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Le lien entre l’eau, les données et la paix


L’outil de télédétection de la FAO, WaPOR, permet de suivre les incidences des conflits sur l’agriculture et de faciliter la répartition équitable de l’eau

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L’accès à l’eau peut être entravé par les conflits, mais peut également les provoquer. La rareté croissante de l’eau et les effets du changement climatique ne font qu’augmenter le risque de conflit. ©FAO/Eduardo Soteras

21/03/2024

L’eau est au cœur de toute vie, et donc de toutes les économies. C’est pourquoi il n’est pas surprenant que l’eau et les conflits puissent aussi être liés.

L’accès à l’eau peut être entravé par les conflits, mais peut également les provoquer. La rareté croissante de l’eau et les effets du changement climatique ne font qu’augmenter le risque de conflit. 

Dans ce contexte, la gestion efficace et durable des ressources en eau est cruciale si l’on veut réduire la concurrence et contribuer à la paix locale, et commence par la surveillance des ressources en eau.

Grâce aux satellites qui tournent autour de la Terre et collectent chaque jour de grandes quantités de données, y compris sur l’eau, la télédétection joue un rôle central s’agissant de combler le manque de données dans les zones difficiles d’accès.

Le Portail de données en libre accès sur la productivité de l’eau (WaPOR) est un outil créé par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et qui utilise les données satellitaires en accès libre pour surveiller les zones agricoles, notamment celles touchées par des conflits. Ces données sont librement accessibles et sont exploitées par la FAO et des institutions nationales à l’appui d’initiatives qui visent à prévenir les conflits entre les usagers de l’eau et à repérer les infrastructures endommagées par ces conflits.

Nous vous présentons ici quatre exemples dans lesquels des données WaPOR ont aidé à surveiller les ressources en eau et ainsi à réduire les conflits et à rétablir l’accès à cette ressource précieuse lorsqu’un conflit l’a bloqué. 

1)      République arabe syrienne

En 2019, la FAO a aidé le Ministère syrien des ressources en eau et l’Organisme général syrien de télédétection à utiliser les données WaPOR pour évaluer les dégâts subis par l’infrastructure d’irrigation du pays en raison du conflit en cours. Des barrages, des stations de pompage, des installations de traitement des eaux usées, des systèmes d’irrigation des champs et d’autres dispositifs avaient été détruits ou gravement endommagés.

Sur la base des données WaPOR, les spécialistes du Ministère des ressources en eau ont analysé les zones équipées d’infrastructures d’irrigation en surveillant la croissance des végétaux et l’eau consommée par ceux-ci. Étant donné que la République arabe syrienne est un pays semi-aride, lorsqu’une consommation d’eau par des végétaux était détectée, cela signifiait que l’agriculture irriguée n’avait pas été touchée.

Le bilan des incidences des conflits sur les investissements nationaux dans l’agriculture est une étape essentielle de la planification de la remise en état. Le Ministère des ressources en eau s’appuie sur ces estimations pour établir ses plans de reconstruction et définir ses besoins en matière de mobilisation de fonds.

WaPOR est un outil de la FAO qui utilise les données satellitaires en accès libre pour permettre le suivi des zones agricoles, Ces données sont exploitées à l’appui d’initiatives qui visent à prévenir les conflits entre les usagers de l’eau et à faciliter l’accès à cette ressource. À gauche/en haut © FAO/Prakash Singh À droite/en bas: ©FAO / Khalid Ali

2. Soudan

En avril 2023, un conflit armé a éclaté au Soudan et il perdure encore à ce jour. L’insécurité généralisée et les conditions dangereuses ont perturbé l’agriculture, notamment la distribution de semences, la préparation des champs et la culture.

Dans ce contexte, la FAO a utilisé les données WaPOR pour comparer la moyenne de la période de végétation de 2023 à celles des cinq précédentes années afin d’estimer les effets du conflit sur la production agricole.

