La voie à suivre pour parvenir à une agriculture et des systèmes alimentaires plus durables

Lorsque les États Membres de l’Organisation des Nations Unies ont adopté à l’unanimité les 17 Objectifs de développement durable (ODD), en 2015, il se sont engagés à instaurer un avenir pacifique, viable et prospère pour les hommes et pour la planète.

Dans le cadre de cet engagement, l’alimentation et l’agriculture ont un rôle fondamental à jouer. Pour rendre notre agriculture et nos systèmes alimentaires plus productifs et plus durables, nous devons adopter des approches intégrées qui permettent de trouver des solutions efficaces et durables. L’agroécologie est l’une de ces approches. 

L’approche agroécologique pour l’instauration d’une agriculture et de systèmes alimentaires durables privilégie l’utilisation des processus naturels, limite le recours à des intrants externes, favorise les cycles fermés ayant des externalités négatives minimales, met en valeur les connaissances locales et les processus participatifs qui permettent d’élaborer des savoirs et des pratiques à partir de l’expérience, ainsi que les méthodes scientifiques. En outre, elle prend en compte la nécessité de lutter contre les inégalités sociales.

Une approche intégrée

Dans la perspective agroécologique, la performance de l’agriculture ne se mesure pas exclusivement à l’aide des indicateurs que sont les rendements par hectare, la production de lait par vache ou le revenu par exploitation. L’agroécologie envisage plutôt les choses dans une perspective plus large, qui prend en compte la conservation et le renforcement des processus biologiques et écologiques dans la production agricole. 

De plus en plus d’éléments indiquent que les approches agroécologiques ont des effets positifs, en particulier sur l’environnement, la biodiversité et les revenus des ménages. Toutefois, ces éléments sont tirés d’études de cas, de l’expérience locale ou d’observations sur le terrain dont les résultats manquent de cohésion du fait de la diversité des méthodes de collecte de données et de calcul.

Afin de tirer pleinement parti des possibilités qu’offre l’agroécologie en matière de transformation, il est impératif de trouver des moyens d’évaluer ses résultats de manière précise et fiable.

Un outil innovant au service de l’agroécologie

La FAO, en collaboration avec des universités, des instituts de recherche et la société civile, a élaboré un Outil pour l’évaluation de la performance de l’agroécologie (TAPE), qui a été conçu pour faciliter la transition vers l’agroécologie, à différentes échelles et dans différents lieux, dans le cadre de processus d’élaboration de politiques éclairées. 

L’outil permet de regrouper les informations sur les effets des approches agroécologiques et fournit un cadre d’orientation pour examiner les possibilités en matière de politiques agroécologiques, afin d’aider les responsables de l’élaboration des politiques à évaluer les effets multidimensionnels des systèmes de production agroécologiques.

Il comporte toute une gamme de fonctionnalités nouvelles, notamment:

• des processus de prise de décision participatifs et récurrents;
• un cadre analytique en plusieurs étapes, qui comprend une étape de validation participative par la communauté; 
• la possibilité d’évaluer les résultats de l’agroécologie à différentes échelles, dans différents lieux et à différents moments;
• le renvoi à un contexte plus large et à des éléments relatifs aux politiques, afin de corréler les données détaillées obtenues au niveau de l’exploitation à des données plus générales qui concernent le territoire;
• l’utilisation d’un logiciel en accès libre pour la collecte de données (KoBo Toolbox).

L’outil a été conçu pour faciliter les diagnostics des systèmes de production, aussi bien dans leurs dimensions environnementale, socioculturelle, économique, sanitaire et nutritionnelle qu’en ce qui concerne leur gouvernance, dans divers contextes (systèmes de production, communautés, territoires, zones agroécologiques, etc.)

Il peut donc contribuer à l’élaboration de projets visant à rassembler des éléments factuels et à réunir des données sur l’agriculture durable et le rôle spécifique des approches agroécologiques. Il peut également être utilisé pour déterminer dans quelle mesure les efforts menés actuellement pour évaluer l’agroécologie contribuent à la constitution d’un ensemble d’éléments factuels harmonisés et pertinents, au niveau mondial.

En outre, l’outil permet d’évaluer tous les types de systèmes de production et tous les sous-secteurs de l’agriculture: culture, élevage, aquaculture, pêche et forêts. Enfin, il est possible de l’adapter complètement aux contextes locaux et aux langues locales.

Comment fonctionne l’outil?

Grâce à un processus par étapes simple et à la portée de tous, TAPE permet de collecter et d’analyser des données multidimensionnelles, à l’aide d’un outil de collecte de données en ligne mis à la disposition du public, KoBo Toolbox. On peut accéder librement à cette plateforme gratuite avec n’importe quel navigateur ou dispositif et celle-ci propose des fonctionnalités en ligne et également hors connexion.

ÉTAPE 0: Le processus consiste tout d’abord à rassembler toutes les informations pertinentes liées au contexte (l’unité de mesure de base est l’exploitation ou le ménage), notamment description des systèmes de production, des écosystèmes agricoles, et plus largement, des éléments favorables ou défavorables présents dans l’environnement de production.

ÉTAPE 1: Les 10 éléments de l’agroécologie, une composante essentielle de TAPE, permettent d’établir un diagnostic de la situation agroécologique. Le diagnostic aide à recenser les points forts (une grande diversité de cultures et d’animaux d’élevage ou des liens étroits avec les marchés locaux, par exemple) et les points faibles (manque de synergie entre les différentes productions, absence de plateforme de partage des connaissances, etc.) du système.

ÉTAPE 2: Cette étape consiste à évaluer les résultats du système au moyen de dix critères principaux, qui portent sur les différents aspects de la durabilité. Ces critères sont les suivants: sécurité des régimes fonciers (ou mobilité des éleveurs pastoraux); productivité (par superficie et par personne); revenu; valeur ajoutée; exposition aux pesticides; diversité de l’alimentation; degré d’autonomie des femmes; emploi des jeunes; biodiversité agricole; santé des sols.

La dernière étape est une analyse participative des résultats, qui consiste à examiner les résultats multidimensionnels obtenus à l’étape 2, à la lumière du diagnostic établi à l’étape 1 et des éléments favorables ou défavorables recensés à l’étape 0. 

L’analyse des éléments factuels obtenus dans le cadre de ce processus permet aux parties prenantes et à la communauté de trouver des solutions durables.

Partager les connaissances et favoriser le progrès durable

L’outil a été élaboré dans le droit fil de l’objectif stratégique de la FAO consistant à rendre l’agriculture, les forêts et la pêche plus productives et plus durables et est actuellement mis à l’essai dans plusieurs régions de la FAO.

Les informations recueillies grâce à l’outil seront mises à disposition dans une base de données centrale, à laquelle auront accès un large éventail de parties prenantes. La base de données permettra d’analyser des contextes agroécologiques spécifiques et donnera un aperçu de la performance à différentes échelles, dans divers systèmes de production agricole, dans différents lieux géographiques et à différents moments, par exemple avant et après la mise en œuvre d’un projet.

Une fois cet outil validé, il faudra faire en sorte que l’outil soit largement adopté et promu et à cette fin mettre en place des stratégies efficaces et des environnements favorables dans l’ensemble des systèmes de production.