L’évaluation mondiale des émissions de protoxyde d’azote (N₂O), réalisée par les Nations Unies, révèle l’urgence d’agir pour faire baisser les émissions de N₂O afin d’éviter des effets catastrophiques sur le climat, l’environnement et la santé.
Un agriculteur afghan tient dans sa main des engrais composés d’urée. La gestion durable des engrais permettrait de faire reculer les émissions de protoxyde d’azote.
©FAO/Hashim Azizi
Bakou (Azerbaïdjan) – Selon une récente évaluation mondiale des Nations Unies sur le protoxyde d’azote (N₂O), ce puissant gaz à effet de serre accélère rapidement le changement climatique et dégrade la couche d’ozone, ce qui met en péril l’objectif de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C et constitue une grave menace pour la santé publique.
Publiée par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), cette évaluation a été présentée lors de la 29e Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP29) à Bakou, en Azerbaïdjan. Elle souligne que les émissions augmentent plus rapidement que prévu et qu’il faut prendre des mesures immédiates pour lutter contre les effets de ce superpolluant sur l’environnement et sur la santé.
Le protoxyde d’azote, qui a un potentiel de réchauffement global quelque 270 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone, a contribué à ce jour à environ 10 pour cent du réchauffement net de la planète depuis la révolution industrielle. Ses émissions proviennent majoritairement du secteur agricole, via l’utilisation d’engrais synthétiques et les effluents d’élevage. Le N₂O est le troisième gaz à effet de serre par ordre d’importance et la première substance nocive pour la couche d’ozone qui continue d’être libérée dans l’atmosphère.
À l’heure actuelle, le protoxyde d’azote est le premier contributeur à la destruction de la couche d’ozone. L’évaluation montre que des mesures volontaristes de réduction du protoxyde d’azote favoriseraient également la reconstitution progressive de la couche d’ozone, ce qui permettrait d’éviter qu’à l’avenir une grande partie de la population mondiale soit exposée à des niveaux d’ultraviolets (UV) nocifs.
Les principales conclusions de l’évaluation sont les suivantes:
Implications et recommandations
Le bilan de l’évaluation est sans appel: il est impératif d’agir d’urgence sur le protoxyde d’azote si l’on veut atteindre les objectifs climatiques. Sans véritable réduction des émissions, il ne sera pas envisageable de limiter le réchauffement à 1,5 °C dans le cadre du développement durable, comme le prévoit l’Accord de Paris. Réduire les émissions de N₂O permettrait d’éviter jusqu’à 235 milliards de tonnes équivalent CO₂ d’ici à 2100, ce qui représente six années d’émissions mondiales actuelles de carbone dues aux combustibles fossiles.
Cette évaluation met en lumière des stratégies de réduction pratiques et intersectorielles susceptibles d’abaisser les émissions de N₂O de plus de 40 pour cent par rapport aux niveaux actuels. Si l’on transformait les systèmes de production alimentaire et que l’on repensait les méthodes de gestion de l’azote à l’échelle de la société, on pourrait faire baisser encore plus les émissions, ce qui offrirait au monde entier une formidable occasion de se rapprocher de ses objectifs en matière de climat, d’environnement et de santé.
L’évaluation montre aussi que les émissions de protoxyde d’azote issues de l’industrie de la chimie peuvent être réduites de façon rapide et économique. Les pratiques agricoles et industrielles ont une influence sur le cycle de l’azote naturel, provoquant une hausse des émissions de N₂O.
Le recul parallèle des émissions d’oxyde d’azote et d’ammoniac améliorerait aussi considérablement la qualité de l’air, ce qui pourrait éviter jusqu’à 20 millions de décès prématurés dans le monde d’ici à 2050. Les mesures de réduction permettraient également d’améliorer la qualité de l’eau, la santé des sols et de protéger les écosystèmes des effets du ruissellement de l’azote.
Une action immédiate et ambitieuse de réduction des émissions de N₂O s’impose, souligne l’évaluation, dans le cadre d’une stratégie plus globale de lutte contre les superpolluants qui, conjuguée aux mesures visant à atteindre la neutralité carbone, mettra le monde en bonne voie de concrétiser les objectifs à long terme en matière de climat, de sécurité alimentaire et de santé.