«Le suivi des résultats de la campagne agricole a été utile pour évaluer la situation de la sécurité alimentaire dans le pays et pour mettre à jour les chiffres du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire, qui sont utilisés pour planifier et programmer des interventions en faveur de la sécurité alimentaire» , indique M. Elwathig Mukhtar Hamid, alors Assistant du Représentant de la FAO au Soudan.

L’évaluation a révélé un recul de 51 pour cent des superficies cultivées au début de la campagne par rapport aux années précédentes. Cela s’explique en grande partie par les perturbations subies par les marchés et les mécanismes de financement qui permettent aux agriculteurs de se fournir en intrants. La FAO a planifié une distribution de semences de haute qualité en août, ce qui a amélioré la situation et permis à davantage d’agriculteurs de semer à temps pour la période de végétation.

Cet exemple montre que les données issues de la télédétection peuvent servir à surveiller les incidences des conflits sur l’agriculture, mais aussi concourir à l’action humanitaire et révéler les résultats des interventions. 

3. Mali

Au Mali, la FAO travaille avec le Ministère du développement rural et le Programme alimentaire mondial en vue d’évaluer les incidences du conflit en cours sur le secteur agricole du pays. L’objectif du projet est de s’appuyer sur les données et outils WaPOR pour trouver une solution permettant de procéder systématiquement à ces évaluations, en particulier dans les régions où il serait dangereux d’assurer un suivi local.

Dans un contexte où règne déjà une insécurité persistante, la pénurie d’eau entraîne une concurrence croissante entre les usagers locaux. Les étangs, les rivières et les puits s’assèchent en raison de la sécheresse et de la désertification.

Le partenariat Water, Peace and Security (WPS) utilise les données WaPOR dans son outil d’alerte rapide mondiale afin d’établir des prévisions de conflit d’après les facteurs liés à l’eau, à l’agriculture et aux tensions sous-jacentes.

À Djenné (Mali), le partenariat WPS fait fond sur les données pour mettre en œuvre des mesures de règlement des conflits, comme des dialogues communautaires dans les régions où l’eau fait généralement l’objet d’une concurrence.

En exploitant des outils comme WaPOR, on peut connaître l’état des ressource en eau, ce qui aide ensuite à planifier des interventions pour réduire les risques de conflit. © FAO/Ishara Kodikara

4. Sri Lanka

Le projet «Mieux connaître l’eau» (KnoWat – Knowing water better), mené par la FAO à Sri Lanka, a permis de clarifier des questions liées au régime foncier de l’eau, questions qui peuvent aussi être source de conflit. Les données WaPOR ont contribué à la comptabilisation des ressources en eau, ce qui permet de cartographier l’accès et le droit à l’eau et les relations en rapport avec cette ressource. Il s’agit de la première étape pour comprendre la répartition de l’eau et connaître les usagers de l’eau. La répartition équitable des ressources en eau exige de savoir qui a accès à l’eau, mais aussi en quelle quantité celle-ci est disponible et quel volume les différentes parties intéressées utilisent.

Le bassin du fleuve Malwathu Oya à Sri Lanka connaît successivement des inondations et des pénuries d’eau, un phénomène aggravé par le changement climatique et par la mauvaise gestion de l’eau, notamment l’irrigation excessive des cultures. Les données WaPOR ont aidé les responsables de l’irrigation dans le bassin fluvial à évaluer la campagne agricole et à prévoir la prochaine, en collaboration avec les agriculteurs locaux. En ayant la possibilité de surveiller la productivité de l’eau, les agents de vulgarisation peuvent donner des conseils aux agriculteurs quant aux dangers d’un arrosage excessif, que ce soit pour les ressources du bassin ou pour la productivité des exploitations.

De meilleures pratiques d’irrigation et un processus participatif ont accru la quantité d’eau disponible pour tous ainsi qu’amélioré les rendements, ce qui a réduit les facteurs de stress et la concurrence dans le domaine de l’eau.

Les données sont le point de départ de toute action. En exploitant des outils comme WaPOR, on peut connaître l’état des ressource en eau, ce qui aide ensuite à planifier des interventions et à prendre des décisions éclairées pour réduire les risques de conflit et contribuer à faire régner la paix.

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