Au cours des deux dernières semaines, des photos, des vidéos et des messages sur les incendies en Amazonie ont été diffusés dans les médias sociaux:

“La plus grande forêt pluviale du monde brûle pour le 16ème jour. Et les médias ne couvrent pas la nouvelle.”

“L'Amazonie brûle depuis 3 semaines et je viens tout juste de l'apprendre parce que les médias ne s'en occupent pas”.

“Cela fait dix-huit jours que l'incendie s'est terminé, et moi je n'ai pas arrêté de pleurer. Les médias essayent de cacher la triste réalité de ce qui se passe en Amazonie en ce moment.”

Mais que ce passe-t-il réellement dans la forêt pluviale la plus grande et la plus riche en biodiversité du monde? Est-ce que l'incendie ne peut pas être maîtrisé? Où ont lieu ces feux de forêt et comment ont-ils commencé? Pourquoi les médias ont-ils tardé à annoncer cette catastrophe? La fumée du feu atteint-elle réellement les villes du sud du Brésil, comme São Paulo? Comment ces incendies influent-ils sur la quantité et la qualité de l'eau puisque le lien entre les forêts et l'eau est tellement important dans cette région?

Il existe de nombreuses questions sans réponse auxquelles il faut s'attaquer, mais le premier point est de comprendre comment l'incendie s'est déclaré et quelle est son lien avec le changement d'affectation des terres dans la région.

Dans des parties non perturbées de la forêt amazonienne, l'humidité est élevée même pendant la saison sèche, ce qui empêche aux feux de végétation de se propager et de toucher la forêt. Le problème commence lorsque la structure des forêts est modifiée et que les régimes naturel en subissent les contre-coups négatifs. C'est exactement ce que fait la déforestation.

En Amazonie, le processus de déforestation suit trois étapes. Premièrement, es arbres dont le bois est précieux sont abattus de manière non planifiée et non durable. Ensuite, deux tracteurs adaptés reliés par des chaînes passent à travers la forêt détruisant tout sur leur passage (technique connue sous le nom de correntão au Brésil). Les feux sont la troisième et dernière étape de la déforestation. Étant donné que la structure de la forêt a été détruite, la végétation ne peut plus retenir l'humidité, ce qui rend la zone sensible au feu. Cette méthode est utilisée par les agriculteurs pour défricher la terre à des fins agricoles.

Voilà exactement ce qui se passe en Amazonie en ce moment. Le principal moteur de ces feux de forêt est le changement anthropogénique de l'utilisation des terres (les forêts sont converties en terres agricoles). Des données récentes de l'Institut de recherche sur l'environnement (IPAM) montrent que le nombre de feux de forêt et le taux de déforestation sont étroitement liés: les municipalités qui enregistrent le nombre le plus élevé d'incendies ont aussi le taux le plus élevé de déforestation. De plus, les données montrent que l'actuelle saison sèche s'inscrit dans les paramètres normaux de la saison et les actuelles conditions météorologiques n'expliquent pas cette augmentation anormale des feux de forêt.

Les rivières volantes: le transport de substances autres que l'eau

Un sujet qui a fait l'objet d'un vaste débat sur les médias sociaux est la fumée et la pollution qui ont touché São Paulo, la plus grande ville du Brésil, le 19 août. Une partie de la fumée générée par les feux en Amazonie a dérivé vers le sud, obscurcissant le ciel de São Paulo même à midi. Des analyses menées par les universités locales ont confirmé la présence de particules provenant des feux de forêt dans l'eau de pluie de São Paulo.

Cet effet est dû aux «rivières volantes» (cliquez ici pour plus d'informations). Outre transporter de la vapeur d'eau et de l'humidité, ces énormes pompes peuvent transporter d'autres substances. Ces rivières volantes sont donc transformées en «rivières de fumée sèche». Les images satellite ont montré un changement dans la couleur des nuages et des nuages de fumée sur différentes villes du Brésil (Porto Velho, Cuiabá et même Livramento, à l'extrême sud du pays).

L'importance de l'Amazonie pour l'approvisionnement en eau

Ces feux de forêt font partie d'un problème plus grand: la déforestation. Il est donc essentiel de combattre et d'empêcher la déforestation afin de lutter contre les feux de forêt. Outre son impressionnante biodiversité, ses populations autochtones et son rôle comme puits de carbone, la forêt amazonienne assure l'approvisionnement en eau de millions de personnes, non seulement au Brésil mais aussi dans d'autres pays d'Amérique du Sud. Son importance, donc, n'est pas uniquement régionale mais aussi continentale.

Sensibilisons le public à ce sujet et aux moteurs des feux de forêt. L'Amazonie est la cible en ce moment, mais c'est aussi un problème mondial. Si nous voulons réellement relever le défi du changement climatique avec le moins de répercussions possibles pour l'économie et le développement à l'échelle mondiale, nous devons soutenir l’adoption de modes durables et de bonnes pratiques dans la gestion des forêts. La déforestation n'en fait pas partie.