Une invasion de criquets migrateurs africains menace les agriculteurs dans certaines régions de Namibie, du Botswana, du Zimbabwe et de Zambie. ©FAO/Phillipus Tobias.
«C’est la première fois que je vois une situation aussi effrayante depuis que je suis né ici. Rien d’autre n’est comparable à une menace aussi grave», a déclaré Fabian Sisamu, agriculteur.
«C’est la pire situation qui soit; nous redoutons l’avenir», ajoute son ami Ian Mubita, découragé par ce qui pourrait se passer.
Fabian et Ian sont tous deux agriculteurs à Kasaya (Namibie), petit avant-poste agricole situé près du Zambèze, quatrième plus grand fleuve d’Afrique. Une invasion de criquets migrateurs et de criquets nomades africains a terrorisé les communautés du nord-est du pays, à la frontière de la Zambie et du Botswana.
Les criquets ont été signalés pour la première fois en février 2020, en petits nombres, mais on a, depuis, observé un important développement des essaims dans différentes parties de la région.
«Au début, nous pensions qu’ils ne représenteraient pas une menace aussi grave pour nos moyens de subsistance, car ils n’étaient pas aussi nombreux que nous le voyons maintenant, mais il semble que nous les ayons sous-estimés », a poursuivi Fabian.
Les essaims de criquets détruisent toute la végétation dans la région, réduisant les prairies à l’état de sable et anéantissant les moyens de subsistance des gens. La FAO travaille avec la Communauté de développement de l’Afrique australe et l’Organisation internationale de lutte contre le criquet nomade en Afrique centrale et australe afin d’aider les gouvernements des quatre pays touchés que sont la Namibie, le Botswana, la Zambie et le Zimbabwe à combattre ce fléau. Le projet de 0,5 million d’USD aide à assurer une surveillance terrestre et aérienne, à cartographier les zones touchées et à combattre les criquets, et l’on s’emploie actuellement à recueillir davantage de fonds pour appuyer ces activités.
«Ces criquets sont très vicieux; ils n’ont aucune pitié. Ils dévorent tout ce qui est vert et ne laissent presque rien derrière eux», a expliqué Ian.
Gauche/Haut: Ian Mubita, gardien de troupeau à Kasaya, dans la région du Zambèze, en Namibie. ©FAO/Phillipus Tobias. Droite/Bas: Fabian Sisamu, agriculteur de la région de Kasaya. ©FAO/Phillipus Tobias.
La crainte du pire
«C’est aussi la première fois que je vois autant de criquets», a déclaré Lionzi Hastings, petit agriculteur d’âge moyen qui possède un potager à Kasaya.
«Ils ont complètement détruit l’herbe autour de mon jardin», a-t-il ajouté, montrant la berge de la rivière, qui se trouve à quelques mètres de son jardin. «Je crains qu’ils ne viennent raser mon jardin s’ils ne sont pas maîtrisés», a-t-il dit pour conclure.
Une aide bien nécessaire
À quelques kilomètres à l’ouest de Kasaya, dans la circonscription de Kabbe Nord, le chef local affirme que la situation est critique et qu’il faut que tout le monde soit sur le pont si l’on veut vaincre les criquets.
George Matengu explique que sa communauté a commencé à remarquer les criquets en novembre dernier, puis en juillet, lorsque les eaux se sont retirées.
«Le champ où j’avais planté du maïs a été gravement touché, il ne restait que les tiges, tout le reste était détruit», a-t-il déclaré.
Sa situation n’est pas unique. De nombreux autres ménages de la région ont été touchés de la même manière. Il dit que la situation, en matière de sécurité alimentaire, est devenue désastreuse et que la plupart des gens survivent maintenant en achetant leur nourriture, comme la farine de maïs, au marché, utilisant une grande partie de leurs revenus familiaux déjà dérisoires.
La FAO aide le pays à combattre les criquets en fournissant aux équipes gouvernementales chargées de la pulvérisation un soutien logistique et technique pour ce qui est de l’utilisation sûre des pesticides, ainsi qu’en procurant certains des produits et les équipements de protection individuelle nécessaires.
«Le pesticide semble produire un effet dans la mesure où nous commençons maintenant à voir des criquets morts suite à la pulvérisation», a déclaré George.
«Nous gardons l’espoir que la situation sera maîtrisée avant le début de la saison de plantation et que les efforts redoubleront pour endiguer l’épidémie», a-t-il ajouté.
Un vulgarisateur agricole tient dans ses mains des criquets migrateurs africains vivants. Ces ravageurs détruisent rapidement les sources de nourriture et les moyens de subsistance. ©FAO/Phillipus Tobias
Aider à combattre les criquets
La FAO a récemment lancé le Projet de préparation et de réponse d’urgence aux crises acridiennes en Afrique australe. En Namibie, elle a aidé, par une assistance technique et financière, le Ministère de l’agriculture, de l’eau et de la réforme agraire à former et à déployer des techniciens et à renforcer la lutte menée actuellement contre les criquets.
Ce projet permettra d’accroître la capacité d’intervention d’urgence aux points envahis par les criquets et de renforcer la coordination et l’échange d’informations entre les pays touchés. Quelque 7 millions de personnes, dans ces quatre pays, se remettent encore de la sécheresse de 2019 et des conséquences économiques de la pandémie de covid-19.
Les invasions de criquets migrateurs africains en Afrique australe sont distinctes de celles de criquets pèlerins qui se produisent simultanément en Afrique de l’Est. En réalité, la région de l’Afrique australe n’est pas touchée par les criquets pèlerins.
Les criquets font partie des ravageurs les plus destructeurs au monde. Un essaim peut comprendre des dizaines de millions d’adultes, et il en existe actuellement de nombreux dans la région australe. Un essaim de criquets de 20 km2 et d’une densité moyenne de 60 millions d’adultes par km2 peut manger en une journée la même quantité de nourriture que celle qui permettrait de nourrir 2 500 personnes pendant un an.
La FAO travaille avec les pays touchés par ces deux situations d’urgence, aidant à préserver la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des millions de personnes touchées.
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