Gestion des pesticides dans le secteur de la banane


Les pesticides sont utilisés de manière intensive pour contrôler les ravageurs et maladies dans les bananeraies, en particulier dans celles dont la production est destinée à l'exportation tout au long de l'année. Les cultures de bananes sont d'autant plus sensibles aux infestations qu'elles sont pour la plupart cultivées dans des régions tropicales, créant des conditions favorables pour les organismes nuisibles. Les pesticides sont utilisés pour contrôler différents parasites de la banane, dont la cercosporiose noire, qui dans les bananeraies peut réduire les rendements de 35% à 50%. La contamination causée par l'utilisation intensive de produits agrochimiques dans les monocultures reste un défi.

Impacts de l’utilisation excessive et de la mauvaise manipulation des pesticides:

  • dommages sur la santé des travailleurs, risque notoire d'intoxication chronique et aiguë;
  • risques pour la santé publique, dont l'intoxication des consommateurs;
  • effets néfastes pour l'environnement, et le sol; contamination de l'eau et réduction de la biodiversité;
  • empoisonnement de la faune, du bétail et des pollinisateurs;
  • réduction des rendements;
  • impact négatif sur les coûts de production et le potentiel d'exportation.

Les inquiétudes concernant les risques liés à l'utilisation de pesticides se reflètent de plus en plus dans la demande du marché. Pour les producteurs, cette évolution appelle un changement dans les systèmes de production et de commercialisation qui les conduit à approfondir leurs connaissances techniques tout en maintenant la viabilité économique des exploitations bananières.

Il est donc important de limiter autant que possible l'utilisation des pesticides et d'en assurer une bonne gestion avant, pendant et après l’application pour pouvoir réduire les risques sociaux et environnementaux qui leur sont associés.

Réduction des risques liés aux pesticides

 

La FAO recommande de suivre les étapes suivantes pour réduire les risques liés aux pesticides:

 

  • Réduire le recours aux pesticides en adoptant de bonnes pratiques agricoles (BPA).
  • Sélectionner les pesticides présentant le risque le plus faible.
  • Assurer une utilisation correcte du produit sélectionné.
  • Mettre en œuvre une gestion adéquate des déchets.

Étape 1: Réduction de la dépendance aux pesticides

  • Éliminer l'utilisation injustifiée des pesticides en utilisant une approche intégrée de lutte antiparasitaire (MIP).
  • Accroître la lutte antiparasitaire non chimique

 

Un plan de lutte antiparasitaire est défini pour faciliter cette étape et adopter une approche proactive de la lutte contre les ravageurs et les maladies grâce à des méthodes alternatives.

Le plan de lutte antiparasitaire doit encourager la lutte intégrée contre les ravageurs et établir une surveillance des organismes nuisibles et maladies.

Lutte intégrée contre les nuisibles

La FAO définit la lutte intégrée contre les organismes nuisibles comme «l'examen minutieux de toutes les techniques de lutte antiparasitaire disponibles et l'intégration ultérieure de mesures appropriées qui entravent le développement de populations de ravageurs et maintiennent les pesticides et autres interventions à des niveaux économiquement justifiés qui réduisent ou minimisent  les risques pour la santé humaine et l'environnement. L’IPM met l'accent sur la croissance d'une culture saine avec une perturbation des agro-écosystèmes réduite au minimum et encourage les mécanismes naturels de lutte contre les ravageurs».

Les pratiques suivantes font partie d'une stratégie de prévention intégrée:

1. Prévention ou élimination des organismes nuisibles grâce à la combinaison des actions suivantes:

  • rotation des cultures et cultures intercalaires;
  • utilisation de techniques de culture adéquates (par exemple, assainissement du lit de semence, dates et densité de semis appropriées, sous-semis, travail de conservation du sol, élagage et semis direct);
  • utilisation de cultivars résistants/tolérants aux nuisibles et de matériel de plantation certifié;
  • gestion équilibrée de l'eau et de la fertilité des sols, utilisation optimale de la matière organique;
  • mesures sanitaires et d'hygiène sur le terrain;
  • protection des organismes bénéfiques.

2. Surveillance des organismes nuisibles à l’aide d’outils adéquats, y compris des observations sur le terrain et, dans la mesure du possible, des systèmes de diagnostic précoce.

3. Les décisions concernant l’usage de pesticides doivent être basées sur ce suivi, en privilégiant les méthodes non chimiques tant qu’elles permettent un contrôle adéquat des nuisibles.

4. Les pesticides ne doivent être utilisés qu'en dernier recours lorsque les méthodes non chimiques sont insuffisantes et l'utilisation des pesticides est économiquement justifiée.

5. L’application de pesticides doit être aussi spécifique et aussi sûre que possible, et leur utilisation doit être maintenue à un niveau minimum.

