte généralisée des semis en voie de régénération du fait que les grands espaces ouverts sont plus sujets à la dessication. L’altitude et l’exposition sont des facteurs déterminants de la composition des espèces, de la structure du peuplement et de la croissance et de la forme des arbres dans les forêts de montagne.
La croissance des forêts est normalement plus lente dans les montagnes que dans les plaines à cause du climat plus âpre, des saisons de végétation plus courtes et des sols moins profonds. La composition et la croissance des espèces diffèrent entre les pentes exposées au soleil (préférées par les espèces tolérant des sols plus secs et un rayonnement solaire plus élevé) et celles à l’ombre (où l’humidité du sol est plus élevée mais l’exposition au soleil plus faible). En montagne, les forestiers devraient tenir compte de ces différences de croissance et de composition en espèces dans leur planification sylvicole. L’altitude de la limite climatique des arbres – au-delà de laquelle les arbres ne poussent pas en quantités significatives – varie considérablement, en fonction de la latitude et du climat. Par exemple, la limite passe de 700 m ou moins dans le grand nord à plus de 4 500 m dans certaines parties des Andes subtropicales. Les écosystèmes à la limite climatique des arbres présentent souvent une faible valeur économique, mais ils peuvent néanmoins jouer des rôles environnementaux importants, en fournissant par exemple des habitats pour des espèces endémiques et en contribuant à l’approvisionnement en eau. De ce fait, ces écosystèmes peuvent exiger une gestion et des mesures de protection spéciales.
Les services environnementaux des forêts de montagne
Les services environnementaux des forêts de montagne
La gestion durable des forêts de montagne devrait soutenir et améliorer la capacité de ces forêts à fournir des services environnementaux. Il est important de quantifier de tels services si les propriétaires fonciers et les communautés locales veulent être récompensés pour leur prestation. Les services environnementaux peuvent être classés en services de production, de régulation et de soutien ou culturels.
Services de production. Les forêts de montagne peuvent fournir du bois pour la construction de bâtiments et d’autres infrastructures, du bois de feu et des produits forestiers non ligneux (PFNL) comme des aliments (gibier, champignons et baies, par exemple) et des médicaments, ainsi que des pâturages pour le bétail.
Services de régulation et de soutien. Les forêts de montagne fournissent des services importants en retenant le sol et réduisant les avalanches et les éboulements. Les forêts de montagne (les forêts de brouillard, en particulier) ont une grande capacité de rétention d’eau: elles interceptent et stockent l’eau de pluie et l’eau contenue dans le brouillard et la neige, puis la libèrent progressivement, contribuant ainsi à maintenir les débits en aval, et ce, à grande échelle. Ainsi, les forêts de montagne réduisent les débits de pointe vers les cours d’eau, limitent l’érosion du sol et atténuent les impacts des avalanches et des inondations en aval. Ces forêts sont aussi d’importants puits de carbone; leur capacité à constamment piéger le carbone est un élément fondamental de l’atténuation du changement climatique. En raison de leur isolement réciproque relatif et de leurs climats contrastants, les forêts de montagne ont un endémisme accentué. Un grand nombre d’entre elles sont des points chauds mondiaux de biodiversité qui procurent des avantages aux plans du tourisme, de la récréation, de la chasse et de la pêche.
Services culturels
Services culturels
Les forêts de montagne ont des valeurs spirituelles et esthétiques intrinsèques. Elles fournissent des occasions de loisir au monde entier, et les coutumes et croyances de nombreuses communautés montagnardes sont étroitement liées aux écosystèmes forestiers (voir aussi Autres références).
Les forêts de montagne sont souvent des «forêts de protection»
Les forêts de montagne sont souvent des «forêts de protection»
Les mouvements de masse, qu'il s'agisse de rochers, de sol, d’eau, de neige ou de glace, sur les pentes des montagnes peuvent représenter un danger pour les vies humaines et les infrastructures. Dans ces conditions, les forêts de montagne peuvent avoir une importante fonction de protection; elles protègent les biens (comme les établissements humains ou les routes) situés en contrebas contre les catastrophes naturelles comme les éboulements, les avalanches, les inondations et les glissements de terrain. Pour préserver leur fonction de protection, il faut gérer ces forêts de façon à renforcer au maximum leur stabilité et leur intégrité. Les interventions humaines devraient être réduites au minimum pour permettre le développement harmonieux des peuplements naturels avec leurs propres structures, composition des espèces végétales, litière et niches écologiques. Les objectifs de gestion des forêts de protection peuvent consister à obtenir une composition variée en espèces, une régénération naturelle suffisante et une structure forestière optimale. Des interventions sylvicoles ou techniques comme le maintien des grandes souches, la plantation, la coupe de régénération et la mise en place de mesures de stabilisation pour contrer les avalanches ou les éboulements pourraient être nécessaires.
