Types de suivi
Chaque mesure incitative pour les services écosystémiques nécessite un type de suivi différent. Cela dépend du contexte, du service écosystémique, de la production agricole et des impacts pris en compte, ainsi que du degré de rigueur exigé par les investisseurs. Le développement d’une méthodologie très détaillée et coûteuse qui ne pourra pas être soutenue par l’initiative sur le long terme, par manque de financements ou par un défaut de matériel et de capacités, ne permettra pas d’effectuer un suivi adéquat.
Les niveaux de précision peuvent aller d’estimations générales basées sur des coefficients généraux jusqu’à des échantillons propres au site concerné. Des niveaux de précision plus élevés (Niveau 3) sont souvent liés à la conformité aux lois environnementales. Le niveau de précision de suivi des investissements volontaires liés à la fourniture de services écosystémiques peut aller du Niveau 1 à 3, en fonction des exigences de l’investisseur et des retours sur investissement recherchés. Comparativement, des investissements volontaires non liés à des facteurs de production nécessiteront sans doute un degré de rigueur moindre (Niveau 1) à cause de l’absence d’un lien direct avec les produits des services écosystémiques.
Niveau 1: Estimation
Certains programmes s’appuient sur des estimations générales des résultats, basées sur des expériences réalisées ailleurs, et sur l’hypothèse qu’une activité donnée produit un résultat donné. Un tel niveau de suivi permet à un programme de se dérouler rapidement et à moindre coût, mais avec moins de garantie sur les résultats.
Ce niveau de suivi fonctionne bien lorsque le changement attendu au niveau environnemental est de faible envergure, et que l’idée est plus de récompenser l’agriculteur pour un comportement déjà positif plutôt que de l’inciter à l’améliorer. Cela pourrait être le cas par exemple lorsque les bénéfices en matière de carbone d’un projet de conservation sont estimés simplement en calculant le potentiel de séquestration des principales espèces d’arbres.
Exemple: Lombok, Indonésie, West Nusa Tenggara
Le suivi de ce programme PSE de protection des bassins versants est effectué sur la base d’estimations. Une agence publique intermédiaire (multi-parties prenantes) fait le suivi chaque année des agriculteurs adhérant au programme via une évaluation visuelle des zones replantées dans la forêt protégée, et via des groupes de discussions qui déterminent l’impact économique des paiements. Les paiements sont conditionnés au respect des engagements de reforestation mais la quantification des services écosystémiques et les bénéfices économiques ne représentent pas en soi un prérequis.
Niveau 2: Activités MNV basées sur une estimation des niveaux de référence
Les méthodes basées sur les activités pour mesurer, notifier et vérifier (MNV) utilisent souvent une estimation des niveaux de référence concernant les pratiques de gestion des terres, et se concentrent principalement sur l’adoption de meilleures pratiques. Les nouvelles alternatives de gestion des terres dérivent d’expériences se déroulant dans d’autres endroits et présentant des caractéristiques similaires. Certaines méthodologies comprennent aussi des échantillonnages sur le terrain, pour le service écosystémique en question, dans certaines exploitations agricoles afin d’étalonner les niveaux de référence et d’améliorer leurs degrés de précision. Les vérifications se font par des échantillons aléatoires, comparés ensuite avec les données rassemblées par les agriculteurs.
Exemple: Bio Carbon Fund, Kenya occidental
Un niveau de référence initial pour ce projet a été établi par son facilitateur, Vi Agroforestry. Un échantillon de 200-300 agriculteurs a permis de cartographier les systèmes agricoles en place et de modéliser la biomasse estimée ainsi que la séquestration du carbone dans le sol découlant des pratiques agricoles améliorées. Ces pratiques visent à réduire la dégradation des sols et à augmenter la couverture agro-forestière. Ce projet mesurera et quantifiera l’amélioration des terres en la comparant avec les niveaux de référence (et donc la séquestration du carbone) via un suivi SIG, renforcé par des vérifications sur le terrain, l’auto-évaluation effectuée par les agriculteurs et le suivi participatif.
Niveau 3: Vérification des résultats
Ces méthodes comprennent des échantillonnages sur le terrain aléatoires plus fréquents pour vérifier les résultats, avec un meilleur degré de précision. Des méthodes d’échantillonnage, de modélisation et d’autres encore sont utilisées et comparées aux niveaux de références afin d’estimer les services écosystémiques supplémentaires résultant de la mise en œuvre de meilleures pratiques agricoles. Ces méthodes sont souvent utilisées lorsque les bénéficiaires des services écosystémiques ont besoin de justifier de façon plus précise leur investissement, comme dans le cas des réductions obligatoires de gaz à effet de serre, d’une exigence particulière concernant la qualité de l’eau ou d’un besoin de conformité avec les mesures de compensation de la biodiversité. Cette méthodologie est appliquée dans le cadre d’accords à petite échelle ayant une haute sensibilité en matière de services écosystémiques, tels que dans le cas d’une source d’eau à grande valeur, ou d’un hotspot de biodiversité important.
Exemple: Vittel, France
Les échantillonnages sur le terrain et les vérifications de la conditionnalité du projet sont menés par Agriair, un intermédiaire. Cela comprend un suivi des pratiques agricoles, de la densité du bétail, de la bonne utilisation des nouveaux bâtiments (s’assurer que les déchets animaux soient bien gérés), ainsi qu’un examen de tous les comptes de l’exploitation selon les termes du contrat PSE. Jusqu’à l’arrêt de l’utilisation de produits chimiques par les exploitants en 2004, l’INRA (l'Institut National de la Recherche Agronomique) surveillait les niveaux de nitrates dans le sol, et ce tout au long de l’année. Nestlé Waters effectue des contrôles journaliers de la qualité de l’eau. Les paiements dépendent de la vérification de la conditionnalité de l’exploitation agricole.