6. L’efficacité des mesures de lutte antiparasitaire appliquées doit être contrôlée.

Étape 2: Sélection des pesticides

  • Si l'utilisation de pesticides est jugée nécessaire, choisir soigneusement le produit le plus approprié.
  • La sélection doit tenir compte d'un certain nombre de facteurs: efficacité; dangers pour l'environnement et la santé humaine; risques associés à la méthode d'application recommandée; exigences en matière de protection personnelle et intervalles à respecter avant la récolte.

Chaque exploitation doit posséder une liste de produits autorisés. Cette liste doitêtre basée sur:

  • la liste des produits agréés légalement autorisés dans le pays concerné;
  • la liste des produits autorisés dans le cadre des programmes de certification du ou des principaux acteurs de la chaîne d'approvisionnement et des exigences du pays de destination pour le produit final.
  • Cette liste doit inclure les noms commerciaux, les ingrédients actifs, la taille de l'unité, la classification des dangers, le fabricant et les conditions d'utilisation.

 

 

Étape 3: Utilisation correcte du produit

Parmi les pratiques adoptées pour promouvoir une bonne manipulation et utilisation des pesticides:

1. Élaboration de procédures et de protocoles concernant:

  • l'équipement de protection individuelle (masque, gants, lunettes, combinaison, etc);
  • le stockage approprié des pesticides;
  • les instructions pour l'application correcte des pesticides;
  • la procédure de manipulation des sacs en plastique traités;
  • la procédure de nettoyage des équipements d'application;
  • la procédure de collecte et/ou d'élimination des contenants de pesticides vides;
  • l'étalonnage du matériel d'application;
  • le suivi de la santé des travailleurs des plantations;
  • la procédure de chargement et de déchargement des pesticides;
  • la liste de contrôle pour le chargement et le déchargement des pesticides;
  • l'étalonnage de l'équipement de mesure;
  • les procédures de premiers soins et la disponibilité du matériel et des équipements de premiers secours (douches d'urgence, lave-yeux, antidotes, etc).Il est important de s'assurer que tous les travailleurs qui manipulent et appliquent des pesticides sont correctement formés pour ces tâches.

 

2. Gestion du stockage

 

  • Chaque produit doit être étiqueté dans la langue qui convient.
  • Une personne est responsable de gérer l'entreposage.
  • Tous les dépôts sont verrouillés, ventilés, avec un éclairage et un mur de soutènement si nécessaire, et des informations visibles sur les procédures en cas d'urgence.
  • Les stocks doivent être gérés selon le principe du "premier entré, premier sorti" afin de prévenir le vieillissement des produits.
  • Les entrepôts doivent contenir l'équipement et des matériaux nécessaires pour gérer les fuites et autres situations d'urgence.

3. Périodes de réadmission

Après l'application des pesticides dans la plantation, le moment auquel les travailleurs peuvent de nouveau entrer dans la zone doit être indiqué.

4. Communication des programmes d'application

Définir les moyens de communication à tous les travailleurs des dates et périodes d'application en cas de pulvérisation aérienne.

Étape 4: Gestion des déchets

Des pratiques telles que le nettoyage des équipements d'application et l'élimination des contenants de pesticides vides, des sacs en plastique traités avec des pesticides et d'autres matériaux contaminés réduisent les risques de contamination de l'environnement ou d'empoisonnement accidentel de personnes ou de bêtes.

Les contenants de pesticides vides sont des déchets dangereux et ne peuvent être réutilisés sous aucune condition. L'option privilégiée pour leur gestion est un système de collecte établi par la plantation ou par le fournisseur. En l'absence d'un tel système, les récipients doivent être rincés et perforés trois fois. L’eau de rinçage peut être pulvérisée sur la plantation.

Par exemple, la société Dole a mis en place un système pour retourner des bidons de pesticides vides aux fournisseurs. De telles pratiques ne peuvent cependant fonctionner qu'avec un nombre suffisant d'agriculteurs dans une zone géographique réduite, compte tenu des coûts de logistique. Depuis que Dole a mis en place ce système de collecte, la société a réduit l'élimination directe de conteneurs vides par leurs utilisateurs d'environ 90%.

Défis

 

  • Transition de la lutte antiparasitaire à base de produits agrochimiques synthétiques vers une lutte intégrée contre les ravageurs.
  • Le renforcement des capacités, la formation et le transfert de connaissances en termes de réduction des risques sont importants pour faire évoluer les pratiques en place depuis de nombreuses années.
  • Des investissements supplémentaires de la part des propriétaires de plantations peuvent être nécessaires pour prévenir les dommages à long terme et les coûts pour la santé, l'environnement et la qualité des fruits.
  • Le renforcement des organisations d'agriculteurs et des syndicats peut contribuer à accroître le pouvoir de négociation des travailleurs des bananeraies et des agriculteurs dans les systèmes de plantations satellites.