La récolte du bois dans les forêts de montagne a ses limites
La récolte du bois dans les forêts de montagne a ses limites
La fréquence des récoltes et les volumes de bois prélevés doivent être adaptés à la productivité plus faible des forêts de montagne. Dans la plupart des cas, la récolte du bois devrait être interdite sur les flancs de montagnes dont la pente est supérieure à 30 degrés. Sur les pentes de moins de 30 degrés, la récolte peut être entreprise à l’aide de méthodes manuelles ou mécanisées lorsque cela est jugé approprié. Les méthodes d’extraction des billes devraient viser à réduire les impacts sur les sols et sur les autres ressources forestières. Selon les conditions environnementales, la disponibilité de main-d’œuvre qualifiée et certaines considérations économiques, l’extraction des biles peut être réalisée par des moyens manuels de débusquage en descente, par des animaux ou encore par des débusqueuses ou tracteurs (avec ou sans treuils). Dans certains cas, les arbres coupés sur des pentes supérieures à 30 degrés pourraient être extraits à l’aide de transbordeurs sur câble (en descente ou en montée) ou d’hélicoptères. En règle générale, le débusquage des billes devrait se faire en montée, car cela est moins préjudiciable à l'environnement que le débusquage en descente.
La coupe rase devrait se limiter à de petites zones car, à grande échelle, elle peut provoquer l’érosion du sol et entraver la régénération forestière. Les solutions de remplacement à la coupe rase à grande échelle comprennent la coupe rase d’une mosaïque de petites zones, la coupe par bandes et l’extraction d’arbres individuels. Les zones tampons devraient être respectées, et les arbres semenciers, les résidus forestiers et les grandes souches conservés. Des mesures devraient être prises pour minimiser le risque intrinsèquement élevé d’accidents pour les bûcherons pendant les opérations d’exploitation dans les montagnes (voir aussi le module L’exploitation du bois).
Les produits forestiers non ligneux et les pâturages en forêt
Les produits forestiers non ligneux et les pâturages en forêt
La récolte de PFNL comme les feuilles, les fruits, les champignons, le gibier, les insectes et le miel, ainsi que l’utilisation des pâturages en forêt pour le bétail peuvent contribuer à améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition et assurer un revenu aux communautés forestières. Les PFNL pourraient s’avérer particulièrement importants pour les moyens d’existence locaux dans les forêts de montagne où la récolte du bois est limitée par le relief accidenté. Cependant, la récolte exagérée des PFNL et le surpâturage par le bétail peuvent mener à la dégradation des forêts, réduire leur capacité de régénération, augmenter l’érosion du sol et réduire la biodiversité.
La régénération des forêts de montagne
La régénération des forêts de montagne
Les semis et les peuplements jeunes dans les zones montagneuses ont souvent besoin de mesures de protection spéciales contre certains phénomènes comme la neige et l’érosion du sol (voir L’exploitation du bois).
Adaptation au changement climatique
Adaptation au changement climatique
Les montagnes sont des systèmes d’alerte rapide des changements du climat mondial, comme le réchauffement de la planète. Les augmentations de température peuvent causer le déplacement des écosystèmes et espèces forestiers vers des altitudes plus élevées; en outre, la présence de ravageurs forestiers adaptés aux températures plus élevées peut aussi s’intensifier aux altitudes supérieures, endommageant des peuplements forestiers auparavant épargnés. La gestion des écosystèmes forestiers de montagne dans un climat en évolution signifie soutenir leur capacité naturelle à s’adapter au changement en encourageant une nouvelle composition des espèces indigènes, des structures différentes des forêts et la régénération naturelle. Les grandes opérations de coupe rase, les monocultures et les peuplements forestiers équiennes devraient être évités (voir aussi Le changement climatique: adaptation et atténuation).
Des directives détaillées et des conseils relatifs aux forêts de montagne figurent dans les sections Outils et Cas.