SAVE FOOD: Initiative mondiale de réduction des pertes et du gaspillage alimentaires

« Pour atteindre la sécurité alimentaire, il faut prendre soin des écosystèmes vitaux qui nous permettent de produire la nourriture »

27 May 2016


Voilà les mots de Mme Amina J. Mohamed, Ministre de l’Environnement du Nigéria, qui sont également au cœur de la mission de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture pour atteindre un monde libéré de la faim. Cette année, la Journée mondiale de l’environnement, qui sera célébrée le 5 Juin, sera axée sur la dimension environnementale d’un des défis concernant la durabilité parmi les plus importants du travail de la FAO : le problème des pertes et du gaspillage alimentaires.

D’après les données de la FAO, un tiers du total de la nourriture produite et destinée à la consommation humaine est perdue ou bien gaspillée, à savoir, 1,3 milliards de tonnes. La réduction des pertes et du gaspillage alimentaires a été inscrite dans les objectifs du développement durable et, par conséquent, la communauté internationale se doit de relever ce défi. Il est vrai que pour faire en sorte que les aliments soient manipulés et consommés d’une façon plus durable, à présent et dans le futur, il faut déployer des efforts ambitieux, collectifs et globaux, et il faut mettre en œuvre des changements aboutissant à des transformations profondes, tant au niveau international que des ménages. Pourtant, comme la FAO le souligne, la réduction des pertes et du gaspillage alimentaires pourrait également avoir des effets positifs sur l’environnement et elle va être nécessaire pour obtenir des systèmes alimentaires durables et inclusifs.

Les pertes et le gaspillage alimentaires et leurs impacts sur l’environnement

La production de nourriture s’appuie sur l’emploi de ressources écologiques insuffisantes, qui doivent également satisfaire les multiples besoins de l’industrie globale. Les terres disponibles doivent servir, à la fois, pour la production de nourriture, des aliments pour le bétail, de bois, etc... Souvent, cela a des effets néfastes pour les forêts naturelles. De même, les écosystèmes aquatiques et les stocks de poissons doivent faire face à une industrie mondiale de la pêche en expansion, qui comprend également les aliments pour poissons dans le domaine de l’aquaculture. La dégradation des écosystèmes représente une opportunité gâchée pour atteindre le but de la durabilité en matière de production et sécurité alimentaire et pour satisfaire les besoins nutritionnels des personnes les plus vulnérables au monde. Le secteur de l’utilisation des terres doit être plus productif, tout en faisant un emploi plus efficace des ressources disponibles. En même temps, d’après les estimations actuelles, environ 28% des surfaces agricoles du monde sont occupées pour la production de nourriture qui ne sera jamais consommée par les êtres humains. A cause de la manipulation inefficace et pas durable des denrées, les pertes et le gaspillage alimentaires peuvent engendrer des impacts sérieux sur la déforestation, la dégradation des écosystèmes et l’épuisement des ressources naturelles. De plus, environ 35% des produits comestibles de la mer et des poissons, au niveau mondial, sont soit perdus soit gaspillés, chaque année, et une part considérable des déchets survient au niveau des captures. De tels chiffres sont inacceptables, d’autant plus que les stocks de poissons et leurs écosystèmes de soutien sont surexploités et dégradés dans le monde entier, à cause de mauvaises pratiques de pêche, de gestion et de gouvernance.

Les impacts des pertes et du gaspillage alimentaires ne sont pas seulement associés aux écosystèmes aquatiques ou agricoles, où la nourriture est produite. Les denrées alimentaires sont transportées et commercialisées à travers les continents, et, en plus, il faut apporter des ressources supplémentaires pour accomplir toutes les opérations de la chaine d’approvisionnement. Les systèmes alimentaires consomment environ 30% de l’énergie globale disponible, dont 38% est employé pour la production de nourriture, qui sera perdue ou bien gaspillée. D’énormes ressources d’eau sont également utilisées dans la chaine d’approvisionnement alimentaire, dont la plupart sont consommées notamment pendant la première phase de production, à savoir pour l’irrigation.

Les pertes et le gaspillage alimentaires engendrent une énorme gaspillage d’eau et cela représente un problème considérable, notamment en ce qui concerne l’augmentation de la pénurie d’eau et les impacts néfastes dus au changement climatique.

Enfin, les ressources et les intrants naturels nécessaires dans le processus, ainsi que les actions associées à la gestion des déchets, apportent, dans leur ensemble, des émissions de gaz à effet de serre qui, à leur tour, contribuent au changement climatique. Ces impacts agrégés font que les pertes et le gaspillage alimentaires soient un facteur très important du changement climatique, en produisant environ 8% des émissions de gaz à effet de serre totales, et, en augmentant également la vulnérabilité au changement climatique, comme la FAO va le souligner à l’occasion de la Journée mondiale de l’alimentation de cette année 2016. 

La réduction des pertes et du gaspillage alimentaires et la durabilité environnementale

Prévenir les pertes et le gaspillage alimentaires offre l’occasion fondamentale pour faire face aux causes principales de la dégradation environnementale et de la perte de biodiversité, tout en contribuant, à la fois,  à garantir la sécurité alimentaire et nutritionnelle pour tous. Les effets en cascade découlant de la transformation de nos modes non viables de produire et consommer les aliments, tout en améliorant l’efficacité des systèmes alimentaires, vont avoir des implications majeures sur la durabilité environnementale.