«Nous devons impérativement nous attaquer aux émissions de protoxyde d’azote pour mettre en place une agriculture durable, inclusive et résiliente qui aide les pays dans la réalisation de leurs objectifs, sur le plan du climat comme sur celui de la sécurité alimentaire. L’évaluation le dit clairement: il existe des moyens de produire plus avec moins de ressources, en utilisant plus efficacement l’azote dans l’agriculture et en réduisant les épandages excessifs d’azote», a déclaré M. Kaveh Zahedi, Directeur du Bureau du changement climatique, de la biodiversité et de l’environnement de la FAO.
«Réduire les émissions de N₂O permettrait d’éviter jusqu’à 235 milliards de tonnes équivalent CO₂ d’ici à 2100», a expliqué M. David Kanter, professeur associé en sciences de l’environnement à l’université de New York et coprésident de l’évaluation. «Ce chiffre représente six années d’émissions mondiales actuelles de carbone dues aux combustibles fossiles.»
«Une gestion durable de l’azote permet non seulement de réduire les émissions de protoxyde d’azote, mais aussi d’éviter le rejet d’autres composés azotés nocifs», a déclaré M. A.R. Ravishankara, chimiste et spécialiste de l’atmosphère à l’université d’État du Colorado et coprésident de l’évaluation. «Ces mesures permettraient d’améliorer la qualité de l’air et de l’eau, et de protéger les écosystèmes et la santé humaine, tout en assurant la sécurité alimentaire.»
«La couche d’ozone est indispensable à la vie sur Terre. Depuis plusieurs décennies, les parties au protocole de Montréal s’efforcent de la protéger. Cette évaluation souligne la nécessité de faire preuve d’une vigilance, d’une détermination et d’un volontarisme constants si l’on veut que la couche d’ozone retrouve le plus rapidement possible ses niveaux d’avant 1980», a précisé Mme Megumi Seki, Secrétaire exécutive du secrétariat de l’ozone du Protocole de Montréal, au Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).
«Cette étude tire la sonnette d’alarme sur un superpolluant relativement oublié qui contribue énormément au changement climatique et à la pollution de l’air», a déclaré Mme Martina Otto, Cheffe du secrétariat de la Coalition pour le climat et l’air pur, qui est hébergée par le PNUE.
«Si nous utilisons les instruments de réduction des émissions qui sont présentés dans l’évaluation et auxquels nous avons déjà accès, cela aura de nombreux effets positifs sur le climat, l’air pur et la santé», a-t-elle ajouté.
À propos de la Coalition pour le climat et l’air pur
La Coalition pour le climat et l’air pur, réunie au sein du PNUE, est un partenariat regroupant plus de 180 gouvernements, organisations intergouvernementales et organisations non gouvernementales. Son travail consiste à réduire les superpolluants importants qui aggravent le changement climatique et la pollution d’air. Elle ambitionne de relier la mise en place d’objectifs ambitieux à des mesures d’atténuation ciblées au sein des pays et des secteurs. Ses travaux se fondent sur des analyses et des éléments scientifiques rigoureux. Bénéficiant de l’appui de son fonds fiduciaire, la Coalition a suscité une mobilisation politique de haut niveau et des soutiens au niveau national, et a fait émerger une série d’outils qui plaident en faveur d’actions concrètes et de la mise en œuvre.
À propos du Système international de gestion de l’azote
Le Système international de gestion de l’azote est un dispositif mondial visant à apporter un soutien scientifique à l’élaboration d’une stratégie internationale au sujet de l’azote. Son application est assurée par le PNUE, avec le concours financier du Fonds pour l’environnement mondial (FEM). Le Système international est hébergé par le centre britannique en écologie et en hydrologie (UK Centre for Ecology & Hydrology [UKCEH]), un partenaire de collaboration du PNUE, dans le cadre d’un protocole d’accord entre les deux organismes. En 2025, le Système international publiera une évaluation internationale de l’azote, qui a préparé les scénarios optimistes et pessimistes de réduction de l’azote ayant contribué à l’évaluation mondiale sur le protoxyde d’azote.
À propos du secrétariat de l’ozone du Protocole de Montréal
Le secrétariat de l’ozone du Protocole de Montréal est implanté à Nairobi (Kenya), au sein du PNUE. C’est le secrétariat d’un traité et d’un accord qui sont très importants pour la protection de la couche d’ozone: la Convention de Vienne pour la protection de la couche d’ozone et le Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone. Ces deux instruments jouent un rôle majeur dans la protection de la couche d’ozone et la réduction de son appauvrissement, et donc dans la protection de l’environnement. Le secrétariat a pour tâche de faciliter la mise en œuvre effective de la Convention de Vienne et du Protocole de Montréal et de ses amendements.
Sreya Banerjee FAO Actualités et Médias (Rome) [email protected]
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