La réduction des pertes et du gaspillage des aliments est à la fois une opportunité logique et unique d’intégrer les objectifs de développement durable et les cibles du climat dans les actions nécessaires dans les chaines d’approvisionnement alimentaires. Bien que la réponse à ce phénomène soit susceptible de varier selon les différentes régions du monde, il s’agit là d’un problème global qui requiert des actions urgentes de la part de tous les pays. Il est inacceptable que les ressources naturelles soient épuisées et que les écosystèmes vitaux soient dégradés, afin de produire de la nourriture qui ne sera jamais vraiment consommée, alors qu’environ 795 millions de personnes continuent à souffrir la faim chronique. Cet énorme gaspillage de ressources ne fait qu’exacerber le changement climatique, qui, à la fois, engendrera des effets néfastes sur la productivité alimentaire dans les décennies à venir. Il faut changer notre mentalité concernant notre façon de considérer et de consommer les ressources, de sorte que la prévention des pertes et du gaspillage alimentaire devienne notre priorité.

Considérations et recommandations clé

  • La réduction des pertes et du gaspillage alimentaires représente une opportunité ayant des coûts et des bénéfices pour améliorer l’efficacité de l’emploi des ressources, dans le secteur agricole, et pour contribuer à atténuer le risque d’épuisement des ressources naturelles. De plus, la réduction des pertes et du gaspillage alimentaires pourrait garantir un emploi plus durable des ressources, sans, pour autant, avoir des impacts trop importants pour les écosystèmes, y compris les sols et l’eau.
  • Il est nécessaire de se pencher sur la question des pertes et du gaspillage des poissons, y compris des déchets, afin de réduire les effets négatifs de la pêche sur les écosystèmes aquatiques. Si de telles mesures sont associées à une transformation dans la gouvernance et la gestion des pêches, elles pourront contribuer à une exploitation plus durable, tout en optimisant l’utilisation des ressources, et en réduisant possiblement les causes d’une surexploitation des ressources marines.
  • Les pertes alimentaires dans les pays à bas revenu sont souvent associées au manque d’accès à l’énergie, notamment dans la phase après récolte. Afin de réaliser la transition vers des chaines d’approvisionnement alimentaires susceptibles de réduire les pertes alimentaires, ainsi que la dépendance de combustibles fossiles dans les systèmes alimentaires, il faut introduire, à plus vaste échelle, les technologies « propres » ou à faible intensité de carbone. En effet,  l’utilisation accrue de technologies employant les énergies renouvelables pourrait, non seulement améliorer la durabilité des systèmes alimentaires, mais aussi réduire les pertes dans les pays en développement.
  • Il est essentiel de déployer des efforts visant à réduire les pertes et le gaspillage alimentaires pour renforcer l’action globale contre le changement climatique, vu que ces mêmes efforts peuvent contribuer dans leur ensemble, à atteindre les trois objectifs globaux, à savoir: l’atténuation du changement climatique, en réduisant les émissions de gaz à effet de serre associées aux pertes et au gaspillage alimentaires ; le renforcement de la résilience pour faire face au changement climatique, tout en améliorant, à la fois, la disponibilité alimentaire et la nutrition. Par conséquent, il convient d’intégrer des mesures de réduction des pertes, dans le cadre des systèmes alimentaires adaptés au climat, au sein des stratégies et des plans d’action climatiques, en tant qu’opportunités supplémentaires pour atteindre les buts de l’atténuation et de l’adaptation.
  • La réduction de la quantité de nourriture perdue ou gaspillée représente une condition préalable pour promouvoir et atteindre finalement une agriculture durable. Il faut se pencher sur toutes les politiques et les règlements qui mènent au gaspillage alimentaire, telles que les subventions dans l’agriculture et la pêche, pour atteindre une gestion des ressources naturelles plus efficace. De plus, l’amélioration de la politique des subventions permettrait de faire un emploi plus efficace des fonds publics, en réduisant ainsi le capital qui est dépensé pour produire la nourriture qui ne sera jamais consommée.
  • Il faut attribuer plus d’importance à l’amélioration de l’accès aux financements, tout en encourageant, à la fois, des mesures incitatives politiques appropriées, ainsi qu’en renforçant la capacité de gestion. Il peut s’avérer utile de réunir les gouvernements, les producteurs alimentaires et les investisseurs, pour identifier ensemble les défis et les opportunités et pour résoudre les déficits dans les systèmes alimentaires, ainsi que pour accélérer l’emploi de technologies durables dans les chaines d’approvisionnement alimentaires. Si de tels efforts sont associés avec des pratiques agricoles et de consommation durables, il sera possible d’ouvrir la voie de la protection des ressources environnementales et d’atteindre les objectifs et les cibles établis dans l’Agenda pour le développement durable de 2030.

Le contenu de cet article est basé sur le prochain document de travail: Le programme de développement post-2015: Comment la perte de nourriture et de réduction des déchets peuvent contribuer à la durabilité environnementale et la réalisation des objectifs de développement durable.

Pour plus d'informations sur la perte de nourriture et les déchets et le lien avec l'environnement et le changement climatique, s'il vous plaît contacter Mme Emilie Wieben: [email protected]